
Anéantir de Michel Houellebecq
Le hasard du calendrier veut que quelques semaines après la sortie d’Anéantir, une enquête sur un groupe français, leader mondial de la gestion d’Ehpad, révèle les abus et rationnements systémiques, pratiqués à leur entier bénéfice par ses établissements, au préjudice des personnes âgées qui y résident à grands frais et y meurent, souvent rapidement, après y être entrées du fait de l’abandon dans lequel elles sont laissées1. La vieillesse, la fin de vie, la maladie, la foi et la mort, mais aussi l’amour sont des questions qui ont toujours préoccupé Michel Houellebecq et sont cardinales dans Anéantir. Tel Balzac dans La Comédie humaine, celui-ci continue de dépeindre notre époque, avec la même acuité, en en pointant les maux. Après la désespérance et la noirceur de Sérotonine, en dépit de son titre, ce nouveau roman marque un tournant remarquable dans l’œuvre de l’auteur par l’apaisement et la lumière qui s’en dégagent.
Ce n’est pas le moindre des paradoxes que le héros d’Anéantir, Paul Raison, soit un haut fonctionnaire, proche conseiller du ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Juge, champion de la réindustrialisation de la France, redevenue en 2027, alors que le second mandat du président en exercice est sur le point de s’achever, deuxième puissance économique européenne derrière l’Allemagne. Michel Houellebecq n’a eu de cesse de pourfendre l’é