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Notes de lecture

Dans le même numéro

Monnaie, souveraineté et démocratie sous la dir. de Thomas Boccon-Gibod et Alban Mathieu

janv./févr. 2023

Cette contribution au débat public s’inscrit dans le sillage de la théorie institutionnaliste de la monnaie de Michel Aglietta et André Orléan, attentive à ses dimensions historiques et anthropologiques, et qui place la notion de confiance au centre de ses analyses.

Prenant acte des dispositifs d’urgence mis en place à l’occasion de la crise sanitaire mondiale et de la guerre en Ukraine, les deux coordinateurs de ce volume collectif, issu d’un projet de recherche engagé dans le cadre de l’Initiative d’excellence de l’université de Grenoble Alpes, considèrent que la demande actuelle de souveraineté, notamment exprimée lors du Brexit (take back control), exprime non seulement une « indépendance technologique et productive trop délaissée, mais aussi et plus largement celle d’un contrôle politique de l’économie de marché, voire d’une critique politique globale de la mondialisation capitaliste ». Cette contribution au débat public s’inscrit dans le sillage de la théorie institutionnaliste de la monnaie de Michel Aglietta et André Orléan, attentive à ses dimensions historiques et anthropologiques, et qui place la notion de confiance au centre de ses analyses. Elle vise à élucider l’articulation entre souveraineté monétaire et souveraineté étatique. Pour ce faire, Benjamin Lemoine souligne que l’État, en se finançant par la dette publique sur les marchés, rejoint l’espace financier mondialisé et doit rendre des comptes devant des cours d’arbitrage internationales. Devant cette perte manifeste de souveraineté, Wolfgang Streeck exprimait son euroscepticisme et accordait sa préférence à une nationalisation de la monnaie. Au contraire, Colin Crouch soutient que « la souveraineté peut faire l’objet d’un partage sans perte de puissance ». Mais est-ce bien possible si le rapport de force au sein des différents échelons institutionnels reste en faveur du capital ? Les deux dernières contributions abordent les innovations numériques, qui viennent entamer la souveraineté de l’État de différentes manières : Thierry Ménissier considère que « les collectivités politiques doivent prendre en charge la culture numérique » face au capitalisme des plateformes et Matthieu Montalban montre que « l’avènement des crypto-monnaies vient contester le pouvoir de l’État », au point que le code pourrait à terme remplacer la règle dans le système monétaire. Cet état des lieux de la réflexion contemporaine sur les rapports entre la monnaie et la souveraineté a le mérite de toujours poser la question au prisme de l’approfondissement ou de la régression démocratiques.

Le Bord de l’eau, 2022
260 p. 22 €

Jonathan Chalier

Rédacteur en chef adjoint de la revue Esprit, chargé de cours de philosophie à l'École polytechnique.

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Tous antimodernes ?

« Être moderne » a longtemps désigné une promesse de progrès, de liberté et de justice. Aujourd’hui le réchauffement climatique, une crise économique sans fin, la défiance à l’égard de la technique ou les excès de l’individualisme manifestent au contraire un doute sur la supériorité de notre présent sur le passé. Sommes-nous donc condamnés à être antimodernes ? Ce dossier, coordonné par Michaël Fœssel et Jonathan Chalier, se penche sur l’héritage de la modernité, dont le testament reste ouvert et à écrire. À lire aussi dans ce numéro : La démocratie dans le miroir russe, le métier diplomatique en danger, la solidarité énergétique à l’épreuve de l’hiver et la littérature par en-dessous d’Annie Ernaux.