
Comment peut-on être laïque ?
Les polémiques autour de la laïcité doivent être décidées en fonction des principes qui fondent la séparation du religieux et de l’État : la raison publique, l’égalité civique et la liberté personnelle.
Dans les Lettres persanes de 1721, le baron de Montesquieu encourageait ses lecteurs français à se demander, avec lui, comment on peut être persan. Il entendait ainsi prendre une distance ethnographique et critique par rapport aux habitudes et préjugés de la société parisienne de son temps. Peut-on, de même, prendre une distance philosophique, et tout autant critique, par rapport à la laïcité ? Trop souvent, en France, l’appel à la laïcité fonctionne comme une sorte de mantra religieux, d’autant plus évocateur qu’il est étroitement lié à l’affirmation d’une identité historique commune. Nous sommes laïques, en quelque sorte, parce que nous sommes français. Or ni l’appel à l’identité, ni l’appel à l’histoire, ne constitue une explication, encore moins une justification.
Peut-on expliciter la logique profonde, la raison d’être de la laïcité ? Commençons par préciser le terme. La laïcité est un principe de séparation entre le politique et le religieux ; plus précisément, un principe de mise à distance du religieux par l’État. Principe purement politique, la laïcité ne dépend pas d’une éthique antireligieuse, agnostique ou athée. Elle est compatible avec la foi et se borne à constituer un cadre de coexistence politique entre non-croyants et croyants de toutes obédiences. L’idéal de laïcité, en ce sens, est peu controversé, tant il est vrai qu’une forme de séparation entre le politique et le religieux semble essentielle à la démocratie libérale. Mais ce sens com