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Bancs avec des barreaux pour éviter de s’allonger. Herzi Pinki via Wikimédia
Bancs avec des barreaux pour éviter de s'allonger. Herzi Pinki via Wikimédia
Dans le même numéro

Le prix de l’ordre. Droits et marginalité dans les lieux publics

L’ordre public est garanti au prix d’une inégalité injustifiable : l’exclusion des sans-abri, consommateurs de drogues, prostitués et migrants, considérés comme des fléaux sociaux contre lesquels la société doit se défendre. On pourrait pourtant imaginer des contrôles de l’action policière.

Les rues, les parcs et les places publics sont cruciaux pour la réalisation de nos libertés politiques, sociales, économiques ou personnelles. Nous utilisons ces lieux publics pour nous réunir et manifester nos idées, pour aller au travail ou dans un commerce, pour nous distraire ou y rencontrer nos amis. Or l’exercice de ces libertés ne peut échapper à une forme de désordre : les allées et venues peuvent être anarchiques, le commerce bruyant ou les manifestations chaotiques. Le rôle de l’État est alors de garantir un ordre qui permette de concrétiser nos libertés et de concilier l’exercice de nos droits entre eux1.

Pour y parvenir, une stratégie – ancienne et récurrente2 – consiste à établir des restrictions visant la présence et le comportement de certains groupes. Les sans-abris, les mendiants, les consommateurs de drogues, les migrants, les prostitués sont écartés des lieux publics pour y maintenir l’ordre. Cette exclusion s’appuie sur le pouvoir discrétionnaire confié aux autorités de police pour lutter contre ces populations marginales, perçues comme une menace pour l’ordre social. L’ordre public est ainsi garanti au prix d’une inégalité injustifiable.

Pouvoir discrétionnaire et marginaux

La gestion des populations marginales par les forces de l’ordre n’est pas entièrement libre. Des garde-fous ont été créés pour empêcher l’arbitraire policier de violer les droits et libertés de ces personnes. Lorsque les autorités de police agissent à la suite de la commission d’une infraction, l’ensemble des garanties de la procédure pénale sont censées s’appliquer. Par exemple, depuis l’abolition du délit de vagabondage et de sans-abrisme en 1994 ou de racolage en 2016, il n’est plus possible d’être placé en garde à vue, voire condamné, parce que l’on est un sans-abri ou un prostitué. Les forces de l’ordre devront soupçonner la commission d’autres infractions pour placer un sans-abri ou un prostitué en garde à vue. De même, lorsque l’action des autorités vise à prévenir la commission d’une infraction, la mesure adoptée doit être justifiée par des risques réels et sérieux de trouble à l’ordre public. L’évacuation d’un camp de migrants ou l’adoption d’arrêtés anti-mendicité ne peuvent être décidées sans établir la preuve d’un tel trouble3.

Toutefois, en pratique, ces garde-fous laissent une large marge d’appréciation aux autorités policières. Par exemple, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) exige en principe que les limitations des droits et libertés soient prévues par un texte public déterminant précisément les motifs de ces restrictions. Cette exigence fondamentale doit permettre à la population de régler sa conduite et de vérifier qu’aucun abus de pouvoir n’a été commis à son encontre. Or ce principe central a été écarté lorsqu’il s’est agi d’encadrer le comportement de populations marginales. Ainsi, en 1983, afin de faire face à la présence de nombreux consommateurs de drogues dans le quartier Ganzenhoef, le maire d’Amsterdam a décidé de prononcer des bannissements du centre de la ville à l’encontre de ceux qui troublaient l’ordre public. Le bannissement était fondé sur une disposition générale, confiant au maire le soin de prendre toute mesure nécessaire pour répondre à une situation de crise et sur des instructions non publiées de la municipalité4. Pour contester un tel bannissement devant la Cour européenne des droits de l’homme, un individu a soutenu que cette restriction de sa liberté d’aller et venir n’était prévue par aucune loi. En effet, seule existait une compilation des précédentes décisions de bannissement, qui ne précisait ni les hypothèses autorisant un bannissement ni la procédure à suivre pour décider une atteinte aussi grave à la liberté de mouvement. Pourtant, la Cour a validé la solution adoptée par les autorités amstellodamoises. Elle ne s’est pas émue de l’absence de publicité des instructions, de procédure transparente ou de critères précis. Ces exigences minimales furent écartées car, aux yeux de la Cour, il était normal qu’une importante marge d’appréciation soit confiée aux autorités de police pour lutter contre le fléau qui frappait Amsterdam5.

Dans une opinion dissidente particulièrement violente, trois juges de la Cour ont relevé que cette décision n’avait aucun précédent6. Certes, la gestion de l’ordre public implique de faire face à l’imprévisible. Le pouvoir de ceux qui sont chargés de sa protection est un « pouvoir nécessaire7 », impossible à encadrer intégralement. Toutefois, des garanties minimales sont en principe exigées et ici oubliées. Cet oubli ne peut s’expliquer que par la personnalité du requérant et le contexte de la décision. Consommateur de drogues dures, il était un habitué d’une scène de consommation à ciel ouvert au cœur d’Amsterdam. Pour les autorités municipales, la lutte contre la présence de consommateurs dans les rues justifiait des mesures radicales, échappant aux cadres des procédures pénales ou administratives. Le bannissement d’un consommateur de drogue ne devait pas être limité par les garanties qui encadrent les restrictions de droits et libertés visant les autres membres de la société. La Cour a validé cette argumentation et a suspendu l’une des garanties les plus fondamentales contre l’arbitraire policier : la connaissance des règles applicables. Elle a empêché le contrôle extérieur de l’usage des pouvoirs de la police dans sa lutte contre la drogue.

La suspension des garanties qui encadrent l’action des autorités de police et le pouvoir discrétionnaire qui en découle réapparaissent à chaque fois que les forces de l’ordre sont confrontées à des marginaux8. Parce que le contrôle exercé sur leur décision est particulièrement faible, les autorités publiques peuvent alors encadrer, en fonction de considérations qui leur sont propres, la présence de marginaux dans des lieux publics. La gestion de la prostitution est un exemple flagrant de ce phénomène. En raison de l’indétermination des règles sanctionnant l’activité prostitutionnelle, ce sont les autorités chargées de les mettre en œuvre qui en déterminent le contenu concret. Elles peuvent alors s’en servir pour déterminer quel prostitué est acceptable dans quel lieu public. Par exemple, à Paris, dans le cadre de la mise en œuvre du délit de racolage passif (créé en 2003 et supprimé en 2016), les forces de l’ordre ont pu déterminer des zones dans lesquelles la prostitution pouvait être tolérée et l’éliminer des rues, parcs et places des autres quartiers9. Si cette situation reflète l’autonomie dont les policiers de terrain disposent systématiquement dans la mise en œuvre des règles10, elle traduit également une indépendance spécifique propre aux services chargés de la lutte contre la prostitution11. Plus encore, lorsque des prostitués saisissent une juridiction pour contester une mesure de police prise à leur encontre pour les éloigner de certains lieux publics, par exemple un arrêté municipal anti-prostitution, le contrôle exercé est minimal12.

La menace d’un fléau social

D’autres populations et lieux sont concernés par un tel pouvoir discrétionnaire. L’action des autorités dans les « mondes clos13 », comme les établissements pénitentiaires ou psychiatriques, échappe ainsi au moins partiellement à un contrôle extérieur, malgré la reconnaissance progressive de droits des personnes enfermées et de leur capacité à les faire valoir devant une juridiction14. Les pouvoirs publics peuvent restreindre ces droits afin d’atteindre les buts de l’institution – soigner, éduquer, sanctionner – ou parce que les conditions objectives de la vie dans un lieu fermé l’exigent. Ces objectifs étant particulièrement vagues, les juridictions saisies se contentent alors de sanctionner les ingérences manifestement excessives dans l’exercice des droits des détenus15 et laissent, pour l’essentiel, les établissements libres de limiter les droits et libertés des personnes privées de liberté.

Bien que similaire, le pouvoir discrétionnaire frappant les marginaux dans les lieux publics repose sur des bases distinctes16. Ce n’est pas la logique des lieux qui fonde ce pouvoir discrétionnaire, mais la nature des populations. Ces différents groupes – sans-abris, consommateurs de drogue, prostitués, mendiants, etc. – sont perçus comme une pathologie sociale. Aux yeux des autorités, ils sont une menace pour l’ordre public, pour les droits d’autrui, voire pour eux-mêmes, indépendamment de leurs comportements individuels. Cela transparaît par exemple de la manière dont a été interprétée la possibilité, donnée par l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme, d’enfermer une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, un aliéné, un alcoolique, un toxicomane ou un vagabond. Cette disposition met sur le même plan une série de groupes distincts entre lesquels il existe un « lien17  » : appartenir à l’un de ces groupes signifie être « une menace risquant de causer à la société de graves problèmes (une attaque contre d’autres personnes ou une propriété) ou rendant la société responsable de [votre] état », parce que vous risquez de vous suicider ou de vous automutiler18. Ce sont des fléaux sociaux contre lesquels la société doit se défendre.

L’identification de ces dangers varie évidemment dans le temps. Sans qu’une règle générale puisse être établie, il est possible de constater que ces groupes sont associés à des comportements déviants, fréquemment pénalisés. Ils sont également souvent assimilés à des populations flottantes, sans attache au sein du territoire19. Une telle construction a un double effet. D’abord, les marginaux apparaissent comme des déviants ou des délinquants potentiels, difficiles à contrôler et susceptibles de contaminer le reste de la société. C’est contre cette contamination que la société doit se défendre. Ensuite, les marginaux ne sont pas perçus comme des habitants des quartiers où ils se sont installés, mais comme des étrangers qu’il est possible d’exclure.

La politique déployée par la préfecture de police de Paris à l’encontre des consommateurs de crack est, à cet égard, révélatrice. Le 24 septembre 2021, la préfecture de police a déplacé ceux qui étaient présents autour du jardin d’Éole dans le 18e arrondissement. Ils ont été transférés au nord du 19e, à la frontière entre Paris, Aubervilliers et Pantin. Pour justifier cette décision, la préfecture a relevé que le secteur où « leur présence était constatée » n’était pas adapté à la prise en charge des consommateurs de crack. Ils devaient donc être déplacés vers « un autre lieu de regroupement20 ». Autrement dit, il est possible de déplacer les consommateurs de crack, car ils sont seulement présents ou regroupés à un endroit. Ils ne sont pas attachés au quartier où ils sont, ils n’y résident pas, ni même le fréquentent. Ils nous sont étrangers.

Un régime inégalitaire

Ce mode de contrôle des populations marginales repose sur un régime singulier. Les autorités publiques ne sanctionnent pas des infractions passées qu’elles pourraient imputer individuellement à chaque membre du groupe et qui justifieraient une sanction, telle qu’une exclusion des lieux publics. Elles n’établissent pas non plus une règle universelle applicable à tous afin de prévenir les troubles à l’ordre public ou la commission d’infractions. Elles imputent collectivement à un groupe un risque de trouble à l’ordre public ou de commission d’infractions, permettant de présumer que chaque membre du groupe constitue une menace pour l’ordre social. C’est alors à l’individu – ou à ses défenseurs – d’établir qu’il se distingue de ce groupe, que son comportement ne constitue pas une menace pour l’ordre public, lui-même ou autrui. Un régime particulier de libertés publiques est ainsi appliqué à des hommes et femmes que l’on associe à un risque pour la société.

Un régime particulier de libertés publiques est ainsi appliqué à des hommes et femmes que l’on associe à un risque pour la société.

Bien sûr, le « découpage systématique de la population en catégories21 » soumises à des règles différentes n’est pas une nouveauté. Dans de nombreuses autres situations, il est admis que l’interprétation des droits fondamentaux puisse différer lorsque leur titulaire appartient à une catégorie particulière22 : les vulnérabilités liées au genre, à l’âge, à la situation économique, au handicap, à la nationalité étrangère, à la profession, etc., sont autant de facteurs qui peuvent justifier un régime particulier. En un sens, le raisonnement qui frappe les populations marginales reprend cette logique : la marginalité implique une interprétation particulière des droits et libertés des personnes concernées.

Toutefois, dans le cadre de la gestion des populations marginales, deux éléments rendent ce régime inégalitaire. D’abord, en raison du pouvoir discrétionnaire confié aux autorités publiques pour contrôler leur présence, le droit de ces populations d’exercer leur liberté dans les rues, les parcs ou les jardins n’est presque plus un droit : ce n’est qu’une faveur, qui peut toujours leur être retirée dès que les autorités invoquent un risque de trouble à l’ordre public. Bien que rien ne le justifie23, leur appartenance à un groupe social problématique provoque une déchéance d’une partie de leurs droits. En pratique, la faiblesse de leurs droits et du contrôle exercé sur les forces de l’ordre peut aller jusqu’à une forme de « souveraineté policière24 » : les autorités bénéficient alors d’une liberté complète pour gérer la présence et le comportement des populations marginales dans les lieux publics, y compris par l’adoption de mesures radicalement attentatoires aux droits et libertés.

Ensuite, l’appartenance à un groupe exclut le processus d’individualisation qui devrait gouverner la restriction des droits et libertés. En principe, une telle restriction s’apprécie au cas par cas, en fonction des circonstances particulières. Par exemple, la jouissance de liens amicaux ou familiaux pourrait rendre impossible l’éloignement des marginaux des quartiers où ils résident. Leur besoin d’accéder aux lieux publics pour dormir, manger ou uriner pourrait primer dans certains cas sur la liberté d’aller et venir des riverains. De même, l’impossibilité d’une vie alternative ou l’absence de trouble à l’ordre public provoqué par leur comportement individuel ou leur présence pourrait impliquer une modulation des décisions prises à leur encontre, en fonction des risques qu’ils feraient concrètement peser sur l’ordre public. Il n’en est rien. La marginalité détermine entièrement le recours à des mesures de police25. Le fait d’être un consommateur de drogues, un sans-abri, un prostitué suffit à justifier la restriction de droits et libertés sans que la situation personnelle des individus ne soit prise en compte.

Évidemment, certains marginaux parviennent à trouver les ressources pour faire valoir leurs droits devant des juridictions. Soutenus le plus souvent par des associations, ils peuvent alors obtenir une condamnation de l’État lorsque ce dernier a manifestement porté atteinte à leurs droits les plus élémentaires26. En outre, certaines opérations de police sont si importantes que des institutions, des associations ou des médias viennent les observer27. Grâce à ces observations, un contrôle minimal est garanti. Cependant, ces exemples demeurent limités et ne remettent pas en cause la logique d’ensemble. Pour garantir l’ordre dans les lieux publics, une partie de la population est soumise à un régime spécifique, inconnu de la majorité d’entre nous et que nous considérerions légitimement comme inacceptable : un régime dans lequel les droits sont concédés par les forces de l’ordre, les individualités ignorées et le contrôle des mesures de police inexistant ; un régime dans lequel l’unique protection contre l’oubli de la dignité des marginaux est la déontologie des forces de l’ordre.

Imaginer une alternative

Toute régulation des lieux publics ne doit cependant pas être condamnée. Ces lieux sont des biens communs permettant la réalisation des libertés. L’action des forces de l’ordre est donc nécessaire pour garantir la cohabitation des libertés de chacun28. Un campement de migrants peut nuire à la liberté d’aller et venir des riverains. La présence d’une scène ouverte de consommation de drogue peut entraîner son lot de violence. La mendicité agressive ou la présence d’un sans-abri dormant devant un commerce peut éloigner des clients potentiels et restreindre les libertés économiques. Cependant, l’action des autorités de police ne doit pas conduire à un traitement inégalitaire des marginaux.

Si elle ne peut jamais être entièrement contrôlée, la marge d’appréciation dont disposent les autorités doit être encadrée, par exemple, en exigeant la remise d’un récépissé à chaque contrôle. Un tel dispositif permettrait alors de rendre compte publiquement de leur action et de contrôler les effets de leurs stratégies. Des procédures pourraient également être instaurées afin de contrôler les mesures les plus attentatoires aux droits et libertés. Par exemple, lorsqu’un campement est évacué sur le territoire d’une commune, l’action des autorités de police n’est encadrée que par une circulaire interministérielle. Une procédure précise pourrait être prévue afin de permettre un contrôle systématique, par une juridiction, des préparatifs de l’évacuation, de son déroulement et de la prise en charge des personnes évacuées. Une telle procédure paraît d’autant plus nécessaire que les personnes vivant dans un campement sont généralement dans une situation de vulnérabilité rendant improbable l’exercice d’un recours à l’encontre d’une décision ou d’une opération d’évacuation.

Ensuite, aucune présomption ne devrait frapper certaines populations. S’il est établi qu’un individu a commis une infraction, une procédure pénale doit être engagée contre lui. S’il trouble manifestement l’ordre public, des mesures de police peuvent être déclenchées à son encontre. Cependant, à chaque fois, il incombe à l’autorité d’établir les preuves de cette infraction ou de ce risque de trouble à l’ordre public, l’appartenance de l’individu à un groupe ne pouvant suffire à justifier des restrictions de droits et libertés. Là encore, des mécanismes de contrôle devraient être établis afin de vérifier les preuves apportées par les autorités de police.

Enfin, notre perception du problème doit évoluer. Les marginaux ne doivent plus être considérés comme un fléau contre lequel il faut défendre la société, comme des étrangers que nous sommes libres d’exclure. Ils appartiennent à la société et doivent recevoir ce qui leur revient dans la répartition de l’accès à une ressource rare. Le rôle de l’État est alors d’arbitrer entre les différents usages afin de déterminer ce qu’il est légitime de faire dans un lieu public et d’appliquer uniformément ces règles à l’ensemble de la population. Autrement dit, un problème sécuritaire de gestion des marges doit apparaître pour ce qu’il est : un problème politique de justice sociale.

  • 1. Le rôle des personnes privées dans la gestion des lieux ouverts au public – notamment lorsqu’elles sont propriétaires de ces lieux – ne sera pas évoqué, bien qu’il soit significatif. Sur ce point, voir Stéphanie Hennette-Vauchez, « The Mall », Revue française de droit administratif, no 5, septembre-octobre 2020, p. 833-850. Je tiens à remercier Kévin Havet et Pauline Joubert, qui ont accepté de me fournir leur analyse précieuse et riche de l’espace public, ainsi que Camille Moisan, dont les critiques concernant la garantie de l’égalité dans l’espace public ont provoqué l’écriture de ce texte.
  • 2. Joe Doherty, Volker Busch-Geertsema, Vita Karpuskiene, Jukka Korhonen, Eoin O’Sullivan, Ingrid Sahlin, Antonio Tosi, Agostino Petrillo et Julia Wygnańska, “Homelessness and Exclusion: Regulating public space in European Cities”, Surveillance & Society, vol. 5, no 3, 2008, p. 290-314.
  • 3. Pierre Auriel, « L’État, les sans-abris et l’espace public » [en ligne], #Dièses, 10 novembre 2021.
  • 4. CEDH, 4 juin 2002, Landvreugd c. Pays-Bas, requête no 37331/97, § 48.
  • 5. Ibid., § 61.
  • 6. Opinion dissidente des juges Gaukur Jörundsson, Riza Türmen et Rait Maruste.
  • 7. Jean Rivero, Les Mesures d’ordre intérieur administratives. Essai sur les caractères juridiques de la vie intérieure des services publics, Paris, Sirey, 1934, p. 255.
  • 8. P. Auriel, « Faut-il enfermer les fumeurs de crack ? » [en ligne], La Vie des idées, 12 octobre 2021.
  • 9. Gwénaëlle Mainsant, « Gérer les contradictions du droit “par le bas”. Logiques de police en concurrence dans le contrôle de la prostitution de rue à Paris », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 198, juin 2013, p. 29.
  • 10. Dominique Montjardet, « À la recherche du travail policier », Sociologie du travail, vol. 27, no 4, 1985, p. 391-407.
  • 11. G. Mainsant, Sur le trottoir, l’État. La police face à la prostitution, Paris, Seuil, 2021. Ce point est notamment mis en lumière dans le compte rendu de ce livre par Anaïk Purenne, « Les pouvoirs de la Mondaine » [en ligne], La Vie des idées, 6 septembre 2021.
  • 12. Cour administrative d’appel de Bordeaux, 21 juin 2018, requête n° 16BX02889.
  • 13. Vincent Tchen, « Les droits fondamentaux du détenu à l’épreuve des exigences du service public pénitentiaire », Revue française de droit administratif, no 3, 1997, p. 598.
  • 14. Concernant la prison et les établissements pénitentiaires, voir Béatrice Belda, Les Droits de l’homme des personnes privées de liberté. Contribution à l’étude du pouvoir normatif de la Cour européenne des droits de l’homme, préface de Frédéric Sudre, Bruxelles, Bruylant, 2010. Dans le cadre des centres de rétention administrative, voir Nicolas Fischer, Le Territoire de l’expulsion. La rétention administrative des étrangers et l’État de droit en France, Lyon, ENS Éditions, 2017.
  • 15. CEDH, 11 décembre 2003, Yankov c. Bulgarie, requête no 39084/97.
  • 16. Encore fréquemment, les restrictions dans les « mondes clos » ne sont pas seulement justifiées par des considérations liées aux buts et à la nature de l’institution concernée, mais également par une logique de défense et d’exclusion de la société. Voir par exemple P. Auriel, « Aux marges de l’espace public : la participation des détenus au débat public », Revue des droits de l’homme, no 19, 2021.
  • 17. CEDH, 4 avril 2000, Witold Litwa c. Pologne, requête no 26629/95, § 60.
  • 18. CEDH, 15 décembre 1977, Frits Winterwerp c. Pays-Bas, § 34. La même logique vaut pour les prostitués qui, depuis les ordonnances de 1960 faisant de la prostitution une activité illicite, sont perçus comme un fléau social, tour à tour victimes et délinquants (Lilian Mathieu, Sociologie de la prostitution, Paris, La Découverte, 2015, p. 34-35).
  • 19. Nicolas Fischer et Emmanuel Blanchard, « La lutte contre la mobilité et l’errance (xviie-xxie siècles) », dans Immigration, un régime pénal d’exception, Paris, Gisti, 2012 ; Fabien Jobard, « Le gibier de police immuable ou changeant ? », Archives de politique criminelle, no 32, 2010, p. 93-105.
  • 20. Arrêté no 2021-983 portant évacuation et prise en charge des personnes sous l’emprise ou en manque de crack dans le secteur du jardin d’Éole et de la place de la Bataille-de-Stalingrad.
  • 21. Danièle Lochak, « Les minorités et le droit public français : du refus des différences à la gestion des différences », dans Alain Fenet et Gérard Soulier (sous la dir. de), Les Minorités et leurs droits depuis 1789, Paris, L’Harmattan, 1989, p. 120.
  • 22. Yaël Attal-Galy, Droits de l’homme et catégories d’individus, préface de Hugues Moutou, Paris, LGDJ, 2004.
  • 23. Voir par exemple Navanethem Pillay, “High Commissioner calls for focus on human rights and harm reduction in international drug policy”, communiqué de presse du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, 2009.
  • 24. Fabien Jobard, Bavures policières ? La force publique et ses usages, Paris, La Découverte, 2002, p. 277. Cette situation n’est évidemment pas propre à la France. Voir par exemple Céline Bellot et Marie-Ève Sylvestre, « La judiciarisation de l’itinérance à Montréal : les dérives sécuritaires de la gestion pénale de la pauvreté », Revue générale de droit, vol. 47, 2017, p. 11-44.
  • 25. Daniel Moeckli, Exclusion From Public Space: A Comparative Constitutional Analysis, Cambridge, Cambridge University Press, 2016, p. 376.
  • 26. Par exemple, CEDH, 19 janvier 2021, Lacatus c. Suisse, requête no 14065/15.
  • 27. Par exemple, Défenseur des droits, Rapport d’observation sur le démantèlement des campements et prise en charge des exilés Calais – Stalingrad (Paris), décembre 2016. Toutefois, cette possibilité peut être restreinte en raison des exigences liées à une opération de police. Voir Conseil d’État, 3 février 2021 concernant l’évacuation de la jungle de Calais, décision no 448721.
  • 28. Bertrand Seiller, « La notion de police administrative », Revue française de droit administratif, no 6, 2015.

Pierre Auriel

Docteur en droit public et chercheur postdoctoral dans le cadre du programme ANR « Egalibex », Pierre Auriel est notamment l’auteur de L’équivalence des protections des droits fondamentaux dans l’Union européenne (Bruylant, 2020).

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