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Dans le même numéro

Réformes du marché du travail : raison garder

janvier 2009

#Divers

Le marché du travail occupe une place particulière dans les débats sur la réforme en France depuis de nombreuses années, comme d’ailleurs le chômage de masse – même si, depuis la fin des années 1990, le taux de chômage avait nettement régressé, pour se situer autour de 7, 5% avant son aggravation récente1. Des politiques de l’emploi ont été explicitement construites et se sont sédimentées depuis le début des années 1980, mais ce domaine de l’action publique est apparu à beaucoup comme particulièrement décevant et de hauts responsables ont prétendu qu’on avait tout tenté en la matière. La récente irruption de la crise financière, puis celle de la crise économique, changent brutalement le paysage conjoncturel et le regard rétrospectif, mais cela ne modifie pas fondamentalement, nous le croyons, l’erre sur laquelle les réformes sont engagées et les aspects relativement « permanents » du marché du travail français.

Dans la première moitié des années 1990, certains diagnostics sur les dysfonctionnements du système apparurent relativement consensuels : l’un d’entre eux concernait la réforme nécessaire de l’Agence nationale pour l’emploi (Anpe2). Mais bien d’autres points déclenchaient la controverse : fallait-il « partager le travail » ? Le rôle de l’État était-il d’intervenir activement dans la gestion de l’emploi par les firmes ? Fallait-il renforcer ou amoindrir la rigueur du droit du travail ? Les élites politiques et administratives avaient de toute façon renoncé aux solutions keynésiennes pour se tourner vers des nuances variées de néolibéralisme gestionnaire. Finalement, la recette principale mise en œuvre a été la diminution, d’abord ciblée, puis progressivement largement étendue, des cotisations patronales, ce qui a, par la même occasion, changé profondément le financement de la sécurité sociale3.

Avec le recul, la reprise de la période 1997-2001, combinée avec la singularité française de la réduction de la durée légale de travail hebdomadaire dans les entreprises de plus de 20 salariés, apparaît comme l’élément essentiel de l’interruption momentanée du débat. Mais celui-ci est revenu en force dès 2002 ; une nouvelle thèse s’est répandue, issue des travaux de l’école économique dominante sur le plan international, relayée dans divers rapports officiels. Selon ces derniers, la maladie française combinait désormais la rigidité du droit du travail et l’inefficacité des organismes et des acteurs, en raison d’incitations insuffisantes des salariés et des chômeurs : l’analyse a pris la valeur d’une vulgate. Sans se perdre dans l’exploration technique, il est important de confronter cette vision majoritaire chez les experts de gauche comme de droite à ce qu’on peut considérer comme des traits au moins en partie spécifiques de la situation française, par comparaison avec nos voisins. Le fait que les idées de beaucoup d’économistes aient brutalement évolué avec la crise de l’automne 2008 ne va pas, pour autant, faire disparaître la situation acquise : la réalisation des réformes a finalement débouché sur une multiplicité sans précédent de chantiers après l’élection présidentielle de 2007. Il faut replacer la période 2007-2008 dans une plus longue durée pour estimer, avec réalisme, ce que ce feu d’artifice réformateur peut modifier à moyen terme.

La doxa des « réformes structurelles »

Ce qui est nouveau à la fin des années 1990 en France, c’est la place prise dans le débat (et dans le conseil au gouvernement) par l’opinion économique internationale concernant la nécessité des « réformes structurelles ». Auparavant, depuis la fin des années 1970, l’inspiration était beaucoup plus variée, faisant droit par exemple à l’analyse multidisciplinaire de l’exclusion et du chômage et donnant lieu à l’adoption de grandes lois de réforme : lois de 1975 sur les personnes handicapées, adoption unanime de l’allocation de parent isolé en 1976, du Rmi en 1988. Aujourd’hui, les réformes paraissent inspirées par l’idée selon laquelle la solution miracle de la pauvreté et de l’exclusion sociale réside dans la mise au travail de tous et toutes, presque à tout âge.

Il est évidemment exclu ici d’analyser en détail l’immense production d’analyses économiques sur les réformes du marché du travail et les performances comparées entre pays. Disons pourtant que sa lecture, de l’extérieur de la discipline, paraît extrêmement répétitive et décevante. Synthétisant un ensemble impressionnant de travaux, un économiste américain réputé, Richard B. Freeman4, conclut tout simplement que « les institutions » des marchés du travail n’ont qu’un seul effet vérifiable par la technique économique : dans les pays où les prestations de chômage sont généreuses, où il y a des réglementations qui protègent les salariés, des négociations collectives coordonnées (par exemple en Allemagne, en Scandinavie, en France), l’inégalité des salaires et des revenus est moindre, à l’inverse des autres (par exemple, les États-Unis et la Grande-Bretagne). Cela n’a pas empêché, cependant, la profession des économistes de proposer, en majorité, des solutions qui, on me pardonnera de schématiser, sont celles promues internationalement, quels que soient les pays, par l’Ocde depuis 20 ans.

Je me bornerai à illustrer l’esprit de cette doxa par deux documents dont je n’ai pas la place ici de démontrer le caractère représentatif. Le premier est un rapport français qui a eu beaucoup d’influence, bien que ses préconisations n’aient pas toutes été suivies : le rapport dit « Cahuc-Kramarz », du nom de deux économistes français renommés, l’un professeur d’université, l’autre administrateur de l’Insee, publié en 20045. Le second est l’intervention d’un des plus célèbres économistes britanniques du travail, Lord R. Layard (conseiller du parti travailliste), dans le débat présidentiel français, en 2007, au moyen d’une tribune6. Pour le premier comme pour le second, les pays qui ont « réussi » ont fait tous le même type de réforme. C’est ce qu’un journaliste, lui aussi typique de l’opinion courante, au journal Le Monde, résume avec candeur, avant l’engagement des réformes de l’ère Sarkozy : « Le premier défi, celui du plein emploi, est paradoxalement le plus facile à gagner. Cela peut surprendre, mais il ne s’agit, après tout, que de faire ce que tous les pays ont fait7. » Or, j’y reviendrai plus loin, il est empiriquement faux de prétendre que tous les pays ont fait la même chose, non seulement parce que leurs systèmes ont toujours été fondamentalement divers, mais aussi parce qu’ils n’ont pas conduit les mêmes politiques de réforme : l’opposition majeure entre la Suède et le Royaume-Uni, après 20 ans de réformes dans les deux pays, est là pour en témoigner : générosité des prestations, niveau de chômage, niveau d’emploi, inégalités, situations des femmes, pour ne prendre que des indicateurs essentiels.

Le rapport Cahuc-Kramarz préconisait, pour l’essentiel, trois choses : une réforme du service public de l’emploi (guichet unique, sous-traitance, renforcement du contrôle et engagement de service au chômeur) ; le démantèlement des protections pour certaines professions, comme les taxis et les coiffeurs ; la création d’un contrat de travail unique accompagnée du remplacement de la protection contre les licenciements par des « malus » payés par les entreprises qui licencient. Deux caractéristiques du rapport doivent être soulignées. D’une part, ses préconisations étaient toutes justifiées à partir de la mobilisation d’études uniquement économiques : les juristes, les spécialistes de management, les sociologues, les psychologues sont absents de cette réflexion où le droit du travail devient une ressource manipulable et n’est plus un fondement de l’ordre social8. D’autre part, l’orientation normative – on peut même dire combattante – sous-jacente du rapport est en faveur des défavorisés, des précaires, et elle s’attaque aux nantis, aux insiders, aux protégés, toutes catégories qui dans la théorie orthodoxe économique, sont des rentiers : elle cherche à capter ainsi une position morale de supériorité sur des adversaires dépeints en défenseurs de privilégiés.

De son côté, pour R. Layard, « tout dépend de l’efficacité du système qui permet de mobiliser les chômeurs et de les amener à prendre les emplois qui se présentent » et l’expérience internationale de l’efficacité exige, selon lui, qu’il y ait un seul « centre » où l’on perçoit les prestations et où l’on est aidé à trouver un emploi ; que l’aide soit active et que la personne se présente régulièrement, obligée d’accepter les emplois proposés au bout d’un temps court de chômage. Ici encore, les systèmes existants ne correspondent pas à la description de l’économiste : ainsi pour ne prendre qu’un exemple, au Danemark, pays « miracle » par excellence, malgré la municipalisation du service de l’emploi fin 2008, ce sont toujours les caisses d’assurance chômage, gérées par les syndicats de salariés, qui servent les allocations, alors que l’orientation est faite au guichet communal. La solution de R. Layard, apparemment universelle, est en fait l’organisation qu’on trouve seulement au Royaume-Uni. Bref, pour résumer, la solution du chômage (d’avant la crise de l’automne 2008), en France comme ailleurs, passait par une « activation » des chômeurs, fondée sur des sanctions, des incitations et des obligations, d’une part, et une réorganisation du service de l’emploi qui augmenterait la qualité de ses services, d’autre part. Avant de montrer comment les réformes engagées depuis 2007 illustrent cette opinion dominante, voyons si ces orientations apparaissent cohérentes avec les caractéristiques permanentes du marché du travail français.

Traits comparatifs du marché du travail français

Les problèmes de l’emploi français et de sa gestion par les organismes qui en sont chargés sont marqués par quatre traits principaux. Le premier est une singularité du salariat français : le « marché du travail » est d’abord polarisé par une grande division entre fonctionnaires (les trois fonctions publiques) et salariés du privé. En conséquence, la France est le pays où les conditions d’emploi sont le plus inégales entre gens du public (les fonctionnaires sont en minorité dans le secteur public de tous les grands pays comparables) et gens du privé ; d’autre part, la proportion des fonctionnaires est la plus élevée – alors même que les contrats dits précaires se sont taillé une place importante dans le secteur public. C’est même dans le public qu’on trouve les contrats les plus effectivement précaires (les contrats de vacataires). C’est aussi dans la haute fonction publique qu’on trouve des emplois particulièrement protégés, pour la vie, et très bien payés. La polarisation dans le secteur est donc très grande en comparaison de nos voisins. Sur ce point, la vulgate qui a cours en France n’a, pour l’instant, pas été extrêmement loquace, en particulier sur les privilèges de la haute fonction publique et des grandes écoles, dont on ne manque pas de s’étonner, au Danemark, par exemple.

Le deuxième trait contredit l’idée selon laquelle le système français serait uniment rigide. La flexibilisation des contrats de travail s’est bien faite en France, depuis 20 ans, mais « en douce », selon un modèle « latin », comme en Espagne et en Italie9. Il faudrait multiplier ici les chiffres et les distinctions, pour illustrer ce fait qui a conduit à une segmentation croissante, à une inégalité et une diversité des conditions d’emploi, qui n’oppose pas – ce serait trop simple – un groupe homogène d’insiders et un autre aussi homogène d’outsiders. C’est plutôt à un émiettement des statuts d’emploi qu’on a assisté dans les vingt dernières années.

Dans une recherche avec des collègues danois, italiens, allemands, britanniques et espagnols10, nous avons montré que l’opposition outsider-insider existe partout, sauf dans les pays scandinaves, mais qu’en France, ce qu’on appelle précarité de l’emploi se concentre sur des groupes qui sont les perdants de la flexibilisation du travail et de l’emploi11 : certains secteurs, comme les emplois d’aide à domicile ou dans les centres d’appel ; les jeunes aux faibles qualifications ou victimes de discrimination – les jeunes femmes peu qualifiées, en particulier ; les salariés aux qualifications standard, privés d’accès à la formation continue, etc. Plus qu’un dualisme du marché, c’est plutôt une multiple segmentation qu’on observe et qui s’analyse centralement par les chances très différentes de « s’en sortir ».

À ce propos, les deux graphiques 1 et 2 illustrent une de ces dimensions, l’inégalité française particulièrement marquée selon l’âge : sur le graphique 1, on observe que, contrairement aux chiffres alarmistes, la part des « formes particulières d’emploi », dans la population en général, a crû nettement, depuis le début des années 1980, pour arriver à 10-12% des emplois ; elle apparaît stable depuis la fin des années 1990. En revanche, le graphique 2 illustre la prévalence de ces formes particulières chez les jeunes. C’est ce qui a amené C.Nicole-Drancourt à souligner le contraste entre « précarité d’exclusion » et « précarité d’insertion », en insistant sur la différence entre jeunes femmes et jeunes hommes. Bien loin d’être « précaires » pour la vie, les jeunes sont désormais désavantagés pour leur période d’insertion, qui s’est fortement allongée, mais ils finissent, sauf les peu qualifiés, par rejoindre, en trois ou cinq ans, les salariés stables. L’exemple des jeunes n’est qu’une des manifestations de la segmentation et de l’émiettement des statuts selon l’âge12, le sexe, le secteur, la qualification.

Graphique 1
Graphique 2

La multiplication des contrats qu’on appelle « aidés13 » (subventionnés d’une manière ou d’une autre) a elle aussi accru les divisions statutaires et aggravé les risques d’entrer dans des contrats de travail qui ne permettent pas de sortir de la pauvreté, tout comme les McJobs anglais. Parmi les formes particulières d’emploi, il faut compter ces « contrats aidés » parmi les principaux vecteurs de l’exposition aux mauvaises conditions de travail, aux revenus insuffisants et aléatoires, à une couverture sociale dégradée. Mais, comme cela a été souvent illustré dans la littérature spécialisée, tous les Cdd ne s’équivalent pas ; l’intérim s’est extrêmement diversifié, l’apprentissage est en général une bonne voie d’insertion professionnelle. L’outil de la mesure de la « précarité » – la part des formes particulières d’emploi– est donc très grossier et il conduit à des discours généraux sur la dualité (alors qu’il s’agit d’émiettement) et laisse de côté la question essentielle des dynamiques de carrières d’emploi sur le long terme : il y a une différence majeure entre l’instabilité de l’emploi (qui peut être compatible avec le fait d’être constamment en emploi) et l’insécurité de l’emploi (qui signifie l’exposition au chômage, à la pauvreté dans le travail, etc.) comme l’avait montré le rapport publié par le Cerc en 2006. Les situations sont bien différentes en Europe à ce propos : l’allemand vient juste d’introduire le mot Prekariat dans son vocabulaire, en 2006, après la réforme Hartz. En Grande-Bretagne, la contestation monte depuis deux ans à propos des vulnerable workers et le gouvernement de G. Brown a enfin levé son opposition à l’adoption future d’une directive européenne sur le travail « temporaire », après 25 ans de combat d’arrière-garde. En France, un des sommets de l’inégalité et de la segmentation a été atteint sous le gouvernement de Villepin, introduisant en 2005 le contrat nouvelle embauche pour les petites entreprises (Cne, finalement retiré car condamné par l’Organisation internationale du travail, puis définitivement annulé par la loi du 25 juin 2008) et le fameux Cpe (contrat première embauche) qui a scellé la fin des espoirs présidentiels du Premier ministre en 2006.

Le troisième trait comparatif concerne la rigidité présumée qui découle du droit du travail. Ce débat se fonde sur des chiffres publiés par l’Ocde. L’organisme attribue des pondérations à différentes réglementations qu’il regroupe sous le terme « protection de l’emploi ». Ce genre d’exercice est toujours délicat techniquement et a fait l’objet de nombreuses critiques spécialisées. Pourtant, même si l’on prend ces chiffres – forcément contestables méthodologiquement – tels qu’ils sont, le droit du travail français n’apparaît pas « rigide » de façon homogène : le droit du travail danois est plus protecteur pour les licenciements collectifs, le droit néerlandais pour l’emploi standard et c’est seulement pour les emplois atypiques que le droit français est le plus exigeant. Or, Pays-Bas et Danemark sont presque universellement loués pour leur prétendu modèle de « flexicurité », pendant que la France est généralement vue comme trop rigide. Ce point met en cause directement la crédibilité de la doxa.

Enfin, le quatrième trait indispensable pour la compréhension de la pertinence des réformes en cours est le système des prestations d’assurance chômage et d’aide sociale, ainsi que l’organisation des services proposés pour trouver un emploi. Le trait qui singularise la France est la multiplicité des revenus minimum pour les personnes en âge de travailler (à partir de 25 ans, en fait) et l’inégalité des droits et obligations qui leur sont associés : par exemple, contrairement à tous les autres pays, les titulaires du Rmi ne sont pas obligés de chercher du travail car les lois de 1988, puis de 1992, ont décidé qu’il y avait d’autres formes d’insertion sociale que la recherche d’emploi, une hypothèse qui est étrangère à la théorie économique dominante. D’autre part, au fur et à mesure de la mise en place des programmes publics, le territoire est devenu une mosaïque d’acteurs qui s’occupent de l’emploi, de l’insertion, sociale ou professionnelle, de la formation, etc. Ces problèmes de cohérence de l’action administrative et politique sont publiquement reconnus depuis 20 ans : qu’on relise le rapport coordonné par M. Aubry pour le Xe plan en 1989. Le système d’évaluation des actions, la connaissance de leurs résultats et de leur coût ont toujours été défectueux, partiels, non professionnels, politisés et confidentiels.

Ici, l’idée véhiculée par la doxa selon laquelle le système français est peu cohérent et inefficace est donc largement confirmée. Cela ne préjuge pas, pourtant, de la substance des réformes qui seraient les plus appropriées : peut-on faire un guichet unique ? L’existence d’un seul organisme est-elle la plus efficace et la moins coûteuse ? Les chômeurs vont-ils mieux se placer si on renforce les sanctions ? Combien faut-il de chômeurs par agent du service de l’emploi pour que l’intermédiation soit efficace ? Toutes ces questions n’ont pas une seule réponse, ni une réponse valide pour toujours : de ce point de vue, la leçon tirée des modèles économiques s’apparente, comme au bon vieux temps de l’organisation « scientifique » du travail, à la recherche éternellement frustrée d’un one best way.

D’un point de vue élémentaire de management public, une chose est certaine : la fragmentation, le financement et l’investissement intellectuel insuffisants, les « doublons », la mauvaise coordination sont des causes d’inefficacité et de mauvais service pour les chômeurs et les gens qui cherchent à se former. À tout le moins, répondre à la question de l’amélioration de l’efficacité oblige à tenir compte du contexte du pays, à considérer donc des explications managériales, sociologiques et psychologiques, médicales, etc., et à les replacer dans le débat public sur la justice sociale. Si l’intérêt d’une analyse économique du rôle de l’administration de l’emploi est éminent, on ne voit pas au nom de quoi la certitude d’une bonne réponse pourrait s’analyser uniquement sous l’angle d’une économie qui transforme les chercheurs d’emploi en agents rationnels maximisant leur satisfaction et choisissant, de temps à autre, le chômage volontaire, et la plupart des salariés français en titulaires de rentes injustifiées.

Un bouquet de réformes tous azimuts est en cours

Depuis l’arrivée au pouvoir du nouveau président et de son gouvernement, quatre chantiers principaux de réforme ont été ouverts : la fusion de l’Anpe et de l’Unedic ; le renforcement de ce qu’on appelle euphémiquement « l’accompagnement » des chômeurs, y compris l’introduction de nouvelles obligations et sanctions ; la réforme du marché du travail, faisant l’objet de l’accord interprofessionnel signé par le patronat et les grandes centrales syndicales (hors la Cgt) le 11 janvier 2008 ; et, enfin, la réforme du système des minima sociaux qui s’est traduite par l’organisation d’un « Grenelle de l’insertion » (rapport final rendu le 27 mai 2008) et par la mise en place annoncée d’un nouveau revenu minimum, dit « revenu de solidarité active – Rsa ». Au moment où les décisions laborieuses concernant le financement du Rsa avaient été arbitrées, la crise financière a éclaté, faisant passer au second plan des réformes dont certaines sont encore seulement potentielles.

Le bilan réaliste d’étape qu’on peut tirer aujourd’hui, sans négliger l’impact incertain de la crise économique, repose donc sur des hypothèses. Que peut dire la sociologie politique concernant la prévision des effets des réformes de 2007-2008 (appuyées il est vrai sur une plus longue durée d’action publique, comme on vient de le souligner) : va-t-on constater une rupture de trajectoire, dans les faits, étant entendu que la rupture de discours ne fait pas débat ? ou, selon d’autres hypothèses, le poids du passé, l’empreinte des origines, la lourdeur des systèmes d’acteurs vont-ils graduellement « digérer » les projets qui ne déboucheront, à la fin, que sur une couche supplémentaire de complexité, sans améliorer, dans le pire des cas, l’efficacité du système ni la justice sociale ? Les autres articles de cette livraison traitent de certaines de ces questions et je me concentrerai seulement sur certaines réformes.

Concernant l’accord du 11 janvier (voir article de A. Jobert), qui est à l’origine de la loi du 25 juin, je ferai simplement observer deux points. Tout d’abord, seules certaines de ses dispositions ont trouvé une traduction législative, les autres sont restées, pour l’instant, à l’état de promesses (ainsi : l’instauration d’une prime forfaitaire pour les jeunes chômeurs de moins de 25 ans ; la prise en compte de l’ancienneté dans l’accès aux droits, les mesures d’accompagnement de la mobilité, la portabilité de certains droits, notamment). Ce qu’on a parfois présenté emphatiquement comme une « flexicurité à la française14 » présente une réalisation nettement biaisée en faveur de la flexibilité demandée par les employeurs. En second lieu, contrairement à l’idée de l’unification des contrats, dont le Cne, puis le Cpe, ont pu être considérés comme des étapes15, la loi, si elle confirme le caractère de droit commun du contrat à durée indéterminée, introduit non seulement un contrat supplémentaire, « à objet défini » (ajouté pour les ingénieurs et cadres, à la palette déjà nombreuse des contrats existants), mais a inventé une modalité nouvelle, la rupture conventionnelle. La réforme ne représente donc pas une rupture avec l’inégalité et la segmentation des statuts. Si les partenaires sociaux ont appelé de leurs vœux l’unification des « contrats aidés » (article 1 de l’accord), la situation reste, au moment où ces lignes sont écrites, pratiquement inchangée.

S’agissant en second lieu de « l’activation des chômeurs », de leurs obligations et du renforcement des sanctions, on ne peut que s’étonner du fait que le gouvernement ait fait, à marche forcée, adopter la loi du 1er août « sur les droits et devoirs des demandeurs d’emploi ». D’abord, cette matière relève de la renégociation de la convention d’assurance chômage qui n’a commencé qu’en septembre 2008. Ensuite, on n’oublie pas qu’une précédente loi, dite loi Borloo, en 2005, avait déjà profondément réformé le système des sanctions, dont la clarification était demandée depuis un certain temps de plusieurs côtés16. Or, à ma connaissance, ni l’Unedic ni le gouvernement n’ont publié une quelconque évaluation de la mise en œuvre de cette loi : des informations ont filtré dans la presse à propos d’un bilan 2006 attribué à l’Unedic17. Alors que le chômage ne peut être attribué unilatéralement aux conduites des chômeurs, alors que, même avant la crise, la création d’emploi était atone, on est conduit à interpréter le vote de cette loi comme une opération de communication politique, destinée à montrer la fermeté du gouvernement, fidèle aux déclarations du candidat Sarkozy pendant la campagne présidentielle, si banalement démarquées de la communication politique de Tony Blair. Les citoyens et, parmi eux, les chômeurs (et pas simplement les partenaires sociaux agissant dans le secret de la direction de l’Unedic) seraient très intéressés de savoir si l’aggravation des sanctions décidée en 2005 a produit des effets, et si oui, lesquels ? Cette réforme engagée depuis trois ans valide-t-elle les préconisations des économistes ? La réforme d’août 2008, qui renforce les obligations des chômeurs en matière d’acceptation des offres dites « raisonnables », est bien dans la lignée des interventions politiques punitives qui ne sont fondées sur aucune évaluation publique, elle ne représente aucune rupture avec le passé. On peut prévoir qu’elle ne produira aucune amélioration de la qualité du service aux chômeurs, laquelle constituait pourtant l’un des points clés de l’accord interprofessionnel de janvier 2008 (articles 15, 16 et 17).

Sur la fusion de l’Anpe et de l’Unedic, la décision finale a été scellée par une loi du 13 février 2008. Comme l’a fait remarquer, au moment de l’adoption de la loi, la ministre de l’Économie, les choses ne faisaient que commencer ; si le principe est acquis et si on travaille à la mise en place du nouvel organisme, baptisé « Pôle Emploi », la fusion reste entièrement à faire sur le terrain. L’exemple de la réforme allemande est ici éclairant : l’idée d’un guichet unique, alors même que l’ancien Bundesanstalt für Arbeit regroupait déjà les fonctions d’assurance et de placement, a été finalement abandonnée. Il y a maintenant pour la plupart des chômeurs deux guichets, l’un pour ceux qui ont des droits d’assurés, l’autre pour ceux qui relèvent de l’assistance. Il faut certes tenir compte dans le cas allemand des complications du fédéralisme, qui ne sont pas négligeables. Mais, dans le cas français, outre la gestion de différents statuts de personnel, l’opposition des « cultures d’entreprise », il faut aussi tenir compte du fait que la recherche du guichet unique dure depuis plus de dix ans, et du fait que la mise en compatibilité des systèmes informatiques est sur le chantier depuis à peu près la même durée. Il faut aussi évoquer la saturation potentielle, au moins du côté de l’Anpe, par des réformes incessantes qui se succèdent depuis dix ans sans qu’elles soient clairement évaluées. Enfin, last but not least, la question ne se résume pas, comme en Grande-Bretagne, à la mise en œuvre centralisée d’un système punitif et résiduel d’assistance – ce serait simple si l’on pouvait adopter la médication du docteur Layard! Il y a en France encore une véritable assurance chômage, qui se distingue des minima sociaux, et tous les gens « privés d’emploi » ne sont pas de simples benefit claimants comme outre-Manche.

L’un des points épineux, explicitement débattu dans le cadre de l’adoption de la loi sur le Rsa, est celui de l’obligation de rechercher un emploi pour les bénéficiaires, finalement affirmée, mais d’une façon ambiguë18. Ici encore, on peut rappeler le précédent allemand : en 2005, au 1er janvier, tous – ou presque tous – les bénéficiaires de l’assistance ont été inscrits comme « employables », ce qui expliqua l’essentiel de l’augmentation de la statistique administrative du chômage de quelque 500000 personnes. Le premier effet de la mise en œuvre du Rsa, prévue en juillet 2009, sera-t-il de même ordre ? Comment le Service public de l’emploi va-t-il traiter ceux des anciens bénéficiaires de minima sociaux qui seront inscrits ? Quel sera le sort des « dispensés de recherche d’emploi » (400000 personnes, en raison de leur âge, que la loi d’août 2008 prévoit de réintégrer dans le droit commun d’ici trois ans) ? Seule la pratique le dira.

On pourrait aisément allonger la liste de ces questions très concrètes. Au demeurant, l’Anpe est entrée dans un tourbillon de réformes depuis plus de dix ans, toutes marquées par une forte politisation. Elle a plus que doublé ses effectifs depuis 1990, mais, avant la fusion, en termes du ratio d’employés par chômeur, ils restaient encore modestes vis-à-vis de pays comme la Grande-Bretagne, ou, a fortiori, la Suède et le Danemark. Comme l’a bien montré la mise en œuvre de la réforme de l’assurance chômage qui aboutit à la création du Pare19 (à partir de 2000, lequel, soit dit en passant, n’a jamais été évalué), il ne suffit pas, comme la Cfdt l’avait espéré à l’époque, de lancer une réforme bien intentionnée pour se rapprocher de la qualité des services scandinaves.

L’interrogation majeure est ici double : d’une part, les responsabilités politiques sont partagées entre communes, départements, régions, État central, et l’on ne fait pas travailler ensemble des niveaux légitimes de gouvernement sans que des compromis et des échanges soient menés, qui conduisent, comme l’ont montré les réformes allemande et danoise, à une variation inévitable entre le plan « rationnel-fonctionnel » de départ – fût-il inspiré par une économétrie impeccable–, et le résultat à l’arrivée, cinq ou six ans après. D’autre part, il y a, dans la réforme, un enjeu majeur de management du service public, et toute l’histoire du service public de l’emploi tend à montrer que cette capacité gestionnaire n’a pas été plus exemplaire en France qu’en Allemagne. Si les obstacles politiques sont gérés avec doigté, si de réelles réformes d’organisation et de management sont engagées, l’efficacité peut être au rendez-vous, mais cela ne saurait se faire que sur la durée, et le gouvernement a fort peu de chances d’engranger des résultats effectifs à court terme, surtout au moment où la conjoncture s’est brutalement dégradée.

Les conclusions du Grenelle de l’insertion, en mai 2008, comme l’accord interprofessionnel du 11 janvier, ont affirmé la nécessaire simplification des contrats « aidés » : la loi finalement promulguée prévoit un « contrat unique d’insertion », qui prendra la forme des actuels « Cie » (contrat initiative emploi) pour le secteur marchand, et « Cae » (contrat d’accompagnement dans l’emploi). La simplification sera considérable, quand elle aura finalement été mise en œuvre, tout en conservant une différence entre public et privé. Contrairement à l’esprit initial du projet, seuls les bénéficiaires de l’ancien Rmi et de l’ancienne allocation de parent isolé (Api) sont éligibles au Rsa20, à côté des travailleurs dont les revenus les classent dans les « travailleurs pauvres » et qui risquent ainsi de se trouver stigmatisés par le passage d’une prestation fiscale (l’ancienne prime pour l’emploi) à une sociale. Cette situation ne va donc pas faire disparaître l’inégalité des situations, la segmentation qu’on a soulignée plus haut et la complexité de leur gestion. L’offre d’emploi, de son côté, n’a aucune chance d’être « automatiquement » au rendez-vous. En 20 ans de politiques de l’emploi, l’implication des entreprises a été, globalement, un échec. Plusieurs spécialistes de l’insertion et de la pauvreté, chercheurs et experts ont mis l’accent sur les nombreuses incohérences ou contradictions du projet. Sa rationalité est, cela ne fait aucun doute, tout à fait conforme à la théorie économique présentée au début de ce texte: la colonne vertébrale du futur Rsa est construite sur l’idée que le travail permet d’échapper à la pauvreté, d’une part, et qu’il faut inciter les gens à chercher des emplois. À part sa décentralisation vers les départements, la dernière réforme d’ampleur du Rmi a pourtant consisté dans l’invention du Revenu minimum d’activité (Rma), annoncé comme une révolution par le gouvernement Raffarin en 2003. Ce fut un échec magistral, puisqu’au lieu des 100000 contrats prévus dès la fin 2003, il en existe seulement moins de 15000 en été 2008. Cet échec pourrait être médité, même si l’ampleur de la réflexion et des ruptures annoncées en matière de gestion des minima sociaux est d’une autre nature que la « réformette » du Rma qui était destinée à satisfaire, après la victoire de la droite en 2002, la partie la plus réactionnaire des élus qui avaient déposé une proposition de loi critiquant de façon virulente l’insertion.

Une potion pour guérir quelle maladie ?

Au total, la multiplicité des réformes annoncées, de même que la durée indispensable pour les mettre en place et en mesurer les fruits compliquent sérieusement tout exercice d’appréciation. Le moins qu’on puisse signaler cependant, c’est que la liste des objectifs annoncés est telle qu’il y a peu de chances qu’ils soient tous atteints. Si ces réformes ont une couleur qui s’inspire indubitablement de la théorie économique internationale justifiant les réformes structurelles, plus de privatisation et de concurrence, plus de flexibilité du travail, plus de sanctions des chômeurs, on connaît la potion, mais ce sont les conditions de son administration qui laissent perplexe, surtout dans la conjoncture nouvelle de la crise économique. On a montré qu’elles ont une spécificité française. Personne en Europe n’essaie de mettre en place de guichet unique, sauf la Grande-Bretagne hypercentralisée. Personne ne maintient plusieurs minima sociaux. Aucun gouvernement, sauf le britannique, n’attache si peu d’importance au respect authentique d’une compétence des partenaires sociaux. Aucun pays n’a autant de niveaux de gouvernement que la France, ni autant de fonctionnaires et d’inégalité entre les statuts publics et privés. Tous ces points ne sont pas négligeables et ne disparaîtront pas grâce à une bonne communication politique. L’introduction hâtivement annoncée à la fin 2008 de 100000 nouveaux contrats aidés trahit une continuité de la politique française de l’emploi : l’État s’est comporté, sous les gouvernements de droite comme de gauche, comme un « employeur de dernier ressort », depuis la fin des années 1980. Certes son offre de dernier ressort (les contrats aidés) n’a jamais été suffisante, mais cette caractéristique fait plutôt ressembler la France à la Suède qu’à la Grande-Bretagne. Au-delà des critiques nombreuses et justifiées portées au Rsa, c’est l’ensemble des réformes en cours, très ambitieuses, qu’il faut considérer.

On peut dès lors formuler le scénario qui a le plus de chances de se réaliser. C’est celui qui, au-delà de la rupture étourdissante des discours, va voir s’installer des aménagements certes notables, mais pas révolutionnaires. La fusion Anpe-Unedic se réalisera, mais peut-être en dix ans, et, au bout de dix ans, un nouveau gouvernement décidera peut-être de séparer à nouveau les deux fonctions, comme cela s’est fait dans l’histoire, aux États-Unis et en Grande-Bretagne. La croissance des emplois ne sera pas tout à fait au rendez-vous, et on aura beau « activer » les chômeurs, l’objectif de la réduction de la pauvreté, s’il est évalué sérieusement, ne sera pas plus atteint en France qu’en Grande-Bretagne, malgré la « révolution Blair ». Des simplifications seront introduites dans les contrats, mais elles risquent d’être contrebalancées par d’autres complexités. La mise en concurrence des opérateurs privés et public va s’accroître pour les services de l’emploi, mais, même avec les méthodes économétriques les plus sophistiquées, personne ne pourra montrer, pas plus en France qu’en Allemagne, un avantage dirimant de tel ou tel modèle d’action : l’insertion professionnelle des personnes pauvres, peu qualifiées, difficiles à placer, est un sujet sur lequel tous les pays ont achoppé, même les plus performants et les plus conséquents et les plus solidaires dans leur réforme, les scandinaves.

Enfin, la question majeure du marché du travail français, c’est-à-dire son émiettement et ses inégalités, entre hommes et femmes, jeunes, vieux, et personnes d’âge intermédiaire, personnes discriminées, personnes qui ont été considérées comme en échec à l’école et diplômés des grandes écoles, cette question majeure ne sera vraisemblablement pas modifiée grandement par le foisonnement des réformes actuelles, diagnostic et remèdes mis en œuvre fussent-ils appuyés sur une excellente analyse économique. Il faut donc raison garder pour apprécier la portée des réformes.

  • 1.

    Pour une analyse rétrospective, voir Jérôme Gautié, le Chômage, à paraître dans la collection « Repères » (Paris, La Découverte, 2009).

  • 2.

    Dès cette époque, l’Anpe a été mise en position structurelle de bouc émissaire. En 1989-1991, deux rapports, l’un de droite (de Gaulle), l’autre de gauche (Brunhes), préconisent sa décentralisation.

  • 3.

    Après la défaite de la gauche en 2002, le principe de l’exonération, réformé plusieurs fois, ne remet pas en cause le fait que la prise en charge des cotisations patronales par l’État représente le principal poste de la dépense pour l’emploi (plus de 30 milliards d’euros). La part du financement par cotisations de la protection sociale a fortement régressé depuis 1990, et s’établit aujourd’hui à environ deux tiers du total.

  • 4.

    R. B. Freeman, “Labor Market Institutions Around the World”, Cep Discussion Paper, n° 844, janvier 2008, Londres, Centre for Economic Performance.

  • 5.

    Rapport du 2 décembre 2004, P. Cahuc et F. Kramarz, « De la précarité à la mobilité : vers une sécurité sociale professionnelle », remis aux ministres de l’Économie et du Travail (Paris, La Documentation française).

  • 6.

    « Comment certains pays ont réduit le chômage de masse » de R. Layard, publié par Telos, le 7 février 2007, sur le site www.telos-eu.com.

  • 7.

    Éric Leboucher, dans l’édition du 30 mai 2007.

  • 8.

    Voir, sur ce point, l’article d’Antoine Garapon, « Un nouveau modèle de justice : efficacité, acteur stratégique, sécurité », Esprit, novembre 2008, p. 98-122.

  • 9.

    Voir J.-C. Barbier, « La réforme du marché du travail français au miroir de l’Europe. Imiter l’Espagne à défaut du Danemark ? », Esprit, mai 2006, p. 17-28.

  • 10.

    Laparra Navarro M., La Construcción del empleo precario, dimensiones, causas y tendencias della precariedad laboral, San Bernardo, Caritas Editores, 2006.

  • 11.

    Pour une réflexion interdisciplinaire sur la question, voir J.-C. Barbier et H. Nadel, la Flexibilité du travail et de l’emploi, Paris, Flammarion, 2000.

  • 12.

    Il faudrait aussi évoquer les problèmes concernant les salariés âgés, les effets des réformes des retraites, etc.

  • 13.

    En attendant les résultats des réformes en cours : contrat d’avenir ; CI-Rma ; contrat d’accompagnement dans l’emploi (Cae) ; Cie (initiative-emploi) ; Civis ; contrat de soutien à l’emploi des jeunes en entreprise ; d’apprentissage ; de professionnalisation.

  • 14.

    À supposer que le débat autour de ce terme tant galvaudé ait encore un sens précis.

  • 15.

    Chief economist de l’Ocde, J.-P. Cotis, écrivit dans Le Monde du 31 mars 2006 : « Le Cpe, qui offre des indemnités et des garanties supérieures à celles d’un Cdd trouve alors son sens en tant qu’étape vers une unification des contrats. »

  • 16.

    La demande figurait notamment dans le rapport Marimbert de 2004, sur le rapprochement des services de l’emploi, argumentée sur une base de comparaison avec les autres pays.

  • 17.

    Les Échos, 26 juillet 2007.

  • 18.

    Le « livre vert sur le Rsa », publié début 2008, écrivait prudemment : « C’est pourquoi on peut se demander dans quelles conditions l’évolution de l’offre de services du nouvel opérateur, compte tenu de ses moyens, peut conduire à envisager, pour les allocataires du Rsa chômeurs, une obligation d’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi. » La loi finalement adoptée (article L. 262-27) laisse la place à plusieurs orientations des bénéficiaires, en affirmant le principe de la recherche d’emploi.

  • 19.

    Le Plan d’aide au retour à l’emploi est la modalité standard de l’indemnisation des assurés contre le chômage.

  • 20.

    Subsisteront donc, après la réforme, les autres revenus minimum pour les personnes d’âge actif, dont les plus importants sont l’Allocation de solidarité spécifique (Ass) et l’Allocation d’adulte handicapé (Aah).

Jean-Claude Barbier

Sociologue et directeur de recherche au CNRS, il fait partie de l’équipe Matisse au sein du Centre d’économie de la Sorbonne. Spécialiste de l'intégration européenne et des politiques sociales, il a travaillé sur la transition de l'Afrique du Sud vers la démocratie. Il a notamment publié La longue marche vers l’Europe sociale (PUF, 2008) et Le système français de protection sociale (La Découverte,…

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