Donner de soi. Sur la clinique du donneur vivant dans les transplantations hépatiques
Sur la clinique du donneur vivant dans les transplantations hépatiques
Pour les personnes en attente d’une greffe du foie, la possibilité d’un prélèvement sur une personne vivante ouvre une perspective de guérison inespérée. Lors de leurs entretiens préalables aux greffes avec les équipes médicales, les donneurs, souvent membres de la famille du receveur, affirment le caractère volontaire et éclairé de leur démarche avec une belle assurance. Pourtant, quelques mois après le succès de l’opération, bien des évidences sont remises en cause …
Dans un contexte de forte pénurie d’organes, la greffe avec donneur vivant est apparue comme un recours inespéré pour sauver des malades en insuffisance hépatique terminale inscrits sur liste d’attente. Défi technique et humain à la fois, à même d’accomplir une victoire inédite du médical sur la mort, cette pratique nouvelle a soulevé auprès des équipes concernées un formidable élan.
Progressivement pourtant, quelques chirurgiens ont été gagnés par le doute, questionnant jusqu’au bien-fondé d’un geste efficace pour les receveurs, mais dont le retentissement sur l’ensemble de la famille et en particulier sur les donneurs déjoue toute anticipation.
Partant des interrogations d’une équipe de transplantation, ce travail tire sa matière d’entretiens cliniques systématiques réalisés avec des « candidats au don » pendant le bilan pré-opératoire, avec des donneurs pendant leur hospitalisation, et à distance, lors des visites régulières de contrôle, plusieurs semaines, mois ou années après la transplantation1.
Cela fait des mois maintenant, parfois des années qu’ils ont donné ce « morceau » de foie pour un proche, un membre de leur famille. Cela fait bien longtemps que leur foie a retrouvé son volume initial, que pour eux le quotidien aurait dû reprendre sa course. Et pourtant ces « donneurs vivants » reviennent sur les lieux de l’opération, hantant les consultations de chirurgie hépatique pour témoigner de troubles fantômes, ou pour montrer inlassablement une cicatrice qu’ils ne peuvent accepter. Seul objet véritablement reconnu par le médical, ce corps qu’ils exhibent comme s’il leur était devenu étranger, semble demander réparation.
D’autres se plaignent de n’avoir pas été suffisamment prévenus, d’avoir été mal informés des suites opératoires ou des risques encourus, laissant entendre qu’ils ont donné leur confiance à tort. Certains même qui s’étaient montrés avant l’opération des plus déterminés et volontaires disent plus tard avoir donné sous la contrainte ; ce n’était pas un « choix librement consenti » comme ils l’ont affirmé auparavant, mais un « non-choix », un « choix par défaut ».
Certes, il est des donneurs qui traversent cette expérience extrême avec une relative sérénité : pour eux tout s’est passé au mieux, et la réussite de la chirurgie comme le retour à la santé de leur proche contribuent à estomper les derniers souvenirs difficiles.
C’est pourtant aux donneurs entamés par cette épreuve que nous nous intéresserons ici, à ceux, nombreux, en qui ce geste a fait rupture, menaçant dangereusement parfois l’édifice identitaire. Car dans les questionnements et les plaintes qu’ils nous adressent, se révèlent en filigrane les espoirs et les représentations au fondement même de cet acte de don. Et ces récits remaniés au fil du parcours éclairent les paradoxes et les multiples leurres auxquels tout donneur est nécessairement confronté et que le médical favorise à son insu.
Une logique de l’évidence
Lorsque M. L. rencontre le chirurgien, sa décision est prise depuis un moment, depuis qu’il sait que donner pour sa femme est possible. Cette option thérapeutique a été discutée avec les hépatologues et le bilan médical est déjà en cours. L’évolution de la pathologie, la dégradation actuelle de la santé de Mme L. et surtout la greffe à venir sont au centre de notre premier entretien et des préoccupations de M. L. L’état avancé de la cirrhose appelle une opération rapide : « Son foie est mort », explique-t-il. En contrepoint de ce développement des plus techniques, les années difficiles qui ont précédé la maladie et l’alcoolisme de son épouse sont évoquées en de brefs raccourcis, renvoyés à un passé que la perspective de la transplantation rendrait désormais obsolète : « J’avais perdu ma femme », dit-il.
De ce qu’il ressent, M. L. parle peu, seulement de sa motivation à donner et de la transformation qui en peu de temps s’est opérée en lui et au sein de la famille : il a perdu plus de vingt-cinq kilos en quelques semaines, a repris une activité sportive intensive et est fier maintenant de l’admiration qu’il suscite chez son épouse et ses deux fils. Donner pour sa femme apparaît comme une nécessité absolue, mais aussi comme un défi personnel qu’il tient à relever. Il se compare d’ailleurs à un sportif pour qui la confiance en soi est essentielle avant une épreuve décisive : « Quand on n’est pas sûr, le doute c’est la catastrophe… Il faut être convaincu, ne rien laisser au hasard. » Dans un mouvement plus sensible, M. L. conclut pudiquement : « Je n’ai pas d’émotions mais des sentiments. On s’est toujours aimés. »
Lors des premiers entretiens, il est avant tout question de l’autre et de sa maladie. Par un effet de gommage, de mise à distance, le sujet qui parle reste comme en arrière-plan de son récit, tant la gravité de la pathologie et les enjeux vitaux qu’elle convoque neutralisent toute autre scène. À peine ébauchée et souvent vidée de toute conflictualité, l’histoire familiale elle-même est reconstruite à partir de l’histoire de la maladie. Dans ces récits, les derniers mois et parfois même les dernières années ont le plus souvent été marqués par une dégradation inquiétante de l’état de santé du malade, grevant lourdement le quotidien, remodelant les relations familiales jusque-là établies.
La maladie hépatique sévère peut en effet prendre un tour spectaculaire et effrayant, entraînant pour le patient une transformation radicale, physique et même psychique. Un dysfonctionnement massif du foie ouvre sur une altération générale des autres fonctions vitales et peut induire d’importantes crises d’encéphalopathie : « Maintenant il se fait dessus, il ne se rend même pas compte… Il ne me reconnaît plus… », déplore M. C. qui souhaite donner au plus vite pour son frère.
Proposée dans ces contextes extrêmes et dramatiques, la transplantation hépatique est nécessairement idéalisée, présentée par nombre de donneurs comme « l’opération de la dernière chance », comme un recours ultime pour contrer la pathologie et une mort sinon imparable. Par le formidable espoir de vie qu’elle insuffle, la perspective de la greffe met ainsi en suspens les mouvements de deuil que la maladie avait amorcés et maintient à bonne distance les affects dépressifs, l’angoisse et les représentations de mort. Ce qui s’annonçait comme une perte de l’autre, et à travers elle une perte de soi, est écarté, dénié avec le don à venir. « C’est aussi pour nous qu’on le fait, dit Mme N. engagée dans le bilan médical avec son frère, c’est dans notre intérêt, on n’est pas du tout prêts à perdre notre père. Maman est morte d’un cancer il y a deux ans, ça a été trop dur, on n’en est pas encore remis dans la famille. » Et cette mise en perspective, où la mort est maintenant prête à être déjouée, justifie à elle seule la décision de donner. Au nom de liens précieux à sauvegarder, au nom d’idéaux profondément ancrés.
Mélange d’intime et de formules toutes faites, d’histoires singulières et de lieux communs, le discours de la plupart des donneurs puise ainsi dans une rhétorique des plus convaincantes, dans une détermination difficile à interroger : « Quand on aime, on ne se pose pas de question. C’est ça un couple, on fait tout ensemble », m’explique Mme S. dont le mari est en attente de greffe. « Si devant vous quelqu’un se noie, vous faites quoi ? me demande Mme R. qui a donné deux ans auparavant pour son frère. Si vous réfléchissez, vous n’y allez pas. Vous ne savez pas si vous nagez assez bien, si vous avez bien digéré, si vous aurez la force de faire l’aller-retour… C’est une situation où il ne faut pas penser. On fonce et c’est tout… »
Et de fait, si la décision s’impose comme une évidence au regard de l’état du receveur, penser et surtout se penser paraît bien complexe pour le donneur, presque hors propos dans ce temps qui précède la greffe. La gravité de ce geste et de ce qu’il implique pour le sujet, le risque vital et les multiples conséquences auxquels il s’expose lors de cette chirurgie majeure sont banalisés, à peine entendus parfois, et ne suscitent pas les hésitations et l’anxiété attendues.
De la même façon, la douleur liée à une opération lourde est minimisée, anticipée comme relative, toujours en comparaison à la souffrance éprouvée par le receveur : « Il y a des gens qui luttent pour survivre, explique M. A., moi je peux bien lutter un peu pour redonner la vie. Sinon mon père est mort. » Comme si les avertissements des chirurgiens et des anesthésistes n’avaient pas prise sur eux, comme si rien ne pouvait à ce moment contrebalancer ce choix ni entamer leur motivation.
Avant la greffe, le discours des donneurs met en jeu, on le voit, des processus psychiques de défense massifs pour évacuer au mieux la dimension conflictuelle de cet acte : « Qu’est-ce que c’est que de donner un bout de bidoche ? », m’interpellait M. O. dans un raccourci éloquent. Et ce geste si évident qu’il devient difficile pour le sujet à penser, laisserait entendre, par transparence, que ne pas donner est justement impensable…
Profession de foi
Cette logique de l’évidence tire sa légitimité du médical qui met par avance à disposition de la famille compétences et technique confirmées. C’est en toute confiance que le futur donneur s’appuie sur l’équipe hospitalière et sur son expérience pour s’engager dans ce projet. Dès les premières consultations, le sujet intègre et reprend à son compte les informations et le vocabulaire consacré, dans une identification partielle au médecin et à sa profession de foi : « Je ne sais pas vraiment pourquoi je veux tellement donner à ma sœur, m’expliquait Mme D., c’est comme… un chirurgien, pourquoi il a voulu faire ce métier, il y a plein de raisons, si vous lui demandez, il ne saura pas quoi vous répondre exactement. » Pour le chirurgien comme pour le donneur, il s’agit de réparer, guérir, sauver, d’adopter une position active face à la maladie de l’autre, face à la mort. Aussi le futur donneur est-il considéré comme un allié thérapeutique et volontaire, faisant front commun avec l’équipe médicale contre la pathologie du receveur.
Ce statut particulier du donneur brouille considérablement la relation traditionnelle entre médecin et patient, le corps atteint par la maladie ne s’interposant pas entre eux. En témoigne la proximité que donneurs et équipe médicale entretiennent fréquemment, dans un « hors cadre » pouvant aller jusqu’au tutoiement ou aux relations amicales. À condition, toutefois, que le candidat au don remplisse un certain nombre de préalables tacites et sans lien direct avec les critères médicaux. Il ne suffit pas que le futur donneur se prête aux examens demandés pour démontrer sa bonne volonté, ni que son foie soit compatible pour la greffe ; plus encore, il doit véritablement incarner les idéaux de l’équipe et faire preuve d’un discours rassurant et « médicalement correct ».
Il est essentiel par exemple pour les chirurgiens que le sujet ait parfaitement assimilé les explications techniques et qu’il puisse les restituer clairement. Un candidat au don qui ne comprend pas bien les informations médicales, ne les retient pas ou ne pose pas suffisamment de questions suscite ainsi rejet et forte anxiété auprès des professionnels. Et en arrière-plan, une intense culpabilité à la perspective d’opérer un sujet qui ne serait pas pleinement conscient de ce qu’il subit, l’ablation même partielle d’un organe intègre, aux seules fins de la santé d’un autre, représentant pour le chirurgien une transgression majeure.
Certains donneurs sont même incités à réaliser des efforts supplémentaires, à perdre du poids pour éliminer la « graisse », la stéatose qui peut enrober le foie et rendre la chirurgie plus délicate. « Vous allez me dire si je suis un ténor ou un bon à rien », « J’attends qu’on me dise si je suis valable », « Mon foie n’est pas correct », entend-on pendant le bilan. De la même manière, l’entretien final avec les experts de l’agence biomédicale peut être vécu comme un véritable examen de passage que certains candidats révisent, le verdict étant accueilli avec soulagement ou déception.
Multiples exigences pour l’élection du donneur, qui figure, à l’issue de ce parcours contraignant et initiatique, le héros promis à un combat d’exception tant sur la scène familiale que médicale.
Maladie du don
Déterminé et acteur aux côtés des médecins des mutations qui se préparent dans son corps et dans celui du proche malade, le futur donneur représente ainsi pour l’hôpital un usager des plus atypiques, sa présence se justifiant paradoxalement par son excellente santé. Pourtant, dès lors qu’un dossier médical est ouvert à son nom et que les examens débutent, il compte parmi les patients du service, sain encore mais déjà familier des salles d’attente et des consultations. Mme D. évoque ce temps d’avant la greffe et l’incidence délétère de cette proximité avec l’hôpital : « Dans la famille, on donne tous nos plaquettes. Mais comme j’avais fait une fibroscopie pour le bilan, je ne pouvais plus donner mon sang pendant plusieurs mois, parce qu’on ne sait jamais, j’étais peut-être malade, à cause des infections qui traînent à l’hôpital. Ça, c’est un mauvais souvenir. » Mme E. se souvient : « Une fois, pour un examen, on m’a demandé : “Vous êtes une patiente ?” Non, pas du tout, je suis en bonne santé, j’ai répondu. » Quelques jours avant la greffe, Mme E. et sa sœur atteinte se sont pourtant rendues à la messe de leur paroisse pour y recevoir ensemble le « sacrement des malades ». M. P., quant à lui, décrit la gêne ressentie lorsque, transporté en brancard entre deux examens, il croisait les regards : « Ils ont dû penser que j’étais malade… Qu’est-ce que ça doit être quand on est vraiment malade !… »
Premiers vacillements du sujet, dans cette course contre la maladie de l’autre qui rattrape inévitablement le donneur lui-même, malgré toutes les tentatives de rationalisation : « Je ne me suis jamais considérée comme malade, seulement comme convalescente », se rappelle Mme R., en dépit des complications qui l’ont tenue plus d’un mois alitée dans le service. Et cette transformation dans le regard que le donneur porte sur lui-même passe aussi par de nouvelles représentations de l’intérieur de son corps.
Définie comme « la vie dans le silence des organes » par R. Leriche2, la santé se traduit couramment par une mise en sommeil de la pensée et des images du corps interne, un « blanc » qui signe le refoulement. Pour le candidat au don, ce « blanc », ce flou, tendent à se dissiper progressivement au fil des consultations et des explications médicales, premier symptôme de cette « maladie du don » qui gagne le sujet : « Avant, l’intérieur de mon corps, je ne l’imaginais pas », rapporte M. H., qui ne pouvait même pas localiser le foie dans son « ventre ».
Mais pour le donneur, c’est l’opération chirurgicale qui marque une bascule radicale, ouvrant une brèche interne, physique et psychique à la fois. Car cette chirurgie, qui ne se justifie en rien pour le corps du sujet lui-même, peut générer d’intenses fantasmes mortifères, d’intrusion et de persécution. Dès le premier entretien, M. C. avait anticipé la violence de l’acte opératoire dans des scénarios de science-fiction : « Vous savez, je suis Spielberg, je me fais des films de dingue : ils vont tirer, pousser, faire tout bouger à l’intérieur, m’ouvrir… C’est ça le pire, quelqu’un va me trifouiller à l’intérieur. » Trois mois après la transplantation, M. H. est toujours sous le coup de l’effroi suscité par cette percée en lui : « Vous imaginez ? [la chirurgienne], elle a vu mes entrailles !… » Indécence de ce geste qui met à jour pour d’autres les parties intimes et intègres du donneur, découvrant une réalité crue, une vérité inédite sur le sujet. Lors de cette visite illicite, le corps sain du donneur est véritablement « trifouillé », « trié » et « fouillé » à la fois. Sur le mode du vol, du cambriolage, du viol parfois même. Mais aussi sur le mode d’une scène primitive, dont le patient serait exclu et objet tout à la fois, ou de l’autopsie, dissection offrant les entrailles du cadavre à la curiosité du médecin.
Fréquemment en postopératoire immédiat, l’importante douleur ressentie ou l’épuisement physique signent ce renversement : c’est par la violence faite à son corps, violence qu’il ne pouvait imaginer par avance que le sujet réapparaît pour lui-même, rattrapé alors dans ses fondements premiers. Mlle M. se souvient du cauchemar auquel elle était aux prises lorsque l’anesthésie s’est dissipée : « On était en train de me tuer en m’enfonçant un couteau dans le ventre, j’ai fait un mouvement brusque, c’est la douleur qui m’a réveillée. » « Les médecins m’ont dit que j’allais être fatigué après, se rappelle M. C. Ça n’a rien à voir avec de la fatigue, eux ils ne savent pas, je ne pouvais pas me préparer à ça. J’ai cru que je ne récupérerais jamais. »
Insolite maladie que celle dont les donneurs sont atteints. Une maladie consentie, décidée, voire revendiquée comme un droit, mais qui, dans l’après-coup, apparaît bien souvent dans toute sa violence.
Effets secondaires
Et ce corps sain effracté par la chirurgie devient pour certains donneurs étranger à lui-même : « Je ne me reconnais plus » revient ainsi régulièrement dans les entretiens, indice de l’importante rupture dans la continuité somato-psychique du sujet. M. H. se sent « flasque, […] ventripotent, […] dérangé par des sensations étrangères », par un intérieur qui se signale maintenant à lui régulièrement. Mme D. s’inquiète : « C’est bizarre, je ne sens plus rien. Mon ventre est mort… » Un an après la greffe, Mlle M. constate : « C’est pas normal, j’ai encore mal là. Ils ne trouvent rien… »
La cicatrice reste le motif de plainte le plus courant pour la gêne qu’elle suscite : « Elle n’est pas belle, vraiment horrible. Elle est toute violette, je ne peux toujours pas la toucher », m’explique Mlle T. « J’ai 36 centimètres de cicatrice, m’annonce M. S., j’ai l’impression d’avoir le ventre coupé en deux. » À la frontière entre le dehors et le dedans, la cicatrice inscrit de façon indélébile l’expérience de cette chirurgie dans la chair : « Si j’y pense pas, ma cicatrice me le rappelle. Elle est toujours très sensible… », dit Mme E. Il n’est d’ailleurs pas rare qu’un donneur montre spontanément sa cicatrice au cours d’un entretien avec la psychologue, exhibant au regard de celle qui l’écoute les stigmates du traumatisme, les blessures du conflit qui se serait joué en lui.
Dans l’après-coup de l’intervention, la plupart des donneurs sont ainsi aux prises avec d’intenses mouvements dépressifs et leur cortège de symptômes, réactionnels et transitoires pour certains, rapidement chroniques pour d’autres : affects dysphoriques, forte angoisse, anhédonie, inhibition générale avec troubles du sommeil, de l’appétit, de la libido… « Je ne suis plus opérationnel », déplore M. C. qui après le don a quitté son amie sans lui donner davantage d’explications. Pour ces donneurs meurtris, ces éprouvés douloureux sont d’autant plus difficiles à tolérer qu’ils sont inattendus et incompréhensibles, en rupture totale avec l’humeur fébrile et exaltée qui depuis plusieurs mois les avaient soutenus dans ce projet.
Et cette irruption soudaine de pensées mortifères, alors même que le corps n’a pas été véritablement traversé par la maladie, laisse bien souvent le sujet démuni. Ainsi Mme E. qui depuis la greffe est sujette à des insomnies, ressassant chaque nuit l’idée du risque encouru : « J’aurais pu mourir… Maintenant j’y pense tout le temps. » Pour M. V., régulièrement en proie à des crises de larmes inexpliquées, il s’agit d’un « véritable deuil à faire », malgré la survie de son frère et la réussite de la transplantation. Depuis des mois, Mlle M. est périodiquement assaillie d’« idées noires », attentive aux moindres manifestations de son corps et appréhendant une « rupture à l’intérieur », annonçant une mort certaine. M. N., quant à lui, révèle avoir pensé à plusieurs reprises au suicide depuis la chirurgie. Car ce moment où le sujet fait retour pour lui-même est marqué par un important remaniement des investissements et du désir, sous le signe inévitable de la perte.
Vécu de mutilation, d’amputation, expérience paradigmatique de la perte d’objet et de l’angoisse de castration, de cette « angoisse rouge » décrite par A. Green dont il lie la destructivité à l’évocation « d’une blessure corporelle associée à un acte sanglant3 ». Souvent, le temps d’avant l’opération est revisité dans une version idéalisée et nostalgique où le sujet était encore unifié, porté par un corps intègre : « Avant, j’étais insouciante. […] J’étais toujours gaie… », se rappelle Mlle M. Par son intensité, l’expérience du don et de la chirurgie risque en effet d’occulter et de recouvrir toute autre scène, réactualisant et cristallisant à elle d’autres vécus douloureux mis en sourdine. Et cette potentialité traumatique peut se révéler de façon imprévisible, dépendant à la fois des aléas médicaux, des suites opératoires et des résultats de la greffe, mais plus encore du fonctionnement psychique du sujet et de son histoire.
L’expérience d’un désaveu
Cette perte inévitable qui peut déstabiliser considérablement et durablement l’équilibre identitaire du donneur, le médical peine à la reconnaître. Ainsi le don de foie est-il présenté aux candidats comme une opération de chirurgie majeure mais dont les effets sont limités et réversibles, le foie récupérant sa fonctionnalité et son volume initiaux à une vitesse proprement incroyable, la masse hépatique conservée ayant déjà doublé huit jours après la chirurgie.
Or, en dépit de ce que soutiennent les médecins, le foie ne « repousse » pas ! « Ils m’ont dit que le foie repoussait, mais c’est pas vraiment ça, ce qu’ils ont enlevé, ça ne reviendra jamais, c’est le reste du foie qui grossit à la place », explique judicieusement Mme D. En effet, le processus de régénération ne s’exerce que sur la partie conservée du foie et cette hypertrophie compensatoire a pour résultat de modifier l’anatomie hépatique dans son ensemble ; en conséquence de quoi le don ne peut se pratiquer qu’une unique fois, un nouveau partage de ce foie transformé devenant par la suite impossible.
Peut-être cette simplification de la part des médecins permet-elle de rendre compte de la prégnance du mythe prométhéen et de la fascination que la vitalité du foie exerce sur eux. Plus certainement, ce raccourci témoigne du malaise pour l’équipe à léser le corps d’un sujet sain dans le but d’en soigner un autre.
De la même façon, l’ablation conjointe de la vésicule biliaire pendant la chirurgie n’est pas annoncée de façon systématique au donneur pendant le bilan. Et cette difficulté à prendre en compte la perte et à la dire pour les médecins, conjuguée à la difficulté à entendre le risque pour les futurs donneurs, expliquent les griefs des uns et des autres après l’opération. Comme par exemple M. H. qui déplore : « J’en veux aux médecins, ils ne m’ont jamais dit que ça allait être aussi dur, ils m’ont présenté ça comme une appendectomie. » De son côté le chirurgien se souvient : « Je lui ai pourtant tout expliqué, il ne voulait absolument rien savoir… »
Par la suite, tout contribue à recouvrir au plus vite cette histoire récente du donneur, à l’occulter : son retour à la santé et son départ de l’hôpital quelques jours après la greffe, la « pousse » fulgurante de son foie, mais aussi les préoccupations continues de l’équipe médicale et des proches pour le receveur dont l’état clinique peut rester encore longtemps précaire. « C’est comme s’il ne s’était rien passé, dit M. F., et pourtant !… »
Une fois opéré et privé d’une partie de son foie, le donneur perdrait ainsi son statut d’exception, laissé rapidement pour compte par ceux qui l’avaient jusque-là entouré et soutenu. Patient de circonstance et soumis au même titre que ses voisins de chambre au scalpel des chirurgiens, le donneur n’est jamais véritablement reconnu comme un « malade » à part entière : « Au début, les médecins et la famille sont aux petits soins, c’est après que c’est dur, quand tout le monde s’en fout », raconte M. P.
La chirurgie marque ainsi une rupture, un renversement dans les représentations, le donneur n’apparaissant plus comme le sujet en pleine santé, déterminé et au premier plan d’un projet d’envergure, mais davantage comme l’auxiliaire d’un autre, l’ayant secondé et servi grâce à un corps affaibli et maintenant inutile. Car si le donneur est sollicité pour les liens affectifs qui l’unissent à son proche malade, la pratique médicale procède aussi d’une logique purement économique, d’une logique d’échanges où le foie figure comme un produit rare : le don intrafamilial est présenté comme une alternative avantageuse à la transplantation avec greffon cadavérique, pour contrer les délais d’attente trop importants dans un contexte de forte pénurie.
Dans cette pensée pragmatique, l’organe et, par extension, le sujet qui le porte sont ainsi réifiés, considérés comme un objet, réduits à une « pièce détachée » en remplacement d’une autre défectueuse. Les explications médicales elles-mêmes portent la marque de cet infléchissement sémantique, renvoyant le corps et l’acte chirurgical à une affaire de « tuyauterie », de « plomberie ». Autre registre métaphorique donc, qui infiltre aussi le discours de certains donneurs. Pour M. C. par exemple, l’opération est référée à la mécanique automobile : « On ne m’a jamais rien ressoudé… Là on m’a enlevé le moteur. » Pour M. I., son foie a servi à sa sœur de « pièce de rechange ».
Si ce glissement lexical évacuant le vivant au profit de l’inanimé témoigne des processus défensifs habituels aux médecins, il tire vers une logique plus mortifère encore dans ce contexte précis, le « donneur vivant » étant implicitement mis en concurrence avec le donneur mort, en lieu et place du cadavre à prélever qui fait alors défaut. De retour sur les lieux de l’opération lors des consultations régulières de contrôle, nombre de donneurs expriment ainsi leur ambivalence envers ceux qui ont été acteurs et témoins de cette expérience des plus troublantes : « Si je vais mal, il n’y a qu’ici que je puisse m’adresser », dit M. B. qui téléphone régulièrement dans le service, entre demande d’aide et revendication. Et ces plaintes du donneur concernant son corps et ses modifications sont bien difficiles à appréhender et à contenir pour l’équipe de chirurgiens, exhortée à intervenir encore, sur un autre registre cependant…
Fictions familiales
Mais ce que les entretiens avec les donneurs font rapidement apparaître, c’est que ces plaintes à l’adresse des médecins viennent redoubler et masquer d’autres plaintes, tenues, elles, au silence. Bien souvent, en effet, les donneurs laissent entendre combien cette perte consentie n’a pas non plus été suffisamment prise en compte et reconnue par leurs proches, et plus particulièrement par le receveur lui-même. Pour M. H. qui a donné pour son père quelques mois plus tôt, la désillusion est d’importance : « Je pensais qu’on allait vivre ça la main dans la main, comme dans les séries télévisées américaines. Ça a été le contraire, tout s’est fait en parallèle, tout a été inversé. C’est moi qui ai dû aller prendre mon père dans les bras la veille de l’opération pour le rassurer. Il n’a rien dit ni avant ni après. Je ne m’attendais pas à un merci mais… Il m’a juste fait un chèque pour que je parte avec ma copine en vacances. » Par la suite, il évoque son enfance et ce père continuellement absent pour ses trois enfants : « Il n’avait aucun contact avec nous, même pas tactile. Ma mère s’occupait de tout, de l’éducation, de l’autorité, lui il se contentait de ramener le pognon… »
Ce qui revient avec une importante fréquence dans les entretiens, c’est le sentiment de déception que les donneurs éprouvent après la chirurgie. Pour expliquer cette déconvenue, l’ingratitude du receveur à leur égard est régulièrement évoquée : nombre de donneurs disent n’avoir jamais été convenablement remerciés pour un geste dont on ne parle plus en famille ou qui est rapidement banalisé. « J’attendais qu’il me remercie. Qu’il soit plus reconnaissant de ce que j’ai fait pour lui… Peut-être que si ça avait été ma sœur, si c’est elle qui avait donné, il l’aurait davantage remerciée », déplore M. N. « Lorsqu’on se dispute, des fois je lui dis : “Je me suis sacrifié pour toi quand même…” “Tu l’as bien voulu, je ne t’ai rien demandé !”, qu’elle me répond », se plaint M. B. Dans l’après-coup, se dévoile ainsi en négatif et par des décalages une autre logique fondant ce geste du don, une logique du fantasme que les rationalisations premières se devaient de tenir secrète. Aussi le don ne représenterait-il pas uniquement pour le donneur l’économie à venir d’une perte précieuse, mais aussi la promesse tacite de gains, de bénéfices narcissiques dans un réseau d’échanges familiaux des plus complexes. Au jeu bien connu du don et de la dette.
Dès la première rencontre avec le chirurgien, M. J. qui se propose de donner pour sa mère plaisante : « Après je vais pouvoir me moquer d’elle et lui demander rémunération pour mon foie ! » De la même manière, M. G. imagine : « Je vais faire une espèce de chantage à ma femme, si elle se remet à boire je lui dirai : après ce que j’ai fait pour toi !… » Une fois la chirurgie passée, peut se dessiner un arrière-plan familial que les premiers entretiens très défensifs n’avaient que partiellement permis d’explorer. Et ces nouvelles constructions plus personnelles offrent un éclairage inédit sur le lien qui unit donneur et receveur et sur les enjeux inconscients d’un tel acte, souvent méconnus jusque-là du sujet lui-même.
Autour du geste à venir, le donneur élabore en effet une fiction personnelle chargée de désirs, de fantasmes de reconnaissance et de réparation sur la scène familiale. Car la proximité physique que cet assemblage des corps opère, ne peut que susciter chez le donneur l’attente de nouvelles proximités, d’une nouvelle mise en forme des liens familiaux. Plus encore peut-être, lorsque des conduites à risque comme l’alcoolisme ou la toxicomanie sont à l’origine de la maladie ou lorsqu’un enfant devenu adulte donne pour l’un de ses parents4.
Nombre d’entretiens qui suivent la transplantation témoignent ainsi des espoirs qui ont fondé ce geste et qui sont pourtant restés lettre morte, désirs « mis en greffe » en l’autre et qui n’ont pas pris : « Ça n’a rien changé entre mon frère et moi. On se voyait très rarement, on se téléphonait très peu. C’est pareil maintenant… », déplore M. K. « Ce que je regrette le plus, dit M. U. qui a donné pour sa mère, c’est qu’ils n’en profitent pas, il n’y a pas eu de déclic. Je croyais qu’ils allaient vivre un peu, sortir, voyager, se rapprocher de nous, être plus “famille”. C’est même pire, il y a de moins en moins de liens. Je suis déçu, vraiment, ma mère, elle, n’en aura pas profité de ce que je lui ai donné. »
Embarras du choix ?
L’épreuve de la chirurgie traversée, nombre de donneurs reviennent ainsi sur cette expérience, interrogeant dans l’après-coup jusqu’aux mobiles du don. Volte-face du donneur qui pour être connues, n’en laissent pas moins les chirurgiens irrités et perplexes. « Cette opération, elle est librement consentie. Il n’y a pas de souci, si je peux donner à ma femme, je veux le faire », annonce M. L. lors d’un premier entretien. Quelques semaines après l’opération et l’échec de la transplantation pour son épouse, il dit au contraire : « De toute façon, ce n’était pas un choix, c’était un non-choix, vraiment par défaut… »
Si cette décision se réclame des liens et des sentiments, certains donneurs laissent entendre que ce choix a été dicté tout autant par le sentiment du devoir, par une injonction interne relayant une « pression sociale », parfois même familiale importante. « Dans une telle situation, on est comme une machine, dit Mme R. qui a donné pour son mari, on est programmé pour ça. Je me suis demandée après si j’aurais pu dire non, je ne sais pas… Je ne crois pas… et puis j’ai été éduquée par des bonnes sœurs, alors l’idée du partage… » « C’est comme un soldat qui sert sa patrie. Il fait son métier. Il doit le faire, il ne peut pas reculer, sinon il est rejeté par son milieu. C’est une question de conscience… de culture », explique Mme X. qui doit donner prochainement pour son fils adulte.
Pour certains, ce choix entre donner et ne pas donner apparaîtrait comme un leurre, la marge de liberté du sujet étant réduite face au dilemme entre laisser mourir l’autre et le faire vivre : « Vous imaginez, savoir que j’aurais pu sauver mon père et ne pas l’avoir fait ? Je ne m’en remettrais jamais, psychologiquement », témoigne M. F. Convoqué au nom d’enjeux vitaux, ce geste s’avère ainsi une évidence parce que ne pas vouloir donner reviendrait dans le fantasme à assumer le meurtre de l’autre. Pour soi, mais aussi aux yeux des autres : « Si je ne donnais pas, je ne pourrais plus me regarder dans une glace, explique M. O., ni regarder mes enfants en face. Ni mes parents non plus. C’est pour eux aussi que je le fais… » M. H. se souvient : « On était trois sur la liste. À la fin du bilan ils ont dit que j’étais le seul apte. Je n’y croyais pas. Vous imaginez ? Qu’est-ce que je pouvais bien faire d’autre… »
Et ce choix prescrit par avance et sans véritable alternative signe l’appartenance du sujet au groupe et à ses idéaux, expression ultime du devoir, d’un altruisme fait de grandeur et de renoncement : il s’agit de « donner de soi », de « payer de sa personne » au sens littéral, d’offrir en « sacrifice » à son proche une part intime et réelle de son corps. En inscrivant le don de foie dans un cadre intrafamilial5, le législateur lui-même fonde le geste sur cet engagement tacite entre membres d’une même famille. Puisque les conjoints ont la possibilité de donner l’un pour l’autre, le don intrafamilial en appelle en effet au partage d’un patrimoine non pas génétique mais avant tout affectif. Comme si être parents proches ouvrait sur une nécessaire proximité des corps justifiant leur combinaison, leur jumelage, comme si l’appartenance à une même famille légitimait l’appropriation et la jouissance des organes au titre de biens indivis.
Consacré par avance à l’autre malade, tant par les dispositions légales que par la pratique chirurgicale, le corps du futur donneur ne lui appartiendrait pas véritablement en propre. Aussi cette décision de donner, tributaire d’injonctions hautement paradoxales, relèverait-elle davantage de la nécessité que du choix. Dans ce contexte, que reste-t-il du « consentement libre et éclairé » que les médecins et les magistrats en dernier lieu cherchent à recueillir auprès du candidat au don6 ? « On me poignarde avec mon accord !… », résume Mme E. en une formule saisissante…
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Happés par l’extraordinaire espoir de sauver leur proche malade et de le ramener à la vie, la plupart des donneurs s’engagent spontanément dans le projet de transplantation hépatique, portés par un dévouement et une détermination difficiles à interroger. Or, l’épreuve de la chirurgie marque un renversement pour le donneur désormais atteint, une bascule inévitable sous le signe de la désillusion et de la perte. Car l’opération revisite de façon inattendue et violente ce qui fonde le sujet dans son narcissisme et dans la relation à l’autre, à partir du corps et de sa mise en partage. Au risque de déstabiliser la construction identitaire du donneur, de le déborder dangereusement, de faire symptôme sur la durée. Dans l’après-coup de l’intervention, peuvent être questionnés les enjeux et les motifs d’un geste complexe, soumettant le sujet et son corps à des logiques qui s’enchevêtrent et se télescopent. Corps chargé d’affects, traversé par le désir et l’inconscient, corps par avance dédié à l’autre, lourd d’histoire et d’attaches, corps-objet et matière, presque dépouille, instrumentalisé par la chirurgie mais plus encore par un discours fait de doubles liens. Et ces remaniements d’importance opérés sur le donneur et sur l’ensemble de ses proches, les équipes médicales en ont méconnu longtemps la portée véritable, mues par une idéalisation de cette technique et un regard tourné avant tout vers le receveur à soigner.
L’écoute de ces sujets meurtris et quelque peu laissés pour compte incite cependant à reconsidérer cette pratique, et engage à réfléchir au cadre et aux dispositifs mis en place pour recevoir, évaluer et accompagner les donneurs, tout au long de ce parcours et bien après. Car aussi admirable et noble ce geste soit-il, le don vivant peut devenir blessure d’âme, dès lors que le sujet n’a pas été entendu et reconnu dans l’inédit de cette expérience.
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Psychologue clinicienne.
- 1.
Ont été réalisés 85 entretiens auprès de 46 futurs donneurs ou donneurs, dans le temps du bilan et jusqu’à sept ans après la transplantation, dans le service de chirurgie viscérale du professeur Belghiti, à l’hôpital Beaujon. À noter que ce travail ne concerne que la clinique « d’adulte à adulte », le don hépatique de parents au bénéfice d’enfants, spécifique à maints égards, n’étant pas abordé directement ici.
- 2.
R. Leriche, cité par G. Canguilhem, dans Essai sur quelques problèmes concernant le normal et le pathologique, Paris, Vrin, 1943.
- 3.
André Green, Narcissisme de vie, narcissisme de mort, Paris, Minuit, 1983, p. 226.
- 4.
Si l’objet de cet article n’est pas de rendre compte dans le détail de la dynamique fantasmatique qui anime le donneur et ses proches, un travail clinique approfondi s’avérerait indispensable pour dégager des constantes, l’origine de la pathologie hépatique ou le lien de parenté par exemple paraissant influencer considérable la portée d’une telle expérience.
- 5.
« Art. L. 1231-1. – Le prélèvement d’organes sur une personne vivante, qui en fait le don, ne peut être opéré que dans l’intérêt thérapeutique direct d’un receveur. Le donneur doit avoir la qualité de père ou mère du receveur. Par dérogation au premier alinéa, peuvent être autorisés à se prêter à un prélèvement d’organe dans l’intérêt thérapeutique direct d’un receveur son conjoint, ses frères ou sœurs, ses fils ou filles, ses grands-parents, ses oncles ou tantes, ses cousins germains et cousines germaines ainsi que le conjoint de son père ou de sa mère. Le donneur peut également être toute personne apportant la preuve d’une vie commune d’au moins deux ans avec le receveur », loi no 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique, titre III.
- 6.
« Le donneur, préalablement informé par le comité d’experts mentionné à l’article L. 1231-3 des risques qu’il encourt et des conséquences éventuelles du prélèvement, doit exprimer son consentement devant le président du tribunal de grande instance ou le magistrat désigné par lui, qui s’assure au préalable que le consentement est libre et éclairé et que le don est conforme aux conditions prévues aux premier et deuxième alinéas. […] Le consentement est révocable sans forme et à tout moment », loi no 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique, titre III.