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Hélène Iswolsky : la Russie, par-delà le tsarisme et le stalinisme
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Hélène Iswolsky : la Russie, par-delà le tsarisme et le stalinisme

La figure d’Hélène Iswolsky est aujourd’hui peu connue. Russe exilée, contrainte par la Révolution d’octobre 1917 à demeurer en France, où son père fut le dernier ambassadeur du tsar à Paris, active participante au bouillonnement intellectuel de l’entre-deux-guerres, une seconde fois exilée aux États-Unis à partir de 1941, amie de Jacques Maritain et de Dorothy Day, « spécialiste des affaires russes » pour la revue Esprit à ses tout débuts, traductrice de Pouchkine et de Berdiaev, son parcours et son œuvre méritent d’être redécouverts. C’est pourquoi Baudoin de Guillebon et Florian Michel, soutenus par les éditions Salvator, ont publié en 2021 Au temps de la lumière, texte autobiographique dans lequel Hélène Iswolsky évoque ses années en France. Paru en anglais aux États-Unis en 1942 avec une préface de Jacques Maritain, traduit à Montréal en 1945, le témoignage d’Hélène Iswolsky est enfin accessible au public français.

Fille de diplomate, Hélène Iswolsky s’installe avec sa famille dans le sud-ouest de la France après la révolution que la jeune Hélène, ne regrettant pas l’ancienne « tyrannie tsariste », considère comme nécessaire pour la Russie, bien qu’elle doive être « dépassée et transcendée en accord avec les idées d’un humanisme authentiquement russe. » L’entre-deux-guerres marque autant le début de sa carrière littéraire dans les cercles intellectuels parisiens qu’une période de quête intérieure, où elle cherche à faire coïncider sa fidélité à la Russie, sa foi renouvelée avec son travail de journaliste et d’écrivaine au sein des plus grandes revues de l’époque, de la Revue de Paris à la Revue des Deux mondes en passant par la Revue de France où elle est alors correspondante pour les questions russes. C’est en 1923, lors d’une retraite à l’abbaye bénédictine Sainte Scholastique, qu’elle se convertit au catholicisme, tout en demeurant attachée au rite oriental. Renouant vite avec le bouillonnement intellectuel et spirituel parisien, elle rencontre Rilke, Claudel, Paul Valéry, Colette, aperçoit même Marcel Proust, et tisse des amitiés : Joseph Kessel, avec qui elle écrit Les Rois aveugles sur les derniers jours des Tsars, ainsi que Charles du Bos, qui l’emmène à la rencontre des intellectuels chrétiens. Entre 1925 et 1930, elle traduit l’œuvre de Pouchkine, et collabore à la NRF. Elle initie les cercles russes en France à la pensée sociale catholique et se joint bientôt aux « postrévolutionnaires russes » pour dénoncer les dérives staliniennes et le « despotisme communiste ».

En 1934, Hélène Iswolsky rencontre Emmanuel Mounier par l’intermédiaire de Jacques Maritain, et collabore cinq années avec la toute jeune revue Esprit en tant que « spécialiste des affaires russes ». Entre 1935 et 1939, elle écrit de nombreux articles, sur des sujets aussi divers que le statut de la femme, l’homme soviétique, la paysannerie russe, le mouvement religieux en U.R.S.S, la tradition communautaire russe ou les sources intellectuelles et historiques du communisme russe. Alors qu’elle s’engage contre la guerre en Espagne, la Seconde Guerre mondiale la contraint à un nouvel exil. Pendant la guerre, elle travaille au bureau français Voice of America aux côtés de Denis de Rougemont, André Breton et Claude Lévi-Strauss. Après la guerre, Hélène Iswolsky milite pour réunir les chrétiens d’Orient et d’Occident et lance le mouvement de l’union dans la revue The Third Hour. Bientôt amie de Dorothy Day, Hélène Iswolsky s’engage dans le mouvement du Catholic Worker. Elle travaille un temps aux bureaux des Nations unies dans le but d’œuvrer pour la paix internationale et fonde dans les années 1960 le centre œcuménique Saint Benoît-Saint Serge. Devenue oblate de l’abbaye bénédictine Regina Laudis, Hélène Iswolsky décède en 1975 à New York sous le nom de sœur Olga.

Photographie d'Hélène Iswolsky à New York, non datée. Collections Helen Gallagher McHugh, archives de l'université de Scranton.

06 décembre 2021  -  Redécouvrir la figure d'Hélène Iswolsky
30 juin 2021  -  Hélène Iswolsky (1896-1975). Itinéraire d’une femme de lettres
septembre 2021  -  Histoire des Quatre. Les postrévolutionnaires russes à Esprit
mars 1939  -  De la Sainte Russie à l'U.R.S.S
juillet 1938  -  Le mouvement religieux en U.R.S.S
juin 1936  -  La femme en U.R.S.S
janvier 1935  -  La tradition communautaire russe