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Dans le même numéro

L'échec de Copenhague en perspective

février 2010

#Divers

Que peut-on dire du résultat des négociations internationales sur le changement climatique qui n’a pas débouché sur l’accord espéré fin 2009 ? Sans enrayer un processus de négociations qui se poursuit, l’occasion de confirmer des engagements a été manquée. Mais quel impact cela aura-t-il sur nos stratégies environnementales, économiques et sur les formes de solidarité internationale qui restent à inventer ?

La 15e Conférence des parties (Cop) à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (Unfcc) s’est achevée, après deux semaines de débats à Copenhague, sur un accord de trois pages, dont les parties ont, selon les termes officiels, seulement « pris note ». Après une longue suite de conférences plus ou moins considérées comme des succès (Kyoto, 1997), des échecs (La Haye, 2000) ou des demi-échecs (Bali, 2007 ; Poznan 2008), cette étape revêtait une importance particulière, devenue hautement symbolique. Le protocole de Kyoto, qui est une application de l’Unfcc, comporte des échéances clés en 2012. Pour rester dans la continuité de ces engagements, le tournant 2010 était vu comme une limite. Après cette mobilisation médiatique et politique qui a marqué 2009, il faudra maintenant attendre le rendez-vous de Mexico, en novembre prochain, pour voir si des conditions d’une poursuite d’engagements sur le mode de ceux pris à Kyoto peuvent encore être fixées.

Énormément a été dit sur les raisons de cet échec ; et je voudrais ici, tout en sélectionnant certains éléments factuels, les replacer dans le contexte où devait s’inscrire l’accord, nettement plus ambitieux, recherché. Je les répartirai en trois catégories : enjeux climatiques, inégalités mondiales, problèmes de gouvernance. Enfin, je tenterai de réfléchir aux enjeux plus larges encore de l’intégration des questions climatiques dans les transformations politiques et sociales.

Enjeux climatiques

Souvent évoqué et pourtant encore insuffisamment compris par le public, esquissons le « mur » du climat sur lequel la trajectoire humaine mondiale est en passe de se heurter avec fracas. On mesure actuellement une concentration de 430 ppm équivalents CO2 de gaz à effet de serre dans l’atmosphère (dont 387 de CO2), et ce chiffre augmente d’environ 2 ppm par an, ce qui nous mènera à 450 ppm dès 2020, si l’évolution continue de la sorte. Or, plutôt que de ralentir, la tendance s’accélère : depuis la conférence de Kyoto en 1997, les émissions mondiales annuelles ont… augmenté de 20% (même si celles de l’Union européenne et de certains pays ont diminué par rapport à 1990). Il faut savoir que 450 ppm est l’objectif de stabilisation visé actuellement par l’Europe1, son dépassement devrait être le plus court possible, et pour cela il faut réaliser des réductions fortes et rapides d’émissions.

Pourquoi un dépassement de 450 ppm doit-il nous alarmer ? Parce qu’il amène la planète au-dessus d’un réchauffement de 2 oC par rapport aux périodes préindustrielles. Vu la dynamique actuelle des émissions, peu d’experts croient encore que cette limite sera respectée. Quelle sera l’ampleur du réchauffement au xxie siècle ? 3, 4, 5, 6, voire 7 oC ? Le Groupe intergouvernemental d’études sur le climat, qui a étudié dans son rapport de 2007 les conséquences de ces différentes élévations de température, n’a pas voulu s’aventurer à décrire ce qui se passerait au-dessus de 5 oC, tant les effets d’une augmentation de 2 ou 3 oC apparaissent déjà redoutables. L’expression « deux degrés » a été actée à la première page de l’accord de Copenhague, mais sans référence à une période de départ, et sans échéance. Faut-il être exagérément méfiant, de peur qu’une échéance vienne ultérieurement s’y accoler, en s’inspirant du sommet du G8 en juillet 2009 (Aquila), où la déclaration des chefs d’État visait à respecter une limite de « 2 oC en 2050 » ? (Alors que l’Union européenne avait affirmé jusqu’à il y a peu un objectif de deux degrés maximum pour 2100.) Autre marge de négociation ultérieure autour de ces termes fétiches de « deux degrés » : les référer à la température actuelle, supérieure d’environ 0, 7 oC à la situation préindustrielle. L’accord renvoie toutefois aux « vues scientifiques ». De nombreuses versions draft des accords mentionnaient d’ailleurs la nécessité de se référer non seulement à l’évolution des travaux scientifiques, mais à celle des observations.

Le paradoxe vient précisément de ce que le rendez-vous de Copenhague, si frileux dans ses décisions finales, a été tout de même marqué par des témoignages venus de toutes parts sur les effets tangibles d’un réchauffement déjà à l’œuvre, que ce soit dans des discours de chefs d’État ou des reportages de journalistes ou d’associations. Paradoxe qui n’est évidemment qu’apparent, car respecter lesdites limites atmosphériques signifie pour les pays industrialisés diviser par 5 ou 10 leurs émissions avant 2050, et les réduire de 30% d’ici dix ans seulement. Quant aux pays en développement, sachant qu’ils seraient à l’origine de 90% des émissions supplémentaires attendues d’ici 2050, date à laquelle les émissions mondiales devraient en fait avoir diminué de moitié (après un pic mondial souhaité en 2015, soit dans cinq ans…), on mesure à quel point ces objectifs représentent pour eux des modifications fondamentales.

Pour en donner une illustration, voyons ce qu’a réalisé l’Europe depuis Kyoto. Une réduction de 7% sur vingt ans par rapport aux émissions de 1990, due essentiellement à la fermeture d’usines polluantes à l’est de l’Allemagne. Passer à 20% entre 2010 et 2020 (en comptant les 7% déjà réalisés, soit une réduction d’environ 13% supplémentaires) signifie quadrupler cet effort (deux fois plus en deux fois moins de temps), sachant que les low hanging fruits (les économies les plus faciles à réaliser) sont déjà engrangés. Quant aux 30% affichés comme l’objectif maximal de l’Union européenne (des Ong demandaient 40%), il supposerait de multiplier par 6 ou 7 l’intensité de l’effort réalisé pour satisfaire Kyoto. Dernier repère, majeur, dans ces données matérielles : la crise économique que nous venons de connaître a décalé le rythme des émissions de deux ans tout au plus. Certes il y a eu des baisses, mais à un fort coût social et politique, et leurs effets ne retarderont le réchauffement qu’assez marginalement en définitive si les trajectoires reprennent leur cours comme avant la crise.

Ces quelques repères permettent aussi de mieux comprendre l’intérêt grandissant pour le développement de techniques, agronomiques ou autres (géo-ingénierie) visant à retirer du CO2 de l’atmosphère. Les scénarios officiels envisagent non seulement de faire de la capture de carbone et du stockage sous terre pour des usines de production électrique à base de charbon (un dispositif majeur des stratégies actuelles, bien qu’encore très peu pratiqué), mais aussi de séquestrer du carbone issu de l’incinération de végétaux. Cela permettrait d’enfouir dans le sol le carbone atmosphérique capté par les végétaux lors de leur croissance. En outre, il faudrait non seulement arrêter la déforestation, mais pratiquer une reforestation importante pour conserver du CO2 dans les arbres ainsi que dans les sols qui sont des milieux de stockage importants. Il y a d’autres pistes, mais elles restent actuellement moins concrètes encore, ce qui nous ramène aux deux piliers de la convention sur les changements climatiques : diminuer les émissions et s’adapter aux effets des changements.

En matière d’adaptation, la situation des pays riches a été peu discutée à Copenhague. Un certain nombre d’entre eux, pourtant, commencent à élaborer des stratégies à ce sujet, y compris dans les villes. Cette adaptation nécessaire devra intégrer des menaces mais aussi des opportunités (tourisme, changements de métiers…). Mais ce sont bien sûr les pays en zone équatoriale et subsaharienne, les plus vulnérables, qui ont retenu l’attention. D’où des demandes d’aide, dont l’accord de Copenhague se fait le relais : de nouvelles ressources seront fournies par les pays développés à hauteur de 30 milliards de dollars pour la période 2010-2012, en priorité vers les pays les plus pauvres et les plus exposés. De plus, les pays développés « s’engagent à mobiliser ensemble 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 pour répondre aux besoins des pays en développement ».

Inégalités

Les inégalités fondamentales entre pays dans la responsabilité des émissions de gaz à effet de serre sont bien connues. Ainsi, par exemple, les populations vivant dans les cent pays qui seront les plus affectés par les changements climatiques seraient responsables de 3% seulement des émissions mondiales2. À l’autre bout de l’échelle, on a beaucoup parlé du G2, États-Unis et Chine, les deux plus gros émetteurs (plus de 40% du total), et de l’Union européenne proportionnellement moins polluante par unité de richesse, mais dotée d’une forte responsabilité historique. Entre ces pôles, s’étale une diversité de situations et d’enjeux, avec des pays comme l’Indonésie, énorme contributeur par sa déforestation, des pays à industrialisation moyenne en phase de croissance, de petites îles menacées d’immersion, etc. La fiction traditionnelle onusienne d’un bloc de « pays en développement » montre ici ses limites. On pense en particulier aux transferts de technologies. Au sein des 100 milliards par an, dont il est question dans l’accord, une partie y sera consacrée, et ce n’est là d’ailleurs qu’une fraction de ce qui serait nécessaire. Pour la Banque mondiale, les besoins de financement pour la prévention se monteraient à 400 milliards de dollars par an en 2030, tandis que pour l’Agence internationale de l’énergie, on devrait investir pas moins de 10 000 milliards de dollars d’ici à 2030 pour concrétiser le scénario de 450 ppm. Il est évident qu’une bonne part de ces questions technologiques aujourd’hui, loin d’obéir à l’ancien schéma de l’aide au développement, met en jeu des questions de compétition très complexes entre pays de l’Ocde et pays émergents sur des secteurs porteurs.

Durant toute l’année 2009, les représentants des États du monde se sont efforcés de préparer l’accord de Copenhague lors de réunions intermédiaires, en dépit de tout ce qui sépare ces situations contrastées autant qu’interdépendantes. Les échos de ces préparatifs étaient peu encourageants, et la situation paraissait bloquée à de nombreux niveaux. De fait, les délégations espéraient des derniers jours de la conférence et de l’arrivée d’un nombre record de chefs d’État un déblocage, qui n’a pas eu lieu. Jusqu’à la fin, les délégations ont négocié sur deux textes en parallèle. L’un, basé sur le protocole de Kyoto, cherchait à établir les conditions d’une seconde période d’engagement. Ce document avait les faveurs de pays en développement, en particulier les plus pauvres, étant donné qu’il était contraignant à l’égard des pays développés et ne formulait pas d’exigences envers les pays peu émetteurs. L’autre texte, basé directement sur la convention des Nations unies, permettait d’inclure sur des bases différentes tous les pays, y compris les États-Unis et de grands pays émergents. En définitive, un troisième texte « politique » est venu s’ajouter et c’est celui qui constitue finalement l’accord de Copenhague.

Gouvernance

L’organisation danoise des débats a été beaucoup critiquée, ce qui pourrait affaiblir le début du mandat de la nouvelle Commissaire européenne à l’action climatique, Connie Hedegaard, remplacée d’ailleurs les derniers jours dans sa fonction de présidente de la conférence par le Premier ministre danois. En outre, les restrictions sévères apportées à la participation des Ong (certains participants ont dû faire plus de dix heures de file d’attente et, durant les derniers jours, seule une petite fraction des Ong présentes a été admise dans l’enceinte du Bella Center) sont inhabituelles dans les Cop précédentes. Au-delà, c’est bien sûr le problème de la décision onusienne à l’unanimité qui a été discuté. Cette enceinte permet la prise de parole et la participation mondiale, ce qui rééquilibre un peu le rapport de force d’ordinairement très défavorable aux petites nations. Les blocages dépendent des dossiers et, dans ce cas, les raisons ne manquaient pas. Plus spécifiquement, la position politique européenne a également été scrutée, à la fois dans ses faiblesses éventuelles de coordination interne et sa place dans le concert des nations. S’il est vrai que certains pays européens se sont également exprimés à titre individuel – c’est le cas de l’initiative franco-africaine dont le statut vis-à-vis de la position européenne n’était pas clair –, il n’est pas sûr que ces tiraillements aient joué un rôle majeur. Quant à la supposée faiblesse de l’Europe dans la décision finale, il faut apprécier combien sa place a changé depuis la conférence de Kyoto : sans les États-Unis et avec des pays émergents peu concernés par les objectifs de réduction, l’Union européenne était alors au centre de la décision avec le Japon et quelques grands pays industrialisés. Ce n’est plus le cas. Néanmoins, les engagements clairs de l’Europe quant aux réductions d’émission ont joué un rôle certain dans toute la dynamique. Une erreur de communication vient peut-être de l’impression souvent donnée en Europe, y compris par M. Barroso, que Copenhague ne pouvait pas se conclure sur un échec.

Mais, au-delà du texte lui-même et de futurs accords possibles, des problèmes plus fondamentaux de gouvernance des changements climatiques se posent tant au niveau de l’adaptation que de leur prévention. Pour le premier point, on peut citer en particulier la faiblesse de la gouvernance interne des pays pauvres qui va handicaper la distribution des fonds vers les populations concernées. Quels acteurs de terrain vont aider les agriculteurs à adapter leurs semences, leurs habitats, à modifier l’irrigation ? Par quelles institutions et selon quelles règles démocratiques, des montants considérables vont-ils pouvoir transiter vers une multitude de villages et de quartiers urbains où les structures étatiques sont très peu présentes ? Les ratés considérables de l’action publique dans le pays le plus riche de la planète avant, pendant et après l’ouragan Katrina en 2005 peuvent nous rendre circonspects. L’adaptation est loin de n’être qu’une question de montants financiers, au-delà des difficultés considérables pour mettre ceux-ci à disposition. Elle s’intègre dans des processus politiques au sens large par lesquels les sociétés font face à des problèmes divers qui affectent les populations, dont celui du climat représentera progressivement une part croissante dans certaines régions. L’enjeu est donc encore une fois très vaste ici aussi.

Il l’est également, en matière de prévention, pour ce qu’on a appelé la « finance du carbone ». Sur ce terrain, Copenhague apparaissait comme un rendez-vous clé pour donner des signaux aux investisseurs sur les prix à court et moyen terme de la tonne de carbone. Ce prix, dépendant au premier chef de conventions comme celles de Kyoto et des politiques nationales ou régionales, constitue un facteur déterminant pour encourager des investissements en énergies renouvelables et en efficacité énergétique. Début 2010, la perspective d’un marché du carbone mondial s’est éloignée, peut-être pour longtemps, du fait de contraintes différentes pesant sur des régions peu coordonnées. En outre, lors de la conférence, le marché de quotas de CO2 entre États, qui est une pièce maîtresse du système en vigueur, a été critiqué pour la largesse avec laquelle les quotas ont été initialement attribués, et pour son manque de traçabilité, pouvant mener selon certains à de nouvelles formes de spéculation. La voie d’une taxe sur le CO2 à la production ou aux frontières pourrait gagner du terrain à l’avenir3.

Le futur proche est en tout cas laissé aux engagements nationaux. Avant le 31 janvier 2010, il est prévu par l’accord de Copenhague que des objectifs de réduction soient formulés, à l’horizon 2020 pour les pays riches, et selon des périodes à définir pour les pays en développement. De tels engagements verront très probablement le jour, étant donné les annonces unilatérales déjà formulées. De toute façon la voie nationale, qui est le réflexe de base classique, se poursuivra et s’approfondira. Ira-t-on plus loin ? Le passé montre qu’il y a des progressions de conférence en conférence, et si l’on veut faire montre d’optimisme (en dépit du contre-la-montre atmosphérique rappelé en début d’article), on peut imaginer que ce mouvement s’accélère dans certains pays. Le tournant de la politique américaine pourrait porter plus de fruits avec le temps, de même que l’engagement de la Chine dans les technologies « vertes ». Des arrangements techniques concernant les financements, les transferts de technologie, la propriété intellectuelle pourraient progresser, diminuant les entraves à la conclusion d’accords plus sérieux. Si le prix du pétrole et du gaz devait remonter, cela ne manquera pas de rappeler la grande dépendance des pays aux énergies fossiles (en particulier en Europe, qui les importera de façon croissante), et stimulera les acteurs à investir dans les énergies renouvelables et les économies d’énergie.

Climat, politique et changement social

Outre les résultats dont il a été question, une conférence majeure comme celle de Copenhague est aussi l’occasion d’écouter les chefs d’État et représentants du monde entier s’exprimer en session plénière à propos de leur vision et de leur stratégie. Variations renouvelées de discours mariant les critères éthiques, les intérêts économiques, les arguments historiques, politiques et scientifiques4.

Dans cet exercice, le président Sarkozy s’est montré volontariste comme à son habitude en rythmant son intervention de la phrase « qui osera » (refuser un accord), répétée plus d’une quinzaine de fois. Obama a déçu les Européens, mais a sans doute été conforme à ses engagements domestiques. Des voix plus discordantes ont également bénéficié de la tribune. Le président Ahmadinejad a plaidé ouvertement en faveur du nucléaire en tant qu’énergie ne dégageant pas de CO2, mais aussi pour les valeurs religieuses permettant de sortir d’une culture consumériste nuisible à l’environnement. Chavez a été applaudi avec sa formule : « Si le climat était une banque, les pays riches l’auraient déjà sauvé. » Il a appuyé le mot d’ordre de la manifestation des associations à Copenhague : « Changez le système, pas le climat », en attaquant le capitalisme pour ses méfaits en matière d’environnement, et citant même un auteur français, Hervé Kempf. Avec Morales et le représentant de Cuba notamment, Chavez a appelé à ne pas signer l’accord « non démocratique », reflet de l’ordre du monde. Dernier exemple, Mohammed Nasheed, le charismatique président des Maldives, île fort exposée, a développé des arguments fondés sur les droits de l’homme, l’engagement et le volontarisme, proches de beaucoup de positions d’Ong. La large présence de militants jeunes et informés au sein des délégations des Ong a marqué la conférence. Nul doute que l’échec de la conférence va susciter en interne des discussions sur les stratégies de ces associations, où l’on perçoit des appels à plus de radicalisme.

Lors de ce type de sommet se tiennent également de nombreux séminaires (side events), qui ne sont pas les moins intéressants pour percevoir les enjeux en profondeur. Il était frappant de constater qu’un nombre croissant de problématiques de développement commence à être élaboré en rapport avec des questions climatiques : problèmes de santé (vecteurs de maladie, désastres, eau…), agriculture et alimentation, assurances, rôle des femmes dans la gouvernance, migrations (elles augmentent tandis que les frontières se referment), innovation, énergie…

Tous ces champs de mise en relation s’ouvrent en même temps, au point qu’on aurait pu fictivement se prendre à imaginer un monde où le changement climatique n’aurait pas lieu, comme un endroit où bien des problèmes seraient réglés. Il n’en est évidemment rien. L’enjeu de ces prochaines années va être de faire face à ces menaces en les intégrant progressivement dans des pensées politiques efficaces, sans que ces mots d’ordre n’écrasent les autres problèmes de leur charge symbolique et spectaculaire, et qui plus est de façon stérile et culpabilisatrice. Penser la situation présente, dans son caractère inédit, et mesurer les possibilités de changements, sera une fois de plus un impératif de premier ordre.

  • *.

    Professeur à l’Université libre de Bruxelles, où il dirige le Centre d’études du développement durable (Igeat), il enseigne aussi à l’Iep-Paris. Voir son précédent article : « Changer les comportements : une utopie ? », Esprit, décembre 2009.

  • 1.

    Cet objectif continue à être fortement discuté : pour certains, il ne concernerait que le CO2 seul ; pour d’autres, l’objectif est trop laxiste et il faudrait viser 350 ppm. Il y a seulement 2 quelques années, la limite visée était de 550 ppm, mais les observations et les modèles ont conduit à revoir cet objectif de manière drastique. Edwin Zaccai, compte rendu du livre de Tim Flannery, les Faiseurs de pluie. Comprendre et préserver l’équilibre climatique (2005, trad. fr. Paris, Le Seuil, coll. « Points », 2006), paru en 2007 dans Développement durable et Territoires, mis en ligne le 1er février 2008 (http://developpementdurable.revues.org/index4783.html).

  • 2.

    www.germanwatch.org

  • 3.

    Défendues par des Ong, ces positions se retrouvent aussi sous la plume d’un climatologue influent comme James Hansen, “Cap and Fade”, New York Times, 7 décembre 2009.

  • 4.

    Ces interventions ainsi qu’un certain nombre de conférences de presse sont visibles sur le site www.unfcc.int, voir “Virtual Participation in COP 15”.