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Notes de lecture

À travers le mur. Un conte et trois paraboles de Hannah Arendt, précédés de Martha Arendt, Notre enfant

Édition de Karin Biro, traduction de Diane Meur

février 2018

#Divers

Faut-il publier tous les inédits et fonds de tiroir des écrivains qui ont marqué le xxe siècle ? Ce livre compile des textes de nature et de longueur hétérogènes : le journal tenu par Martha, la mère de Hannah Arendt, lorsque cette dernière était enfant, un conte écrit par Hannah Arendt à Berlin en 1929, puis trois textes très courts et énigmatiques rédigés à Paris autour de 1938 et enfin un essai de Karin Biro, à qui l’on doit déjà une édition des poèmes de Hannah Arendt (Heureux celui qui n’a pas de patrie, Payot, 2015). Le journal, publié sous forme bilingue allemand-français, n’a aucun intérêt, pas plus que les tentatives de justification des responsables éditoriaux, qui jouent sur la corde sensible de l’amour maternel. Le prix du volume est exorbitant pour un livre qui aurait pu être réduit à moins de cent pages et à un coût modique. Cela est d’autant plus navrant que l’essai de Karin Biro est tout à fait valable et écrit avec clarté. En outre, curieusement, le seul texte conséquent de ce recueil, le conte intitulé « Les sages animaux », n’est guère annoncé dans le titre ni en quatrième de couverture. Pourtant, Karin Biro en propose une lecture sérieuse, en contexte et sans surinterprétation, en rappelant les règles du genre (roman initiatique, rites de passages entre l’enfance et l’âge adulte, symbolique des nombres, etc.), les similitudes avec le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède publié par Selma Lagerlöf l’année de la naissance de Hannah Arendt et les enjeux de la littérature romantique dans son cercle intellectuel. Les textes intitulés « Métaphore… La porte », « À travers le mur » et « Le poids ôté du cœur » ne se voient pas attribuer d’explication unilatérale, mais ils se rattachent aux poèmes rédigés par Hannah Arendt après avoir fui l’Allemagne nazie. Exil, frontière, perte, enfermement, nostalgie, Sehnsucht : Karin Biro conclut en passant en revue les lieux de sociabilité de Hannah Arendt dans le Paris disparu des années 1930.

Emmanuel Delille

Payot, 2017
224 p. 20 €