
Les manifestations noires
Femmes rebelles de Pologne
Le nouveau pouvoir national-conservateur s’en prend aux droits des femmes, que les femmes, en masse, défendent dans la rue. Mais le mouvement féministe polonais reste faible et attaché à une vision patriotique de la femme.
La célébration, en 2018, du centenaire de l’indépendance de la Pologne a coïncidé avec un autre moment historique : la conquête par les femmes polonaises du droit de vote. Deux expositions à Varsovie ont fêté ce double événement. Au Musée national, celle intitulée En criant : la Pologne ! Indépendance 1918 a montré un pays habité uniquement par des hommes qui rêvaient de femmes fantasmées. La seconde, présentée au Musée d’art contemporain sous le titre Indépendantes. Les femmes et le discours national, réunissait peu d’œuvres d’artistes polonaises. Elle exploitait en revanche les métaphores du post-colonialisme, de l’esclavage et du capitalisme. Comme si, au croisement de la féminité et de la polonité, il n’y avait rien d’autre à saisir[1].
L’amnésie absolue, ou les femmes-victimes
Une telle situation ne signifie pas, bien entendu, l’inexistence en Pologne d’un excellent art critique ou politique créé par des femmes. Elle traduit le fait que les œuvres et les artistes souffrent de « l’amnésie absolue[2] ». Face au manque systématique de réflexion et de mémoire sur la résistance féminine, la révolte en Pologne est toujours à recommencer. D’où cette absence ressentie par les visiteurs des musées : on pouvait voir les femmes victimes d’exclusion et d’un discours politique empreint de violence,