Les choix de l’acteur politique régional. (Entretien)
La région est-elle le territoire approprié de la métropole ? Le président de la région Île-de-France l’a souvent affirmé. Mais le débat sur le Grand Paris devrait fournir l’occasion de revoir à la hausse les missions de la Région, ses relations avec un État qui se veut plus contrôleur mais aussi avec la mairie de Paris. Bref, il n’est plus concevable d’opposer le Francilien au Parisien.
Esprit – Une lecture uniquement politique des dernières municipales (renforcement de la gauche municipale) pourrait donner l’impression d’un renforcement du local et des collectivités territoriales par rapport à l’État. Pourtant, l’État se montre aussi très offensif sur la question de l’aménagement régional avec la création d’un secrétariat d’État au développement de la Région Capitale. Comment caractériser dès lors le nouvel équilibre à venir entre les collectivités territoriales et l’État ?
Jean-Paul Huchon – Un nouvel équilibre entre État et collectivités ? J’y suis très favorable. Et, en dépit des tentations recentralisatrices, voire bonapartistes, à l’œuvre, ce devrait être aussi l’intérêt bien compris de l’État. Que l’on parle croissance économique, développement social ou nouvelle donne environnementale, la dimension territoriale est devenue incontournable. Rappelons que plus de 75 % de l’investissement public est désormais réalisé par les collectivités locales, au premier rang desquelles les régions.
Mais ce nouvel équilibre suppose, pour les collectivités, un partenariat clarifié et stable avec l’État. Or, sa « doctrine territoriale » est peu claire, tout particulièrement pour ce qui est de la Région Capitale. J’irais même jusqu’à dire que l’État est triplement empêché. D’un côté, au nom d’une conception très datée de l’aménagement du territoire, il continue à régulièrement pénaliser l’Île-de-France, pourtant moteur décisif de la croissance nationale. La récente annonce d’une possible délocalisation de l’Insee est ainsi le dernier avatar de ce que certains ont qualifié de « disqualification francilienne » (Laurent Davezies) ; disqualification qu’aucune autre métropole européenne n’a à subir. De l’autre, l’État tend à gérer par à-coups les portions, très conséquentes, du territoire francilien dont il est propriétaire ou qu’il maîtrise à travers ses établissements publics ou les grandes entreprises nationales. Les difficultés du pôle stratégique qu’est La Défense ou les retards dans le développement du plateau de Saclay sont directement liés à des atermoiements patrimoniaux et pécuniaires. Si l’on ajoute, enfin, le conflit politique permanent avec l’exécutif régional, dans une région longtemps considérée par la droite comme une véritable chasse gardée et désormais à gauche, il est actuellement très difficile de s’accorder sur ce nouvel équilibre.
Bien entendu, s’opposent ici des conceptions différentes, non seulement de la décentralisation mais aussi de l’inscription de la métropole francilienne dans la globalisation. Plutôt qu’une stratégie de niches ou de coups territoriaux supposés entraîner le reste du territoire régional, une sorte d’attractivité en ghettos, il faut privilégier un système faisant de l’ensemble du territoire métropolitain un unique bassin d’emplois, de compétences et de production. C’est pourquoi la question des inégalités territoriales est si cruciale. C’est toute la vision portée par le projet de schéma directeur (Sdrif) que nous venons d’adopter dans sa forme définitive.
Une région dans la mondialisation
Si l’on peut définir la métropole comme un espace destiné à articuler le global et le local au niveau d’une grande agglomération, la région met-elle suffisamment en avant sa capacité à « pacifier » des flux ? Si la région/métropole est une constellation de centralités et de pôles, son rôle majeur dans le contexte du « nouveau monde industriel » (Pierre Veltz) n’est-il pas d’être le moteur d’une internationalisation qui ne soit pas une simple adaptation au marché du savoir, de la recherche ou du travail ? En quoi la région peut-elle contrer le mouvement d’adaptation retardé à l’économie mondiale ?
Je conteste l’idée d’un mouvement retardé au regard de la mondialisation : nous sommes en plein dedans ! Pour le meilleur – la part des étudiants et chercheurs étrangers dans nos établissements par exemple – ou pour le plus difficile – les très fortes incertitudes pesant sur certains pans de l’appareil productif notamment. En revanche, si je reprends votre formule de « flux pacifiés », il est vrai que nous n’avons pas encore collectivement réussi, y compris pour les raisons évoquées précédemment, à construire un système mutualisé entre ceux qui y gagnent et ceux qui y perdent ou en sont exclus ; une mutualisation aux dimensions territoriales particulières, y compris en Île-de-France pourtant très insérée dans l’économie globale : les gains mais aussi l’incertitude économique qu’apporte la globalisation différencient très fortement territoires exposés et territoires protégés.
Les collectivités territoriales, particulièrement la région, en Île-de-France mais aussi dans les autres grandes régions urbaines, ont un rôle spécifique à jouer. Les mécanismes nationaux de redistribution, dont l’État est garant, ne suffisent plus et ne créent pas nécessairement de plus-value et de cohésion territoriale durable ; ils n’apportent pas les moyens d’une intégration de tous dans cette nouvelle donne économique comme en témoigne l’aggravation des disparités en Île-de-France.
Le rôle spécifique des collectivités consiste tout d’abord à développer les services collectifs « locaux » permettant de répondre à cette nouvelle donne. Il s’agit de services particulièrement cruciaux comme les transports ou le logement, facteurs clefs dans la concurrence entre métropoles mondiales, mais aussi bien sûr tout ce qui touche à la formation, aux compétences, à la recherche, véritables assurances sur l’avenir. Ceci représente des investissements considérables, de plusieurs dizaines de milliards d’euros, engagés aujourd’hui particulièrement par les régions.
Ensuite, les collectivités territoriales sont particulièrement bien positionnées pour accompagner voire susciter des regroupements d’acteurs qu’il s’agisse de communautés territoriales ou de communautés professionnelles, là encore à des fins de mutualisation. Les pôles de compétitivité ou encore les pôles de recherche et d’enseignement supérieur (Pres) en sont un bon exemple mais l’on peut citer aussi, plus récemment, la création par la région du centre régional du design, regroupant écoles, professionnels et collectivités.
Enfin, il est décisif pour une métropole de valoriser ses atouts spécifiques et plus généralement son identité propre dans un monde global. L’innovation en matière d’écologie urbaine, qu’il s’agisse de mobilité, de logistique, de construction, d’énergie, de nouvelle gestion environnementale, de santé, de numérique, de services aux personnes, etc. pourrait devenir à la fois une marque à l’international et un fil conducteur interne, la métropole urbaine qu’est l’Île-de-France constituant un laboratoire grandeur nature.
La région et les acteurs régionaux
Si l’on associe la région à la métropole, cela signifie-t-il que la région se confond institutionnellement avec un territoire précis ? Ou bien la région n’est-elle pas l’acteur d’une dynamique métropolitaine pouvant être portée par d’autres acteurs et institutions ?
Je sais bien que du point de vue des spécialistes, urbanistes ou géographes, le périmètre administratif régional ne correspond pas à un espace d’évidence. C’est leur métier que de mettre en lumière les différentes échelles possibles de la ville et, plus complexe encore, des métropoles contemporaines. Le propre de l’urbain n’est-il pas d’ailleurs de déborder constamment les frontières qu’on lui assigne ?
À quelques exceptions près, il n’en demeure pas moins que le périmètre de l’Île-de-France coïncide assez bien avec, pour le dire simplement, la région parisienne, telle qu’elle est vécue par ses habitants ou perçue à l’étranger. S’y concentrent à la fois l’ensemble de l’espace urbain qui s’est développé en continu autour de Paris et l’essentiel des sites nécessaires au bon fonctionnement métropolitain interne et externe (plates-formes aéroportuaires, logistiques mais aussi pôles touristiques internationaux, espaces naturels, etc.). Et s’il fallait poursuivre dans cette question des limites, nécessairement sans fin, je dirais que ce n’est, par exemple, pas le cas du Grand Londres…
Dire que « la métropole, c’est la région », c’est d’abord rappeler ce lien, cette interdépendance entre l’agglomération (en gros quelque 400 communes autour de Paris), et les territoires environnants qu’il s’agisse de Roissy, du plateau scientifique de Saclay ou encore de la forêt de Fontainebleau. Et ensuite, comme vous m’y invitez, de mettre en lumière un système collectif, composé de multiples acteurs dont le point commun est cet intérêt métropolitain à la fois interne (la région urbaine) et connecté à l’extérieur (la région métropole).
Dans un premier temps la région (représentant les Franciliens) a donné l’impression de s’en prendre à Paris intra-muros (les Parisiens) ? Ce bras de fer n’a-t-il pas été une erreur dans la mesure où la région n’existe pas sans son centre historique ? Aujourd’hui la confrontation avec l’État (voir les propos de Christian Blanc sur le Sdrif) ne risque-t-il pas de reconduire ce scénario d’une région confrontée à un acteur/ adversaire politique ?
Historiquement, la tension entre région et ville centre est une vieille affaire. Si la décentralisation à la française lui confère une certaine couleur locale, on la retrouve toutefois à l’œuvre dans nombre de métropoles internationales ; que l’on songe aux conflits récurrents entre la ville de New York et l’État du même nom, aux crises institutionnelles et politiques qu’a connues Barcelone, le cas londonien étant, en l’absence de commune centre, caractérisé par une forte tension avec l’État.
Mais n’en déplaise aux gazettes, il n’y a pas de bras de fer avec Paris ! Les négociations peuvent être rudes, c’est certain ; et d’ailleurs, ce n’est pas qu’avec Paris, je vous rassure… Les accords n’en sont pas moins solides. Parce que nous partageons un même projet politique aux traductions très concrètes en matière de logement, d’urbanisme ou encore de péréquation financière… Et parce qu’au plan territorial Paris s’est ouvert sur son agglomération, la région a cessé de tourner le dos à son centre. Là encore, différents chantiers d’envergure l’attestent : le plan de transports, la politique de tourisme, l’enseignement supérieur et la recherche par exemple ; d’autres, par exemple dans le champ de l’attractivité internationale, sont à renforcer.
C’est la force aujourd’hui de la coalition francilienne. Paris, mais également les autres conseils généraux, les grandes agglomérations et la région tiennent chacun une part de la métropole et sont obligés à la coopération. Le fonctionnement du Syndicat des transports d’Île-de-France (Stif) en est la meilleure illustration : depuis sa décentralisation, non seulement la région, Paris et les départements ont doublé leur contribution mais la quasi-totalité des décisions a été prise à l’unanimité.
Comment faire métropole
Dans cette optique, la région ne doit-elle pas jouer un rôle incitateur et dynamiser des centralités nouvelles (pôles d’excellence en tout genre : universitaires, économiques, loisirs…) ? La région n’a-t-elle pas à jouer un rôle de régulation et de coordination que l’État voudrait se réapproprier ? Qu’est-ce qui peut alors distinguer l’action de la région de celle de l’État ? La région n’a-t-elle pas à promouvoir des projets qui ne soient pas sectoriels (logements, transports) mais portés par des liens au territoire (paysage, récit urbain) ?
L’organisation territoriale de la métropole est effectivement une question majeure. Elle est décisive pour la vie quotidienne des 11 millions de Franciliens, sans compter ceux qui viennent régulièrement travailler en Île-de-France. Elle conditionne l’unité du marché du travail, un atout historique de la région parisienne au regard d’autres métropoles internationales. Elle entraîne, ou peut contrarier, les dynamiques locales d’innovation et de mutualisation.
Mais par philosophie personnelle et réalisme, je ne crois pas à la définition de centralités ex abrupto. Il ne s’agit pas pour l’acteur régional de se substituer à l’État des coups de crayon volontaires de la planification des années 1950, pour le dire schématiquement. Il faut assumer l’héritage polycentrique, incarné par les villes nouvelles et accompagner les centralités émergentes particulièrement fortes dans la zone la plus dense de l’agglomération. Les centralités telles qu’elles sont forgées par les acteurs locaux, élus, habitants, communautés professionnelles. Et ce, en étroit lien avec le cœur parisien qui est notre histoire et notre patrimoine communs.
Concrètement, cela consiste à investir prioritairement sur certains sites en termes d’équipements d’envergure, scientifiques, économiques, culturels, etc. mais aussi à veiller à leurs effets d’entraînement sur les territoires immédiatement environnants. Pour prendre deux exemples aujourd’hui particulièrement débattus, et parfois controversés, c’est le cas du pôle économique de Roissy aux liens déconnectés avec le territoire de la Plaine de France ou encore du plateau scientifique de Saclay qui doit irriguer tout le « cône sud de l’innovation » et non s’organiser hors sol.
Des différentes formes d’intervention que l’État a historiquement pratiquées dans la région parisienne subsiste essentiellement aujourd’hui un pilotage depuis « ses » territoires, ceux dont il a la maîtrise foncière. La plupart sont stratégiques (La Défense, Marne-la-Vallée, etc.) et nous avons crucialement besoin, nous collectivités, d’être beaucoup mieux associées à leur gestion et à leur devenir. Mais la coordination par la région, en lien incontournable avec les autres collectivités, consiste à travailler la « maille territoriale » : les pôles et les centralités mais aussi, et c’est beaucoup plus complexe, les hinterlands, les interstices, les marges enfin.
Et ce que vous qualifiez de « sectoriel », comme les transports, le logement, l’urbanisme à grande échelle, me semble structurant. C’est là que la région doit être chef de file et, pour ce qui est des dimensions paysagères ou des contours urbains, plutôt en soutien aux côtés des collectivités proprement locales. Cela a été très débattu à l’occasion du Sdrif : la densification de la métropole francilienne est un objectif majeur des prochaines décennies. Or, il y a de multiples façons de construire dense. Et c’est aux territoires de développer les formes qui leur conviennent le mieux. Il appartient en revanche à la région, et aux autres collectivités en charge des déplacements, de veiller à ce que la reconfiguration du système de transport rende possible cette densification.
L’Île-de-France ne devrait-elle pas mieux marquer ses choix sur le plan de l’orientation des territoires ? Que penser des propositions d’Antoine Grumbach pour qui la métropole s’ouvre vers la mer vers l’ouest ? La région n’a-t-elle pas également un tropisme nordique qui n’exclut pas le front maritime et l’Europe du Nord ? Il y a des choix historiques qui rompent avec une Île-de-France marquée par une histoire centraliste regardant vers le centre de la France (Fernand Braudel). Paradoxalement, le reconnaître fortement délierait mentalement la métropole du poids de la ville centre.
Parmi la quarantaine de réponses au concours international lancé par le ministère de la Culture et de la Communication et auquel nous participons, la réflexion défendue par Antoine Grumbach est l’une de celles qui a retenu toute notre attention car elle rejoint une des orientations du Sdrif, peut-être insuffisamment perçue car elle est très nouvelle, autour du fleuve.
Faut-il pour autant en déduire un « tropisme nordique » ? Plus concrètement, je rappellerais la coopération engagée par les régions du Bassin parisien dans le champ des transports (canal Seine-Nord, liaisons ferroviaires) ou encore en matière de filière productive (exemple de l’automobile organisé à l’échelle de toute la vallée de la Seine). Et, surtout, je soulignerais la proximité grandissante avec la métropole londonienne. Pour des raisons objectives, par exemple en matière de services financiers, et par tradition bien française, Paris et Londres sont fréquemment comparées, confrontées, opposées, par classements internationaux interposés. Et, soyons franc, j’y sacrifie aussi car ces classements nous sont plus souvent qu’on ne le croit favorables et participent d’une stratégie d’image qu’on ne peut sous-estimer. Ceci étant, à l’échelle des grandes conurbations urbaines mondiales, Londres et Paris sont dans un même bassin et doivent être développées, en jouant sur leurs complémentarités, comme le premier pôle urbain européen. Vous l’aurez compris mes convictions sont plus européennes que jacobines.
La question démocratique
Faut-il en rester à l’idée que les questions de gouvernance seront résolues dans une phase ultérieure, après l’acceptation des projets ? Si celle-ci est illusoire comment imaginer une répartition viable des institutions en présence dans l’Île-de-France (État compris) ? Plus avant, comment voyez-vous des réformes de gouvernance susceptibles de renforcer l’activité démocratique des citoyens ? Il ne suffit pas de redéfinir les territoires et de les reconfigurer institutionnellement, encore faut-il disposer d’institutions qui activent la démocratie dite locale. Ce qui n’est peut-être pas le cas des Epci et des intercommunalités en tout genre. Êtes-vous par exemple favorable à l’élection démocratique directe du responsable de grandes communautés urbaines ?
Au lendemain d’élections municipales et cantonales et à l’heure où les échéances régionales approchent, je suis extrêmement réservé sur des projets de « reconfiguration institutionnelle », le gouvernement ayant d’ailleurs déjà fort à faire, paraît-il, avec le redécoupage des circonscriptions législatives… Et si je me place du point de vue du pilotage de la métropole, rien ne serait plus illusoire que de croire au miracle d’un big bang institutionnel. Aucune métropole internationale aujourd’hui n’est assise sur un dispositif unique de gouvernement. Et la proposition du sénateur Philippe Dallier ne vise ni plus ni moins qu’à supprimer quatre conseils généraux pour en reconstituer un plus vaste et ressusciter une frontière au sein de l’agglomération au nom d’une vision de la ville datant des années 1920.
Sérieusement, la seule évolution institutionnelle urgente pour l’Île-de-France concerne le développement de nouvelles intercommunalités crédibles dans le cœur de l’agglomération. C’est une des clefs de la mise en œuvre du schéma régional (Sdrif). Cela exige effectivement aussi de rendre plus transparents les mécanismes de délégation communautaire (suffrage universel direct, fléchage des délégués communautaires dans les listes municipales, etc.).
Pour ce qui est de la gouvernance d’ensemble, je suis un partisan – et un praticien ! – d’un pilotage négocié permettant aux différents niveaux, également légitimes, de cette coalition francilienne, d’interagir, de se partager les rôles et, in fine, de construire des choix tout ensemble locaux et métropolitains. C’est moins médiatique qu’un chambardement institutionnel mais c’est beaucoup plus efficace et plus démocratique !
Mais attention, cela exige aussi des réformes de fond ; en priorité celles pointées par la commission régionale présidée par Jean-Paul Planchou autour des enjeux du « Grand Paris » : une nouvelle donne financière et fiscale mettant fin aux inégalités actuelles, des outils conjoints par exemple en matière de logement, ou encore un syndicat mixte concrétisant les travaux de la Conférence métropolitaine.
Enfin, s’il faut reconnaître que l’institution régionale est encore en devenir, le régionaliste que je suis en conviendra pleinement.
La région, trop focalisée sur les questions institutionnelles et techniciennes dans son autoprésentation (Sdrif), ne gagnerait-elle pas à puiser dans l’imaginaire et l’histoire pour se forger des éléments historiques qui auraient également l’avantage de recoudre, dans un cadre métropolitain, le centre et la périphérie ? La région, qui associe plusieurs territoires urbains (l’haussmannisme du centre, le pavillonnaire, les grands ensembles, le vert des parcs, jardins et forêts, les terres agricoles, l’horizon maritime), ne devrait-elle pas valoriser et faire fructifier une culture urbaine qui manque à notre culture nationale ? La région catalane a créé très vite un grand centre culturel, certes logé au cœur de Barcelone, consacré à la ville, le Cccb. Mais il est vrai que nous sommes dans une région autonome.
L’institution régionale devrait encore évoluer, c’est entendu ! Mais de là à la confiner aujourd’hui à un simple rôle technique… passons. Je ne sais si l’exemple catalan est tout à fait probant, compte tenu aussi de la taille et des fonctions beaucoup plus diverses et internationalisées de l’Île-de-France. Ceci étant, la culture urbaine est effectivement notre patrimoine commun. Nous avons engagé, de façon assez nouvelle, à l’occasion du Sdrif, diverses initiatives avec au premier rang l’Institut d’aménagement et d’urbanisme, mais aussi l’ordre régional des architectes, la société française des urbanistes, les écoles franciliennes dans le cadre d’un workshop de création urbaine, etc.
Mais l’enjeu des décennies à venir ne réside-t-il pas plus encore dans le développement d’une culture métropolitaine afin d’adjoindre à cette histoire et ce patrimoine des lieux une égale prise en compte d’une identité construite par les flux ? En tout cas le Sdrif prend clairement, avec la densification et la refonte du système de transport, ce parti pris. C’est la première fois.
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Président de la région Île-de-France.