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Dans le même numéro

Ce que la famille peut apprendre du genre

janvier 2015

#Divers

La controverse du mariage pour les couples de même sexe et celle qui a suivi sur la «  théorie du genre  » ont mis en lumière des oppositions apparemment irréductibles. La notion de famille ne doit pas être abandonnée, mais elle ne doit pas être conçue comme naturelle ou totalisante. Le mystère de la naissance est après tout l’acceptation d’un autre qui résiste à nos logiques de contrôle.

La réflexion contemporaine concernant la différence des sexes, la constitution du «  genre  » et leurs conséquences sur la manière de penser la conjugalité et la famille remet sur le métier une manière de symboliser la «  nature  » en nous (le corps) et entre nous (le sang) pour instituer le lien généalogique. Mais elle le fait sans la hauteur métaphysique de l’idée de nature présente dans la hautaine référence à la «  famille naturelle  », expression dans laquelle les études de genre ne voient qu’un oxymore. Ces études invitent à repenser le lien familial. Elles discutent les formes «  traditionnelles  » d’organisation du familial, jusqu’à les soupçonner d’être tombées dans le piège de l’idéologie traditionaliste. Elles travaillent à métamorphoser l’univers symbolique au sein duquel déchiffrer l’appartenance à une communauté familiale et à expliciter une reconnaissance dans un lignage1. Mais, ce faisant, elles permettent aussi de retrouver la force du lien familial.

Nous ferons alors l’hypothèse que les études de genre contribuent à une articulation à nouveaux frais d’une phénoménologie de la naissance et d’une herméneutique de la reconnaissance dont les familles seraient tout à la fois le théâtre et l’enjeu. Entendons que les études de genre nous permettent de méditer en profondeur l’étonnement sur la naissance – dans ce qu’elle a de hasardeux, de contingent et d’absolument non choisi?: mon corps, mon tempérament, l’enfant qui vient et la famille où il « ?tombe? ». Puisque toute naissance nous situe dans l’existence et en même temps nous limite, une herméneutique de la reconnaissance se révèle nécessaire. Cette herméneutique porte une dimension épistémologique?: comment les identités sexuelles et personnelles se construisent-elles?? Mais elle a également une portée pratique?: une herméneutique de la reconnaissance se prolonge, en effet, dans des options éthiques (substituer aux « ?bonnes mœurs? » familiales le souci d’une éthique de l’authenticité dans les liens), juridiques (droit de la famille pour les beaux-parents, les tiers d’engendrement) et politiques (un souci de la justice par l’accompagnement politique des familles fragilisées ou exposées?: protection des familles recomposées ou monoparentales). Si le savoir rend visibles des formes de vies familiales invisibilisées, celles-ci participent aussi d’une lutte sociale et politique pour la reconnaissance. Elle affirme que l’humain, garçon ou fille, n’est jamais né une fois pour toutes mais qu’il s’agit de réapprendre, à chaque génération, à comprendre le sens opaque de cet être au monde qu’est, pour chacune et chacun, le fait d’être né et de vivre dans une famille.

Or en ces matières, la tentation est grande de céder à des interprétations tronquées, enfermant la question des identités dans des essences ou des statuts définitifs, ou la diluant dans l’attention à la pluralité des contextes que représentent les formes de vie familiales. En effet, on peut ici vouloir opposer la « ?nature? » au « ?genre? » du point de vue du concept?; le conservatisme au progressisme du point de vue des luttes sociales et des idéologies?; la Vie aux formes de vies du point de vue métaphysique. L’herméneutique du soupçon se précise alors. Les tenants de la « ?famille naturelle? » seraient soutenus par une institutionnalisation religieuse et politique de la famille reposant sur une conception substantialiste de l’être familial – sommairement dit « ?la pensée chrétienne? », comme si cette dernière n’était pas plurielle et en tension, et comme si les autres traditions religieuses du judaïsme ou de l’islam étaient absentes de la discussion. Inversement, aux yeux de leurs adversaires, les promoteurs de la critique du familialisme et d’un refus de la famille normative ne seraient que des individualistes constructivistes défenseurs du genre – comme si les études de genre n’étaient pas, elles aussi, diverses et plurielles. Cette opposition, qui a un sens du point de vue des luttes sociales dont l’enjeu est de reconnaître des formes de vie familiales masquées ou sans droits, nous semble stérile et peu éclairante du point de vue de l’analyse parce qu’elle repose sur le dualisme nature-culture dont elle rejoue, une fois de plus, la partition. Or les liens familiaux apprennent à expliciter le fond opaque qui les supporte dans un insubstituable parcours de la reconnaissance, redisant par là que l’identité familiale est moins d’ordre substantiel que relationnel. C’est la raison pour laquelle nous avancerons ici une double idée.

D’une part, la prise en compte des sciences sociales et des cultural studies pour penser et servir l’émancipation de formes de familles invisibilisées, humiliées ou mutilées (familles monoparentales, familles homosexuelles, familles interdites de regroupement) revêt une signification épistémologique forte. Elle exige de repenser à nouveaux frais la dialectique d’un fond de passivité en nous (l’opacité de la naissance et de l’appartenance lignagère) et de sa reprise en concepts et en pratiques familiales.

D’autre part, le débat sur la famille naturelle discutée au prisme du genre est révélateur d’un moment propre à l’« ?âge séculier? », selon l’expression du philosophe Charles Taylor. Le débat sur la famille se déploie en effet aujourd’hui dans un cadre postchrétien cherchant à se libérer de l’insolente idée de nature. Parler de « ?postchrétienté? » entérine une sécularisation des mœurs qui suppose une remise en question de modes d’intervention des traditions religieuses ou spirituelles dans l’espace public. Ces dernières ne doivent-elles pas apprendre à se séparer de l’idée de nature qu’elles convoquent encore en interne mais qui n’est plus audible dans le champ public?? En effet, l’État ne défend plus une norme familiale. Il est d’ailleurs renforcé en cela par la neutralité du discours technomédical concernant notamment l’assistance médicale à la procréation. Or en contexte sécularisé, l’enjeu n’est-il pas aujourd’hui d’initier une langue qui fasse résonner cet étonnement devant la condition sexuée et devant la naissance, au cœur même d’un monde qui ne s’en étonne plus parce qu’il croit avoir totalement maîtrisé les processus de reproduction?? Au fond, les religions, en ces matières, n’ont-elles pas à insister sur ce qu’il y a à célébrer dans l’étonnant de chaque naissance avant de vouloir le moraliser ou le normaliser?? Ce faisant, ne peuvent-elles pas contribuer, avec d’autres, à développer une symbolique de la reconnaissance augmentant poétiquement l’apparition de chacune et de chacun, fille ou garçon, sœur ou frère, dans la joie étonnante qui ne cesse à chaque fois de chercher à exprimer « ?un enfant nous est né, un fils, une fille nous est donné(e)? »??

Le débat raté de la famille et du genre?: essentialisme versus constructivisme

Une manière de résumer l’opposition entre les tenants de la famille et ceux du genre, entre essence et histoire, pourrait être de juxtaposer deux propositions fortes que l’on a pu récemment brandir comme des slogans. Celui d’une position naturaliste disant?: « ?Un papa, une maman, il n’y a pas mieux pour un enfant? » et celui, historiciste, rappelant que « ?nulle part un père et une mère ne suffisent à faire un enfant2? ». Ici, la nature s’oppose au genre pour penser la famille. Elle se concentre sur le statut de la loi naturelle (qui ne se confond pas avec la biologie).

Si nous parlons de débat raté, c’est que l’opposition entre le vitalisme et l’historicisme, la nature et le genre, l’enracinement dans la biologie et l’arrachement à toute nécessité est en fait la manifestation d’une opposition sommaire, à partir des relations entre institution et sexualité, qui masque le lieu de l’enjeu. Or l’enjeu concerne la traduction éthique et institutionnelle donnée à la portée existentielle et expressive engagée dans une phénoménologie de la naissance et de la différence des sexes. Comment comprendre ce fond d’opacité qu’est notre existence comme être sexué?? Comment se fait-il que l’humanité, puisqu’elle est une, s’épelle en masculin et féminin?? Que faire de cette conditionnalité herméneutique selon laquelle les humains, ne naissant pas tous en même temps, se trouvent inscrits généalogiquement, c’est-à-dire occupent des situations interprétatives distinctes?? D’un côté, la voix essentialiste affirme que la différence des sexes a besoin d’être domestiquée pour s’humaniser. Ce faisant, elle prend le risque d’une valorisation excessive de l’institution contre les forces désinstitutionnalisantes et la puissance de l’eros?: ce qui peut se traduire par une forme de violence (un gouvernement des désirs et des corps). D’un autre côté, la voix critique du genre défend la pluralité et la singularité des expériences de vie sexuelle, non canalisables, résistant à ce qui voudrait les discipliner jusqu’à les manipuler ou les forcer à l’invisibilité ou à la caricature. Elle prend le risque cette fois-ci d’une dérégulation possible d’un monde commun, ne le pensant que comme l’expression juxtaposée de désirs singuliers, oubliant qu’ils engagent, bon gré mal gré, du collectif.

On doit pouvoir sortir des dualismes entre nature et culture, biologique et symbolique, donné et construit. Car ceux-ci nous rendent incapables de saisir que le lieu fondamental et authentique de l’interrogation porte sur la manière de comprendre la différence des sexes, si cette différence n’est pas qu’une différence logique. La profondeur de l’interrogation est vertigineuse?: comment l’unité de l’humanité peut-elle se comprendre, elle qui s’exprime dans la figure double de l’homme et de la femme?? Comme cadre herméneutique, espace-temps où l’on apprend à se comprendre et se reconnaître et à être reconnu comme garçon ou comme fille dans un lignage, toute famille est la chambre d’écho de cette interrogation. Mais si l’on ne laisse pas retentir l’opacité de cette énigme, on reste prisonnier d’une alternative entre la nature et le genre qui engage une variante contemporaine du conflit entre tradition et modernité, alors que les deux partis tournent autour du même nœud. Cette alternative peut se résumer ainsi?:

Dans quel sens s’effectue la causalité?: des différences entre les sexes biologiques et naturels aux inégalités entre les genres sociaux?; ou au contraire, des genres aux sexes, du social à la nature3??

Cette alternative opposerait alors ceux qui défendent que la causalité va du genre à la nature dans une posture constructiviste et historiciste (« ?ce qu’on a présenté comme le sexe naturel serait toujours déjà empreint de social? », dit Judith Butler4) à ceux qui, dans une posture essentialiste et vitaliste, promeuvent l’idée qu’on part de la biologie pour aller vers le genre (l’hétérosexualité est fondatrice de la parenté pour Sylviane Agacinski5). Nous pensons que la question ainsi posée resterait encore dans un dualisme. Il s’agit de le dépasser par l’articulation entre passivité d’une situation existentielle engagée dans la naissance et une large palette d’attitudes construites à l’égard de cette situation?: élucidation (gender studies), combat (Beauvoir), révolte (Wittig), voire consentement (formes apaisées du familial, car il y en a?!). Cela est possible, à la condition de rappeler que dans tous ces débats s’engagent des enjeux d’existences et non pas de métaphysiques. La naissance n’est pas la vie. L’inscription généalogique n’est pas la famille. C’est précisément pour cette raison que la phénoménologie de la naissance appelle une herméneutique de la reconnaissance.

Nous l’avons dit, les études de genre sont installées dans un mouvement historique d’émancipation déjà long et nécessaire. Relevant d’une approche constructiviste, elles s’affranchissent d’une référence autoritaire à la nature. Définie par sa perfectibilité, dans une tradition des Lumières maintes fois reprise, l’humanité n’est plus assujettie à la nature, que ce soit la nature biologique ou l’histoire naturalisée des codes culturels et sociaux. La perfectibilité est la capacité de s’arracher à la nécessité naturelle, aux déterminations naturelles comprises comme des déterminismes. Ce faisant, le fondement d’une téléologie morale – une nature définissant pour les êtres humains un dessein à honorer – est sapé. Il faudra désormais faire une différence entre être dans une situation et être par une situation, pour reprendre une distinction de Karl Jaspers. Les premières formulations de la réflexion sur le genre distinguant entre le sexe biologique et l’identité sexuelle sociale reposaient sur cette idée. Pour notre question, l’homme ou la femme ne sont pas mâle et femelle, si l’on entend par là que le corps aurait une fonction spécifique que l’un et l’autre devraient honorer et dont la famille serait le réceptacle prédestiné en tant que « ?communauté naturelle? ». Le sexe n’est pas une nature, il en appelle à une histoire. Les techniques d’assistance médicale à la procréation contemporaines, après la longue histoire des pratiques adoptives, devraient suffire, aujourd’hui, à nous en convaincre. Puisque nous sommes perfectibles, il devient impossible de lire dans le concept d’homme ou de femme une finalité unique, définitive et normative.

Être un homme ou une femme n’est pas simplement dérouler mécaniquement un programme ou un code que la nature aurait prédéfini pour nous. Engagement biographique, c’est bien plutôt un processus mobilisant une herméneutique de soi devant et avec ces autres qui sont les nôtres. Si la femme a la possibilité de porter des enfants – c’est là son être en situation –, cela n’implique nullement nécessairement qu’elle est/soit faite pour mettre au monde des enfants – c’est là que s’engage son être par une situation. Confondre l’un et l’autre serait animaliser la maternité par exemple. C’est pourquoi les métaphores sont souvent trompeuses. On pense ici à la prégnance des métaphores végétales pour parler de la sexualité et de la procréation présentes dans les images de fertilité, de semence, de germe. C’est là le vieux reste d’une conception orphique de la nature, d’un cosmovitalisme voyant dans la sexualité et la procréation la puissance fécondante des forces de la nature luttant pour la vie contre la mort. Au-delà de ces métaphores mortes, cette dimension orphique dit pourtant quelque chose d’insistant?: il y a dans la sexualité et l’engendrement une force et une puissance qui nous dépassent et peuvent nous inquiéter. Il y a, en nous et entre nous, sinon la vie, du moins une forme de passivité avec laquelle nous confronter pour nous conter. À cet endroit s’élaborent des métaphores vives pour exprimer le lien, des liens dont on aimerait qu’ils soient des liens qui libèrent. Les parents donnent ainsi à leurs enfants la vie, c’est-à-dire quelque chose qu’ils ne possèdent pas. Mais la fécondité humaine ne saurait se penser uniquement dans les mots naturalisants de la fertilité. La maîtrise de la fertilité, les différents genres de vies possibles pour les femmes par exemple, de la nombreuse maternité au célibat volontaire en passant par les formes multiples de la conjugalité et du familial, révèlent combien une référence insolente à la nature peut justifier parfois des conceptions mutilées de l’existence. C’est une banalité de le rappeler?: l’homme est l’être de l’anti-nature. L’homme n’a un destin que dans la mesure où il est/a une histoire.

La traversée symbolique de la différence des sexes et des générations

Entre nature et genre, vitalisme et historicisme, l’humain ne se tient-il pas sur la brèche qui fait qu’il n’est une espèce que dans la mesure où il est une histoire?? L’herméneutique de soi et de l’être-ensemble familial, engagée autour d’une existence sexuée et généalogiquement située, n’appelle-t-elle pas son prolongement dans une herméneutique des symboles et des institutions qui les portent (droit, état civil, etc.)?? Répondre à la question « ?qui suis-je??? », pour l’existant sexué et généalogiquement situé, n’engage-t-il pas un processus herméneutique confronté à ce fond d’opacité qu’est l’énigme du sexe et du générationnel en lui?? Parler d’herméneutique ouvre l’entre-deux entre la nature et l’histoire, entre l’essentialisme et le constructivisme.

La famille pensée au prisme du genre se fait l’écho d’une hantise?: l’équivocité de l’humain qui, en son unité, se donne dans la diversité des sexes et des générations. Le problème de la différence et de la similitude y est mobilisé, débusquant les formes de domination du même sur l’autre (la violence essentialiste, le poids de la norme hétérosexuelle) ou du discours totalisant. Toutefois, les enjeux ne sont pas seulement disciplinaires ou politiques. Ils sont également symboliques. Entendons qu’ils cherchent à donner à comprendre quelque chose – l’altérité qui est le fond mystérieux de toute naissance, de toute situation sexuée, de toute inscription générationnelle – qui résiste à l’explication, pour reprendre l’antique distinction de la philosophie herméneutique. Sans doute les études de genre ont-elles dû travailler à lutter contre les imageries généralisantes et les stéréotypes qui enferment les histoires de famille sous des images toutes faites et mortifères – on pense notamment aux caricatures de l’identité « ?homo? » qui font disparaître des histoires de vie sous la généralisation d’un stigmate – mais cette nécessaire critique des imageries ne peut disqualifier la force élucidante des imaginaires et l’expressivité des symboles. Dans sa dimension sensible, le symbole nous rend présents à l’originaire émergence de ce qui survient de façon préconceptuelle. Avant qu’on ne le désigne et qu’on le classe dans ces thèmes, le sexe est symbolisé dans l’existence sexuée. La situation générationnelle est symbolisée dans l’inscription lignagère (le symbole du lien). S’y libère la force expressive engagée dans cette réalité par une poétique de la relation, poétique des images (portraits de famille, photographies, films) et des récits (épopées et tragicomédies familiales, faire-part de naissance).

Il ne s’agit pas là d’irrationalité. Car le phénomène de la génération – en français le mot « ?génération? » conserve cette belle homonymie de l’engendrement et de la situation généalogique –, une fois les soupçons des études de genre entendus et exercés de façon fructueuse, résiste en son fond surprenant, et insiste pour dire que tout, dans le familial, ne relève pas de la causalité ou du rapport de force. L’enjeu n’est pas de suppléer une connaissance déficiente par des symboles censés imager la différence des sexes ou des âges, ou les rôles dans la procréation. On n’oublie pas que, pendant longtemps, les images, notamment celle du sang, ont tenu lieu d’explication naturalisante des liens. Elles ont depuis lors été critiquées et remplacées par l’explication rationnelle et positive. Mais le genre et la génération ne mobilisent pas que des questions de techniques procréatives, de savoirs psychologiques ou sociologiques. Il y a là également des enjeux d’existence confrontés à l’incompressible opacité de toute situation incarnée. Mythes et symboles de la naissance et de la généalogie tentent d’en augmenter la portée.

En nos temps où le poids de l’explication (par la biologie, la génétique) l’emporte sur la compréhension, on doit se demander en quoi le discours symbolique, encore présent dans la littérature, les arts ou les mythes, explore en images l’opacité de la différence des sexes et des générations comme une énigme en nous et en dehors de nous6. Parler ici de symbole n’est donc pas une paresse intellectuelle. Bien au contraire, c’est la manifestation d’une exigence de penser plus avant, retrouvant une des racines du symbolisme présentes naguère dans les hiérophanies (portrait, gène, sang, grandes images présentes et actives dans la climatique familiale7) et qui rappelle qu’on n’en a peut-être jamais fini de dire le sexe ou la génération. La famille ne se décortique pas uniquement sur le mode du schéma question/réponse?: comment avoir des enfants?? Comment trouver un donneur de gamètes?? Comment hériter et qui sont les héritiers « ?naturels? »?? Elle est habitée par un questionnement existentiel et disons le mot, ontologique, qui est de l’ordre du schéma appel/réponse?: d’où viennent les enfants?? Pourquoi suis-je en vie dans cette vie-ci?? Pourquoi suis-je né dans cette famille?? Or on ne répond pas à un appel comme on répond à une question.

Avant la biologie et la génétique, ce questionnement a connu des réponses mythologiques dont l’organisation familiale a été la traduction parfois corsetée?: maintenir une forme de régulation et de contrôle de la procréation et engager la fertilité dans une discipline et une maîtrise d’un sexe sur l’autre. C’est ce que Françoise Héritier a pu appeler la valence différentielle des sexes8?: non seulement la famille est confrontée à la question d’assurer sa pérennité en structurant les liens d’alliance et de parenté mais, en plus, ce faisant, elle subordonne la puissance féminine de la procréation à la domination masculine. Ce qu’il faut retenir de cela, ce sont deux choses complémentaires. D’une part, il y a un travail à faire pour débusquer ces formes de représentations et d’organisations familiales dominatrices d’un sexe sur l’autre. C’est là le rôle critique des études de genre pour lesquelles assez souvent le discours symbolique est conçu comme un discours coercitif9. D’autre part, il y a à garder vive la question poétique originaire. Elle concerne l’appel de l’obscur lien ombilical qui perce sous les organisations et les structures de parenté et d’alliance qui cherchent à lui donner une mesure. Mystère de l’origine, de la différence des sexes et des générations.

Faute de quoi, la question de l’altérité demeure refoulée. C’est là un enjeu ultime car, finalement, toute famille est confrontée à cette tâche qui consiste à rendre compatible la différence (des sexes, des âges et des désirs) avec la similitude. Cette tâche a bien sûr une signification éthique et politique. Celle d’une lutte pour la reconnaissance (Axel Honneth) contre les pratiques familiales humiliantes qui n’autorisent pas l’autre à exister (vie familiale stigmatisant ou invisibilisant l’homosexualité de l’un de ses membres)?; lutte contre les dominations indues et pour la revendication des droits reconnaissant que chacun en famille peut être aussi sujet de droit (statut juridique du beau-parent?; droit notarial entre conjoints de même sexe, droit de garde ou de visite, etc.)?; lutte de résistance au mépris social qui stigmatise certaines formes de vie familiale, notamment homoparentale mais aussi monoparentale ou immigrée.

Toutefois, au-delà de ces enjeux et de ces luttes, la famille envisagée au prisme du genre active une interrogation originaire qu’elle déploie dans une trajectoire historique, un parcours de la reconnaissance, car on apprend à se reconnaître, tant bien que mal, d’une famille. Cette interrogation porte sur le statut de la différence, sur le retentissement de ce fond de passivité présent en toute famille qu’est l’altérité et avec lequel chacune déploie sa créativité symbolique. Prenons l’exemple de la différence des sexes, de la sexualité comme important problème philosophique.

Le sens de la division de l’humain en homme et femme ne se réduit pas à un problème biologique. […] C’est en effet une altérité très étrange?: la femme n’est ni le contradictoire ni le contraire de l’homme, ni comme les autres différences. Ce n’est pas comme l’opposition de la lumière et des ténèbres. Distinction qui n’est pas contingente, et il faut chercher la place de cela par rapport à l’amour. […] Le problème de l’Éros est philosophique et concerne l’altérité10.

Or il ne s’agit pas de penser cette altérité comme une opposition logique et binaire entre mâle et femelle, homme et femme, masculin et féminin, ce qui serait ici encore une altérité formelle, découlant d’une lecture sommaire du mythe de l’androgynie, qui pense les sexes dans le langage d’une forme de complémentarité mathématique ou géométrique?: deux moitiés d’un même être sphérique. Levinas poursuit?:

la féminité – et il faudrait voir dans quel sens cela peut se dire de la masculinité ou de la virilité, c’est-à-dire de la différence des sexes en général – non seulement comme une qualité, différente de toutes les autres, mais comme la qualité de la différence. Idée qui devrait rendre possible la notion de couple comme distincte de toute dualité numérique11

Il s’agit donc de sortir notre pensée de l’altérité de la distinction comprise dans la logique du genre (entendu comme classification administrative) ou dans celle de naturalisation biologisante (la physiologie) pour penser l’altérité comme la qualité de la différence.

Sécurité de la famille ou aventure du « ?faire famille? »??

La famille naturelle, telle qu’elle a pu être conçue en chrétienté, est le fruit d’une combinaison culturelle entre des figures ou intelligence des choses concrètes (images sensibles qui expriment des manières de vie possibles?: les bonnes mœurs familiales et la dénonciation de la fille-mère ou de l’enfant naturel?; l’apparente évidence d’une norme sociale naturalisée?: « ?un papa, une maman, il n’y a pas mieux pour un enfant? »)?; des concepts ou intelligence des choses abstraites (le développement d’une argumentation qui parlera d’une essence du familial, ou de la famille dans la métaphorisation organique de la « ?cellule de base de la société? »)?; des catégories ou intelligence des choses mystiques (invocation de réalités qui n’ont pas de matérialité mais qui font tenir des choses ensemble?: la loi naturelle, la vie). Bonnes mœurs, essence de la famille comprise comme communauté naturelle et loi naturelle épellent ainsi ce qu’est et devrait être « ?la famille? », chrétienne ou non. Cet ordre symbolique qui profile l’essence de la famille s’inscrit dans des institutions, des textes, des disciplines scientifiques, des dispositifs techniques, des rituels, des guides, des valeurs, un ethos qui expriment ce qui est et ce qui doit être à propos des pratiques familiales.

Une culture, dans sa manière d’envisager la famille, se déploie ainsi comme un cadre interprétatif actif qui porte une manière d’équilibre entre ces trois éléments et propose, voire impose ainsi une norme dominante dans le champ social. De la sorte, la « ?famille naturelle? » se trouve au point de conjonction réunissant une figure (père/mère/enfant), un concept (la famille entendue comme une essence) et une catégorie (la loi naturelle). Assumant une continuité entre la loi naturelle, l’essence de la famille et son expression dans la physiologie, la famille, naturalisation de la norme familiale, servira alors à définir ce qui devrait être et ce qui serait contre-nature?: l’homoparentalité, la fille-mère, la famille monoparentale, la gestation pour autrui, la prise en compte de tiers d’engendrement. Ce discours continuiste, s’appuyant sur la nature et un triomphe de la vie – concept central en théologie –, n’est sans doute pas assez attentif au caractère discontinu de toute naissance. L’emprise du concept de nature estompe ce que chaque venue au monde a de « ?miraculeux? », dirait Hannah Arendt12.

Or les études dites de genre ont travaillé et travaillent à remettre en cause cette idée qu’il y aurait une continuité « ?naturelle? » entre la physiologie, l’essence et la norme?; comme si celle-là était la simple transcription dans la biologie de ce qu’est celle-ci sur le plan des essences13. Elles soupçonnent d’être mutilante et humiliante cette manière de comprendre le lien sexuel et familial. En le disciplinant par l’institution, elle masque une forme de domination, sinon un coup de force de l’idéologie bourgeoise. Les études de genre déconstruisent donc une conception insolente de l’idée de nature, au point de rendre insolite toute référence qui y serait faite14. En effet, notion polysémique, sur l’idée de nature se condensent des plans argumentatifs distincts relevant des savoirs (l’opposition naturel/artificiel)?; des principes (une référence ontologique parlant de l’essence d’un être ou d’une chose) et des normes (la nature et le contre-nature). Or les études de genre, en déconstruisant l’idée de « ?famille naturelle? », discutent comme arbitraire l’apparente continuité logique entre ces trois plans. L’ordre des normes n’est pas que le décalque de l’ordre des essences, qu’il suffirait de lire dans l’ordre des faits « ?naturels? ». De l’un à l’autre, il n’est pas question de transcription mais de traduction, c’est-à-dire d’un travail d’interprétation. Ce travail peut prendre la forme d’une lutte pour la reconnaissance d’autres formes de vies. C’est pourquoi les approches de la famille en termes de genre s’engagent dans une transformation de l’ordre symbolique familialiste, ouvrant une voie qui, après la déconstruction, soumet l’idée de nature au risque de l’interprétation. A contrario, c’est ce qu’enregistre aujourd’hui l’expression « ?faire famille? ». La « ?famille naturelle? » était un programme?; le « ?faire famille? » sera un processus. Faire famille implique parfois de défaire la famille, lorsque cette dernière, norme dominante et mutilante, rend des vies invivables.

Aussi peut-on comprendre la préhistoire et l’histoire des études de genre comme la mise en travail de l’univers symbolique qui a cherché à élaborer ce que signifie se comprendre d’un même lignage, ce qu’engagent naissance et reconnaissance dans un lignage. Celles-ci installent une discontinuité entre les trois plans évoqués ci-dessus?: pluralisation des formes possibles de faire famille sur le plan des figures?; substitution du concept fonctionnel de parentalité en lieu et place du concept essentialiste de famille?; opposition à la catégorie de loi naturelle en lui opposant celle de dignité, de droit ou bien encore celle d’exigence de reconnaissance.

Mais alors, comment penser et vivre cette transformation de la symbolisation de la différence et du lien généalogique?? Peut-on la penser sans céder à l’alternative qui oppose le discours de l’effondrement de la famille au discours de l’arrachement promu par la révolution féministe de deuxième génération refusant toute naturalisation des rôles conjugaux ou familiaux?? Ne sommes-nous pas amenés à nous confronter au fait que la différence des sexes, malgré la nécessaire critique des stéréotypes de la domination masculine, n’est pas qu’un enjeu éthique, social et politique de lutte pour la reconnaissance et contre les diverses formes de mépris?? Cette lutte est bien évidemment utile, nécessaire et sans doute jamais épuisée, mais la différence des sexes nous situe aussi devant l’énigme de la sexualité et de l’inscription généalogique, l’énigme de l’existence comme sexuée et générationnellement située. Cette différence ne nous confronte-t-elle pas à des enjeux symboliques et ontologiques nous découvrant que

la différence des sexes traverse l’humanité autrement qu’une différence d’espèce et autrement qu’une différence sociale, autrement encore qu’une différence spirituelle15??

La critique de la famille naturelle

Si toute compréhension de la famille s’envisage comme le déploiement d’un cadre herméneutique tentant de déchiffrer l’opacité de la différence en nous (différence des sexes) et entre nous (différence des âges et des désirs) sur fond d’appartenance à un lignage, le cadre qui servait à parler de « ?famille naturelle? » a donc fait son temps. Il a contribué à instituer une manière de faire lien – la famille bourgeoise nucléaire?: « ?un père, une mère et un enfant? ». Mais il a également fait son temps en ce qu’il ne nous paraît plus porteur pour rendre compte des différentes configurations familiales concentrées dans l’idée de « ?faire famille? », rendues possibles par le pluralisme de nos sociétés mais aussi par les possibilités technoscientifiques qu’apporte l’assistance médicale à la procréation. Si « ?la famille? » n’est plus un programme, peut-elle être comprise alors comme un processus herméneutique dont l’enjeu serait d’apprendre à s’y reconnaître, dans les différences d’un même lignage??

Le débat récemment engagé sur la scène française autour du mariage dit « ?pour tous? », qui a opposé les partisans d’un accès au mariage pour les couples homosexuels à l’idée de « ?famille naturelle? », a mis en évidence de nouveaux arbitrages entre religions et démocratie, à travers une repolitisation du croire. Or ce débat peut s’interpréter à plusieurs niveaux. Il est tout d’abord l’ultime pulsation de la sécularisation, eu égard au caractère englobant des religions (et peut-être de l’État-nation??), en déployant ce que l’on pourrait appeler avec René Rémond une « ?sécularisation des mœurs? » considérée comme la consécration ultime et définitive d’une séparation entre religions et démocratie. Cette revendication signerait définitivement l’entrée en postchrétienté. Cet exclusivisme s’opposerait à toute expression de la croyance dans l’espace public. Ensuite, la place que les religions ont pu prendre directement ou indirectement dans ce débat révèle bien que le rôle public des religions est en train de se recomposer. L’investissement de l’espace public, à côté de l’espace étatique, au sens où Habermas entend cette distinction, est ici à reconsidérer. Sans défendre une position inclusiviste qui donnerait la parole aux religions dans le cadre de l’espace étatique – dans le débat sur le genre cela a été la position des représentants des religions, se heurtant à la difficulté de vouloir faire entendre une parole reposant sur des dogmes dans un espace étatique métaphysiquement neutre et construit sur l’argumentation et la discussion16 –, est en question quel peut être le rôle « ?civilisateur? » du religieux en matière de sexualité, de genre et de famille en régime postchrétien. C’est là l’enjeu de ce que nous avons appelé plus haut une symbolique de la reconnaissance capable de figurer et de célébrer l’étonnement de l’altérité – du sexe, de l’âge ou du désir – engagé dans la naissance dont les familles sont les hôtes. Enfin, là où la tentation est celle du discours englobant qui imposerait une conception du monde et des liens familiaux non soumise à la délibération (la famille naturelle) – et c’est ce qui nous semble avoir été la contribution ratée des religions lors du débat sur le mariage homosexuel ou dans leur opposition au genre –, il nous paraît par contre décisif d’observer que les religions ne sont pas démunies pour tenter d’aider à symboliser et déchiffrer l’énigme de la sexualité et de l’appartenance lignagère. Leur rôle dans l’espace public, où elles peuvent intervenir, ne pourrait-il pas être de mobiliser leurs « ?potentiels sémantiques? » comme dit Habermas, c’est-à-dire leur capacité à produire du lien et du sens sur la différence des sexes et sur la filiation?? Car les enjeux n’y sont pas que techniques (l’Amp) ou juridiques (le droit à…). La parole séculière sur le genre peut se trouver enrichie et complexifiée de la parole religieuse concernant l’opacité de la différence des sexes, sans que pour autant elle soit contrainte de s’y soumettre. Du moins si l’on maintient bien distincte la sphère de formation de l’opinion (espace public) de la sphère de production de la décision (espace étatique). Les grands mythes, les rites, la puissance symbolique des langages religieux ne sont pas rien en ces matières de genre. On pense à cette exclamation que rapporte la tradition yahviste et qui ne cesse de nous redire, sur le mode du symbole, qu’on n’a jamais fini de dire le joyeux, le mystérieux et l’inquiétant de la différence des sexes?:

L’homme s’écria?: « ?Voici cette fois l’os de mes os, et la chair de ma chair…? ».

(Gn, 2, 23)

Mais il est question d’apprendre à les traduire, et non simplement à les transcrire plus ou moins mécaniquement. À les traduire dans une langue moins substantialiste.

Ce que la réflexion sur le genre, entendue comme confrontation au mystère de la différence, nous apprend finalement des organisations familiales, c’est à les sortir de cette logique totalisante qui les contamine toujours, pour les ouvrir à leur dimension d’extériorité et d’opacité qui les travaille. Cette totalisation enferme et assigne à résidence dans des rôles, des statuts, des thèmes?: les homosexuels, les lesbiens, les trans, « ?les autres en tant que? » qui ne seront jamais des visages?; les pères forcément virils ou les mères nécessairement maternantes, la complémentarité des rôles homme/femme dans la domesticité envisagée comme une complémentarité fonctionnelle et hiérarchisée si l’on pense aux activités de care, etc. Tout cela dévisage au lieu d’envisager ceux ou celles qui demandent d’être et d’apparaître. Or l’enjeu n’est-il pas, là où d’ordinaire on stigmatise jusqu’à faire paraître comme monstrueux, de laisser sa chance à l’apparition de l’autre comme autre et de laisser retentir ce qui résiste à nos logiques de contrôle, de régulation de maîtrise et de sécurisation, dans le risque de la relation, du vif, dans la surprise de son être-là?? Il est une leçon que les familles peuvent retenir des études de genre. Face à la tentation d’une emprise sur les vies, ne s’agit-il pas d’apprendre, dans les familles, à toujours et inlassablement laisser poindre la possibilité d’un être en prise sur le mouvement d’existences qui s’y cherchent??

  • *.

    Philosophe, maître de conférences à la faculté de philosophie de l’université Jean-Moulin, Lyon. Il a récemment publié Où va la famille??, Paris, Les liens qui libèrent, 2014, et Mythopées. Un portrait de la modernité tardive, Paris, Vrin, 2014.

  • 1.

    Par univers symbolique, nous entendons un système de structures relationnelles, de représentations, de valorisations, de pratiques et de symboles intégrés. Robuste, une communauté historique s’y exprime et rend compte des expériences fondatrices qu’elle vit, comme ce peut être le cas pour l’appartenance lignagère, les structures d’alliances et de parenté (l’eros, la naissance, le mariage, la généalogie).

  • 2.

    Maurice Godelier, Métamorphoses de la parenté, Paris, Fayard, 2004.

  • 3.

    Thierry Hoquet, « ?“D’où sors-tu??” Femmes et femelles au prisme de la génération? », Critique, no 787, décembre 2012, p. 1060.

  • 4.

    Judith Butler, Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l’identité, trad. fr. Cynthia Kraus, Paris, La Découverte, 2005, p. 68-69.

  • 5.

    Sylviane Agacinski, Femmes entre sexe et genre, Paris, Le Seuil, 2012.

  • 6.

    On pense au mythe de l’androgynie, au mythe d’Adam et Ève, ou aux métamorphoses d’Ovide récemment adaptées au cinéma par Christophe Honoré par exemple.

  • 7.

    Jean-Philippe Pierron, le Climat familial. Une poétique de la famille, Paris, Cerf, 2009.

  • 8.

    Françoise Héritier, Masculin/féminin, II. Dissoudre la hiérarchie, Paris, Odile Jacob, 2002, p. 14.

  • 9.

    « ?Il ne s’agit plus seulement pour la femme adulte de rêver sa vie à travers des symboles, mais de la vivre? », Simone de Beauvoir, le Deuxième Sexe, Paris, Gallimard, coll. « ?Idées? », 1949, tome II, chap. x, « ?Situation et caractère de la femme? », p. 307.

  • 10.

    Emmanuel Levinas, « ?Philosophie, justice et amour? », dans Entre nous. Essais sur le penser-à-l’autre, Paris, Grasset, 1991, p. 131-132.

  • 11.

    E. Levinas, le Temps et l’Autre, Paris, Puf, coll. « ?Quadrige? », 1996, p. 14. Nous soulignons. Ce texte a son importance parce qu’il vient également contredire le discours genré dont on accuse parfois Levinas.

  • 12.

    Hannah Arendt, la Condition de l’homme moderne, Paris, Calmann-Lévy, 1961.

  • 13.

    Éric Fassin, « ?Les forêts tropicales du mariage hétérosexuel? », dans Revue de théologie morale, no 261, 2010.

  • 14.

    J.-P. Pierron, « ?Insolite ou insolente idée de nature??? », Études, no 4202, février 2014, p. 55-65.

  • 15.

    Paul Ricœur, « ?Sexualité. La merveille, l’errance, l’énigme? » [1960], dans Histoire et vérité, Paris, Le Seuil, 3e édition, 1964, p. 198.

  • 16.

    Sur ce point, voir l’éclairant article de Philippe Portier, « ?Démocratie et religion. La contribution de Jürgen Habermas? », dans Revue d’éthique et de théologie morale, no 277, décembre 2013, p. 25-47.