Corps perdus
Les corps des réfugiés syriens décédés au Liban constituent un enjeu politique et humain pour les vivants.
Le cimetière syrien de Daraya se trouve dans le creux d’une vallée en contrebas du village libanais du même nom. Les sépultures s’étalent à l’ombre de grands chênes. Elles sont garnies de fleurs fraiches déposées dans des vases ou plantées entre les herbes folles. Le lieu a l’odeur du baume aux herbes dont on enduit les corps avant de les mettre en terre.
Abou Abdo arpente inlassablement les allées du cimetière. Il connaît l’histoire de chaque tombe ; c’est lui qui s’occupe de l’endroit. Pourtant, contrairement à ses funèbres locataires, Abou Abdo n’est pas un réfugié. Il a quitté la Syrie il y a quinze ans pour venir travailler comme plombier au Liban. Quand la guerre a éclaté chez lui en 2011, il se sentait déjà loin, bien installé dans sa nouvelle vie. La violence l’a rattrapé quand un de ses proches est mort : « Le mari de ma tante est décédé ici au Liban. C’était des réfugiés. Pendant des jours et des jours, nous avons cherché un endroit où l’enterrer. Le corps s’est mis à sentir fort, c’était une épreuve très difficile », dit-il. « C’est à ce moment là
Ersal, le conflit syrien au Liban. Introduction |