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Photo : Sara Kurig via Unsplash
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Dans le même numéro

Le futur du numérique sera-t-il incarné ?

Le métavers, cet espace virtuel en trois dimensions, où les utilisateurs sont représentés par leur avatar, signale l’évolution des technologies vers des dispositifs de plus en plus immersifs. Quels contours ces innovations esquissent-elles pour l’avenir de la corporéité, de l’identité ou de la socialisation ?

En première lecture, l’informatique – et Internet en particulier – nous affranchit d’un grand nombre de contraintes physiques1. La culture libre y a vu l’opportunité d’abolir les frontières du savoir pour distribuer arts et sciences à quiconque, gratuitement, où qu’il se trouve. Le cloud, ou nuage, permet à chaque individu d’accéder à ses photos depuis tout appareil électronique. Aux lettres manuscrites se substituent des courriels immatériels. La vie sur l’écran est comme désincarnée. Et quand les nouvelles technologies s’intéressent au corps, c’est pour le parfaire afin de mieux en oublier sa pesanteur. Les gourous du « soi quantifié » rêvent à un ensemble de capteurs qui mesureront continuellement nos fréquences cardiaques, pressions artérielles et autres biomarqueurs en vue de prévenir tout dysfonctionnement.

À y regarder de près, la réalité est plus complexe. Le cloud correspond à des ordinateurs stockés par milliers dans d’énormes chambres de refroidissement. Ces centres de données sont loin d’être immatériels, nécessitant métaux rares pour leur construction et énergie pour leur fonctionnement. Les réseaux sociaux ont accentué les mondes de l’image et du spectacle, nous faisant entrer dans une ère de représentation quasi permanente de nous-mêmes. Les produits numériques sont élaborés avec des ingénieurs spécialistes de l’expérience utilisateur et tout est fait pour que leurs utilisations soient directes, instinctives, ergonomiques. Les mesures de confinement dues à la Covid-19 ont intensifié la recherche d’interactions virtuelles sensibles.

Si nous pouvons désormais en un clic nous retrouver face à face avec une amie expatriée ou des collègues de travail, le degré d’incarnation reste néanmoins très limité. Les outils de télétravail ne recréent pas la magie des interactions sociales autour de la machine à café. Les téléconférences actuelles peinent à capturer les échanges informels féconds des colloques scientifiques. Plusieurs dirigeants de la tech se proposent de répondre à ce problème via le développement d’outils résolument immersifs. Ces velléités se cristallisent autour de l’emploi du mot « métavers », ressuscitant le vieux topos d’un univers numérique parallèle. Où en est cette recherche d’un Internet sensible et incarné ? Dans quelles mesures ce métavers s’intégrera au monde que nous connaissons ? Quelles conséquences aurait une telle éventualité sur nos sociétés ?

En quête d’immersion

Le métavers se définit comme un espace virtuel à trois dimensions où les utilisateurs sont représentés par des avatars à travers lesquels ils interagissent. L’expérience peut être enrichie grâce à des dispositifs haptiques, c’est-à-dire des appareillages simulant la perception de notre corps dans son environnement. C’est notamment le but des casques de réalité virtuelle qui, une fois enfilés, nous projettent dans un tel espace en obstruant notre champ visuel pour le focaliser sur un écran. De même, manettes et tapis roulants permettent d’utiliser bras et jambes pour déplacer son avatar ou bien pour cliquer sur des boutons apparaissant à l’écran afin, par exemple, de le téléporter. Certains espèrent, grâce à ces technologies, répondre aux frustrations des interactions numériques actuelles, jugées bien loin de la qualité du monde réel. En particulier, ils espèrent que le futur d’Internet et de l’informatique réussira à susciter la sensation de présence qui manque encore à nos visioconférences. C’est notamment le cas du groupe Facebook, qui rassemble le réseau social du même nom, Instagram, le système de messagerie WhatsApp et les casques Oculus Rift, et qui a renommé sa maison mère en Meta, en référence au métavers. Il a investi 10, 193 milliards de dollars dans sa filière de réalité virtuelle pour l’année 2021. Ce chiffre indique l’importance de ce secteur pour cette entreprise qui a dépensé 22, 649 milliards en recherche et développement la même année2.

Le métavers n’est pas un concept nouveau. En 1984, William Gibson imagina la Matrice dans son roman cyberpunk, Neuromancer, puis en 1999, Lana et Lilly Wachowski la portèrent à l’écran dans la série de films Matrix. Cette matrice n’est pas sans rappeler la machine de The Minority Report de Philip K. Dick, publié en 1956. Le mot lui-même apparut dans Le Samouraï virtuel de Neal Stephenson en 1992. En dehors de la littérature de science-fiction, en 2003, une entreprise californienne sortit le jeu vidéo Second Life, un métavers qui atteignit un million d’utilisateurs réguliers en 2013. Si Second Life n’a pas eu le succès escompté, les défenseurs du métavers l’expliquent par le manque de maturité des technologies sous-jacentes de l’époque. La puissance de calcul, les technologies d’immersion sensorielle, l’habitude des consommateurs vis-à-vis de leur avatar numérique : beaucoup de facteurs fourniraient la réponse à ce qu’il avait manqué.

Les ambitions du métavers ne se limitent pas à une sorte de jeu vidéo interactif. Il s’agit d’un nouvel écosystème. L’économie créative y est particulièrement présente, qu’il s’agisse d’habiller les avatars, de leur construire des maisons ou de leur proposer des concerts. À titre indicatif, du 23 au 25 avril 2020, l’avatar du rappeur Travis Scott a donné cinq concerts sur le jeu vidéo multijoueurs Fortnite, totalisant un ensemble de 28 millions de spectateurs uniques ; tandis que Nike, un mois plus tard, acquérait une entreprise de chaussures virtuelles. Au-delà de cet aspect ludique, le métavers représente pour beaucoup l’avènement du « Web 3.0 » : un Internet fondé sur la technologie de blockchain, dont l’économie serait décentralisée, c’est-à-dire sans banque centrale, et la gouvernance autonome. Une blockchain est un registre qui s’appuie sur des processus cryptographiques modernes. Ces processus permettent d’assurer la validité du registre sans avoir besoin de recourir à un opérateur central référent. La possibilité de tels systèmes de comptabilité sans organisme de régulation a réjoui les adeptes du libéralisme monétaire. Ainsi naissait le Bitcoin en 2009, et Facebook projeta de lancer sa cryptomonnaie Libra en 2019, avant de se rétracter au début de cette année, faute d’avoir convaincu les régulateurs. Les blockchains servent également à enregistrer des titres de propriété, notamment dans le monde de l’art. Une entrée du registre s’assimile à un jeton non fongible, c’est-à-dire non interchangeable, ce qui explique la dénomination de NFT, de l’anglais non fungible token. D’après un rapport commun d’Art Basel et UBS, les NFT auraient représenté 2, 6 milliards des 65 milliards de dollars des ventes du marché de l’art en 2021.

La réalisation d’un métavers n’est pas exempte de difficulté. Les plateformes actuelles restent loin des promesses décrites. C’est notamment ce que les critiques ont retenu de la Metaverse Fashion Week, hébergée sur le site argentin Decentraland fin mars 2022. Ils ont regretté la mauvaise résolution graphique des avatars, qui limite l’intérêt de leurs vêtements, et autres dysfonctionnements techniques, rendant l’expérience peu satisfaisante. Par ailleurs, la concurrence des différents acteurs proposant des métavers pose des questions d’interopérabilité3. Va-t-on devoir créer un avatar par plateforme ? Ou bien ces acteurs vont-ils se mettre d’accord sur des normes communes pour garantir la portabilité de nos avatars et différents actifs numériques (vêtements, maison) d’une plateforme à l’autre ? Aujourd’hui, le coût de la technologie est également un frein à l’expérience d’un métavers immersif.

Si le métavers se propose de reproduire les codes du monde incarné dans l’espace virtuel, ce choix de design pour le futur d’Internet est contestable. Cette démarche, dite skeuomorphe, s’inscrit dans une tendance assez naturelle à ramener des concepts informatiques à des représentations physiques, à l’instar du hacking qui s’explique comme une effraction. Cependant, ces technologies immersives demandent un fort degré d’engagement qui semble aller à l’encontre de la préférence des utilisateurs pour les canaux de communication peu intrusifs. Ainsi, plusieurs études s’accordent sur le fait que les jeunes préfèrent les textos aux appels téléphoniques. Dans le même ordre d’idée, l’échec du cinéma 3D, dont les parts de marché au box-office ne cessent de décroître depuis le succès d’Avatar fin 2009-début 2010, souligne le peu de valeur ajoutée d’une troisième dimension à l’écran par rapport aux désagréments liés au port de lunettes. À l’avenant, les photographies en trois dimensions n’ont jamais rencontré un grand succès et apparaissent de l’ordre du gadget.

De nouveaux terrains entrepreneuriaux

Au-delà d’une potentielle demande des utilisateurs, il est légitime de se questionner sur les motivations entrepreneuriales qui prévalent à la construction du métavers. La recherche d’une nouvelle image de Facebook, désormais Meta, peut s’expliquer par la mauvaise presse véhiculée par le scandale Cambridge Analytica qui amena Mark Zuckerberg devant le Congrès américain en avril 2018, puis la divulgation de documents internes par Frances Haugen. Dans ses rapports à la Securities and Exchange Commission (SEC), Meta se dit conscient des risques pour son fonctionnement associés à une mauvaise réputation. Certains spéculent également sur une volonté de changer de modèle de rentabilité. En effet, les profits de Meta sont essentiellement le fait de la publicité. Ils dépendent beaucoup des données utilisateurs pour améliorer la qualité de celle-ci et augmenter le nombre de clics pour lesquels les annonceurs rétribuent l’entreprise. Ce modèle est fragilisé par les volontés régulatrices des États qui s’illustrent avec le Règlement général sur la protection des données de 2016 ou le California Consumer Privacy Act de 2018. Plus récemment, Apple a modifié son système d’exploitation pour mobile, rendant le recoupement de données plus ardu. Cela générera une perte estimée à plus de 10 milliards de dollars en 2022 pour Meta d’après son directeur financier David Wehner, tandis qu’Apple a augmenté ses revenus publicitaires du même ordre de grandeur en 2021. Concevoir son propre matériel électronique pour le métavers affranchirait Meta de ce genre de contraintes imposées par la concurrence.

Si prédire le futur n’est pas chose aisée, il nous paraît peu probable qu’Internet bascule complètement vers un univers virtuel immersif. En effet, il serait tout à fait mal pratique, pour faire un virement en ligne, de devoir d’abord déplacer son avatar pour interagir avec l’avatar d’un banquier plutôt que de suivre trois liens hypertextes comme aujourd’hui. De leur côté, les marchés financiers illustrent l’aspect spéculatif du métavers, à la suite des annonces du changement de nom de Facebook en Meta le 28 octobre 2021. Entre le troisième et le quatrième trimestre 2021, les ventes de terrain sur la plateforme The Sandbox sont restées à 13 millions de dollars sur le marché primaire4, tandis que celles sur le marché secondaire passaient de 16 à 281 millions. Et le cours de la cryptomonnaie associée est passé de 0, 94 dollar le jour de l’annonce à 8, 40 dollars moins d’un mois après, avant de retomber aux alentours de 1, 2 dollar début mai 2022. Un effet d’emballement peut s’expliquer par le comportement grégaire d’entreprises, dont les coûts pour établir une présence dans le métavers apparaît faible devant le risque de passer à côté des lieux de présence des consommateurs. Ainsi le directeur général de la maison mère de Calvin Klein et de Tommy Hilfiger écrit, dans une interview pour le rapport The State of Fashion 2022 de McKinsey : « Quand on voit ces modifications du comportement des consommateurs qui suivent des taux de croissance exponentiels, il faut y aller, même dans le métavers5. »

Que le métavers advienne ou non, les efforts et les investissements actuels auront des applications. En particulier, les joueurs en ligne sont friands de ces expériences enrichies ; pensons à la console Nintendo Wii, aux périphériques d’ordinateur de l’entreprise Logitech, ou à l’application Pokémon Go. Certains s’enthousiasment des opportunités pour les domaines de la médecine et de l’éducation. De fait, les simulateurs de vol participent déjà à la formation des pilotes d’avion. Ils sont également utilisés dans des programmes aidant les passagers à réduire leur peur de l’altitude. Dans le même temps, l’organisation People for the Ethical Treatment of Animals (PETA) utilise la réalité virtuelle comme un outil de communication persuasive pour sensibiliser la population au bien-être animal. Et si les agences immobilières modernes proposent des visites numériques en 3D, les stylistes et architectes bénéficieront probablement de ces produits pour créer des maquettes numériques et visualiser les espaces plus aisément. Dans l’ensemble, Bloomberg Intelligence évalue la taille du marché du métavers aux alentours de 500 milliards de dollars en 2020 et le projette à 800 milliards en 2024. C’est la moitié du produit intérieur brut du Canada. Par ailleurs, sans entrer dans la définition stricto sensu du métavers, l’essor d’assistants virtuels pour dicter des messages, ou commander l’interruption de lumières chez soi, entremêle aussi le numérique et l’expérience sensible. Cette ubiquité du numérique risque de s’accroître avec les débits de télécommunications du réseau 5G permettant de connecter plus d’objets et de capteurs à Internet.

Le développement du métavers soulève les mêmes questions éthiques que celles qui s’appliquent généralement aux nouvelles technologies. Outre-Atlantique, la plupart des craintes sont synthétisées dans une circulaire récente de la Maison Blanche intitulée A Declaration for the Future of the Internet. Vis-à-vis de la santé, un rapport d’expertise collective daté de juin 2021 et provenant de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) met en garde contre l’exposition à ces technologies immersives. Il décrit notamment les risques d’addiction et de désocialisation. Quant aux volontés hégémoniques, les régulateurs sont soucieux de veiller à une concurrence saine et éviter les situations de monopole. Ce fut l’objet de la législation sur les marchés numériques, pour laquelle le Parlement européen a trouvé un accord provisoire fin mars 2022. Les acteurs privés n’ont pas beaucoup d’incitations intrinsèques à se concerter sur des normes communes d’interopérabilité. Ils préfèrent orienter de tels investissements pour concentrer un écosystème sur leurs plateformes respectives. Présentée concomitamment aux instances européennes, la législation sur les services numériques cherche à assurer la modération du contenu et la protection des données. Le métavers pourrait rendre Meta moins vulnérable à ces lois en facilitant un passage vers un modèle de rentabilité fondé sur un service payant sans publicité à l’image de Spotify6. Enfin, si le monde numérique basculait dans le métavers, des enjeux d’inclusivité découleraient du fait que les personnes âgées ont moins d’appétence pour la technologie, et du prix des technologies d’immersion.

Corporéité numérique

Comme Internet et les téléphones mobiles, les technologies de réalité virtuelle transformeront en profondeur notre rapport au monde. À la manière de la fiction, que certains voyaient comme cathartique quand d’autres pensaient qu’elle encourageait les passions, que dire de jeux vidéo où les joueurs pourront se mettre dans la peau d’un bandit de façon plus réaliste que jamais ? Souhaitons-nous un monde où les interactions virtuelles deviennent omniprésentes ? Quid du mélange entre réel et virtuel exploré en 2013 par le film Her dans lequel un homme (Joaquin Phoenix) tombe amoureux d’une chimère numérique (Scarlett Johansson) ? L’ANSES remarque que les études relatives à ces sujets sont trop insuffisantes pour répondre à ces questions sérieusement.

Le concept d’identité pourrait devenir plus fluide, si on peut en changer au gré des avatars.

On sait que l’anonymat associé au virtuel augmente un sentiment de licence sur Internet. D’après une étude de WeProtect Global Alliance, 54 % des utilisatrices d’Internet disent avoir été victimes d’abus sexuels en ligne pendant leur enfance. En particulier, 34 % auraient été incitées à des comportements non désirés. Dans l’optique de prévenir les agressions virtuelles, Meta développe un outil Safe Zone7 qu’un utilisateur peut activer pour éviter tout contact ou interaction non désirée. L’anonymisation des profils est d’ailleurs contre la politique de Facebook qui n’autorise qu’un compte par personne. Et le 21 avril 2022, Elon Musk écrit sur Twitter : « Si notre offre de rachat pour Twitter aboutit, on supprimera tous les faux profils, quitte à y laisser nos vies » avant d’ajouter : « Et on identifiera tous les humains. » Reste que le concept d’identité pourrait devenir plus fluide, si on peut en changer au gré des avatars. Quoique hors d’atteinte pour l’instant, les développements technologiques transhumanistes entraîneraient des transformations encore plus profondes. Ainsi, quand l’entreprise Neuralink d’Elon Musk cherche à intégrer des puces électroniques dans les cerveaux humains, la série Altered Carbon imagine des transferts d’esprit entre corps. Parallèlement, comment envisager la mort quand des technologies d’intelligence artificielle proposent de ressusciter les morts sous forme d’hologramme en reproduisant la tonalité de leur voix et leur façon de parler ?

Pour les décideurs, la gouvernance de ces sociétés en ligne est un enjeu de taille. C’est l’un des objets du programme « Définir et construire le métavers » du Forum économique mondial de Davos, lancé fin mai 2022. S’il est clair que les entreprises devront se conformer aux lois en vigueur, les avocats du Web 3.0 s’enivrent du concept d’organisation autonome décentralisé, DAO étant le sigle anglais. Il s’agit d’ériger des règles algorithmiques qui agissent comme une forme de constitution immuable. Par exemple, si nous imaginons une organisation liée à un métavers, les différents acteurs de ce métavers pourraient recevoir des jetons proportionnels à leur temps de présence, jetons qui représenteraient par la suite leur pouvoir de vote lorsque des modifications sont proposées à ce monde virtuel. En pratique, les constitutions tendent à donner des droits de vote proportionnels à l’argent investi dans la plateforme, avec des mécanismes de rétribution qui stimulent la participation à la gouvernance de l’organisation. Et que dire des capacités d’une plateforme à bannir un utilisateur, qui, à supposer que le métavers devienne un cadre dominant de notre vie, s’assimileraient à l’exil des sociétés anciennes ou à l’ostracisme en Grèce antique ?

Si l’avènement d’Internet ne s’est pas traduit par un adieu au corps, reste à savoir quelle corporéité numérique adviendra. En tout état de cause, les investissements actuels conduiront à des services numériques de plus en plus immersifs. Il est toutefois trop tôt pour se prononcer vis-à-vis d’un changement en profondeur de notre rapport au Web et au monde. Dans l’Hexagone, nos concitoyens sont particulièrement peu au fait de ces projets. À en croire un sondage Ipsos de mai 2022, seuls 28 % des Français sont familiers du concept de métavers, et seuls 31 % nourrissent des sentiments positifs par rapport au mélange du réel et du virtuel. C’est bien loin de l’enthousiasme de la Chine, où ces pourcentages atteignent respectivement 73 % et 78 %.

  • 1. L’auteur remercie Louis Abraham et Charles Arnal pour leur aide à la rédaction de cet article.
  • 2. Les informations financières citées dans cet article ont été glanées via les rapports émis pour les régulateurs financiers telle la United States Securities and Exchange Commission, et les communiqués de presse des différentes organisations mentionnées.
  • 3. L’interopérabilité et la portabilité définissent l’aptitude d’un processus informatique à s’affranchir de sa plateforme d’exécution. Par exemple, le rendu graphique d’un site internet est relativement indépendant du navigateur qui l’affiche.
  • 4. Le marché primaire désigne les transactions entre la plateforme et les utilisateurs achetant des terrains. Le marché secondaire désigne les reventes entre utilisateurs.
  • 5. “When you see those exponential growth rates of consumer-shifting behavior, you need to follow that, including the meta-world.”
  • 6. Les revenus de Spotify, une application de musique en ligne, proviennent à 90 % des abonnements, le reste étant le fait des publicités sur le service gratuit. Cependant notons que, malgré les législations et la diversité de leurs produits, la part de la publicité dans les revenus de Google est stable, aux alentours de 80 %.
  • 7. En français, on dirait « zone de sécurité ».

Vivien Cabannes

Doctorant en mathématiques à l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique et l’École normale supérieure de Paris.

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Faire corps

La pandémie a été l’occasion de rééprouver la dimension incarnée de nos existences. L’expérience de la maladie, la perte des liens sensibles et des repères spatio-temporels, le questionnement sur les vaccins, ont redonné son importance à notre corporéité. Ce « retour au corps » est venu amplifier un mouvement plus ancien mais rarement interrogé : l’importance croissante du corps dans la manière dont nous nous rapportons à nous-mêmes comme sujets. Qu’il s’agisse du corps « militant » des végans ou des féministes, du corps « abusé » des victimes de viol ou d’inceste qui accèdent aujourd’hui à la parole, ou du corps « choisi » dont les évolutions en matière de bioéthique nous permettent de disposer selon des modalités profondément renouvelées, ce dossier, coordonné par Anne Dujin, explore les différentes manières dont le corps est investi aujourd’hui comme préoccupation et support d’une expression politique. À lire aussi dans ce numéro : « La guerre en Ukraine, une nouvelle crise nucléaire ? »,   « La construction de la forteresse Russie », « L’Ukraine, sa résistance par la démocratie », « La maladie du monde », et « La poétique des reliques de Michel Deguy ».