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 Image : Daniel Reche via Pixabay
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Dans le même numéro

Le refus du corps comme destin

entretien avec

Dominique Memmi

Dominique Memmi est directrice de recherche en sciences sociales au CNRS, à Paris. Elle s’efforce de démontrer qu’étudier la dimension corporelle de la vie sociale permet de remarquablement saisir certaines de ses évolutions récentes. Parmi elles, la moindre tolérance à l’emprise physique exercée sur les corps, ou le refus de toute assignation à une destinée particulière en raison d’un trait corporel.

À travers des phénomènes aussi divers que la place nouvelle du corps dans différents militantismes contemporains (écologiste ou féministe notamment), la dénonciation massive des violences sexuelles, ou le désir largement partagé de transformer son corps pour qu’il corresponde à l’idée que l’on se fait de soi, on ne peut que constater l’importance croissante du corps dans la manière dont nous nous rapportons à nous-mêmes comme sujets. De quelles transformations sociales témoignent ces pratiques, vers quoi convergent-elles ? Les critiques adressées à notre supposé individualisme contemporain insistent sur l’abandon de la perspective de transformation collective du monde et le recentrement sur l’individuel. Est-ce de cela qu’il s’agit ?

Un petit préalable, avant de revenir à votre question. Mon travail vise au fond à montrer qu’il s’est produit dans nos sociétés, à partir notamment de la fin des années 1960, ce que j’ai appelé un double refus du « corps comme destin ».

Cela se traduit, d’une part, en une résistance croissante à toute emprise sur le corps qui vienne d’une instance extérieure. La chose se vérifie de manière spectaculaire dans bien des institutions. À l’école, où toute sanction physique est aujourd’hui prohibée (plus de gifle possible ni même de règle en fer assénée sur les doigts !), où la suspicion de l’emprise sexuelle sur les enfants interdit désormais bien des gestes professionnels, et où même l’appropriation institutionnelle de l’image physique d’un enfant dans une photographie de groupe réclame l’autorisation. À l’hôpital, où la manipulation des bébés à la naissance s’est notoirement adoucie1, où les « violences obstétricales » commencent à faire l’objet d’une surveillance assidue et où, plus généralement, toute opération réclame une autorisation signée. En famille, enfin, en témoignent plusieurs législations européennes sur la fessée et où, de fait, à la sanction physique s’est substituée sa simple menace (« Attention, je compte, si à 3 tu n’as pas obéi… 1… 2… »).

Cette hausse du seuil de sensibilité à toute emprise physique, c’est ce que j’ai qualifié de « crise » de la « domination rapprochée », une notion dont je teste en ce moment l’extension. J’ajouterai simplement et plus précisément qu’une instance (individu ou institution) ne saurait aujourd’hui s’emparer du corps d’un autre sans mobiliser un « tiers » (comme on dit en psychanalyse) et que ce tiers est souvent… la parole. On peut toujours prendre, à certains égards, mais à condition de demander. D’où, aujourd’hui, l’obsession du « consentement », des autorisations signées, de l’« obligation de proposer » pour les professionnels, etc. C’est ce que j’ai qualifié de « gouvernement par la parole », dont l’extension se vérifie en famille, à l’école, et à l’hôpital, non sans mettre souvent en difficulté les membres de ces institutions tant elle est gourmande en temps et en énergie2

Mais le refus du corps comme destin se traduit par ailleurs par tout autre chose : un refus de toute assignation à une destinée particulière en raison d’un trait corporel : qu’il s’agisse du sexe biologique (« la » femme n’est plus obligée à engendrer sous prétexte qu’elle a un utérus), d’une apparence sexuée (un homme, pourtant doté d’un phallus, peut désormais aimer les hommes plutôt que les femmes), d’un handicap (vanté désormais, pour se voir définitivement déstigmatisé, comme un trait de la « culture sourde » ou de la « culture autistique »), la couleur de peau se voyant elle aussi soulignée3 mais pour être magnifiée (« Black is beautiful »). Le refus du caractère inexorable et imposé par la nature même du vieillissement et de la fin de vie peut aussi entrer dans cette catégorie : comme l’avortement est une interruption « volontaire » de grossesse, l’euthanasie, déjà autorisée dans certains pays, représenterait une légitime « interruption volontaire de vieillesse ».

Vous avez alors la réponse à votre question : assiste-t-on à un simple « recentrement sur l’individuel » ? Pas autant que vous le suggérez. Car ces traits corporels dessinent eux aussi des collectifs : les handicapés, les patients, les homosexuels, les minorités « visibles ». Ils sont simplement un peu moins larges que les classes sociales et les « prolétaires de tous les pays » des révoltes d’antan. Les femmes, collectif particulièrement large, représentent de ce point de vue une sorte d’exception, mais en même temps ce collectif s’est lui-même en partie scindé en « Cisgenre, bi, trans », etc. Il ne s’agit donc pas tant d’un recentrement sur l’individuel, mais sur d’autres appartenances, quelque peu plus étroites.

Vous avez consacré un article à la manière dont les travaux de Norbert Elias permettent de comprendre ce mouvement de recul de l’emprise physique sur les corps4. Non pas seulement en termes de révolte contre la domination, mais parce qu’il a porté une attention constante à la physicalité des relations sociales, et donc à une individuation qui passe par le corps. Évoquons peut-être ici la question des violences sexuelles, dont la dénonciation a pris une ampleur spectaculaire ces toutes dernières années. Mais peut-être qu’un phénomène comme la réticence au vaccin peut également être pensé en ces termes ?

Dès qu’on parle d’emprise physique, on se retrouve de fait – ce n’est pas comme on veut – confronté à des relations de pouvoir ou de domination. Car pour exercer une emprise physique sur quelqu’un, il faut disposer d’un minimum de ressources et de supériorité le permettant. Dorothée Dussy a ainsi montré, par exemple, que dans les faits, l’inceste n’est jamais induit par un plus faible sur un plus fort, un cadet sur un aîné par exemple. Il y faut une supériorité en âge (adulte/enfant, aîné/cadet), et/ou en force physique (homme/femme), à laquelle s’ajoute souvent une supériorité en ressources sociales (producteur/comédien, professeur/étudiant, etc.). Il peut certes ne s’agir que d’un différentiel de pouvoir ou d’autorité sociale, comme pour le médecin faisant un toucher rectal ou vaginal sans parole ni consentement. Ou même de quelque chose de moins institutionnalisé, comme le charisme personnel que peut détenir un individu sur les autres (comme dans le cas des prédations sexuelles dans certaines sectes). On se retrouve donc bien souvent dans une zone floue entre pouvoir, domination, simple autorité ou influence : comme dans certaines affaires d’abus sexuel, précisément5. Mais « si la chance de trouver quelqu’un disposé à obéir aux ordres » qu’on désire voir satisfaits définit pour Max Weber la domination sociale objective, alors vous voyez qu’on se retrouve de fait bien souvent dans ce cas de figure à propos des cas que j’ai évoqués.

Ce qui peut peut-être vous amener à penser qu’il ne s’agit pas de domination, c’est que l’instance externe qui exerce son autorité sur les corps est parfois fort légitime. C’est le cas par excellence de l’hôpital, qui a pour vocation de s’emparer des corps « pour la bonne cause ». Or la disparition ou la mise en retrait des salles de contention en psychiatrie, l’interdiction officielle en 2016 de l’enveloppement des autistes dans des tissus mouillés ou secs (le packing), l’apparition, d’un code de déontologie médicale à l’autre, d’un protocole très formalisé du consentement pour le toucher rectal, la sensibilité depuis les années 1990 à la « violence obstétricale » le signalent là aussi : la contestation larvaire de toute emprise sur les corps, même au nom de la santé, est bien là. Autre exemple, l’armée. Si la défense de la patrie semble toujours une fonction sociale légitime (si l’on en croit l’augmentation des budgets et la permanence des parades militaires dans nos pays), la disparition du service militaire dans la quasi-totalité des pays occidentaux (sauf en Suisse !) et la difficulté des recrues, et même des supérieurs, à accepter l’idée du « mourir pour la patrie » montrent la résistance au don physique de soi à une instance externe. « Sauver le soldat Ryan » semble à certains égards plus important que de le sacrifier pour la bonne cause.

C’est ce que traduirait aujourd’hui la révolte contre les vaccins. Ni la « bonne cause » que représentent la santé publique et le désengorgement des hôpitaux, ni même la bonne cause que représente la simple survie physique de l’intéressé ne parviennent à surmonter chez certains l’horreur de l’emprise étatique sur les corps que traduit une telle obligation vaccinale, cristallisée, il est vrai, par une multiplication d’attestations officielles (de sortie du domicile, de test, de vaccin). Et pour reprendre votre question, ici, vous avez raison, il s’agit moins de domination que de pouvoir institutionnalisé (distinction que Max Weber respecte d’ailleurs), mais n’est-ce pas bien secondaire par rapport à ce que nous constatons : cette résistance croissante à toute emprise physique par un tiers ?

Dans votre ouvrage La Revanche de la chair (Seuil, 2014), vous identifiez des convergences entre différentes pratiques liées à la naissance, au deuil, à la filiation : la valorisation de l’allaitement ou du peau à peau avec les nouveau-nés, celle de la confrontation au corps des défunts, ou encore l’accès aux origines biologiques pour les personnes adoptées. Elles témoignent selon vous de l’importance de la « matérialité de la chair comme nœud névralgique du travail sur soi ». Vous montrez aussi que ces nouvelles pratiques mettent à mal un clivage devenu artificiel en sciences sociales, entre constructivisme (que l’on croyait être la pente irréversible sur laquelle sont engagées nos sociétés) et naturalisme. Ce retour au corps est-il une nouvelle forme de naturalisation ?

Pour vous répondre, revenons au double « refus du corps comme destin ». Si une instance tierce ne doit plus pratiquer une emprise par corps, si la société, l’État, et la nature elle-même ne doivent plus par ailleurs vous assigner à votre statut de femme, de handicapé, de sujet vieillissant, voire de mourant, sans volonté propre, cela ouvre évidemment des marges de liberté pour les individus. Il se trouve (mais ce n’était peut-être pas fatal) que bien d’entre eux ont eu tendance à s’en emparer. Si l’État, avec la contestation de tout eugénisme étatique, n’oblige plus à « engendrer pour la patrie  », alors on va pouvoir évidemment proclamer « un enfant si je veux, quand je veux » à partir de la décennie – véritablement révolutionnaire de ce point de vue ! – qui s’étend dans la plupart des pays occidentaux entre 1965 (introduction de la contraception) et 1975 (légalisation de l’avortement en France). L’acmé de cette rupture, de cette révolte contre à la fois l’emprise et l’assignation corporelles se situe en effet dans cette période, où se solidifient notamment les mouvements féministes et homosexuels, et où les assignations de genre vont se trouver de fait bouleversées : les filles pouvant désormais se transformer en garçons (autorisation du pantalon dans l’enseignement secondaire) et les garçons en filles (cheveux longs et chants avec des voix « de fille » à la Polnareff).

On constate alors évidemment que c’est plutôt « à l’envers » – en commençant par les sujets – que s’est faite l’évolution qui vient d’être retracée. Norbert Elias pense que nos sociétés connaissent un « processus d’individuation », sorte d’élément moteur, produisant divers effets sur l’exercice de l’autorité au cœur du monde social comme des institutions.

Mais par conséquent, bien de ces sujets sociaux vont faire preuve d’un véritable « constructivisme » en acte : plus question que la nature dicte ses lois, qui ne sont en fait qu’énoncées et redoublées par celles de l’État et du monde social. On ne « naît » plus femme de toute éternité. Plus question qu’une femme engendre parce qu’elle se retrouve tout bonnement enceinte, qu’un sujet meure dans un service de soins palliatifs hostile à l’euthanasie parce que son heure est tout simplement venue, ou qu’un gaucher ou un homosexuel soient impérieusement « rééduqués »…

On a certes affaire dans ces batailles-ci à des sujets assez militants, parfois nantis d’une approche théorique relativement sophistiquée (féminisme, mouvement en faveur de l’euthanasie). Mais que dire des parents infertiles, candidats à une adoption ou à une PMA, qui affirment tranquillement en consultation que ce n’est pas la nature et les liens du sang qui décident de la filiation, mais bien leur propre « projet parental6 » ? En même temps, on les voit préférer la nature… chaque fois que c’est encore possible. Il existe en effet chez eux une hiérarchie entre les méthodes de PMA favorisant celles où les gamètes viennent le plus possible des deux conjoints (injection intracytoplasmique de spermatozoïdes, ICSI) plutôt qu’un seul d’entre eux (insémination artificielle avec donneur, IAD), le ventre de la mère (fécondation in vitro et transfer d’embryon, FIVETE) plutôt que celui d’une autre… C’est pourquoi j’ai parlé aussi d’un « naturalisme » en acte chez nos contemporains, capables de se livrer à tout ce qui est possible pour réaliser leur projet et satisfaire leur volonté pure au nez et à la barbe de la nature… mais aptes à utiliser ce que celle-ci peut néanmoins offrir : dans le réel (méthodes utilisant les gamètes du couple) comme dans l’imaginaire (sélection parmi les gamètes d’autrui pour provoquer des ressemblances avec les futurs parents, évacuation dès la naissance de toute présence de la mère donneuse dans l’album de photos familial, etc.7).

C’est pourquoi j’ai pu écrire que le débat savant, à haute densité théorique, entre naturalisme et constructivisme n’est pas forcément plus intéressant à analyser que les extraordinaires formations de compromis idéologiques que traduisent les pratiques effectives de nos contemporains. Pour le dire autrement, il est dommage que l’histoire des idées « à la française », trop souvent focalisée sur les produits savants, oublie la sophistication non seulement des produits profanes, mais tout simplement des pratiques sociales ordinaires et de ce qu’elles traduisent de ces arbitrages entre volonté individuelle et argumentaire « naturalisant ».

Vous avez évoqué pour commencer le refus du corps comme destin. Que l’on pense aux évolutions bioéthiques dans lesquelles beaucoup se projettent, ou à la massification du recours à la chirurgie esthétique, il est clair que ce corps, qui est aujourd’hui placé au cœur de la définition de soi, est un corps choisi, un corps modulable. Y a-t-il un paradoxe, ou du moins une tension, entre la revendication du corps comme support d’identité, et l’affirmation de la malléabilité de ce corps ?

Je ne vois pas de tension entre ces deux phénomènes. J’ai essayé de mettre en valeur l’accentuation dans le dernier tiers du xxe siècle du « processus d’individuation » et, surtout, le fait qu’il a eu la particularité de prendre le corps comme lieu privilégié de son accélération. Si ma thèse est juste, il n’y a pas de contradiction entre les deux phénomènes que vous évoquez. Encore une fois, si les instances externes sont désormais censées retirer ou atténuer leur emprise sur le donné corporel des agents sociaux, celui-ci devient plus disponible pour ce que ces derniers peuvent en faire.

Le corps devient un palimpseste où signifier son ineffable singularité.

Or si le processus d’individuation s’intensifie, ils vont chercher des outils pour les aider à « se prendre pour des individus » : car c’est cela la définition du processus d’individuation par Norbert Elias. Si le corps est devenu disponible, il devient un outil possible, un endroit, un palimpseste où signifier son ineffable singularité ou corriger les derniers diktats, ceux imposés malgré tout par la nature : il suffit de penser ici à la massification (relative) de la chirurgie esthétique et du tatouage (autrefois réservé aux déviants ou à certains corps de métiers), ou encore le succès, que semble attester la publicité, de la cosmétique et des parfums pour hommes…

Élargissons, pour terminer, le spectre géographique de ces réflexions. Parlons-nous ici uniquement des sociétés dites occidentales ? Quelle est l’actualité de ce questionnement et des travaux de recherche dans d’autres espaces, d’autres cultures ?

Elias et les éliasiens se sont concentrés sur les sociétés occidentales (et même simplement européennes pour Elias). Tout simplement parce que le processus d’individuation accompagne un degré – ou plutôt un type – de développement de nos sociétés.

Je fais partie moi aussi de ces chercheurs qui pensent que le comparatisme entre des sociétés trop lointaines risque surtout de mettre en valeur… leurs énormes différences. Ou au mieux de révéler de brutales évolutions dans les pays émergents ou en développement qui constituent alors une donnée qui leur est propre, et dont la spécificité, voire la potentielle réversibilité, mérite alors une analyse particulière. Je pense par exemple à la distance radicale qui sépare de leurs mères, au Brésil, les femmes ayant pu accéder enfin à la contraception.

Comment comparer, avec les nôtres en effet, et sans un protocole d’enquête sérieux, des sociétés où, par exemple, les pratiques homosexuelles sont punies de mort, où l’État peut obliger les femmes à se voiler, où mourir pour une cause dépassant sa simple existence propre est davantage banalisé, ou bien encore des sociétés où la santé publique peut exiger des individus, en cas d’épidémie de Covid-19, des transferts durables d’habitants d’immeubles entiers dans des espaces de surveillance médicale, en opérant une séparation entre parents et enfants ? Il ne s’agit aucunement de jugement ici, mais d’un simple constat sur le seuil très variable, selon les sociétés, de tolérance à l’emprise physique par des tiers (ici par l’État). Ce que j’ai voulu mettre en valeur, c’est donc bien une profonde révolution des pratiques et des sensibilités, mais propre à un moment historique et à une aire géographique déterminée. Et c’est déjà suffisamment passionnant comme cela !

Propos recueillis par Anne Dujin

  • 1. Voir Maï le Dû, Toucher pour soigner. Le toucheur, le médecin et l’ostéopathe : un nourrisson entre de bonnes mains, Toulouse, Érès, 2022.
  • 2. Voir Dominique Memmi, Faire vivre et laisser mourir. Le gouvernement contemporain de la naissance et de la mort, Paris, La Découverte, 2003.
  • 3. Voir les travaux et les actions du Conseil représentatif des associations noires (CRAN).
  • 4. D. Memmi, « Pas touche ! Trois modalités actuelles du procès de civilisation », Cités, vol. 88, no 4, 2021, p. 27-40.
  • 5. Voir Mathieu Trachman, « L’ordinaire de la violence. Un cas d’atteinte sexuelle sur mineure en milieu artistique », Travail, genre et sociétés, vol. 40, no 2, 2018, p. 131-150.
  • 6. Sur la façon dont le recours à la PMA interroge le rapport contemporain à la filiation, on se reportera aux travaux de la sociologue Irène Théry.
  • 7. À ce sujet, voir D. Memmi, « Les bricolages profanes », dans La Revanche de la chair. Essai sur les nouveaux supports de l’identité, op. cit., p. 191-217 ; voir également Séverine Mathieu, Faire famille aujourd’hui. PMA, bioéthique et religion, Paris, Le Cavalier bleu, 2020.

Dominique Memmi

Directrice de recherches en sciences sociales au CNRS, elle a notamment publié La revanche de la chair (Seuil, 2014).

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