Voyage au bout de la nuit, un roman de la compassion démocratique ?
L’expérience des tranchées en 1914 fonde la compassion pour le peuple dans le premier roman de Céline. Mais cette compassion peut-elle fonder une communauté ? Ce commentaire attentif du roman souligne l’originalité de cette pitié associée au mépris, de telle sorte que toute idée de justice ou de civilité politique apparaît impossible.
Si nous relisions Voyage au bout de la nuit à nouveaux frais ? Si nous envisagions que Céline, dans ce roman, se livre à une expérience de narration qui est aussi une mise à l’épreuve des valeurs déclarées de la démocratie et de la République1 ? Le laboratoire romanesque ne lui permet-il pas en effet de soumettre le personnage-narrateur, Bardamu, à une initiation au nom de laquelle on a pu rapprocher Voyage au bout de la nuit de Candide2, mais aussi à une émotion de l’humain ? C’est cette émotion que nous interrogerons ici, en proposant plus précisément pour hypothèse de lecture la clef de la compassion démocratique.