
Après la décennie noire en Algérie. Entretien avec Merzak Allouache
L’esthétique cinématographique de votre film Le Repenti semble révélatrice d’une amnésie nationale profonde. L’Algérie a-t-elle du mal à tourner la page de la « décennie noire » ?
Je ne suis pas sociologue et jusqu’à aujourd’hui, il n’y a pas à ma connaissance d’études vraiment sérieuses (historiques ou sociologiques) qui ont abordé la décennie noire et l’amnésie officielle qui s’est ensuivie. En ce qui me concerne, en tant que cinéaste, je ne fais qu’observer la société algérienne, ce qui me permet de raconter des histoires (fictions) qui collent plus ou moins à la réalité du moment. En 2012, au moment des « révolutions arabes » (Égypte, Tunisie, Libye), le problème de l’amnésie en Algérie remonte à la surface. On commence à en parler dans la presse.
En 1999, après les négociations entre l’armée et les « maquisards » de l’Armée islamique du salut, suivie par l’instauration de la concorde civile, alors que nous découvrons un personnage nouveau au sein de la population algérienne, le « repenti », je lis dans un journal algérien une lettre de lecteur relatant l’histoire horrible qui allait donner naissance au scénario du Repenti. Un ancien terroriste voulait monnayer avec une famille la visite de la tombe d’un enfant enlevé et assassiné dans les maquis. Je n’ai pu tourner le film qu’en 2012. Dans la société algérienne et particulièrement parmi les personnes touchées dans leur