
André Thomazo. La vie extraordinaire d’un homme ordinaire de Roland Huesca
Ce livre raconte plusieurs histoires mais, au centre, il y a l’engagement d’André Thomazo dans l’action culturelle du Parti communiste, et ce qu’était cette dernière. Né d’« un couple de militants communistes » de Saint-Tropez, A. Thomazo (1929-2017) devient, en 1962, selon Le Maitron, directeur adjoint de l’Agence littéraire et artistique parisienne pour les échanges culturels, fondée dix ans plus tôt par Louis Aragon et Georges Soria. Ses entretiens avec Jean Miaille ont été confiés par ce dernier et la famille Thomazo à Roland Huesca, qui en a fait ce beau livre sur « un homme ordinaire ». Il y dépeint des « paysages », d’abord ceux où a vécu Thomazo, avec Saint-Tropez bien sûr, entre l’usine de torpilles et les hauts lieux rendus célèbres par les vedettes venues de Saint-Germain-des-Prés. Des paysages « affectifs » aussi, comme celui qui préside au choix du prénom André, en mémoire de Marty, emblème des mutins de la flotte française en mer Noire en 1919. Et surtout une histoire sociale, celle qui marie à l’église des parents communistes engagés ainsi que celle des débats à l’intérieur du « parti ouvrier » dans la France du xxe siècle. Thomazo avait en effet adhéré en 1944, à Limoges, aux Jeunesses communistes (l’Union des jeunesses républicaines de France). De retour dans le Var, il devint secrétaire fédéral des Jeunesses communistes. Élu à leur Conseil national lors du congrès de décembre 1950, il entre au Bureau national en 1953 et y reste jusqu’en 1962. Pendant toutes ces années, il se rend en URSS et dans les pays socialistes, accueille en France les plus grandes productions culturelles des pays « de l’Est » : par exemple, les ballets Moïsseïev et du Bolchoï, les chœurs de l’Armée rouge ou le cirque de Moscou. Il se lie d’amitié avec des artistes de renom (Maurice Béjart, Rudolf Noureev, Robert Hossein, Mikis Theodorakis, Jérôme Savary…). Dans les années 1970, il réalise la programmation artistique et culturelle à la fête annuelle de L’Humanité. Pour résumer son combat, R. Huesca a cette formule : « Séduire les masses et les émanciper par l’élévation de l’esprit, le tout dans une atmosphère de fête, de partage et de joie. » Cette conception militante et politique de la « grande culture » au Parti communiste n’est pas sans poser des questions, mais elle a connu des réussites éclatantes.