
Essais de Marcel Proust
Édition sous la dir. d’Antoine Compagnon, avec la collaboration de Christophe Pradeau et Matthieu Vernet
L’éclectisme de Marcel Proust se retrouve dans ses Essais, où il se fait « concierge de génie ». Nous le découvrons averti autant en littérature, art plastique et musique qu’en philosophie. Ces « matières » se retrouvent dans cette suite de textes à travers le temps. Sa culture encyclopédique y est présente, mais selon le « tri » que l’auteur a opéré dans cette accumulation de connaissances. La philosophie est surtout omniprésente, puisque, à sa manière, La Recherche est un roman philosophique.
Les divers essais complètent ainsi La Recherche dès Contre Sainte-Beuve. Dans la première existe un philosophe caché qui pratique des « barbotages » d’après les leçons d’Alphonse Darlut, professeur de Proust à Condorcet et qui prenait son chapeau comme exemple et parangon de la réalité. Ces essais fourmillent d’analyses et de « consultations » où l’intellect de Proust tourne à plein régime dans les examens d’œuvres très diverses. Se découvre donc un Proust qui reconnaît ce qui « détruit la ressemblance » chez Picasso entre autres, que Proust a connu.
L’art visuel possède une place singulière : « Par l’art nous pouvons sortir de nous et voir le monde se multiplier », écrit-il. Les « rayons spéciaux » en perdurent et il les découvrit chez Rodin et Monet, à qui il emprunta la conception de son œuvre comme « cathédrale d’art ». Et si, chez Proust, la mémoire est un instrument de référence, elle devient dans ce livre un lieu de découverte. Proust semble faire sécher « l’éternel présent » sur la corde invisible de ses marges, qui sont bien plus, malgré son mot, que quelques « hardes ».