Le droit mis à l'épreuve
Si la pensée de Paul Ricœur sur le droit et la justice est si pertinente, c’est qu’elle reconnaît qu’on ne peut penser la justice sans s’arrêter tout d’abord sur des conditions réelles où elle se déroule. Au cours d’un procès, le droit n’apparaît plus comme une série de principes ou un code : il est mis à l’épreuve dans sa capacité à dégager la vérité et à dire le juste.
Dans les deux volumes sur le Juste1, Ricœur fait un choix philosophique dont la portée apparaît au fur et à mesure de la lecture de ces textes : il choisit en effet d’aborder la question du juste à partir de son exercice effectif, du lieu propre de sa réalisation, c’est-à-dire du procès. Ce lieu, entendu au sens fort du terme, c’est-à-dire comme ce qui permet un véritable événement, n’est réductible ni au droit, ni à la morale, ni à la politique. Sans limiter le droit et la justice à cette mise en scène, aussi centrale soit-elle, Ricœur voit dans le procès une figuration philosophique de la place spécifique du droit et de la justice par rapport au politique et à la morale.
Dès le début de son œuvre, Ricœur avait perçu l’importance de l’apparition du tribunal pour saisir le mal. P