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La rareté et les flux numériques. La valeur de l'attention

janvier 2014

#Divers

On assiste, avec le numérique, à une « inversion de la rareté » ; là où, auparavant, la rareté (notamment dans le domaine culturel) était du côté de l’offre et l’abondance du côté de la demande (l’attention du spectateur), aujourd’hui c’est l’attention qui se fait rare, face à une offre pléthorique. Comment penser, alors, une économie de l’attention ?

Le numérique met l’économie de l’attention sur le devant de la scène. Non qu’elle l’ait vraiment jamais quittée : la question de la compétition pour l’attention de l’acheteur est au cœur des théories du management. Comme le notent John Beck et Thomas Davenport1, la compréhension et la gestion de l’attention sont les déterminants de la réussite commerciale, l’attention oscillant entre trois modalités et leurs contraires (attention captive, attractive, périphérique, vs. volontaire, répulsive, focalisée) et la qualité de la réception d’une information dépendant de la position du curseur entre chacun de ces trois pôles.

Si l’expression est séduisante, l’économie de l’attention n’apparaît à première vue que comme une extension de la théorie de la publicité à l’ère de l’internet. Elle semble néanmoins ouvrir de nouveaux horizons aux économistes en crise sur tant de sujets et incite à la coopération entre disciplines (économie, sciences cognitives, sociologie).

Parce que sur le web, ce sont des milliards de pages qui sont en compétition, la capture des attentions individuelles ou collectives prend une dimension nouvelle. Au-delà du changement d’échelle, il apparaît que l’attention est une condition nécessaire – mais non suffisante – de la création de valeur ; elle est au cœur de la réflexion sur les business models du numérique.

Pour en donner une illustration simple mais parlante, on peut mentionner le différentiel de valorisation de la publicité sur le papier et sur le net. La valeur du « même » espace publicitaire sur un journal d’information sur le net vaut dix à quinze fois moins que sur le papier, malgré les données engrangées sur le profil des internautes. Comment le comprendre ? C’est la multitude des sollicitations parvenant à l’internaute qui fragilise la possibilité de valoriser l’espace informationnel à hauteur de ce qui se fait dans le monde physique.

Émergence d’un concept

Membre de l’école autrichienne d’économie politique, Fritz Machlup publie en 1962 The Production and Distribution of Knowledge in the United States, puis Knowledge : Its Creation, Distribution, and Economic Significance. Il propose une typologie de la connaissance et du savoir. On lui doit notamment le concept – aujourd’hui un peu galvaudé – d’économie de la connaissance. Il estimait que l’économie de la connaissance représentait en 1958 aux États-Unis 29 % du produit national brut. En 1977, Marc Uri Porat (rejoint ultérieurement par d’autres chercheurs, notamment Michael Rubin2) se lance dans une recherche monumentale sur la taille de cette économie. Porat distingue deux secteurs, celui de l’information primaire et celui de l’information secondaire. Le premier rassemble les métiers de création ou de gestion de l’information, (scientifiques, écrivains, bibliothécaires, etc.) ; le second comprend des métiers liés à la production d’information dans des secteurs extérieurs à celle-ci (planning, coordination, évaluation, prise de décision au sein de diverses industries). C’est cette définition qu’a adoptée l’Ocde dans ses études sur l’économie de l’information. Les évaluations qui en ont découlé sont nombreuses, allant jusqu’à mettre en évidence une contribution de l’économie de l’information de 56 à 63 % du Pnb en 19973.

L’information est donc un moteur de la croissance économique, même si les frontières en sont floues et poreuses. L’attention permet l’accès à l’information ; elle en est un des « intrants ».

Ce sont avant tout les travaux pionniers d’Herbert Simon, prix Nobel d’économie en 1978, qui fondent la théorie économique de l’attention. Simon s’inspire des théoriciens de la psychologie cognitive et s’interroge sur la « rationalité limitée » qui préside aux comportements économiques et au management des organisations. Il met en évidence le paradoxe apparent qui associe la richesse de l’information à la pauvreté de l’attention :

Ce que l’information consomme est assez évident : elle consomme l’attention de ses destinataires. Par conséquent, l’abondance d’information entraîne la pauvreté de l’attention et le besoin de répartir efficacement cette attention parmi la surabondance des sources d’information4.

Simon reconnaît ainsi deux qualités de l’attention : le fait qu’elle est une ressource et qu’elle a une valeur. Bien plus tard, Josef Falkinger modélise les conditions du passage de la rareté à l’abondance informationnelle, celle-ci allant de pair, dans la droite ligne de l’intuition énoncée par Simon, avec la rareté de l’attention5.

D’un côté se déploie une économie de l’abondance tandis que de l’autre côté, la valeur procède de l’information, de la réputation et de la notoriété, autrement dit de la rareté. Une illustration : l’art contemporain affiche la prévalence du message et de l’attention qu’il requiert sur les œuvres elles-mêmes. Dans son livre sur l’économie de l’attention, Richard Lanham voit en Andy Warhol la figure d’un… « économiste » capable de s’inscrire dans les jeux d’attention entre acteurs de la vie artistique et de mettre en valeur le style plutôt que la substance6. Le cas de Warhol est comme un résumé saisissant de la tension entre le message et l’œuvre, entre le multiple et le singulier, entre la multitude et la rareté.

De Warhol…

Andy Wahrol comprit mieux que tout autre artiste les enjeux et les outils de la capture des attentions individuelles et collectives. Il s’attelle à la construction d’une figure d’artiste rare par son talent mais dont les apparitions publiques sont fréquentes. Il transforme son apparence pour la rendre immédiatement reconnaissable : il fait remodeler son nez, porte une perruque argentée. En reproduisant leurs visages, il met en scène sa proximité avec les vedettes de son temps (Cecil Beaton, Jean-Michel Basquiat, Robert de Niro, Ingrid Bergman, John Travolta, Francesco Clemente, Jerry Hall, Richard Avedon, Sao Schlumberger, les chanteurs du groupe Velvet Underground). Son art s’accommode parallèlement de la reproduction des objets quotidiens, dollars, boîtes de soupe Campbell, bouteilles de coca-cola, ketchup, corn-flakes, la marchandise et la star devenant les « icônes d’une nouvelle religion pareilles à de saintes reliques enfermées dans un espace abstrait7 ». Tel Picasso incité par Léonce Rosenberg à peindre des œuvres en séries, Warhol inonde le marché d’images de stars et d’images du quotidien, toutes aisément identifiables. Michel Nuridsany décrit la fascination de Warhol pour le génie prolifique de Picasso, qui le conduit à comprendre que

la rareté n’est pas synonyme, en art, de gloire, de succès. Sur une scène qui se mondialise, il faut être partout à la fois, à Paris comme à New York, à Milan comme à Tokyo. Il faut pouvoir passer souvent en vente publique – c’est à ce prix qu’on existe –, il faut satisfaire les demandes des musées, des universités, des collectionneurs, être dans plusieurs galeries à la fois, occuper l’attention des médias constamment. Être partout présent. Produire. Alors l’ubiquité nécessaire paraîtra véritablement impressionnante8.

Lanham confronte Warhol et Christo, dont « l’art est fait de la même substance : l’attention9 ». Il met en lumière la façon dont les flux d’information ont besoin de filtres. C’est ainsi que, dans le cas des œuvres de Christo, l’emballage désigne l’œuvre d’art tout en s’attelant à la faire disparaître.

L’attention apparaît comme une monnaie. Acquise par un individu, elle peut être transférée à un autre10. Revenons un instant à Warhol. Il sut tirer profit de la notoriété de son entourage, dans un système d’échanges réciproques, où la gloire des uns nourrit celle des autres. Il peint et tire maintes sérigraphies du visage de Mao d’après la photographie du Petit Livre rouge, qu’il expose de façon spectaculaire sur fond de papier peint Mao à Paris en 1974. Réciproquement, la Française Ultra Violet reconnaît qu’elle cherche à se glisser à son côté sur les photos pour voir son nom figurer sur la légende.

Par un curieux phénomène social, en raison de ses magnifiques effigies de Marilyn, Liz et Jackie (ou de lui-même pour finir), d’autres aspiraient à la gloire que pouvait conférer un portrait de Warhol, par-delà leur propre situation privilégiée11.

L’attention portée sur les uns accroît l’intérêt pour ceux qui se joignent au même « wagon ». L’affiliation d’un artiste avec une école lui permet de bénéficier de la réputation collective, et la réputation des uns génère une rente pour tous. Pour les artistes mineurs ou moins connus, un « effet satellite » résulte de l’appartenance à un réseau ou à un cercle lié à un artiste reconnu. Lorsqu’en 2000 Gao Xingjian reçoit le prix Nobel, les ventes de tous les auteurs de sa maison française d’édition, les éditions de l’Aube, augmentent de 25 % environ12.

… à l’internet

Comment l’alliance du rare et du multiple fait-elle sens avec le numérique ? Sur le Web, les attentions se dispersent et se rassemblent, raccourcissant encore le cycle de la notoriété :

[…] le web est un moyen de plus en plus efficace pour transmettre et faire circuler l’information […]. Datant d’il y a plus de 2 000 ans, les écrits d’Aristote auront probablement suscité l’attention de quelques millions de lecteurs. Cela constitue une forme d’immortalité […]. Peu de gens suscitant l’attention de nombre de leurs contemporains peuvent espérer rester connus durant des millénaires, mais ils ont une bien meilleure chance de récolter les fruits de l’attention de millions de gens sur le web alors qu’ils sont encore vivants. C’est ainsi qu’ils peuvent vivre, et bien vivre, dans la nouvelle économie13.

L’internet, c’est l’infinie quantité de ces informations qui s’échangent chaque jour, requérant des capacités de stockage et un potentiel en bande passante toujours plus importants. C’est aussi un nombre d’internautes dont la croissance considérable se renforce de la montée du temps passé sur les réseaux. En 2019, 90 % de la population mondiale devrait avoir accès à l’internet contre 1, 9 milliard en 2013 (soit environ 27 %). On pourrait en déduire qu’à la masse de l’offre fait face un tel nombre d’internautes que la rencontre entre offre et demande se produit naturellement, en l’absence de rareté.

Mais les travaux conduits sur les comportements sur le net montrent de manière évidente le caractère fragmenté et dispersé de l’attention, de sorte que la multitude des individus connectés se décompose et ne peut se traduire par des séquences d’attention suffisamment longues et intenses. En d’autres termes, le nombre des internautes et la richesse de l’offre informationnelle vont de pair avec la rareté et la fragmentation des attentions, dans cet étonnant renversement où l’offre est infinie et l’attention devient une ressource rare.

Linda Stone distingue le multi-tasking et la continuous partial attention. Dans le premier cas, l’internaute cherche à être plus productif et plus efficient en effectuant plusieurs tâches simultanément. Dans le second cas, il est continûment sur le réseau à la recherche des meilleures opportunités et des meilleurs contacts, révélant un besoin permanent d’être connecté, occupé, reconnu (sur le réseau). L’attention est sollicitée mais elle est partielle, dispersée, discontinue, de sorte que l’individu se sent dépassé, submergé, plongé dans un mode de vie stressant, incapable de réfléchir et de prendre des décisions. Nombre de travaux vont plus loin et mettent en cause non seulement le caractère volatile de l’attention mais encore la capacité à être multitâche dans le monde numérique14… Plutôt que d’en traiter de manière générale, Dominique Boulier identifie trois régimes de l’attention à partir de deux paramètres, l’intensité et la durée15. Dans l’ordre de la durée, c’est la fidélisation qui s’impose, lorsque seule l’intensité joue, on est dans le régime de l’alerte, tandis que la combinaison des deux conduit au régime de l’immersion. Chacun de ces régimes porte en lui ses ennemis ou ses dérives : répétition distraite dans le cas de la fidélisation, rumeur et zapping dans le cas de l’alerte, « Cos » (cognitive overflow syndrome – syndrome de saturation cognitive) et clôture dans le cas de l’immersion. L’attention se propage et se construit, ou à l’inverse se ferme et se détruit suivant ces différents cas.

La monétisation des attentions

Des économistes ont modélisé la formation de la valeur procédant de l’attention en combinant deux dimensions de l’échange : sa dimension affective et sa dimension marchande. L’échange de commentaires sur YouTube est vu comme une monnaie qui récompense le travail et incite à la création16.

Parce que l’attention est difficile à saisir et à stabiliser, sa monétisation est à la fois incertaine et fragile. Sur son blog, toujours intéressant à consulter, Jean-Michel Salaün écrit :

Avec le web, l’économie de l’attention se cherche encore souvent, mais dans une relation qui se renverse : on nous tape sur l’épaule d’abord, pour pointer du doigt éventuellement ensuite. Autrement dit, l’attention sera continuellement fractionnée et distraite par la connectivité du réseau et les liens qu’il propose. Dès lors le principal de la capitalisation de l’attention ne se produit pas par les textes, mais par le mouvement, par la tête que l’on tourne. D’où la prospérité de ceux qui sont capables d’orienter le mouvement et le recul au contraire de ceux qui misent sur le contenu qui nécessite une attention prolongée. Pour l’internaute tout devra être gratuit, car il n’est plus capable de fixer une attention continuellement sollicitée17.

Comment monétiser les contenus dès lors que l’attention est ainsi sollicitée ? Ce sont sans doute les réponses qui s’inscrivent dans des logiques de marchés à double face qui s’avèrent les plus pertinentes. Les marchés bifaces (two-sided markets) sont les marchés auxquels s’adressent des plates-formes ayant deux catégories distinctes d’utilisateurs18 : sur l’internet, ces deux catégories sont les internautes qui envoient leurs requêtes ou surfent sur des sites et les annonceurs qui achètent de l’espace publicitaire. Cette structure de marché ouvre la possibilité (mais non l’obligation) de céder gratuitement l’un des deux biens (l’information) dès lors que le second est payant (la publicité). Plus le nombre des internautes s’accroît, plus le prix de l’espace publicitaire devient élevé.

L’internet repose en large partie sur une économie de la publicité. On pourrait arguer que l’information et la publicité sont de longue date indispensables afin de faire connaître les offres qui arrivent sur un marché. Mais la différence est de deux ordres : d’une part, l’effet de multitude transforme l’échelle et la nature de l’enjeu. D’autre part, la dispersion de l’attention induite par l’écran est inédite – et à présent largement documentée. La capture des attentions devient l’enjeu majeur des modèles économiques de l’internet. Elle peut revêtir deux formes : la constitution de communautés d’échanges sur la base de valeurs ou de centres d’intérêts communs, la constitution de stocks de données personnelles permettant d’adresser des publicités et des informations ciblées.

En France, en 2012, le chiffre d’affaires de la publicité en ligne atteint 2, 7 milliards d’euros19. Parce que offrant la plupart de ses services gratuitement mais générant un chiffre d’affaires publicitaire impressionnant, Google apparaît comme le système publicitaire le plus accompli au plan économique. En effet, sur l’année 2012, Google a réalisé un chiffre d’affaires de 50, 175 milliards de dollars, dont près de 45 milliards de dollars de revenus publicitaires. Des bannières publicitaires sont ciblées en fonction des mots-clés ou du comportement de navigation de l’internaute (Google AdWords). Les annonceurs paient au nombre de clics selon un système d’enchère. AdSense est la régie publicitaire de Google utilisant les sites web comme support pour ses annonces. Celles-ci sont le plus souvent contextuelles, mais d’autres formules sont possibles.

L’économie de l’attention repose sur le repérage des centres d’intérêt via le suivi des comportements et la capture des traces laissées par les internautes. Les raffinements progressifs de la collecte des données personnelles sont le propre des géants du net. La pertinence des recommandations dépend des éléments collectés sur la personnalité, les goûts, les déplacements, les pratiques de navigation de l’internaute. Dans un univers ultracompétitif, la qualité du ciblage est une condition de la tolérance de l’internaute aux intrusions dans son comportement : l’internaute échange un service contre l’acceptation de l’usage de ses données (tels des conseils d’achats pertinents). Mais cette tolérance est de plus en plus érodée par des abus, conduisant à l’émergence d’une demande sociale de protection et au développement de toute une industrie de la privacy20. En d’autres termes, l’attention suscite deux catégories d’activités a priori opposées : la valorisation et la protection.

Du partage à l’échange

L’attention semble échapper aux circuits marchands lorsqu’elle transite par les communautés d’échanges et de partage. Dans son livre Foules intelligentes, Howard Rheingold21 montre comment des groupes importants, dispersés géographiquement et connectés par des technologies simples (téléphone mobile, Sms, courriel, web…), peuvent être réunis rapidement pour agir collectivement. L’histoire nous a démontré l’évidence de cette capacité de l’internet à dépasser les frontières géographiques et la dispersion des personnes.

La dimension marchande revient en force lorsque l’attention est captée par les recommandations qui sont postées sur les sites de l’e-commerce, qui envoient des signaux sur la qualité des biens proposés. L’efficacité de la recommandation comme capteur de l’attention suscite l’intérêt grandissant des producteurs et des créateurs d’œuvres culturelles, emportant ainsi un bouleversement des chaînes de valeur : certains acteurs de l’intermédiation sont menacés de marginalisation ou peuvent disparaître, et celle-ci se répartit entre les utilisateurs/consommateurs, les sites du e-commerce, les auteurs-créateurs-producteurs eux-mêmes.

Les cheminements des attentions sont déterminés par les groupes d’appartenance, l’expérience et les segments de marché dans lesquels ils s’inscrivent. Une enquête réalisée auprès d’un public significatif d’étudiants de plusieurs universités françaises évalue l’importance relative de l’acquisition d’information web et hors web dans l’achat et la lecture de bandes dessinées. Dans l’ensemble, les comportements sur le web se développent au plus près de la quête d’information dans le monde physique, avec des différences selon l’expérience des lecteurs. Si les individus utilisent largement l’internet dans leurs pratiques quotidiennes, les usages qu’ils en font varient selon leurs habitudes de consommation passées en vertu d’un effet d’apprentissage ; le web 2.0 ne réussit pas à supplanter la perte de confiance induite par la disparition de la rencontre physique des acteurs22.

L’inversion de la rareté

L’économie de l’attention emprunte à divers champs d’analyse : elle est une économie des réseaux, de la publicité, des plates-formes, de la recommandation, mais aussi de la longue traîne, c’est-à-dire du lent déplacement de la consommation vers des produits de niche, grâce aux signaux émis par les prescripteurs informels présents sur le web. Toutes ces perspectives convergent vers la thématique de la nouvelle rareté.

En montrant que c’est l’attention qui se fait rare, on est conduit à revoir les modèles de l’offre culturelle. Comme le note Pierre Mounier :

Ce sont donc les lecteurs qui deviennent rares. Si ce sont les lecteurs qui deviennent rares et non les publications, les barrières d’accès au contenu deviennent contre-productives23.

Faut-il en conclure que le libre accès est le seul modèle de la production culturelle ? Il est plausible qu’il cohabite avec d’autres modèles, selon l’ampleur de la rareté, les exigences des internautes en qualité et en tri, ainsi que le poids des revendications en matière de protection des données personnelles.

  • 1.

    Thomas H. Davenport et John C. Beck, The Attention Economy : Understanding the New Currency of Business, Boston, Harvard Business School Press, 2001.

  • 2.

    Marc Uri Porat et Michael Rogers Rubin, The Information Economy, vol. 1-3, Dept. of Commerce, Office of Telecommunications, 1977.

  • 3.

    Uday M. Apte et Hiranya K. Nath, “Size, Structure and Growth of the US Information Economy”, 2004 (http://iris.nyit.edu/~kkhoo/Spring2008/Topics/Topic05/000UCLA_ApteNath.pdf#page=1&zoom=auto, 0, 800). Voir aussi, pour une discussion méthodologique sur la définition du champ couvert par l’économie de l’information, Mary Taylor Huber et Michael Rogers Rubin, The Knowledge Industry in the United States : 1960-1980, Princeton, Princeton University Press, 1986.

  • 4.

    Herbert A. Simon, “Designing Organizations for an Information-Rich World”, dans Martin Greenberger, Computers, Communication, and the Public Interest, Baltimore, The Johns Hopkins Press, 1971, p. 40-41 (ma traduction).

  • 5.

    Josef Falkinger, “Attention Economics”, Journal of Economic Theory, 2007, 133, p. 266-274.

  • 6.

    Richard Lanham, The Economics of Attention, Chicago, University of Chicago Press, 2006.

  • 7.

    Michel Nuridsany, Warhol, Paris, Flammarion, 2001.

  • 8.

    Ibid.

  • 9.

    Ibid.

  • 10.

    Michael Goldhaber, “The Value of Openness in an Attention Economy”, First Monday, 2006, 11 (6) (http://firstmonday.org/htbin/cgiwrap/bin/ojs/index.php/fm/article/view/1334/125).

  • 11.

    Kynaston McShine, catalogue Andy Warhol, rétrospective, Paris, Centre Georges-Pompidou, 1990, p. 14.

  • 12.

    Françoise Benhamou, l’Économie du star-system, Paris, Odile Jacob, 2002.

  • 13.

    M. Goldhaber, “The Attention Economy on the Net”, First Monday, 1997, 2 (4).

  • 14.

    Voir Maggie Jackson, Distracted : The Erosion of Attention and the Coming Dark Age, New York, Prometheus, 2008.

  • 15.

    Dominique Boulier, « Les industries de l’attention : fidélisation, alerte ou immersion », Réseaux, 2009/2, no 154.

  • 16.

    Ashlee Humphreys et Robert V. Kozinets, “The Construction of Value in Attention Economies”, Advances in Consumer Research, 2009, vol. 36.

  • 17.

    http://blogues.ebsi.umontreal.ca/jms/index.php/?q=Pointer+du+doigt+ou+taper+sur+l%27%C3%A9paule+%3A+%C3%A9conomie+de+l%27attention

  • 18.

    Pour plus de détails, voir notamment Jean-Charles Rochet et Jean Tirole, “Platform Competition in Two-Sided Markets”, Journal of the European Economic Association, 2003, 1, p. 990-1029.

  • 19.

    Source : Syndicat des régies de l’internet (Sri).

  • 20.

    Pour une vue d’ensemble de la question, voir notamment Fabrice Rochelandet, Économie des données personnelles et de la vie privée, Paris, La Découverte, coll. « Repères », 2010.

  • 21.

    Howard Rheingold, Foules intelligentes. La nouvelle révolution sociale, Paris, M 21 Éditions, 2005.

  • 22.

    Françoise Benhamou, Nathalie Moureau et Stéphanie Peltier, « La longue marche vers une appropriation cognitive du web : le cas de la bande dessinée », Réseaux, 2012/5, no 175.

  • 23.

    Pierre Mounier, « Le libre accès : entre idéal et nécessité », Hermès, 2010, no 57, p. 23-30 (http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00534136/en/).

Françoise Benhamou

Ses travaux sur l’économie de la culture donnent un regard aigu et très informé sur les secteurs de l’édition (voir notre numéro spécial « Malaise dans l’édition », juin 2003), du cinéma et du numérique. Cette connaissance des mécanismes économiques nourrit aussi son analyse critique de la politique culturelle française, en ce qui concerne aussi bien les musées, la démocratisation des publics que…

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