
Les testaments à nouveau trahis de Milan Kundera
Une biographie publiée cet été à Prague accuse Milan Kundera de compromissions avec le régime communiste tchèque, sans autres preuves qu’une analyse contestable de son œuvre. Retour sur une habile opération de communication réalisée aux dépens d’un monument littéraire.
Au début de l’été, flottait comme un parfum de procès politique à Prague. Rien de judiciaire, comme au bon vieux temps du communisme. On s’était adapté. Le tribunal était l’opinion ; le procureur, un hebdomadaire ; le témoin à charge, un auteur de second rang. Quant aux organisateurs, des communicants de l’industrie du livre. Un non-événement en somme, n’eût été la figure de l’accusé, Milan Kundera.
Les empires totalitaires ont disparu mais l’esprit du procès est resté comme héritage. Milan Kundera
Il y a près de trente ans, Kundera nous avait prévenus : « Les empires totalitaires ont disparu avec leurs procès sanglants mais l’esprit du procès est resté comme héritage1. » Et voilà qu’en cette fin de mois de juin 2020 on publiait à Prague une biographie – Kundera : une vie tchèque en son temps (non traduit) – qui devait ouvrir son procès ! Fini le « privilège d’intouchabilité » dont il avait jusque-là bénéficié, on allait (enfin !) connaître « la vérité », on serait (enfin !) en mesure de juger.
L’auteur, Jan Novák, était surtout connu pour une biographie romancée de deux frères qui avaient combattu le communisme les armes à la main. Rien ne le prédisposait à se faire biographe d’un écrivain si ce n’est, dans le cas de Kundera, son anticommunisme qu’on aurait, de mon temps, qualifié de primaire et viscéral. Novák avait travaillé quatre an