Face à la fétichisation du patrimoine. Introduction
Depuis plusieurs années, Esprit accorde la plus grande attention au travail au long cours mené par Françoise Choay qui, de formation philosophique, s’est particulièrement intéressée à l’histoire de l’urbanisme et de l’architecture1. Depuis les années 1960, elle a anticipé avec rigueur bien des mutations en cours en analysant les évolutions des territoires et les métamorphoses de la dimension spatiale. Dans des textes prophétiques, elle annonçait dès 1969 que l’urbanisme à la française et l’opposition centre/périphérie (voire État/ville) qui le sous-tendait n’étaient plus guère pertinents à l’heure de la révolution « électro-télématique », quand réseaux et flux privilégient la connexion et le branchement. Un texte plus récent, qui reprenait cette thèse sur un mode iconoclaste et perturbant pour les académiciens de l’architecture, en appelait à une reconsidération conceptuelle en critiquant une conception dépassée de la ville européenne et en cherchant à comprendre les ressorts de l’après-ville2. De facto les métamorphoses du langage vont de pair avec les changements du paysage et des formes urbaines. Ce qui n’aurait pas surpris Ildefonso Cerda qui ouvrait en 1867 son traité d’urbanisme « ind