Olivier Mongin
Directeur de la revue Esprit de 1989 à 2012.
Marqué par des penseurs comme Michel de Certeau, qui le pousse à se confronter au structuralisme et l'initie aux problématiques de la ville et aux pratiques urbaines, Claude Lefort et Cornelius Castoriadis, les animateurs du mouvement Socialisme ou Barbarie, qui lui donnent les outils à la fois politiques et philosophiques de la lutte anti-totalitaire, il demeure également marqué par les figures d'Emmanuel Levinas et Paul Ricœur, auquel il a consacré un livre (Paul Ricoeur, 1994).
En marge du monde intellectuel académique, Olivier Mongin peut se servir de son point de vue multidisciplinaire et indépendant pour s’attaquer aux problèmes créés par les ruptures (Face au scepticisme. Les mutations du paysage intellectuel, 1994) : comment civiliser un monde qui est violent, et qui – contrairement aux croyances des générations précédentes – restera violent ?
Pour lui, la mondialisation n’est pas qu’un phénomène économique, on assiste aussi à une reconfiguration des territoires, qui place la ville au cœur de cette évolution (La condition urbaine, 2005). Une autre approche de la compréhension du monde et de ses transformations, c’est la prise en compte des « fictions » qui le décrivent : dans les romans, sur scène, et sur les écrans ; c’est la thématique des trois volumes des Passions démocratiques (1991-2002). C’est aussi une façon de prendre en compte la rupture créée par les nouvelles technologies, ainsi que l’importance du comique, qui crée une relation entre le corps du rieur et celui du créateur de rire (Eclats de rire ; variations sur le corps comique, 2002).
Selon Olivier Mongin, « On ne manque pas de réel, on ne manque pas d’informations, elles fusent de partout, du plus près au plus lointain. On ne manque pas de spectacle non plus, c’est incontestable, il suffit d’allumer le petit écran pour s’en rendre compte. On manque seulement d’une capacité de mise en scène, c’est-à-dire de recul et de décalage qui nous permettent de mieux saisir corporellement et intellectuellement le monde présent et comment on peut y agir autrement qu’en ravivant des vieux schémas ».
Olivier Mongin vient d’une génération anti-totalitaire portée par des valeurs démocratiques venues de l’histoire culturelle, philosophique et politique européenne. Mais le monde d’aujourd’hui est beaucoup plus grand que l’Europe qui est maintenant décentrée. Les valeurs européennes ne sont pas dévalorisées, mais il faut les penser dans un monde dont l’Europe n’est plus le centre.