
Les services compétents d'Iegor Gran
Iegor Gran, fils de l’écrivain André Siniavski, retrace les années où son père a été traqué par le KGB. Ce livre, qui relève à la fois de la biographie, du roman historique, du thriller et de la comédie, offre un éclairage original sur l’Union soviétique des années 1960. Il témoigne aussi du fait que la liberté gît toujours cachée, sous la masse du pouvoir totalitaire.
En février 1959, paraît dans la revue Esprit un texte intitulé « Le réalisme socialiste », signé par un certain Abram Tertz. Comme l’écrit Jean-Marie Domenach dans son introduction, il s’agit « de la première critique de l’académisme officiel qui nous parvienne d’un écrivain russe vivant dans son pays ». Quelques années plus tard, André Siniavski est démasqué et condamné à sept ans de camp : un écrivain russe – un de plus – détenu dans son pays. Histoire banale et triste que celle de Siniavski.
Banale ? Et triste ? Décidément non. Tout d’abord, n’est-il pas extraordinaire qu’un auteur se soit joué si longtemps des services de sécurité soviétiques ? Entre 1959 et 1965, six années se sont écoulées, pendant lesquelles Siniavski a non seulement continué de vivre et d’enseigner mais fait passer en Occident plusieurs nouvelles d’un style neuf qu’il appelait le « réalisme fantastique ». Les « services compétents » n’en reviennent d’ailleurs pas. Comment un type seul, un intellectuel en plus, parvient-il à