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Notes de lecture

Dans le même numéro

Dictionnaire amoureux de Montaigne d'André Comte-Sponville

avril 2021

C’est un livre qui raconte une histoire d’amour avec Montaigne. Le volume est aussi instructif sur son auteur que sur son objet. Tous deux s’inscrivent dans ce que le premier appelle la tradition française en philosophie, dans laquelle un excellent philosophe est en même temps un grand écrivain. La partie n’était pas gagnée avec les Essais, un genre littéraire que Montaigne invente. Le lecteur d’aujourd’hui doit affronter de multiples obstacles pour les lire. En amoureux de la langue, André Comte-Sponville permet au débutant de s’y repérer en même temps qu’au plus avancé de progresser encore. Quelle édition choisir ? Il est suggéré d’essayer de lire le texte original dont seules l’orthographe et la ponctuation sont modernisées et de n’utiliser une adaptation en français contemporain qu’en dernier recours : on risque de perdre en saveur ce qu’on gagne en facilité de lecture. Que le lecteur soit avancé ou débutant, il sera vraisemblablement sensible aux pages consacrées à l’amitié avec Étienne de La Boétie. L’esprit de finesse de Montaigne est stupéfiant : il distingue entre l’amitié et l’amour, préfère la passion amoureuse à la vie en couple, aime le corps des femmes mais confesse qu’il ne peut pas vivre l’amitié avec une femme. Pourtant, se développe, presque à la fin de sa vie, une relation forte avec Marie de Gournay, que Montaigne appelle « ma fille d’alliance ». Elle a appris le latin toute seule et écrit à Montaigne : « Vous désenseignez la sottise. » Une féministe, sinon la première des féministes, est la plus chère disciple du maître ! En lisant les cent vingt-huit entrées de ce Dictionnaire amoureux, le mouvement se déploie allègrement, agréablement, de surprise en surprise. Comte-Sponville a passé quelque temps sur les épaules d’un géant. Ce faisant, il nous a appris ce que sont sa littérature, ses essais, ses voyages, et nous ne pouvons plus lire Montaigne comme auparavant.

Plon, 2020
656 p. 26 €

Jean-Marie Glé

Jésuite et théologien, il contribue à la revue Esprit depuis 2000.

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Changer d’État

Les difficultés rencontrées pendant la gestion de l’épidémie de Covid-19 ont remis en lumière le rapport paradoxal que la France entretient avec son État. Parce qu’il est censé décider de tout, il est le recours vers lequel tous se tournent en situation de crise, en même temps qu’il concentre l’essentiel des critiques. Au-delà de la crise sanitaire, la question d’un juste partage des responsabilités entre l’État et d’autres acteurs - les collectivités territoriales, les citoyens, les syndicats ou les entreprises- pour construire un horizon d’action commun se pose. Alors même que la pandémie marque le retour en grâce de l’action publique, comment changer concrètement la figure de l’État pour apaiser sa relation avec la société et lui permettre de répondre aux aspirations contemporaines en matière d’écologie et de justice sociale ? C’est à cette question que s’attache ce dossier, coordonné par Lucile Schmid.