
Court vêtue de Marie Gauthier
Dans ce premier roman, Marie Gauthier, à travers son héroïne et son amoureux transi, sort des affres de la bourgeoisie vers une vie plus sauvage et forestière. Le « voyeur » de l’héroïne est, comme cette dernière, en échec scolaire. Mais devenir cantonnier lui suffit. D’autant que le cantonnier qui le prend comme apprenti et le reçoit chez lui est père d’une fille, Gil, qui mange la vie par les deux bouts. Devant ses charmes, les mâles sont vite en rut et peu importent les différences générationnelles. Gil ne s’en soucie guère : à la sortie de l’adolescence, elle pourrait tomber en bovarysme dans son petit village. Mais du genre effronté, elle a du cœur au ventre. De nuit comme de jour, elle s’éprend facilement, ne trouvant aucun mal à se faire du bien avec des hommes qui ne la méprisent pas pour autant. L’apprenti n’est pas éconduit, mais il est trop timide. Gil demeure interdite face à celui qu’elle ne peut nommer que « le garçon ». Et ce, avant qu’il n’apprenne qu’on peut mourir à l’aube, de manière douce, lorsque la vie mord au ventre. Ce premier roman est celui de l’apprentissage, de la découverte des émois, mais la leçon est aussi violente que ravagée par un temps compté. Reste à savoir ce qui est le mieux : l’intensité de la brièveté ou le train-train d’un temps qui s’étire. L’auteure offre son point de vue habile car elliptique : elle n’impose en rien sa vision du bonheur, ou de ce qui en tient lieu, dans un roman allègre et grave.