
Pour en finir avec la nature morte de Laurence Bertrand Dorléac
Le concept de nature morte date du xviie siècle. Mais ce type de représentation, comme le rappelle Laurence Bertrand Dorléac, remonte à l’aube de l’humanité quand un dialogue commence au sein d’une « communauté morte-vivante ». Néanmoins, du vie au xvie siècle, la nature morte disparaît d’Europe. L’autrice montre que, dans ce laps de temps, l’objet n’est qu’un signe qui accompagne la figuration de Dieu et autres saints. Il faudra donc attendre mille ans pour qu’il devienne la glorification de l’humble et exprime le sens du moindre. À la figuration du sacré se substitue celle d’une « trivialité positive » (Baudelaire). La nature morte reste bien vivante. L’objet est recyclé dans l’art et acquiert une vie propre dès l’éclosion du capitalisme et de la société de consommation. Laurence Bertrand Dorléac montre comment certains mouvements du xxe siècle s’élèvent contre la chosification de l’art en tant que produit d’un marché. À l’inverse, la nature morte montre que derrière la chose et sa reproduction, il n’y a pas rien mais tout – le rien du tout, son fantôme, sa pétrification dans une sorte de défi que relèvent et révèlent par exemple Andrès Serrano, Wim Delvoye, Jean-Pierre Formica, Not Vital, Jan Fabre et d’autres.