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Notes de lecture

Dans le même numéro

Idées révolutionnaires de Jonathan Israel

janv./févr. 2020

Si on nous posait la question : qui et qu’est-ce qui a été «  radical  » pendant la Révolution française, nous répondrions spontanément : Robespierre et la Terreur. La réponse de Jonathan Israel, professeur (émérite) d’histoire à Princeton et spécialiste des Lumières, est tout autre : les vrais «  radicaux  » de la Révolution sont ceux qui ont défendu radicalement les principes fondateurs de la Déclaration des droits de 1789, à savoir la démocratie, ou la République et le constitutionnalisme démocratique, les libertés et l’égalité, l’universalisme des droits, la (future) laïcité de l’État et le pluralisme confessionnel. En d’autres termes, ce sont les opposants à la Terreur, «  Brissotins  » et «  Idéologues  » que l’historiographie jacobine, dominante, a disqualifiés comme trop modérés, ou trop peu «  révolutionnaires  » finalement. Ils étaient pourtant, selon J. Israel, seuls fidèles à l’idéal des «  Lumières radicales  » (dont il est le représentant dans l’historiographie internationale sur cette période) à l’origine de la démocratie moderne. Elles seraient pour l’essentiel dues à Spinoza et au spinozisme, compris comme un rationalisme radical, moniste et matérialiste. Les idées de J. Israel (les siennes et celles d’une Révolution menée par des idées à réaliser, et non par sa dynamique propre) ont été fortement contestées. Il en résulte en effet une lecture qui se sépare fortement de l’école «  jacobino-marxiste  » (Albert Mathiez, Georges Lefebvre, Albert Soboul), et finalement tout autant de l’interprétation «  libérale  » de François Furet, plus «  clairvoyant  », mais chez lequel J. Israel croit déceler rien moins que «  de grossières erreurs, parfois même ridicules  », pour reprendre les mots de la postface très combative où il répond à ses critiques. Quoi qu’on pense de ses positions (qui font la part belle à la force des idées), elles induisent une historiographie originale des courants et des développements successifs de la Révolution française. Le long récit qu’il en fait, suivant la chronologie des événements, illustre sans surprise sa thèse d’une Révolution infidèle à ses objectifs initiaux et donc, en ce sens, d’une révolution «  manquée  ».

Alma/Buchet-Chastel, 2019
940 p. 36 €

Jean-Louis Schlegel

Philosophe, éditeur, sociologue des religions et traducteur, Jean-Louis Schlegel est particulièrement intéressé par les recompositions du religieux, et singulièrement de l'Eglise catholique, dans la société contemporaine. Cet intérêt concerne tous les niveaux d’intelligibilité : évolution des pratiques, de la culture, des institutions, des pouvoirs et des « puissances », du rôle et de la place du…

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Le partage de l’universel
L'universel est à nouveau en débat : attaqué par les uns parce qu'il ne serait que le masque d'une prétention hégémonique de l'Occident, il est défendu avec la dernière intransigeance par les autres, au risque d'ignorer la pluralité des histoires et des expériences. Ce dossier, coordonné par Anne Dujin et Anne Lafont, fait le pari que les transformations de l'universel pourront fonder un consensus durable : elles témoignent en effet de l'émergence de nouvelles voix, notamment dans la création artistique et les mondes noirs, qui ne renoncent ni au particulier ni à l'universel. À lire aussi dans ce numéro : la citoyenneté européenne, les capacités d'agir à l'ère numérique, ainsi que les tourmentes laïques, religieuses, écologiques et politiques.