L'État entre effacement et réaffirmation. Introduction
Depuis 1945, le nombre d’États reconnus aux Nations unies est passé de 72 à 197. Cet accroissement numérique, qui s’explique par les mouvements de décolonisation et l’éclatement d’ensembles fédéraux (comme l’Union soviétique), suffit à rappeler que la constitution d’une souveraineté étatique aimante toujours les passions nationales. Pourtant, ce succès apparent de l’État cache aussi une érosion, voire une décomposition, de la capacité des pays à construire une puissance publique légitime et efficace. On voit en Amérique latine des « États captifs » de la puissance des cartels de la drogue1 ; on voit, par exemple dans la crise du Sahel, des États évanescents qui, minés par la faiblesse politique, les litiges territoriaux et le terrorisme déterritorialisé, menacent de s’effondrer2 ; on voit, dans le voisinage des États forts, comme la Russie, des pays dont la souveraineté est soumise au chantage économique3. Les « révolutions arabes » témoignent de la difficulté, en Tunisie ou en Égypte, à reconstruire, au-delà des mobilisations démocratiques, un bien commun qui porte remède à la corruption et à la privatisation de l’État.
Mais la situation n’est pas moins