
Tourmentes laïques
Face aux furies identitaires qui confondent la laïcité avec une religion civile, il faut rappeler que la liberté de conscience se fonde sur l'égalité des droits et implique un espace d'entente entre croyants et non-croyants.
Le débat français sur la laïcité a pris à l’automne 2019 une tournure irréelle et délétère[1]. L’espace public et médiatique s’est trouvé envahi par une frénésie de prises de position fulminantes autour d’incidents dérisoires (une agitation groupusculaire à Grenoble en faveur du burkini dans les piscines) et de pratiques dont il est difficile de dire qu’elles attaquent la légalité républicaine (la présence de femmes voilées parmi les parents qui accompagnent des sorties scolaires, lesquelles n’auraient pas lieu sans l’appui de ces parents).
La fièvre obsidionale qui s’est alors manifestée – prenant chez certains « laïques » autoproclamés la forme d’une mise en garde contre une possible « guerre civile » qu’on semblait appeler tout en disant vouloir l’éviter – s’est déployée dans un grand vide de propositions politiques. À en croire les discours les plus bruyants, pour « lutter contre l’islamisme » et empêcher que se renouvellent les massacres de l’atroce année 2015, il ne convenait pas de réviser nos rapports avec les acteurs économiques qui financent le djihadism