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Photo : Mark de Jong
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L’apprentissage des inhumanités

L’éducation préventive contre les violences politiques s’appuie sur les ressources sur la Shoah et intègre désormais le génocide des Tutsi du Rwanda. Face aux ricanements des uns et au radicalisme des autres, il faut insister sur la place de la justice internationale, la capacité de désobéir et le combat des victimes.

La sortie de la violence est, à l’instar de la réduction des inégalités sociales, une utopie fondatrice que l’école n’est pas en mesure de concrétiser mais qui l’anime toujours. C’est au stade de l’éducation de l’enfant que, selon Françoise Héritier[1], les fondements anthropologiques (le propre/le sale/l’animalité) sur lesquels se bâtissent les idéologies d’exclusion et de massacre devraient être déconstruits. Si ces schèmes culturels potentiellement mortifères restent profondément ancrés, une éducation préventive contre les violences politiques s’est mise en place en s’appuyant sur le récit et l’analyse des génocides et crimes de masse les plus atroces du xxe siècle, et en tout premier lieu sur la rupture que représente le génocide des Juifs d’Europe. Son optique est principalement mémorielle : ne pas oublier le passé pour ne pas répéter les mêmes horreurs. L’Unesco, qui avait créé en 2011 un programme sur l’enseignement de l’histoire de la Shoah, s’est doté d’une chaire sur la prévention des génocides en 2013 et, plus récemment, a rédigé un «  guide à l’intention des décideurs politiques  » sous le titre Enseignement de l’holocauste et prévention du génocide[2]. Même si l’accumulation des recommandations et des fiches pédagogiques du Conseil de l’Europe[3] pouvait faire croire que cet enseignement est entièrement balisé, il peut être amélioré et devra évoluer.

Le socle de l’enseignement sur la Shoah

L’Unesco et l’institut Georg Eckert pour la recherche internationale[4] ont dressé une cartographie mondiale qui montre que, sans être totalement universelle, la Shoah est bien devenue une référence incontournable dans l’enseignement de nombreux pays. C’est le cas en France, où elle est abordée dès le CM2 puis approfondie en troisième et en première. Cette primauté n’est pas contestable car la Shoah est le « génocide matriciel », celui à partir duquel, historiquement, la définition de génocide a été conceptualisée. De plus, grâce à plusieurs décennies de travaux, des ressources pédagogiques solides et diversifiées sur la Shoah permettent d’interroger en profondeur les mécanismes individuels et sociopolitiques des génocides. Même dans les régions qui, à la différence des pays européens, pourraient paraître moins directement concernées, son enseignement offre, pour des sociétés affectées par des violences de masse, un détour utile et une approche préliminaire à des questions qu’il serait trop sensible de traiter frontalement et immédiatement.

Les leçons qui en sont tirées sur le plan pédagogique, en termes de bonnes pratiques[5], peuvent servir pour l’enseignement des autres génocides. Mentionnons-en trois : s’adapter en fonction des âges et prévoir sur plusieurs années une progression dans les contenus de l’enseignement ; favoriser la formation des enseignants et les liens entre les éducateurs et les chercheurs ; donner la priorité à l’approche historique mais en faisant appel à d’autres disciplines comme la philosophie et la littérature, et monter des projets mobilisant collectivement les élèves et les enseignants, comme accueillir un témoin, aller sur un site mémoriel ou réaliser un film[6].

Les erreurs et les méthodes contre-productives sont désormais bien identifiées également. Citons en quatre parmi les plus fréquentes : ­l’approximation, les images chocs, la politisation et le moralisme. De plus, la visibilité de la Shoah peut aviver une forme de concurrence mémorielle ; le manque de discipline peut rendre délicates les visites de témoins ou les sorties de classe dans des mémoriaux ; les préjugés véhiculés à l’extérieur de l’école, le racisme et l’antisémitisme se manifester chez certains élèves[7] ; l’enseignant peut être dépassé par l’opacité de certains débats ou l’abondance des savoirs disponibles. « La majorité des professeurs pensent être aujourd’hui plus précis pour répondre aux attentes nombreuses de beaucoup d’élèves, voire aux provocations de certains », écrivait Frédéric Arber sur la base d’une enquête conduite en 2007 dans les académies de France métropolitaine[8], ajoutant qu’« ils entendent dépasser avec leur classe le stade de la simple émotion pour atteindre une réflexion élargie aux autres génocides afin de dégager notamment la spécificité de la Shoah ». Cependant, Iannis Roder, qui a étudié, pour la mission d’étude en France sur la recherche et l’enseignement des génocides et des crimes de masse, la formation des professeurs, « pointe un hiatus préoccupant entre une impression de connaissance, largement partagée par le milieu enseignant, et la réalité du savoir scientifique réellement maîtrisé. La raison principale en est la faiblesse des programmes universitaires sur le sujet [9] ». Ce constat vient faire écho au résultat troublant d’un sondage Ifop, dévoilé en décembre 2018, selon lequel 10 % des Français n’auraient jamais entendu parler de la Shoah et 21 % ne savent pas la dater. Cette ignorance est accentuée au sein de la tranche des 18 à 24 ans[10]. La Mission Génocides a avancé un certain nombre de recommandations, comme la proposition d’un cours d’université sur les génocides, le projet d’un Centre international de ressources (Cire) ou l’organisation d’une semaine de la recherche. Ces derniers apporteront des réponses à certaines des insuffisances de l’enseignement actuel, mais au vu des difficultés déjà rencontrées, on peut comprendre que l’élargissement de cet enseignement à l’ensemble des processus génocidaires puisse sembler risqué. Il est pourtant indispensable.

Le génocide des Tutsi et les approches comparatives

Surcharge supplémentaire au programme, l’intégration du génocide des Tutsi nécessite une recontextualisation de l’événement dans l’histoire du Rwanda, voire de l’ensemble de la région des Grands Lacs. Pas simple quand on sait la faiblesse de l’enseignement sur l’Afrique. Moins étudié que la Shoah, le génocide des Tutsi peut dérouter par ses formes (massacres à ciel ouvert ou à l’intérieur des églises, parfois au sein d’une même famille) autant que par ses zones d’ombre, en particulier sur l’attentat de l’avion présidentiel et sur la politique française au Rwanda, qui reste l’objet de vives controverses[11]. En 2021, la commission de recherche des archives françaises couvrant la période de 1990 à 1994 devrait apporter, sous l’égide de Vincent Duclert, des éclaircissements qui pourront, selon sa lettre de mission, « aider à constituer la matière historique nécessaire à l’enseignement de ce génocide en France ». Surtout, c’est parce que le Rwanda est aussi une histoire qui nous concerne qu’il est d’autant plus pertinent de l’aborder à l’école. Son articulation avec les cours sur la Shoah permettra en outre d’entrer dans une approche plus globale des violences de masse contemporaines. Les enjeux de la prévention peuvent ainsi mieux être mis en avant en montrant, d’une part, l’enclenchement et le déroulement du génocide et, d’autre part, les réactions, la passivité ou la complicité des acteurs et institutions environnantes[12].

L’abandon des victimes tutsi en 1994 nous place devant les failles d’un système international qui demeure le nôtre.

Les rapprochements les plus significatifs se trouvent dans le processus graduel d’exclusion, de persécution, de massacres sporadiques puis systématiques et dans ses liens avec le contexte de guerre. Les cinq étapes dégagées par Yves Ternon[13], à partir des cas arméniens, juifs et tutsi, décrivent cet enchaînement fatal mais, malgré tout, résistible. Comme le souligne l’Unesco, « le fait qu’un événement historique a eu lieu et est décrit dans les manuels, en ligne et au cinéma, ne signifie pas qu’il devait fatalement se produire. L’holocauste a existé parce que des individus, des groupes et des nations ont décidé d’agir de telle ou telle manière ou de rester passifs[14] ». Si la création de l’Onu peut être présentée comme une réponse à l’échec de la Sdn, l’abandon des victimes tutsi en 1994 nous place devant les failles d’un système international qui demeure le nôtre. Les divergences permettent d’attirer l’attention des élèves sur les contextes, de les mettre en garde contre les amalgames et les anachronismes et de les sensibiliser au fait que chaque génocide étant singulier, les génocides de demain ne ressembleront pas à ceux d’hier. C’est pourquoi, à rebours de la doxa mémorielle, on ne peut pas attendre de l’apprentissage du passé qu’il nous assure une parfaite clairvoyance sur le présent, et a fortiori sur l’avenir. Il nous faut donc rester attentifs aux évolutions et aux aspects inattendus des violences contemporaines ainsi qu’aux changements de perception et de mentalités qui sont à l’œuvre dans nos sociétés.

Ricanements et radicalisme

L’invention saugrenue d’un jeu appelé «  S’échapper d’Auschwitz  » par un professeur stagiaire d’histoire sur une plateforme d’échanges pédagogiques, Magistère, bien que rapidement retirée par le rectorat, est, selon le Crif, « un signal fort pour nous faire réaliser que nous sommes à un tournant en matière de transmission de la mémoire de la Shoah: avec la disparition des témoignages directs des rescapés; avec l’engouement pour le virtuel qui peut avoir pour risque d’anesthésier la sensibilité sur un tel drame; avec des verrous qui sautent en matière d’expression et de banalisation, par effet de génération peut-être. Il n’est pas anodin qu’un professeur d’histoire ne perçoive pas qu’il est impossible de traiter des camps de cette façon[15] ». L’hypothèse d’une rupture générationnelle, incarnée par « les branchés de la génération Z[16] », est reprise dans une récente tribune inquiète que « les mots utilisés par ces jeunes semblent dépouillés de leur sens historique, la Shoah ne serait qu’un signifiant qu’on lance sur l’écran des échanges virtuels en série puis tourné en dérision afin de partager des fous rires (mdr) sans aucune limite (ce qu’on pourrait nommer les serial jokes)[17] ». Bien sûr, il n’y a pas lieu de rejeter globalement Internet (voir l’animation virtuelle «  Le témoin J  » sur le site «  Le tribunal sur le Congo  » de l’artiste Milo Rau[18]) ni de s’affoler outre mesure d’une insouciance et d’une bêtise qui sont, de tout temps, le sceau même de la jeunesse (on se rappellera des déguisements douteux du jeune prince Harry). Il est par contre indéniable que le négationnisme a parfaitement compris qu’il démultiplierait son impact en se plaçant, sous couvert de liberté d’expression, sur le terrain de la dérision plutôt que de la «  scientificité  ». L’invitation de Faurisson par Dieudonné sur la scène du Zénith, en 2009, symbolise ce relais et ce retournement difficiles à contrer dans la mesure où cette posture se nourrit de l’indignation qu’elle provoque et assume ses approximations par son manque de sérieux revendiqué.

Un autre changement, dont nous n’avons pas encore pris toute la mesure, provient du fait que des centaines de jeunes français ont participé à, ou soutenu, un régime génocidaire. Car en plus des attentats commis sur notre sol, Daech a perpétré en Irak le premier génocide du xxie siècle. Il a décimé la communauté des Yezidis, dont les hommes ont été exterminés, les femmes esclavagisées et les enfants transformés en enfants soldats de l’État islamique. L’histoire de ces crimes est encore à écrire[19], ce qui prendra des années, mais on peut gager que l’histoire des génocides ne s’arrêtera pas au xxe siècle. Même s’il s’est déroulé à des milliers de kilomètres, et si les djihadistes français ne composaient qu’une frange de Daech, ce génocide nous renvoie à la question des radicalisés qui mine notre société aujourd’hui. On ne saurait guère trouver de sujet plus sensible et délicat à traiter à l’école que celui-là, mais avons-nous le droit de continuer à l’esquiver, et pour combien de temps encore ? Car la combinaison entre les ricanements des uns et le radicalisme des autres est lourde de menaces pour l’avenir de notre pays.

L’horizon de la justice et de la résilience

Même si aucun rudiment de droit n’est prévu, la place de la justice internationale devrait être davantage valorisée dans le cursus scolaire sur les génocides. Nul besoin d’entrer dans des subtilités juridiques, mais expliquer que ce crime est considéré comme «  international  » parce qu’il abîme la dignité même de l’être humain et que, tout en persécutant ses victimes au nom de leur appartenance à un groupe donné, il dépasse le cadre d’une communauté ou d’une nation. L’humanité n’est pas en tant que tel un sujet de droit surplombant, c’est une représentation, une idée régulatrice, qui permet de faire comprendre la raison profonde du rassemblement dans une même enceinte de juges venant de tous les coins du monde. Il ne s’agit pas de mythifier une justice déterritorialisée qui a montré ses limites face à des contextes géopolitiques qui lui sont défavorables ou du fait de ses dysfonctionnements et insuffisances. Mais s’ils ne sont pas forcément meilleurs ou plus efficaces en étant réunis – la collaboration des différentes cultures juridiques ne va pas de soi –, ces juges incarnent l’exigence d’universalité. En retraçant l’émergence de la responsabilité personnelle des chefs d’État et des exécutants de crimes qui ont acquis un caractère imprescriptible, le droit permet de réfléchir à la déclinaison des différentes formes de responsabilité, individuelle et collective, d’ordre pénal mais aussi d’ordre politique et moral[20]. La capacité de désobéir apparaît comme un facteur majeur de la prévention des génocides. Elle est au cœur, notamment, du procès d’un Eichmann qui justifiait sa conduite au nom de sa fidélité au serment nazi. Eichmann, comme l’écrit Frédéric Gros, « s’est rendu coupable ­d’auto-déresponsabilisation » et, parce qu’il s’est démené pour organiser le plus efficacement possible les déportations des convois juifs vers les camps de la mort : « Chacun est responsable de sa surobéissance[21]. »

La capacité de désobéir apparaît comme un facteur majeur de la prévention des génocides.

Enfin, au travers du combat des victimes pour obtenir la vérité, la condamnation de leurs bourreaux et des réparations, l’enseignant pourra non seulement revenir sur les souffrances et les séquelles des victimes mais aussi, comme le recommande l’Unesco, faire « comprendre comment la mémoire du passé se transmet et comment des récits historiques divergents ont été négociés au fil du temps dans les sociétés cherchant à renouer avec la stabilité et la paix après un génocide. Dans certains cas, il peut également être bénéfique de faire observer comment la mémoire des événements a engendré un nouveau conflit et de nouvelles violences[22] ». Le souvenir du camp de concentration de Jasenovac a ainsi été instrumentalisé par la propagande nationaliste serbe pour justifier et encourager le nettoyage ethnique contre les populations croates et musulmanes. Même sans être dévoyés de la sorte, les effets préventifs de la mémoire seront minimes si la formation individuelle du « bon citoyen, tolérant et pacifique » que promeuvent nos cours d’enseignement civique et moral fait l’impasse sur les relations sociales et leur logique[23]. On en revient donc à cet esprit critique que doit favoriser un enseignement sur les génocides, mais aussi au désarroi que ne peut manquer de provoquer la confrontation à de tels crimes et au sentiment de honte que produit la cruauté des hommes. « La honte est un sentiment très simple et, s’il n’est pas manipulé d’en haut, ramène une justice tout aussi simple dans les rapports sociaux » soutient Luigi Zoja en se demandant si « cette honte ne représenterait pas l’envers de la contamination malveillante – peut-être pas une force contagieuse du bien, lequel n’est malheureusement pas aussi infectieux que le mal, mais un pas vers davantage de conscience [24] ». L’histoire de la justice pénale internationale, des associations de victimes et de défense des droits humains, au-delà de ses échecs et de ses limites, démontre qu’il peut y avoir des combats remportés : extraordinaire moment que celui de la condamnation du général Mladic à La Haye en 2017 ou du dictateur Hissène Habré, quelques mois plus tôt, devant les Chambres africaines extraordinaires. Ainsi, sans illusion ni moralisme, l’enseignement sur les génocides peut aussi, en évoquant les engagements de ceux qui luttent contre l’impunité et la résilience de ceux qui survivent à ces crimes intolérables et se reconstruisent, faire place, en creux, à une célébration de la vie.

 

[1] - Françoise Héritier, De la violence II, Paris, Odile Jacob, 1999 (réed. 2005), p. 15.

[2] - Enseignement de l’holocauste et prévention du génocide. Guide à l’intention des décideurs politiques, Unesco, 2017.

[3] - Recommandation (2001) 15 du Comité des ministres sur «  L’enseignement de l’histoire au xxie siècle  », adoptée le 31 octobre 2001. Sous le contrôle du Conseil de l’Europe, le site Internet www.coe.int/memory fournit les informations concernant le projet «  Enseigner la mémoire. Éducation à la prévention des crimes contre l’humanité  » et met à la disposition des enseignants et des élèves les outils pédagogiques, calendrier des manifestations européennes et nationales et adresses des sites nationaux en rapport avec le projet.

[4] - The international status of education about the Holocaust. A global mapping of textbooks and curricula, Unesco/Institut Georg Eckert pour la recherche internationale, 2015.

[5] - L’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste a recensé 400 études parues dans 600 publications en 15 langues. Voir Monique Eckmann, Doyle Stevick et Jolanta Ambrosewicz-Jacobs (sous la dir. de), Research in teaching and learning about the Holocaust, Berlin, Metropol/AIMH, 2017.

[6] - Un exemple parmi tant d’autres : le film réalisé par des élèves du collège André Malraux de Paron pour d’autres élèves, intitulé «  Enseigner la Shoah  ». Le film est sorti en août 2013 et peut être visionné sur le site www.realisonsleurope.fr.

[7] - Voir Marie-Anne Hugon, Enseigner la Shoah et les questions socialement vives. Risques et défis. Paroles de professeurs de collège et de lycée, Paris, L’Harmattan, 2017.

[8] - Frédéric Arber, «  L’enseignement de la Shoah en France dans le secondaire  », Enseigner l’histoire de la Shoah 1950-2010, Revue d’histoire de la Shoah, n° 193, 2010/2.

[9] - Vincent Duclert (sous la dir. de), Rapport de la Mission Génocides, Paris, Cnrs, décembre 2018, p. 89. Rassemblant, sous la direction de l’historien Vincent Duclert, des professeurs et chercheurs nationaux et internationaux, cette mission, créée en octobre 2016, a établi un état des lieux de la recherche sur cette thématique, en France et dans le monde. Son rapport final a été officiellement reçu le 4 décembre 2018.

[10] - « L’Europe et les génocides : le cas français  », Ifop, 20 décembre 2018.

[11] - Voir Joël Hubrecht, «  La difficile introspection de la France au Rwanda  », Esprit, juillet-août 2019.

[12] - Édité chez Hachette en 2009 sous l’égide du Cndp (Centre national de documentation et pédagogie), le livre Enseigner l’histoire et la prévention des génocides, que nous avons publié en collaboration avec la chercheuse rwandaise Assumpta Mugiraneza, plaide en ce sens en fournissant les principaux jalons pédagogiques d’un tel cours.

[13] - Le processus génocidaire s’élabore par étapes, dans la longue durée sur la base d’un terreau imprégné de racisme. Viennent ensuite le développement d’une culture du ressentiment et la mise en accusation d’un groupe cible, la prise du pouvoir par le parti génocidaire, l’éclatement d’une guerre (seuil fatidique) et enfin la prise de décision du passage à l’acte. Yves Ternon, Génocide. Anatomie d’un crime, Paris, Armand Colin, 2016, p. 101-106.

[14] - Enseignement de l’holocauste et prévention du génocide, op. cit., p. 63.

[15] - « Retour sur le jeu “s’échapper d’Auschwitz” conçu par un professeur d’histoire  », Crif, 18 janvier 2019.

[16] - Sur les caractéristiques de cette génération ayant grandi en plein cœur de la révolution Internet et de l’avènement des jeux vidéo et des réseaux sociaux, voir «  Les branchés de la génération Z  », Le Monde, 14 juin 2018.

[17] - Céline Masson et Isabelle de Mecquenem, «  Selfie sur fond de génocide : génération mort de rire (mdr)  », L’Obs, 5 juin 2019.

[18] - www.the-congo-tribunal.com.

[19] - Le projet «  Action Yezidis  » collecte les témoignages de survivants des crimes commis par Daech en Irak et en Syrie contre la minorité yézidie. Menée par le père Desbois, l’équipe de Yahad-In Unum s’attache ainsi à attester du génocide des Yézidis et à en documenter les différentes étapes.

[20] - En s’appuyant par exemple sur l’essai de Karl Jaspers, La Culpabilité allemande, Paris, Minuit, 1990.

[21] - Frédéric Gros, Désobéir, Paris, Albin Michel, 2017, p. 124-125.

[22] - Enseignement de l’holocauste et prévention du génocide, op. cit., p. 57.

[23] - « Ce qui peut interdire la violence la rend possible, c’est-à-dire la relation sociale elle-même » rappellent Sarah Gensburger et Sandrine Lefranc dans À quoi servent les politiques de mémoire?, Paris, Presses de Sciences Po, 2017, p. 157.

[24] - Luigi Zoja, Paranoïa. La folie qui fait l’histoire, Paris, Les Belles Lettres, 2018, p. 440-441.

Joël Hubrecht

Membre du comité de rédaction d'Esprit. Responsable de Programme (Justice pénale internationale / Justice transitionnelle) à l'Institut des hautes études sur la justice (IHEJ). Membre du Comité Syrie-Europe après Alep. Enseigner l'histoire et la prévention des génocides: peut-on prévenir les crimes contre l'humanité ? (Hachette, 2009). …

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Le sens de l’école

Le dossier, coordonné par Anne-Lorraine Bujon et Isabelle de Mecquenem, remet le sens de l’école sur le métier. Il souligne les paradoxes de « l’école de la confiance », rappelle l’universalité de l’aventure du sens, insiste sur la mutation numérique, les images et les génocides comme nouveaux objets d’apprentissage, et donne la parole aux enseignants. À lire aussi dans ce numéro : un inédit de Paul Ricœur sur la fin du théologico-politique, un article sur les restes humains en archéologie et un plaidoyer pour une histoire universaliste.