
La malédiction des données
Le big data se présente comme l’agent d’une révolution épistémologique, comme le catalyseur d’un nouveau régime de vérité.
Philippe Lemoine
On dit parfois que les données sont le pétrole du xxie siècle. La comparaison est hasardeuse mais
elle a au moins ceci de juste que le pétrole est à l’origine de ce
que les économistes ont appelé la malédiction de la rente et que
nos économies pourraient bien connaître demain la malédiction des
données.
Qu’entend-on par malédiction de la rente ? C’est l’idée, vérifiée
par plusieurs études empiriques, que les pays riches en matières
premières, notamment en pétrole, et qui ont fondé leur
développement sur cet avantage de la nature, ont connu des taux de
croissance plus faibles que ceux des pays équivalents privés de cet
atout. Parmi les explications avancées, l’insécurité liée à la
volatilité du cours des matières premières ; un effet de taux de
change, car l’exportation de l’or noir enchérit la monnaie et nuit
à la compétitivité-prix des industries naissantes ; et surtout un
effet de rente, puisque certains États pétroliers, n’ayant aucun
besoin de lever l’impôt, n’encouragent pas les nationaux à créer de
la richesse.
Parler de malé