
Frontières de Raymond Woessner (sous la dir. de)
C’est en géographes que cette équipe de vingt auteurs aborde, dans tous ses aspects, la question des frontières, mais il s’agit tout autant d’une analyse géopolitique, géoéconomique et culturelle. La frontière en tant que ligne imprègne les imaginaires, surtout depuis les traités de Westphalie de 1648 qui ont donné l’assise territoriale de l’État-nation moderne. Pourtant, dès 1952, Jean Gottmann avait évoqué l’idée de frontière-zone pour caractériser l’espace défini par les interactions de part et d’autre de la frontière. Avec la mondialisation et la construction européenne, on a cru que les frontières d’État étaient des limites marquées par un processus d’intégration. L’idée de la disparition des frontières a suivi la chute du mur de Berlin. Aujourd’hui, on assiste à une « refrontérisation », processus qui associe le populisme à la surveillance numérique des frontières pour freiner ou empêcher les flux. On trouvera dans ce riche recueil plus d’une centaine d’entrées : entre autres, la conquête spatiale chinoise, la bande de Caprivi en Namibie, le Trentin Haut-Adige, la Mexamérique, le détroit de Gibraltar, Chypre, Lampedusa, le Kurdistan, la frontière sino-indienne, la pénétration chinoise en mer de Chine méridionale… Chacun y trouvera son miel et regardera les cartes, parfois bien petites, mais qui ont le mérite d’exister. Glossaire, chronologie, bibliographie enrichissent cet ouvrage plaisant et utile qui ouvre tant de portes et pénètre dans tant d’espaces. En 2020, on compte 197 États. Les murs et barbelés s’étendent sur 16 000 km, et le passage des frontières provoque aujourd’hui bien plus de victimes que le rideau de fer du temps de la guerre froide.