
La paix avec les morts de Rithy Panh et Christophe Bataille
On ne recommandera à personne de se préoccuper des souffrances des autres pour relativiser les siennes. D’autant moins qu’en lisant le retour de Rithy Panh, cinéaste connu pour ses films sur le génocide cambodgien, et de Christophe Bataille sur les terres où Pol Pot et les Khmers rouges éliminèrent avec une cruauté inouïe, en quelques années, 1,8 million de leurs compatriotes, on n’en sort pas relativiste ou plus léger, mais plus désespéré, et renforcé dans la conviction que ce que l’homme peut faire à l’homme dépasse de loin les méfaits d’un virus. Le livre est un parcours effroyable à travers les lieux, les espaces, les temps, les témoins, les images et les cauchemars du crime de masse auquel Rithy Panh a assisté enfant, et où ses parents et ses sœurs ont été assassinés dans des conditions atroces avec des milliers d’autres. Ce n’est pas non plus, pour l’écriture, une réflexion suivie ni un discours de procureur, mais des flashs, presque des notes brèves, mais autant de flèches qui font mal. Les lieux et les espaces sont ceux des fosses communes, des crânes et des ossements qui émergent encore, des champs où l’on dort sur les morts, des trous d’eau qui ont remplacé les charn