
Le Jeu des Ombres de Valère Novarina
Les enfers deviennent le lieu des métamorphoses dans le nouveau texte dramaturgique de Valère Novarina. En remontent Orphée, Eurydice, Cerbère, Charon, Hécate, Pluton et – ce qui est plus étonnant – Sosie, Flipote, les Machines à dire beaucoup, Robert Le Vigan, Michel Baudinat, Gaston Modot, Anne Wiazemski, Louis de Funès, Christine Fersen et Daniel Znyk. Qui sommes-nous, sinon des ombres qui tentent de soulever ce qui nous reste et de sortir du grand volcan du théâtre de la parole ? Le burlesque est là pour affronter la mort et fait sentir l’absurdité d’être non seulement parmi les autres mais aussi parmi les disparus, avec lesquels il s’agit de nouer joies et douleurs par les soupiraux de la langue. Novarina se fait confiance – du moins dans sa langue –, quitte à être dépossédé par ses personnages de sa matière créatrice. L’œuvre permet ainsi de se perdre et de se retrouver tant elle souligne le fait que signalait Giacometti dans ses Carnets : « J’ai toujours eu l’impression d’être un personnage vague, un peu flou, mal situé. » Le travail de Novarina est sans doute l’une des expériences les plus radicales du pouvoir du théâtre en ses moutonnements de matière verbale et syntaxique.