Éric Sarner. La boxe, le jazz
Je voulais terminer cette série incomplète de portraits consacrée aux poètes français contemporains1 par le portrait d’un auteur discret, presque marginal d’une certaine façon, dont le parcours tant géographique qu’existentiel se déroule en dehors de l’Hexagone. Éric Sarner est un poète voyageur, citoyen du monde entier, insaisissable sauf sans doute à ses amis proches. Tantôt il vit en Uruguay à Montevideo, tantôt à Berlin, tantôt il parcourt la route 66 aux États-Unis, caméra à la main, pour réaliser un documentaire commandé par la télévision française2, tantôt il est en Afrique du Sud et dans cent autres lieux du globe. Ce faisant, il s’est placé dans la lignée des grands poètes voyageurs français du début du siècle, Blaise Cendrars à New York puis au Brésil, Victor Segalen à Tahiti puis en Chine, ou encore Paul Claudel en ses multiples ambassades. Cette tradition de mobilité, curieusement suspendue par la Seconde Guerre mondiale et ayant fait place à un étouffant repli national, Éric Sarner l’a revivifiée en la croisant avec l’esprit d’errance et de vagabondage des beatniks américains. De là une poésie libre et détendue jusqu’à la désinvolture, qui s’attache de préférence à l’instantané du monde et en fait sa philosophie. Témoin, ce poème :
Fuir la poésie
la laisser fuir
laisser part