
Les droits de l'homme, un rêve politique
Historiquement, l’impunité liée à la non-dénonciation des grands régimes assassins de leur peuple n’a jamais calmé le jeu ; au contraire elle fait flamber, comme en Syrie, les pratiques criminelles d’un État qui ne voit plus d’obstacle à sa tentative délibérée d’exterminer une partie de sa propre population.
Il vaudrait mieux parler de droits humains plutôt que de droits de l’homme. Cette dernière appellation efface en effet deux strates de sens : d’une part, la question des femmes, en tant qu’elles sont aussi la moitié de l’humanité est rejetée hors champ. D’autre part, la question de la différence des sexes elle-même en tant qu’oscillation première de l’universel humain1 s’efface aussi : les femmes ne sont pas une sous-catégorie, la sexuation de l’espèce humaine oblige à penser l’unité du sujet de droit comme d’emblée plurielle, et ce qui est perdu en stabilité monolithique du concept est gagné en possibilité de penser la différence2. Enfin, l’usage historique sidérant qu’a permis cette formulation, « droits de l’homme », a été l’élimination du féminin (en tant que genre sexué réel) du champ de l’égalité politique et par exemple, en France, du droit de vote pendant plus d’un siècle et demi. Que l’énoncé de la grande parole historique qui promeut les droits humains produise dans ses termes mêmes les conditions de leur violation – les êtres humains féminins éliminés du champ de l’égalité politique – en dit long sur la difficulté de l’entreprise.