
La traîne des empires. Impuissance et religions de Gabriel Martinez-Gros
Professeur d’histoire médiévale à l’université Paris-Nanterre, Gabriel Martinez-Gros élabore, non sans audace, une nouvelle loi de l’histoire, selon laquelle les grandes religions seraient les produits de la chute des empires. En effet, christianisme, islam et bouddhisme sont respectivement issues de l’empire romain, de l’empire islamique et de l’empire chinois. Ces religions se cristallisent lorsque l’impuissance des empires dissocie leur action politique de leur système de valeurs. En somme, quand l’empire n’est plus en état de faire respecter ses valeurs, ces dernières se déplacent dans une religion. Si l’empire est la matrice de la religion, la religion est donc le discours construit de l’empire. Elle est portée par la catégorie nouvelle des clercs – des intellectuels, que la sédentarisation de l’empire et sa division économique et politique des tâches ont consacrés artisans du luxe des mots et des pensées. Mais la religion et ses clercs rompent avec l’empire par le retrait du monde, qui répudie la pompe, les ors et les armes de l’empire pour mieux le dominer et le faire plier. Aux yeux de l’auteur, l’écologie manifeste par excellence ce complexe d’affirmation de valeurs impériales et de dénégation de l’empire où prend sa source une nouvelle religion. Comme l’empire, l’écologie est universelle et pacifiste. De même, l’antiracisme constitue une nouvelle forme de religion, réaffirmant des principes sans se préoccuper de solutions pratiques. En définitive, l’Occident aurait conservé une forme d’autorité éthique et religieuse qui se substitue à ses moyens politiques et militaires défaillants.