
L'Europe des diasporas de Mathilde Monge et Natalia Muchnik
Cet ouvrage propose une excellente recherche, par-delà les frontières de l’Europe, sur plusieurs groupes d’exilés à l’époque moderne. L’intérêt majeur de ce travail est le mélange dans ses analyses de communautés assez connues (les huguenots, les morisques ou les judéo-ibériques) et d’autres moins étudiées par l’historiographie française : les catholiques britanniques, dotés de collèges religieux et d’auberges dans Paris à la fin du xviie siècle, ou les mennonites. Plus encore, les historiennes relatent les réglementations pour assurer l’accueil et la cohabitation des communautés dans certains territoires, certaines villes, avec pour exemples paradigmatiques l’édit de Potsdam (1685), permettant l’accueil des protestants français à Berlin et dans le Brandebourg après leur persécution par Louis XIV, ou la Costituzione Livornina (1593), ensemble de règles commerciales et de citoyenneté pour une ville, Livourne, parmi les plus cosmopolites d’Europe. Mathilde Monge et Natalia Muchnik redéfinissent en effet le cosmopolitisme, en rappelant qu’il désignait moins au xviiie siècle notre tolérance ouverte actuelle qu’une pragmatique politique d’accueil par les exécutifs locaux ou nationaux. Un dictionnaire du français en 1784 définissait ainsi « cosmopolite » : « qui a une répartition géographique large », qualité également applicable à ce livre remarquable, malgré un style parfois trop universitaire.