
Résistance et conscience européenne. Henri Frenay, de Gaulle et les communistes (1940 1947) de Robert Belot
Dans cet ouvrage du titulaire de la chaire Jean Monnet à l’université de Saint-Étienne, c’est, à travers le prisme de Frenay, tout un pan de l’histoire de la Résistance et de la politique française dans l’immédiat après-guerre qui défile. Henri Frenay (1905-1988), saint-cyrien, prisonnier au début de la Seconde Guerre mondiale, évadé, a créé le Mouvement de libération nationale (MLN) dès août 1940. Après une brève période comme officier de renseignement à Vichy, il se met en congé de l’armée pour devenir résistant à plein temps. Entré dans la clandestinité, il crée un premier journal, Vérité, bientôt rebaptisé Combat comme son réseau, lequel est considéré comme le plus important de toute la Résistance intérieure, avec sa presse clandestine, ses activités de renseignement, ses groupes de choc qui intégreront plus tard l’Armée secrète, ses groupes francs et ses maquis. Sous l’impulsion de Jean Moulin, les trois réseaux de la zone Sud (Combat, Libération et Franc-Tireur) se réuniront au sein des Mouvements unis de Résistance (MUR), dont Frenay sera le commissaire militaire, mais au sein duquel il s’emploiera à maintenir une relative indépendance pour son propre mouvement. À la Libération, il sera ministre chargé des Prisonniers, déportés et réfugiés, tout en participant à la création de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR). Comme le montre Bellot, Frenay a pris conscience dès 1941 de la nécessité de bâtir l’Europe d’après-guerre, non seulement pour éviter le retour aux guerres fratricides, mais encore pour instaurer une société plus juste et plus humaine. Sans entrer dans les détails de l’opposition parfois sans pitié qu’il rencontra en raison de son engagement européen, tant du côté des gaullistes que des communistes, soulignons que Frenay devint, après l’échec de l’UDSR aux élections d’octobre 1945, un militant européen de premier plan, président de l’Union européenne des fédéralistes jusqu’à l’échec de la Communauté européenne de défense en 1954. L’auteur fait litière des calomnies qui ont servi et servent encore à dénigrer la Résistance ou la construction européenne, qu’elles concernent, par exemple, le financement de la Résistance ou le mythe des européistes vendus aux États-Unis.