
L’apprentissage du regard
L’impasse de l’école sur la culture visuelle conduit à ne pas former le regard des élèves. L’image mérite pourtant une lecture approfondie, qui permette de se l’approprier, au-delà de la sidération.
Et si, à reprendre le mantra qui nous vient d’une ordonnance de 1816, à savoir que l’école repose sur quelques fondamentaux – « lire, écrire, compter » –, nous tournions le dos à une partie considérable des besoins des élèves ? Et si faire l’impasse sur la culture visuelle, pourtant prégnante dans notre société, nous conduisait à ne pas former leur regard ? Actuellement, l’Éducation nationale préconise la fréquentation des images, mais ces dernières restent à la marge. Bien sûr, l’éducation artistique commence à trouver une place dans les programmes. Par ailleurs, les références à la peinture, à la photographie ou au cinéma sont plus présentes dans les manuels, mais davantage comme des illustrations que comme des documents à étudier pour eux-mêmes. On leur demande surtout de jouer le rôle de supplément récréatif à un enseignement qui, pour être crédible et sérieux, passe par le texte. Apprendre à mieux regarder – avec son corollaire, mieux écouter, puisque le son, en traversant l’image, la modifie – n’est jamais présenté comme un des fondamentaux de l’éducation. Avec la discrétion de l’évidence, nous confondons voir, qui est organique, et regarder, qui ajoute une intentionnalité, suppose une disponibilité et peut faire l’objet d’une éducation.
Peut-être sommes-nous victimes de la familiarité que les enfants manifestent avec le monde du visuel [1]