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Carte géographique ancienne de France | 1854 Vuillemin | wikimedia
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Les grandes étapes de la décentralisation

Encadré

novembre 2019

Depuis les années 1980, le pari est de rapprocher les décisions locales des citoyens pour revitaliser la vie démocratique locale, accélérer les décisions d’équipement et d’aménagement du territoire et économiser les deniers publics. Aujourd’hui, l’endettement public, les inégalités territoriales et la crise des Gilets jaunes interrogent le bilan de cette politique. L’équilibre délicat entre la stratégie globale et la mise en œuvre des solutions locales est sans cesse à remettre sur le métier. Voici un rapide historique de la décentralisation.

La création des collectivités territoriales

La création des communes et des départements comme divisions territoriales remonte à la Constituante. Celles-ci deviennent des collectivités territoriales à part entière à la fin du xixe siècle : la loi du 10 août 1871, qui crée les conseils généraux, et la loi du 4 avril 1884 donnent compétence respectivement aux départements et aux communes pour les affaires d’intérêt départemental et communal. À la différence que, si le maire détient le pouvoir exécutif communal, c’est le préfet qui en bénéficie pour les départements.

L’acte I de la décentralisation : exécutif local et transfert de compétence en «  blocs  ».

Les lois Defferre de 1982 et 1983 procèdent à ce qui deviendra l’acte I de la décentralisation. La région, créée en 1960 comme une simple circonscription administrative et transformée en 1972 en établissement public, devient une collectivité territoriale dotée d’un conseil régional et d’une clause de compétence générale pour les affaires régionales. Le pouvoir exécutif local détenu par les préfets est transféré aux présidents des conseils généraux et régionaux. De fait, la tutelle préfectorale sur les actes des collectivités territoriales est remplacée par un contrôle de légalité a posteriori. Enfin, des « blocs de compétences » sont transférés de l’État aux collectivités, ainsi les compétences sociales aux départements.

L’acte II : l’inscription constitutionnelle et les collectivités chefs de file.

La révision constitutionnelle de 2003 inscrit dans le premier article de la Constitution l’organisation décentralisée de la République. Un titre spécifique, le titre XII, est consacré aux collectivités territoriales : l’article 72 affirme notamment le principe de subsidiarité en vertu duquel la décision doit être prise à l’échelon qui peut le mieux la mettre en œuvre, ainsi que la libre administration (notamment financière) des collectivités dans les conditions prévues par la loi. L’article 72-2 pose le principe de la compensation financière d’un transfert de compétence ainsi que celui de la péréquation pour assurer l’égalité territoriale. La loi organique du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales organise un nouveau mouvement de transfert de compétences avec le principe de la collectivité chef de file lorsque la coopération est nécessaire.

Les années 2010 : la tentative de rationalisation.

Le transfert par « blocs de compétence », pour éviter des compétences partagées, s’est heurté à la réalité de la complémentarité des actions de l’État et des différents niveaux de collectivités. Depuis 2010, plusieurs lois ont tenté de rationaliser cette architecture, à savoir : la loi du 16 décembre 2010 créant les intercommunalités et les métropoles, la loi Maptam du 27 janvier 2014 réaffirmant les métropoles, la loi du 16 janvier 2015 réduisant le nombre de régions, la loi Notre du 7 août 2015 renforçant les intercommunalités et supprimant la clause de compétence générale pour les départements et les régions, et enfin la loi du 28 février 2017 relative au statut de Paris et à l’aménagement métropolitain. La volonté dans ces années était ainsi de développer l’intercommunalité face aux communes jugées trop nombreuses, de renforcer l’échelon régional à travers les nouvelles compétences de la loi Notre (transports, enseignement supérieur, développement économique), de clarifier les compétences et de prendre en compte la progression du fait urbain à travers le Grand Paris et les métropoles. Cet acte a également fait progresser la parité aux élections municipales, intercommunales et départementales.

Vers un acte III ?

Le président de la République a, lors de sa conférence de presse en avril 2019, promis une nouvelle loi de décentralisation pour le dernier trimestre 2019 établissant le nouveau cadre territorial de l’action publique. Celui-ci devrait reposer sur les principes de responsabilité, de lisibilité des compétences et des financements et de différenciation territoriale.

Diane Delaurens

Diane Delaurens est haut fonctionnaire, diplomée de Sciences Po et l'ENA, et titulaire d'une licence de philosophie. Elle s'intéresse notamment aux rapports entre philosophie et politiques publiques.

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