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Idéaliste de province ou Européen cosmopolite ? Deux lectures d'Albert Thibaudet. À propos d'Antoine Compagnon et de Michel Leymarie

août/sept. 2007

Coup de sonde

Idéaliste de province ou Européen cosmopolite ?

Deux lectures d’Albert Thibaudet. À propos d’Antoine Compagnon et de Michel Leymarie

Comment les changements de générations politiques s’inscrivent-ils dans l’histoire et quelles évolutions profondes de la société traduisent-ils du point de vue des équilibres géographiques, du rôle social des professions, de l’influence des diverses familles intellectuelles françaises ? C’est ainsi qu’on peut résumer une des questions héritées de l’œuvre foisonnante d’Albert Thibaudet (1874-1936), qui explique tout l’intérêt qu’on trouve à relire ses œuvres1 aujourd’hui et à découvrir sa biographie2. Cette résurgence bienvenue se produit au moment où nous nous trouvons précisément à un tournant politique, où nous voyons les cadres et responsables issus de l’après-guerre laisser la place à des nouvelles générations qui n’ont ni la même expérience historique ni les mêmes références intellectuelles. Même s’il est encore difficile de bien définir le profil de ce nouveau pouvoir (qui, notamment, n’a pas d’ancrage en province en ce qui concerne le nouveau président de la République, ce qui va à l’encontre d’un pronostic de Thibaudet pour lequel les mouvements de fond de la politique française viennent toujours de province, ou plutôt ne prennent de densité réelle que quand ils s’impriment dans la vie provinciale), on observe notamment la montée en force des formations commerciales et des avocats d’affaire dans l’équipe gouvernementale3. Simultanément, les modes d’excellence privilégiés par l’appareil de formation français sont mis en cause et l’alliance de l’ingénieur (positivisme) et de l’homme de lettres (universalisme républicain) est bousculée par la montée de l’économie, du commerce et le besoin de l’innovation4.

Écrivains et professeurs, les cadres de province

En lisant Albert Thibaudet, on mesure à quel point on ne peut s’enfermer, sur ces sujets, dans un débat sur les « élites », débat biaisé, surtout quand il est instrumentalisé par les médias. Ce qu’il importe d’observer, c’est le déplacement des références intellectuelles des groupes sociaux au pouvoir et, simultanément, l’évolution du poids politique et du rôle historique des professions et des familles intellectuelles au sein du pays. Albert Thibaudet a su percevoir dans son temps le déplacement des clivages significatifs de la société : les héritiers et les boursiers dans le système scolaire, Paris et la province, catholicisme et République … Philosophe élève de Bergson, historien vagabond, critique littéraire de la Nrf d’André Gide (Leo Spitzer et Maurice Blanchot n’ont pas jugé inutile de consacrer une analyse à sa méthode critique), analyste politique de la IIIe République, Albert Thibaudet est connu pour avoir analysé dans le Cartel des gauches l’avènement d’une « république des professeurs ». Dans cet essai de 1927, dont le titre est devenu presque proverbial, il analyse le passage d’un personnel politique dominé par l’école de droit et l’école de la science politique aux normaliens Blum, Painlevé, Herriot, génération formée par Jaurès et l’affaire Dreyfus. Observant les mouvements de la société, il montre que cette promotion des jeunes normaliens dans les cercles du pouvoir trouve son symétrique en province dans la place prise dans les milieux républicains par les classes intermédiaires intellectuelles (en premier lieu les instituteurs) formées par l’affaire Dreyfus. Ce poids nouveau lui permet de parler du « républicanisme de comité » qu’il oppose au « républicanisme proconsulaire », expression désignant le recours à l’homme providentiel au sein de la culture républicaine, formule dans laquelle, selon René Rémond, il avait anticipé les potentialités gaullistes du régime républicain et, pourrait-on ajouter, la tendance à la présidentialisation en cours.

Son attention à la géographie mentale du pays constitue aussi un trait distinctif de son style. Se présentant lui-même comme un Bourguignon, un homme des coteaux et des vignes, il aimait associer les identités locales avec des sensibilités de pensée. Dans les Princes lorrains (1924), il constate l’échec du bellicisme de Barrès et Poincaré et l’associe à la géographie des marches de l’Est. À cet enracinement nationaliste lorrain, il oppose un triangle géographique et intellectuel unissant la Guyenne et la Bourgogne à la Normandie :

À un angle du triangle, la Guyenne de Montesquieu et de Montaigne, c’est-à-dire des grands analystes. À l’autre angle, la Bourgogne de Bossuet, de Lamartine et de Quinet, c’est-à-dire de la synthèse oratoire et du service routier. Au troisième angle, celui du sommet, les grands historiens normands, un Guizot, raciné en Normandie, un Tocqueville et un Albert Sorel, qui ont étoffé, animé les épures de Montesquieu, et su se transporter sans cesser d’être puissamment français, à un cœur d’Europe, de civilisation, de rythmes planétaires, par une démarche analogue à celle dont un Flaubert et un Maupassant occupent un centre de vie5.

Historiens et écrivains, philosophes et politiques dessinent donc ensemble la géographie intellectuelle originale que le critique aime crayonner comme une esquisse intelligente mais rapide dans une sorte de liberté de l’invention, qui lui a été reprochée, qui évoque l’improvisation de la conversation. Cette géographie hexagonale finit par s’ouvrir à l’Europe et, au-delà, au monde, témoignant d’un désir de ne pas s’enfermer dans des frontières, ce dont sa carrière universitaire à Genève porte le témoignage. Cette œuvre critique témoigne ainsi de sa grande liberté, de son indépendance et de sa faculté à faire des liens entre littérature et politique, entre la philosophie et les arts, entre la culture classique et l’histoire contemporaine (mobilisé pendant la Grande Guerre, il relate ses réflexions sur le conflit dans la Campagne avec Thucydide).

C’est comme critique littéraire tout d’abord qu’Albert Thibaudet a mis en avant l’analyse par générations : l’approche des œuvres par la biographie, par les écoles esthétiques, par les genres lui apparaissait réductrice. Pour relier néanmoins les œuvres entre elles, il fait appel à cet autre principe de compréhension et de regroupement des écrivains qu’est la génération – un principe développé dans son Histoire de la littérature française. Issu lui-même de la génération formée par la littérature symboliste (il consacre une monographie à Mallarmé6), il s’est intéressé à travers un nombre impressionnant d’articles de revues (le volume « Quarto » des Réflexions sur la littérature compte plus de 1 700 pages) à ses contemporains Bergson, Maurras et Barrès, à la génération de Proust, Valéry, Gide et Claudel, mais aussi aux classiques et aux littératures européennes, avec une curiosité qui paraissait sans borne – Bergson disait de lui : « Il connaît spécialement tout. » Progressivement, ses chroniques de la Nrf s’émancipent de la seule critique littéraire et intègrent le commentaire politique. Car Albert Thibaudet est aussi baigné depuis son enfance dans la vie politique locale : il est né à Tournus en Bourgogne, son père est un notable radical local, petit propriétaire viticole et maire de Tournus. Thibaudet se présente comme « radicalisant du dehors », connaissant intimement la vie politique radicale de province, mais aussi, de ce fait, les limites de la culture républicaine et son impuissance dans l’entre-deux-guerres.

« Libéral indépendant et impénitent »

Mais son orientation politique, ou la leçon qu’on peut en retenir, fait l’objet d’appréciations diverses de la part des auteurs qui nous proposent de le relire aujourd’hui : son biographe, Michel Leymarie, et le maître d’œuvre des deux volumes de recueil thématiques en « Bouquins » et en « Quarto », Antoine Compagnon. Comment une telle divergence est-elle possible ? Sur quoi porte-t-elle ? Albert Thibaudet était critiqué de son vivant pour l’aspect trop allusif de sa prose. Le travail d’annotation effectué collectivement dans les deux volumes des écrits littéraires et politiques se révèle en effet indispensable pour bien comprendre le texte. Mais qu’il soit allusif n’explique pas la divergence d’appréciation ici. Thibaudet reste inclassable. Provincial appelé par André Gide comme critique dans le temple parisien de la littérature, il n’a cependant jamais fait partie du cénacle de direction de la revue et, trop éclectique, n’a jamais partagé les codes de la littérature pure. Agrégé mais jamais reconnu par l’université, c’est à Genève qu’il a trouvé un lieu pour l’accueillir (à partir de 1924). À Genève, il est resté pour l’université une référence, de façon quelque peu mythique selon Michel Leymarie, de l’école critique dite de Genève, ayant émergé après la Seconde Guerre mondiale, réunissant Georges Poulet, Jean Rousset, Jean-Pierre Richard ou encore Jean Starobinski et dont Esprit a hérité, en partie, par la sensibilité d’Albert Béguin. Politiquement, il se présentait comme modéré mais sans s’affilier à un parti politique ni à l’un des courants de pensée qu’il identifie dans les Idées politiques de la France (traditionalisme, libéralisme, industrialisme, catholicisme social, jacobinisme, socialisme). Il se présentait comme ouvert au pluralisme : non pas un homme des frontières mais des coteaux modérés de Bourgogne, du val de Saône, attaché aussi à Genève, ville de la Sdn des années 1920. C’est son attachement au pluralisme qui provoque le malentendu :

S’il est une chose que je maintiens avec énergie, c’est mon pluralisme, mon Contr’un7

écrit-il en référence au sous-titre du Traité de la servitude volontaire de La Boétie. Antoine Compagnon interprète curieusement ce pluralisme comme un ralliement au conservatisme : l’ouverture au pluralisme revient pour Compagnon, dans la lignée de son livre sur les antimodernes, à une alternative indépassable entre Anciens et Modernes qui organiserait le dialogue dans l’histoire littéraire française. L’attitude d’esprit libérale consiste en effet pour Thibaudet, « amateur de complémentaires8 », à considérer comme positif l’équilibre des antagonismes contenus dans leur opposition même9. Mais l’ouverture au dialogue est réduite par Compagnon à un dualisme, un mouvement de balancier, aussi mécanique que réducteur, au sein de la tradition littéraire (« la notion de littérature à laquelle aboutit Thibaudet coïncide avec celle de tradition10 »). Pourtant, Bergson, dont Thibaudet fut le disciple dans son attention à ne pas réduire la durée de l’histoire littéraire à une succession mécanique d’étapes, décrivait plus justement cette ouverture par la métaphore du carrefour : il lisait, notait Bergson, comme on dresse la carte d’un pays,

en s’arrêtant à chaque rond-point dans la traversée d’une ville, à chaque croix forestière s’il est en forêt11.

Michel Leymarie, dans la même veine, achève sa biographie par cette citation de Thibaudet : « Un esprit libre se sent à chaque instant à un carrefour12. » Le pluralisme, dans l’interprétation de Compagnon, subit un progressif mouvement de réduction, qui le restreint à un dialogue entre les classiques, puis à l’histoire de la littérature française structurée par l’opposition dualiste des Anciens et des Modernes. Pourtant, comme le montre la fin des Princes lorrains avec le triangle Guyenne-Bourgogne-Normandie (Montaigne-Lamartine-Guizot, pour prendre un philosophe, un poète et un historien, et trois hommes politiques !) que nous avons cité, toutes les symétries et antithèses ne se réduisent pas à un dualisme chez Thibaudet. En outre, cette lecture laisse de côté, après l’avoir évoqué, tout l’intérêt et le goût de ce grand voyageur (Italie, Grèce, Égypte) que fut aussi Thibaudet pour la littérature européenne. Albert Thibaudet sert finalement à illustrer la thèse du précédent livre de Compagnon sur les Antimodernes, dans lequel il était déjà évoqué13. Certes, Thibaudet, comme tous les écrivains de l’entre-deux-guerres, avait une connaissance intime de Barrès et une admiration littéraire pour Maurras : « Les lettres, quartier général du traditionalisme », intitule-t-il une sous-partie des Idées politiques de la France. Mais ces deux hommes dominaient pour lui la formation de sa génération avec un troisième : Bergson (il leur consacre à chacun un volume des Trente ans de vie française en trois tomes, 1920, 1921 et 1923). Que devient la référence à Bergson ? Pourquoi faire de l’ouverture et de la curiosité de Thibaudet une illustration d’un attachement national à la tradition française ? Compagnon conclut spectaculairement sa préface aux Réflexions sur la littérature par un « nul ne fut plus français que cet homme-là », achevant ainsi d’occulter la dimension cosmopolite du personnage mais le remodelant de manière plus adaptée à son programme de relecture conservatrice de la littérature française14. Antoine Compagnon fait de Thibaudet un traditionaliste et un conservateur par amour de la province. Un provincial dilettante, bavard approximatif, doublé d’un simple collectionneur de bons mots :

La politique, au fond, écrit Antoine Compagnon, ce ne sont ni des intérêts ni des idées, mais ce sont des mots, des bons mots. Et voilà pourquoi la critique littéraire mène à la critique politique15.

Pour un peu, on se croirait à Coblence dans les salons de la contre-révolution en train de se répéter les bons mots de la cour, en maudissant les temps modernes ! Fallait-il toute cette érudition pour arriver à une thèse aussi réductrice ? Littérature et politique, répertoires de « bons mots » ?

La défense du pluralisme tel que le conçoit Thibaudet a encore, finalement, à apprendre à nos professeurs. Le pluralisme pour lui signifie à la fois le goût de la diversité comme telle, l’« attention à l’unique » (titre de sa dernière chronique dans la Nrf en 1936) et le sentiment profond de la complémentarité des opposés, comme les différentes nations au sein de l’Europe, de même qu’il existe une opposition et une « endosmose de Paris et de la province » ou une opposition et une complémentarité du Nord et du Midi. La réconciliation franco-allemande qu’il appelle de ses vœux est une illustration au premier chef de cette nécessaire rencontre des antagonistes. Significativement, Michel Leymarie finit sa biographie sur la question de l’Europe. Albert Thibaudet, qui écrivait aussi pour la revue Europe nouvelle et pour le Journal de Genève, s’inquiétait dans les années 1920 de l’instabilité issue des traités de paix et de la remontée du nationalisme belliqueux. L’Europe à ses yeux rassemble des oppositions complémentaires : la « mer celto-germanique » et la « mer gréco-latine », le mode de vie maritime et le mode de vie continental, la concentration d’énergie et la concentration de mémoire. Ainsi, faire une histoire politique et littéraire de la France, ne va pas sans une ouverture maximale aux contextes, aux échanges, à une géographie ouverte : la France est un « diminutif d’Europe divisée16 ». Il accorde ainsi une place centrale au conflit politique et suit, avec Bergson, une conception de l’histoire qui n’a rien de figé. Plus que tout, il est resté un critique libre, un homme indépendant, rebelle aux classements, peu enclin à trancher ses opinions, badaud de la République des lettres et non homme de clan.

Marc-Olivier Padis

Librairie

Jean Baudouin et François Hourmant, LES REVUES ET LA DYNAMIQUE DES RUPTURES, Rennes, Presses universitaires de Rennes, coll. « Res Publica », 2007, 210 p., 16 €

Cet ouvrage collectif permet de comprendre pourquoi les revues, données régulièrement comme condamnées à disparaître, ne survivent pas si mal et se créent à profusion, ce dont témoigne l’article de Marion Gret sur la place des revues dans l’expérience participative de Porto Alegre. François Hourmant rappelle que les revues avancent souvent un projet de rupture (voir les manifestes successifs qui les rythment) et qu’elles organisent, chacune à sa manière, le débat et la polémique en leur sein. Cela nous vaut plusieurs articles complémentaires : Goulven Boudic compare l’esprit de débat et de discussion au sein des rédactions des Temps Modernes (Sartre face à Camus et Merleau-Ponty), de Socialisme ou barbarie et d’Esprit ; F. Hourmant souligne « la fabrique de l’excommunication » qui est la marque de Tel Quel (ce qui nous change de l’approche hagiographique de l’ouvrage de référence de Philippe Fourest publié au Seuil) et Gwendal Châton rappelle, en revenant sur la revue Contrepoint (celle qui a précédé la création de Commentaire par Aron et Casanova), que l’intelligentsia libérale fut conflictuelle et l’hégémonie douce des aroniens récente. Mais, à côté d’un article d’Yves Palau sur la revue Politique liée au catholicisme social et d’une étude sur la participation de René Guénon à diverses revues, on s’arrêtera plus particulièrement sur l’article consacré aux deux revues Textures et Libre (1971-1980) qui ont compté dans l’histoire d’Esprit. L’analyse subtile qui en est proposée par Franck Berthot ne conforte pas l’idée d’un courant de pensée politique homogène et souligne combien les principaux rédacteurs de ces deux revues (dont Passé Présent était une suite dans un autre contexte) ne partageaient pas, quoi qu’il en soit de l’antitotalitarisme, les mêmes convictions politiques et les mêmes conceptions de la démocratie. En ce sens, on comprend mieux l’hétérogénéité de penseurs regroupés autour du thème de la démocratie :

Ainsi Claude Lefort réévalue la tradition libérale mais lui-même se réclame d’une démocratie sauvage qui dépasse les conceptions classiques de l’État démocratique libéral. Il n’inscrit pas pour autant sa pensée de la démocratie libérale dans la tradition anarchiste libertaire alors que Miguel Abensour par son anti-étatisme s’y rattache plus sûrement. Cornelius Castoriadis partage avec l’anarchisme des conceptions anti-étatistes mais ne s’en est jamais revendiqué expressément, il se rattache davantage au socialisme révolutionnaire avec une réévaluation tout à fait originale du paradigme démocratique. Marcel Gauchet semble, lui, plus proche d’un socialisme démocratique intégrant les acquis fondamentaux de la tradition libérale.

Si Textures et Libre ont favorisé l’émergence d’un courant (dit antitotalitaire) de réflexion centrée sur la pensée du politique, ces revues ne correspondaient pas à des espaces d’orthodoxie unitaire mais à des foyers où s’exprimaient des débats relatifs à la nature de la démocratie et où couvaient des conflits que l’on saisit mieux rétrospectivement.

Olivier Mongin

Brèves

Thierry Jousse (sous la dir. de), LE GOÛT DE LA TÉLÉVISION. Anthologie des Cahiers du cinéma, Paris, INA/Cahiers du cinéma, 2007, 690 p., 55 €

Proposant un choix de textes extraits des Cahiers du cinéma, Thierry Jousse rappelle que la revue créée en 1951 a comme premier titre Les Cahiers du cinéma et du télécinéma. « Autrement dit, c’est parce que les Cahiers aiment le cinéma qu’ils sont allés scruter les écrans de télévision. » Cette relation effective et affective, ce « goût » pour la télévision, qui contraste avec l’idée d’un mépris total pour une télévision d’abord valorisée parce qu’elle introduit « le direct » dans le domaine des images, permet de saisir la singularité de deux moments. Le premier, correspondant aux années 1970 dont le numéro spécial de 1981 consacré à la télévision témoigne de l’état d’esprit (nous y avons fait référence dans l’ensemble d’Esprit de mars-avril 2003 consacré à la télévision), considère que la télévision n’est pas naturellement mauvaise sur le plan esthétique et du contenu mais qu’elle est prise en otage par l’État et le pouvoir politique. Le second, celui qui se focalise sur ce que Jean-Louis Missika appelle « la fin de la télévision » et valorise l’internaute aux dépens du zappeur, renvoie aux mutations les plus récentes qui passent par internet et les nouvelles technologies. « En gros, le zappeur est un personnage déjà périmé au profit de l’internaute qui, de plongées en apnée en raids souterrains, trouve la manière de nouveaux agencements, de nouveaux montages et peut agir sur l’image. Dans cette nouvelle donne, la télévision existe toujours mais n’est plus qu’un fournisseur, parmi bien d’autres, d’images à la carte. L’espace collectif qui fondait le rapport au petit écran se dissout au profit d’un espace de connexion généralisé qui n’a plus grand-chose à voir avec l’idée, à la fois démocratique et un peu totalitaire, de regarder au même moment, la même chose que son voisin. » Tel est le verdict : on est passé de l’écran de cinéma à l’écran télé (valorisée un temps comme citoyenne par certains) puis à la société des écrans, sans bien anticiper les étapes de ce passage ni ses conséquences sur le régime des images.

O. M.

Jean-Joseph Goux, ACCROCHAGES. Conflits du visuel, Paris, Des Femmes, 2007, 176 p., 15 €

Depuis Économie et symbolique (Le Seuil, 1973) et les Iconoclastes jusqu’à Frivolité de la valeur (Blusson, 2000), Jean-Joseph Goux, un auteur souvent publié dans Esprit, ne cesse de réfléchir au déferlement d’images qui marque notre époque. S’il ne se trompe pas sur les conséquences de la crise esthétique actuelle (« Ce qui s’annonce aujourd’hui n’est pas qu’un nouvel art va naître des cendres de l’avant-garde mais qu’une certaine mission ontologique de l’art, à laquelle deux cents ans de modernité et d’antimodernité ont cru, est en train de perdre sa nécessité. Cette mission bicentenaire subit une brutale déflation qui ne tue pas les arts en tant que tels mais qui les décharge de la responsabilité exorbitante qui leur avait été attribuée »), il suggère, dans l’un des textes qui compose ce recueil, une analogie avec la tragédie qui retient l’attention. « Nous rencontrons le même problème des limites que celui qui anime la tragédie. C’est à travers les écarts, les errances, les trajectoires unilatérales perdant de vue le tout, que se reconnaît comme la butée d’une “loi”, aussi inévitable qu’indicible. Et nous voudrions croire qu’au-delà d’un humanisme de premier niveau, qui attribue trop facilement, par ethnocentrisme, des caractéristiques universelles et essentielles à un type humain trop étroitement défini, il y a la possibilité d’un humanisme de deuxième niveau, qui viserait, au-delà de toute définition restrictive, vers une unité non inscriptible du genre humain. »

O. M.

Philippe Warin, L’ACCÈS AUX DROITS SOCIAUX, Grenoble, Presses de l’université de Grenoble, coll. « Politique en plus », 2007, 168 p., 12 €

Cet ouvrage aborde avec compétence une question peu étudiée, bien qu’elle soit souvent évoquée au titre de problème à résoudre par les politiques sociales : pourquoi des individus, qui ont normalement droit à des aides sociales, ne demandent-ils pas à en bénéficier ? En France, le problème émerge à l’occasion de la mise en place du Rmi, les études sur la population bénéficiaire mettant en évidence l’importance du non-recours et sa part dans le développement de la pauvreté. La question est également posée au niveau européen, l’objectif d’assurer à chacun un accès effectif à l’ensemble de ses droits figurant en bonne place parmi les objectifs sociaux de l’Union, non sans lien avec la thématique de l’égalité des chances. Philippe Warin montre bien qu’il ne suffit pas d’affirmer des droits pour les rendre effectifs, ni d’incriminer les défaillances des dispositifs d’action sociale. Le non-recours est souvent le résultat d’une attitude de repli, manifestation d’une perte de confiance dans l’offre publique. L’auteur pointe également la contradiction entre l’objectif d’assurer à chacun le bénéfice effectif de ses droits et les politiques de ciblage-mise sous condition de ressources et de comportements de certaines prestations. « Cette solution qui progresse aujourd’hui en Europe continentale après avoir été appliquée dans les pays anglo-saxons a pour inconvénient de stigmatiser les individus ou les groupes ciblés. Des comportements de non-recours aux prestations et aides sociales surgissent. La question de l’ineffectivité des droits sociaux est relancée alors même que le ciblage devait la régler. C’est le paradoxe de la solution qui devient à son tour problème. »

B. P.

Michel Hervé, Alain d’Iribarne, Élisabeth Bourguinat, DE LA PYRAMIDE AUX RÉSEAUX. Récits d’une expérience de démocratie participative, Paris, Autrement, 2007, 320 p., 20 €

« Je suis né le 29 septembre 1945 à Parthenay dans les Deux-Sèvres. Mon père était fils d’un cheminot et d’une paysanne. Devenu anarcho-syndicaliste, il avait créé sa propre entreprise en 1934, avec un de ses collègues, pour échapper à l’autorité patronale. » C’est sur ce mode délibérément biographique et historique que commence le récit de Michel Hervé qui, après avoir repris l’entreprise de son père (Hervé Thermique), y a expérimenté une démarche de démocratie participative originale en vue de substituer un fonctionnement en réseau au schéma pyramidal et autoritaire caractéristique de l’autorité patronale. Mais cette expérience retient d’autant plus l’attention que Michel Hervé, longtemps maire de sa ville de Parthenay, a essayé de la transplanter sur le plan de l’animation du territoire en tant qu’élu et non plus en tant que chef d’entreprise. C’est donc une double expérience qui est ici soumise, et il fallait du courage pour s’y prêter, aux feux de la critique, lucide et souvent virulente, d’Alain d’Iribarne qui soupçonne Michel Hervé d’avoir un comportement de tyran chaleureux et d’avoir rendu l’autorité patronale moins visible. Après la présentation de cette expérience inscrite dans une histoire au long cours et l’analyse décapante qui la suit, un débat très ouvert met en présence les divers partenaires de cette expérience qui a eu lieu dans les Deux-Sèvres, c’est-à-dire dans la région chère à Ségolène Royal qui a d’ailleurs rédigé la préface de cet ouvrage consacré à la démocratie participative version Parthenay.

O. M.

Pierre Vermeren, LE MAROC, Paris, Éditions Le Cavalier bleu, 2007, 128 p., Denis Cogneau, L’AFRIQUE DES INÉGALITÉS : OÙ CONDUIT L’HISTOIRE ? Paris, Éditions Rue d’Ulm, coll. « Cepremap », 2007, 64 p., 3 €

Voici deux petits livres éclairants dont l’objectif et la méthode sont radicalement distincts. Le premier, consacré au Maroc par l’un des meilleurs spécialistes du Maghreb contemporain, se penche sur tous les clichés et stéréotypes utilisés à propos de ce pays. Quatre séquences (« Le Maroc et la France », « Le Maroc, destination touristique », « Regards sur le Maroc et son roi », « Le peuple marocain ») permettent de se confronter à une multitude de représentations négatives ou positives. Ce parti pris, celui d’une collection dont le projet est original, a l’avantage de mettre en avant des ressorts historiques (les rapports du Maroc et de l’Algérie, le Maroc et la colonisation), les effets de l’internationalisation du tourisme et les conséquences de l’islamisme. Le second ouvrage, qui porte sur l’Afrique subsaharienne, prend la mesure des inégalités dans cette partie du monde en s’efforçant de chiffrer les réalités objectives et de prendre en compte les conséquences de l’histoire au long cours (le déséquilibre entre les zones côtières et les zones de l’hinterland comme le Congo, le décalage entre les colonisations française et britannique). Il en ressort que les inégalités y sont d’autant plus importantes qu’elles interviennent entre les pays et en leur sein. « L’Afrique subsaharienne est non seulement le sous-continent le plus pauvre de la planète, mais aussi le plus inégal. Elle cumule de larges écarts de richesse entre nations, proches de ceux qui s’observent en Asie, et des inégalités massives au sein de nations comparables à celles qui prévalent en Amérique latine. Les différentes strates de l’histoire se sont accumulées pour constituer le legs d’un espace fragmenté et d’institutions nationales inéquitables. »

O. M.

Antoine Grumbach, L’OMBRE, LE SEUIL, LA LIMITE. Réflexions sur l’espace juif, Paris, Musée d’art et d’histoire du judaïsme, 2007, 56 p., 12 €

Architecte, Antoine Grumbach s’interroge sur les relations entre le monothéisme juif et l’espace. Ouvrant des pistes de réflexion qui ne reprennent pas la thématique de la « ville-refuge » chère à Emmanuel Levinas (l’entrée de la ville comme seuil où la justice peut s’exercer pour celui qui a commis involontairement un crime dans le désert et peut craindre la vengeance) dans ses Lectures talmudiques, il constate que le judaïsme n’assigne pas la croyance à un lieu précis comme le christianisme et l’islam qui ont privilégié avec l’église et la mosquée un espace spirituel, un lieu bâti précis. La raison en est qu’« après la destruction du temple, le judaïsme préfère établir qu’un regroupement de dix hommes est la condition d’un lieu de prière », ce qui revient à déterritorialiser l’espace, à ne pas le limiter. L’architecte y voit un « dispositif qui ouvre une perspective vertigineuse sur l’essence de l’habiter, en ce qu’il indique clairement l’impossibilité de réaliser un bâtiment terminé, avec une double signification en regard de la question de la mémoire et de l’impureté ». Tout en rappelant que Le Corbusier évoque le tabernacle comme origine de la maison et de l’architecture, Grumbach pousse sa réflexion dans trois directions originales : un éloge de l’ombre à propos de la soukkot (la commémoration, durant la fête dite des cabanes, de l’exode dans le soukkah, une cabane dont l’édification exige un partage subtil entre l’ombre et la lumière), le mezouzah (ce terme qui désigne le seuil, le passage entre le dedans et le dehors, ne marque pas un seuil circonscrit, celui de l’entrée de l’habitation par exemple, mais repousse le seuil à l’infini, comme si la limite du privé et du public était remise en cause), et l’erouv (le traité Erouvin, qui renvoie à l’idée de multiplicité, de mélange, attire l’attention « sur le fait que l’espace est indifféremment redistribué dans d’autres systèmes de signification »). De cette réflexion sur l’espace et l’habiter, il ressort une conception de l’espace comme « une étendue sans barrières » et qui « ignore les limites ». Il y a là un imaginaire de la « spatialité insaisissable » qui empêche d’accepter « comme incontournable une spatialité moderne qui, au nom de la transparence, a dissous les idées de seuil, d’ombre et de limite ». Une très belle réflexion où architecture et religion ne sont pas sans consonances.

O. M.

En écho

NANTES, LA POLITIQUE BRETONNE ET L’URBANISME INSULAIRE – La quatrième livraison de la jeune revue Place publique, sous-titrée Nantes/Saint-Nazaire. La revue urbaine (juillet-août 2007), offre un dossier consacré à la création urbaine qui se réalise dans l’île de Nantes, dans des friches portuaires et industrielles qui se trouvent face au centre historique. C’est l’occasion de lire un certain nombre des protagonistes de cette opération ambitieuse et d’abord l’urbaniste-paysagiste Alexandre Chemetoff, et d’envisager des scénarios possibles. En effet : comment cette opération peut-elle éviter une tendance à la gentrification ? Comment préserver la mixité sociale ? Et comment ce nouveau centre insulaire, qui est à l’origine d’une réagglomération urbaine de grande ampleur, va-t-il parvenir à nouer des liens avec les autres centres de cette ville multipolaire, et d’abord le centre historique ? On peut également lire un article de Goulven Boudic sur le socialisme « atlantique », modèle ou réduit ? L’ancrage solide du parti socialiste en Bretagne s’est confirmé dans les récentes élections, ce qui appelle une analyse précise de la géographie électorale qui ouvre sur deux interrogations : comment cerner l’évolution professionnelle et sociologique qui facilite le vote à gauche dans l’Ouest et quels sont les atouts programmatiques du socialisme qui y est représenté ? Le tout invite à se demander si l’on peut voir dans le cas breton de quoi rénover le socialisme, mais cela suppose sans doute de mener des études monographiques aussi précises sur d’autres ensembles régionaux.

SARKOZY, LE CORPS INDIVIDUEL ET LE CORPS COLLECTIF – Philosophie Magazine (no 11, juillet-août 2007) a eu la bonne idée d’interroger notre ami Georges Vigarello sur les images du président Nicolas Sarkozy. Il observe d’abord son corps visible, un corps qui se montre capable de fluidité, de disponibilité et de légèreté car « le ventre en majesté hérité du xixe siècle n’est plus possible ». Le corps sportif du jogger qui n’est pas celui du « macho musclé désireux d’accroître sa force », exprime un effort pour aller vite. Mais cette mobilité s’accompagne d’une nostalgie de l’autorité qui se voit dans la manière dont sa parole – toujours dans le registre corporel – se ferme. « Sa parole tranche en restant calme, l’hésitation n’y a pas sa place. » Voilà pour le corps visible, à la fois décontracté et contracté, fluide et autoritaire. Mais Kantorowicz nous a appris que le roi, et donc le président de la République, avait deux corps : un corps visible et un corps invisible, un corps mortel et périssable mais aussi un corps glorieux et immortel. À en juger par sa photo officielle, « Sarkozy se glisse seulement par concession dans le corps immortel et met en majesté son propre corps mobile et souffrant ». Au risque d’inverser le rôle des deux corps. Mais alors, n’est-ce pas ce manque d’immortalité qui menace de devenir la faiblesse congénitale de Sarkozy ?

La News des livres de la Fondation Jean Jaurès donne la parole à Luc Rouban qui vient de publier avec Pascal Perrineau la Politique en France et en Europe. À la recherche d’un nouvel ordre politique (Éditions des presses de Sciences Po, 2007). Cela n’est pas sans intérêt car ce chercheur de Sciences Po va à l’encontre des approches et commentaires qui se focalisent sur la rupture Sarkozy. Tout d’abord, il affirme que le taux de participation élevée au premier tour de l’élection présidentielle ne doit pas faire illusion dans la mesure où la moitié des électeurs ayant voté ont une posture « antisystème » (20 % ont choisi les extrêmes et 18 % ont refusé la bipolarisation). Ensuite, il s’inquiète de la fragilité d’un pays qui n’a pas vraiment d’alternative crédible : « Nous n’avons ni les moyens de remettre en cause le personnel politique, ni d’alternative crédible aux structures sociales habituelles, ni la possibilité de proposer une nouvelle théorie politique ou une solution institutionnelle. Nous n’avons pas de plan “B” pour compenser le déficit démocratique. » Bref, la France cumule deux problèmes : « D’une part l’existence d’une confusion des clivages et des critères de lecture de la vie politique ; d’autre part elle se trouve à un moment où elle s’interroge sur les grands fondamentaux. » La société française se trouve face à elle-même, mais aussi face au miroir européen. Elle n’a toujours pas surmonté le syndrome de 1848 et de 1870, c’est-à-dire cette oscillation entre la politique de la barricade et celle de l’ordre moral, ou, si l’on préfère, l’opposition cyclique entre la « monarchie constitutionnelle » et les « classes dangereuses ». D’où cette conclusion : « La société politique française est beaucoup plus fragile que bien d’autres sociétés européennes. »

AMÉRIQUE LATINE ET IMMIGRATION CHOISIE – Si l’on en juge par le titre de l’article d’Olivier Compagnon (« L’Amérique latine à l’orée du xxie siècle, un laboratoire pour l’Europe ») publié dans la dernière livraison de La Revue socialiste (La nouvelle donne latino-américaine, no 27, avril-mai 2007), le Parti socialiste préfère regarder ce qui se passe hors de France. Ce qui est louable mais un peu surprenant dans le contexte actuel. À défaut donc d’un ensemble sur la crise du Parti socialiste nous voilà donc partis en Amérique latine (avec en primeur un édito de François Hollande) pour lire un article fort discutable sur Chavez « le révolutionnaire pragmatique » ou une réflexion sur les conditions de succès de Michele Bachelet (sait-on jamais !). Bref, on a le Parti socialiste que l’on mérite. Quant à la revue Raisons politiques. Études de pensée politique (Presses de Sciences Po, no 26, 2007), plus en phase avec la vie politique dans l’Hexagone, elle propose un ensemble cohérent sur les débats relatifs à l’immigration choisie.

Avis

« Juifs et chrétiens devant la rupture spirituelle du xxie siècle » : l’Amitié judéo-chrétienne de France organise du 12 au 17 novembre 2007 une semaine de réflexion consacrée à la présence à la fois civique et spirituelle que juifs et chrétiens peuvent proposer dans une société en panne et en crise. Avec notamment Paul Thibaud, Gilles Bernheim, Patrick Verspieren, Claude Klein, Marcel Gauchet, Oliver Abel, Armand Abecassis (grand amphi de l’Institut catholique, 20 h-22 h, renseignements et inscriptions : Amitié judéo-chrétienne de France, 60, rue de Rome, 75008 Paris, 01 45 22 12 38, ajcf@free.fr, www.amitie-judeo-chretienne.com).

« Le droit public existe-t-il ? » : sous ce titre les centres de droit public de plusieurs universités en Belgique (Ulb, Ucl, etc.) mettent en ligne un site collaboratif et interdisciplinaire qui ambitionne de constituer une plate-forme d’échanges et d’informations inédites, venant de toutes les disciplines, pour alimenter un débat sur la régulation juridique et la manière dont l’État entend réaliser aujourd’hui l’intérêt général (www.ulb.ac.br/droitpublic/).

À la rentrée, nous poursuivrons les réflexions sur le droit, avec deux textes sur la question du droit d’exception aux États-Unis et en Europe dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. En novembre, nous consacrerons un ensemble à la situation politique française après les élections. Nous nous demanderons ensuite comment réussir l’autonomie de l’université votée pendant l’été mais dont le sort dépendra de la mise en œuvre et de la mobilisation des acteurs désireux d’en faire un levier de dynamisation de l’enseignement supérieur. La figure philosophique et politique de Jan Patocka, en cette année anniversaire de la fondation de la Charte 77, sera évoquée à travers plusieurs textes et des inédits de Patocka sur le rôle de la dissidence. Nous nous interrogerons également sur la référence à la notion de « reconnaissance », à partir d’une analyse de l’œuvre d’Axel Honneth. Les nouvelles technologies seront aussi au programme de l’automne, avec un dossier sur la manière dont le numérique change, ou non, notre rapport au corps.

  • 1.

    Albert Thibaudet, Réflexions sur la politique, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2007 (édition établie par Antoine Compagnon) et id., Réflexions sur la littérature, Paris, Gallimard, coll. « Quarto », 2007 (édition établie et annotée par Antoine Compagnon et Christophe Pradeau).

  • 2.

    Michel Leymarie, Albert Thibaudet, « l’outsider du dedans », Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2006. Voir aussi la préface de Michel Leymarie à la réédition de la République des professeurs, suivi des Princes lorrains, Paris, Hachette littératures, coll. « Pluriel », 2006.

  • 3.

    Voir dans le « Journal » de ce même numéro la note de Michaël Fœssel (« “Je ne suis pas un intellectuel ”. La consécration présidentielle d’un lieu commun »), ainsi que « Les énarques, aux abonnés absents », Le Monde, 16 juin 2007.

  • 4.

    Voir, dans le présent numéro, l’éditorial et l’article d’Olivier Mongin sur la culture de l’innovation, qui rend compte du livre de Pierre Veltz sur les grandes écoles et les universités.

  • 5.

    « Épilogue » des Princes lorrains, op. cit., p. 282.

  • 6.

    A. Thibaudet, la Poésie de Stéphane Mallarmé, Paris, Gallimard, 2006 (rééd.).

  • 7.

    « Pour la géographie littéraire », Nrf, avril 1929, cité par M. Leymarie, Albert Thibaudet …, op. cit., p. 198.

  • 8.

    « La question des clercs », Nrf, décembre 1927, cité par M. Leymarie, Albert Thibaudet, op. cit., p. 196.

  • 9.

    C’est manifeste dans son analyse de l’équilibre entre laïcisme et catholicisme dans les Idées politiques de la France, dans le chapitre consacré au catholicisme social : « Dans un pays catholique, une place évacuée par le clergé est automatiquement occupée par l’instituteur et le professeur. Il faut admirer ce parallélisme et cette solidarité des deux corporations. Je dirais même, au risque d’être noté sévèrement par les laïcitoyens, qu’il serait beau et libéral d’en conserver l’équilibre », A. Thibaudet, Réflexions sur la politique, op. cit., p. 194.

  • 10.

    A. Compagnon, « Préface » à A. Thibaudet, Réflexions sur la littérature, op. cit., p. 29.

  • 11.

    Henri, Bergson, « Thibaudet critique et philosophe », Nrf, 1er juillet 1936 (numéro d’hommage de la Nrf à la mort de Thibaudet) dans A. Compagnon, « Préface » déjà citée, p. 21.

  • 12.

    M. Leymarie, Albert Thibaudet …, op. cit., p. 311.

  • 13.

    A. Compagnon, les Antimodernes. De Joseph de Maistre à Roland Barthes, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des idées », 2005.

  • 14.

    A. Compagnon, les Antimodernes …, op. cit.

  • 15.

    A. Compagnon, « Préface » à A. Thibaudet, Réflexions sur la politique, op. cit., p. XXXI.

  • 16.

    A Thibaudet, les Idées politiques de la France, dans Réflexions sur la politique, op. cit., p. 157.

Marc-Olivier Padis

Directeur de la rédaction d'Esprit de 2013 à 2016, après avoir été successivement secrétaire de rédaction (1993-1999) puis rédacteur en chef de la revue (2000-2013). Ses études de Lettres l'ont rapidement conduit à s'intéresser au rapport des écrivains français au journalisme politique, en particulier pendant la Révolution française. La réflexion sur l'écriture et la prise de parole publique, sur…

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