
À Istanbul, sur le chemin du djihad
Vincent Caumontat, consul-adjoint de France à Istanbul et chef de la chancellerie, a perdu la vie dans un accident en avril 2017. En tant que chef du service des Français à Istanbul, il avait eu à gérer les départs et retours de jeunes Français partis faire le djihad en Syrie, pour lesquels Istanbul constituait un point de passage. Muriel Domenach, consule générale à Istanbul entre 2013 et 2016, travailla à cette mission à ses côtés. Elle lui rend ici hommage.
Cher Vincent,
Cette lettre est la suite de nos conversations orphelines.
Notre dernier échange reste gravé dans ma mémoire. Je revenais de Fleury-Mérogis, où se trouvaient de nombreux djihadistes que nous avions suivis. Vous étiez de passage à Paris, avant de repartir pour Istanbul, où nous avions servi ensemble. Je vous avais invité à « écouter nos victoires », après les défaites des départs vers la Syrie, et des attentats en France. Nous étions fin mars 2017. Notre pays avait mis fin aux départs ; face à la coalition militaire, Daech perdait chaque jour plus de son emprise territoriale, et autant de sa capacité à préparer un attentat majeur.
J’ai résolu d’écrire ce que l’on ne peut plus se dire. Pour témoigner de vous, de notre expérience à Istanbul, lieu de transit des djihadistes dont certains allaient frapper la France.
Vous avez disparu quelques jours après, le 9 avril 2017, dans un accident de montgolfière au-dessus de la Cappadoce. Le ministre des Affaires étrangères vous avait rendu un hommage émouvant, en présence de nombreux collègues. J’ai résolu d’écrire ce que l’on ne peut plus se dire. Pour témoigner de vous,