Un éclairage original pour le Grand Paris
Urbaniste et architecte qui a travaillé sur de nombreux sites dans Paris intra-muros et dans l’Île-de-France, Philippe Panerai publie un ouvrage important qui permet de « changer de perspective ». Pour gagner un autre regard sur l’ensemble parisien, il se démarque d’une approche radioconcentrique repoussant toujours un peu plus loin les limites de Paris centre.
Tout en s’appuyant sur une longue pratique professionnelle en région parisienne en tant qu’enseignant, urbaniste et architecte, Philippe Panerai s’inscrit d’emblée dans la réflexion ouverte depuis quelques mois sur ce qu’on aura appelé successivement Paris métropole, le Grand Paris, la Région Capitale. Mais, affichant d’emblée sa volonté de décrire d’un point de vue géographique et morphologique le territoire de ce Grand Paris, il se défend d’intervenir sur le plan politique, et de décider du meilleur gouvernement possible pour la métropole. Se présentant au sens strict comme « un état des lieux », Paris Métropole. Formes et échelles du Grand-Paris1 est avant tout un préalable indispensable aux débats institutionnels. En effet, les scénarios esquissés entrecroisent des limites géographiques, des échelles, des formes, des tracés, des fils conducteurs, des sites et des paysages. Autant d’éléments préalables et indispensables pour que l’action politique s’inscrive dans un territoire perçu de façon sensible et concrète et pas uniquement sur un plan institutionnel. Voilà donc une réponse au vœu formulé par Paul Virilio :
Lorsque j’observe par exemple, une vue aérienne de l’Île-de-France, je contemple une agglomération inconnue où je n’ai jamais mis les yeux ni les pieds, et même si le plan de Paris n’est pas le territoire urbain, cette cartographie m’est infiniment plus précieuse que sa vision atmosphérique, puisqu’elle m’indique les ruptures, les brisures de symétrie, en un mot la fractalisation d’un tissu que ne laisse jamais deviner la photographie2.
Les sept chapitres de l’ouvrage
Fort riche et substantiel, l’ouvrage comporte sept chapitres dont l’orchestration est significative (voir p. 13). Le premier, consacré à la densité, prend la mesure de la répartition possible des habitants à l’intérieur d’une grande métropole en partant du principe qu’une densité faible n’est pas nécessairement la meilleure. Le deuxième chapitre, dont nous proposons les bonnes feuilles, dessine le scénario de quatre Grands Paris possibles. Ces scénarios sont concrétisés et rendus sensibles dans le troisième chapitre grâce à une lecture géographique et paysagère du site global de l’agglomération parisienne. Dans cette optique, le quatrième chapitre s’arrête, dans une perspective qui est celle de la rénovation urbaine et non pas celle de la tabula rasa, sur deux types d’habitat généralement considérés comme à la marge ou catastrophiques, à savoir les zones pavillonnaires et les grands ensembles. Loin de se polariser sur les seuls formes et tissus du territoire l’ouvrage se demande, en prenant l’exemple hallucinant des transports en région parisienne, comment freiner l’expansion du modèle radioconcentrique. En effet, la « ville mobile » exige d’associer les interrogations portant sur le territoire et l’impératif de mobilité qui, non réductible à la fonction des transports, renvoie aussi à la mobilité résidentielle et à celle de l’emploi. En s’appuyant sur une comparaison avec d’autres métropoles comme New York, Londres et Shanghai (chapitre 6), Philippe Panerai revient in fine sur les problèmes de gouvernance. Histoire de ne pas laisser croire que les scénarios « géographiques » mis en scène dans l’ouvrage peuvent faire l’économie d’une action politique dont l’efficacité passe, au-delà des luttes partisanes, par des réformes institutionnelles importantes puisqu’elles concerneront l’ensemble du pays. Non pas que Paris demeure une capitale centralisatrice, mais cette ville historique est désormais inséparable d’une aire métropolitaine qui doit, comme les autres métropoles, convertir le global dans un local qui ne peut se réduire à une entité communale. Ce qui exige de dessiner des ensembles urbains significatifs et cohérents dont les limites peuvent rester floues.
Présupposés politiques
Paris Métropole est pourtant plus politique que ne le dit son auteur. Politique, il l’est dans ses présupposés qui ont tous pour objectif de décaler le regard, c’est-à-dire de se « dé-centrer » physiquement et mentalement, de ne pas penser la métropole, le Grand Paris, à partir et en fonction du seul centre, comme un agrandissement de la ville inaugurée dans la petite île de Lutèce et donnant son nom à l’Île-de-France. Le premier présupposé politique consiste à renverser la dynamique centre/périphérie et le second à tenir compte, pour réfléchir sur le territoire, de la densité (où et comment habiter ?) et de la mobilité (transports) dans un contexte où la mobilité liée au travail et aux transports est également résidentielle3.
Se décentrer spatialement et historiquement ou comment changer de perspective?
« Paris, capitale du royaume, dans son développement égal et concentrique, multiplie, en l’élargissant, l’image de l’île où il fut d’abord enfermé […] Londres est un conglomérat, un assemblage aléatoire d’élements actifs, d’organes dont aucun n’a de priorité sur les autres »
Entre les deux guerres, l’urbaniste italien Giovannoni invitait à rénover les centres-villes anciens en fonction de la périphérie afin d’endiguer l’extension urbaine et de créer de nouvelles formes d’agglomération5. Si l’urbaniste italien préconisait de rénover le centre historique de Bologne par exemple, dans un travail de couture avec la périphérie proche, l’urgence est d’imaginer aujourd’hui dans le cas de Paris une approche géographique large et non pas restreinte, autocentrée ou uniquement soucieuse d’adoucir les transitions avec la première couronne, d’adoucir les seuils (le tramway suivant le tracé de la petite ceinture), les connexions (les Halles) et les portes (la Villette, Ivry, la Chapelle, les Lilas…) séparant trop brutalement la ville historique et ses confins6. C’était le sens de l’exposition présentée au pavillon de l’Arsenal (la Maison de l’architecture de la mairie de Paris) en 2005, dans la foulée des émeutes de l’automne 2005 en banlieue, qui retenait quatre axes (réhabiliter la couronne, investir les enclaves, continuer les faubourgs, réparer la ville de l’après-guerre7). Contre une approche centripète (recoudre le centre et la première couronne) et réparatrice (soigner les plaies du « tout automobile » des années Pompidou et des tours sur dalle style quartier Beau Grenelle), Philippe Panerai initie une approche large, indissociable d’un site dont l’échelle déborde le Paris dense et les deux premières couronnes. Mais celle-ci donne néanmoins une place au centre historique qui reste dans cette optique le centre d’une métropole, conçue comme une « constellation de centres ».
Ce qui signifie que le centre historique est associé à d’autres centralités (pôles d’activités, campus, zones d’habitat, villes anciennes, villes nouvelles, monuments ou paysages, sites, fleuves, rivières, canaux ou espaces verts…). Telle pourrait être alors une définition possible de la métropole : une « polycentralité hiérarchisée » qui inventorie et imagine des « centralités » (au triple sens de paysager, résidentiel et économique) tout en les hiérarchisant. Une telle polycentralité qui se méfie de la logique centripète (la centralité) comme de la seule logique fonctionnelle qui est séparatrice (les pôles spécialisés sur le plan économique et les pôles d’excellence liés au plan Campus). On l’aura compris, la centralité n’est pas seulement une affaire de pôle (habitat, emploi), de villes nouvelles (celles des années 1960 ou celles du rapport Attali) mais aussi de site et de paysage. Pour Sébastien Marot, qui parle pour sa part de « suburbanisme », un regard métropolitain, qui fait du site le régulateur du projet, rend possible un changement de perspective.
Imaginer un scénario urbain pour la métropole, c’est donc envisager un site élargi qui ne soit pas nécessairement limité de manière administrative (les institutions) et fonctionnelle (les pôles spécialisés) mais ouvre sur ce que d’autres appellent le Grand paysage. Antoine Grumbach, l’un des candidats retenus pour le concours du Grand Paris, en appelle ainsi à un paysage métropolitain qui suit le parcours de la Seine et les nuages en regardant vers l’ouest, vers la mer, vers des ports comme Le Havre. Penser en ces termes revient bien entendu à renverser la tendance historique qui lie la France, pays à faible culture urbaine comparé aux pays du nord et à l’Italie, à un centre peu maritime8 qui « aspire » ses extérieurs, bref à un urbanisme centripète. Convaincu qu’une ville est à la fois compacte et diffuse, centrifuge et centripète, Philippe Panerai imagine donc le territoire du Grand Paris en dehors d’une « politique » d’annexions successives. Celle-ci consistant à repousser plus loin les limites haussmanniennes et imaginer un Haussmann 2, ce qui correspond à la position de ceux qui préconisent l’association de Paris centre et de la municipalité parisienne et des communes de la première couronne.
Imaginer le Grand Paris, c’est s’interroger sur la nature de la grande ville contemporaine, la qualité de son paysage, la modalité de ses tissus, les relations entre ses centres. C’est aussi se confronter au modèle radioconcentrique dont les schémas successifs ont tenté sans grand succès de s’écarter.
Si ce modèle radioconcentrique est présent à Amsterdam, Bordeaux, Bruxelles, Paris, Toulouse ou Moscou, il ne l’est pas à Berlin, Venise, Marseille, Londres ou Barcelone. Non universel, il a une histoire parisienne et hexagonale plus que singulière puisque la pression centralisatrice de l’État a contribué à le renforcer. Ne dévalorisant pas d’emblée le périurbain ou le suburbain et ne proposant pas une analyse négative de la banlieue et des zones pavillonnaires, Philippe Panerai s’efforce de penser les liens possibles entre le centre historique, les centralités diverses (sur le plan de l’habitat, de l’économie ou du paysage) et ses périphéries en fonction des exigences décisives sur le plan démocratique que sont la mobilité et l’évolution du foncier9.
Le double impératif de la mobilité et de la densité
Pour y parvenir, et tel est le deuxième présupposé politique de l’ouvrage, Philippe Panerai précise d’emblée un certain nombre de points destinés à clarifier la question décisive de la densité (distincte de celles de la hauteur et de la concentration) sans en faire un mot d’ordre rudimentaire10. Devant répondre à l’impératif du logement tout en évitant les excès de l’étalement, la densité répond à une double nécessité :
À la fois à la nécessité impérieuse de construire pour loger les habitants et la nécessité, non moins impérieuse, de limiter l’étalement urbain.
Plutôt que de se satisfaire d’un appel volontariste à la densité qui passe par les polémiques sur les tours11, Philippe Panerai rappelle à bon escient que l’Île-de-France est
une vaste région aux densités variables : 86 % des Franciliens habitent 22, 5 % du territoire aggloméré du Grand Paris, les 14 % restants se répartissent dans quelques villes moyennes comme Mantes, Meaux, Fontainebleau, Étampes et dans les bourgs et villages d’une région encore fortement agricole, mais travaillent pour l’essentiel dans la zone dense12.
Mais pourquoi se focaliser d’emblée sur la densité ? L’un des rôles de la métropole est de répondre au déficit de logements, au prix de l’immobilier dans Paris intra-muros (augmentation continue dans le centre alors que les prix baissent en première et deuxième couronne) en évitant l’alternative de la surdensification de Paris centre et de l’étalement suburbain. Prendre en compte la demande de logements exige de desserrer l’étau foncier de Paris centre et des couronnes limitrophes13 afin de faire baisser les prix d’accès au logement et de parvenir à constituer une zone dense élargie qui ne se réduise donc pas à celle de Paris centre.
Si nous savons pourquoi densifier reste à savoir si nous sommes capables de proposer aujourd’hui des formes urbaines atteignant des densités comparables à celles des quartiers haussmanniens sans en avoir les défauts (cours exiguës, absence de lumière et de vue dans les étages inférieurs…).
Philippe Panerai s’efforce donc d’imaginer des limites métropolitaines tenant compte de la demande de logement à l’échelle d’une zone dense élargie. Ce qui exige de trouver un équilibre entre l’accès à la propriété, le logement locatif et l’habitat social et de ne pas tout sacrifier au premier.
Mais cette prise en compte de l’habitat par le biais de la densité va de pair avec une description critique de l’état des transports qui témoigne de manière monstrueuse de la tendance radioconcentrique. Ce que révèle une analyse implacable de la structuration du métro parisien et une prise de distance vis-à-vis du tramway considéré comme un instrument de cabotage à l’image du récent batobus appelé Voguéo qui arrive cependant à Ivry et Maisons-Alfort au-delà de Bercy14. Mais Philippe Panerai dénonce parallèlement l’incapacité d’imaginer des centralités hors de Paris centre.
À lire la carte du Rer, quatre pôles hors de Paris seulement existent (Versailles-chantiers, Massy-Palaiseau, Juvisy-sur-Orge et Val-de-Fontenay). Cinq si on ajoute La Défense, six si on compte Saint-Denis. Un peu plus si on intègre les gares de lignes de banlieue. Mais au total arriverait-on à huit ou dix pôles de correspondance, il s’agit de 4 à 6 millions d’habitants… Pour la même population, et à l’extérieur du centre élargi, Londres offre 22 gares ou stations d’interconnexion.
Penser la métropole exige donc de réfléchir aux mutations du territoire en fonction d’une densité décroissante (jusqu’à un certain seuil) et en évitant les dérives du mitage (qui n’est pas une plaie naturelle du périurbain comme les adorateurs de la ville centre le laissent croire). Mais cela exige également de prendre en compte les transports (voir les pages sur le métrophérique et la tangentielle) rendant possible la mobilité dans ces zones d’habitat.
Comparaisons métropolitaines
Décentrement géographique et mental, prise en compte du grand territoire métropolitain, prise en compte de la densité et de la mobilité, Philippe Panerai éclaire et précise le scénario possible de la métropole parisienne en suggérant des comparaisons avec d’autres grandes métropoles. Ce qui est une invitation à prendre en compte le facteur démographique. Contrairement à ce que l’on peut croire, la tendance de la métropole ne se confond ni avec l’illimitation urbaine, celle d’une extension indéfinie (urban sprawl), ni avec un espace replié sur lui-même (plus ou moins grand, la taille est ici aléatoire) à l’image de ce que Saskia Sassen appelle la « ville globale ». Celle-ci est un ensemble urbain qui se coupe de son environnement proche dans la mesure où il est destiné à se connecter avec les autres villes globales15. Entre dilatation et contraction, entre expansion indéfinie et chaotique et fermeture destinée à se greffer sur les autres villes globales du réseau mondial dans la plus profonde indifférence à l’environnement proche16, Philippe Panerai inscrit la réflexion sur la métropole dans le contexte d’une globalisation qui affecte particulièrement les territoires. Si la ville est mobile (logement, emploi, travail), elle l’est d’autant plus qu’elle doit articuler des flux (déterritorialisés) et un territoire qui correspond à une aire urbaine constituée de multiples centres et destinée à répondre à des exigences où la mobilité n’est plus une fonction parmi d’autres puisqu’elle les traverse toutes aujourd’hui17.
Pour Philippe Panerai, Paris est doublement perçue comme une métropole mondiale parmi d’autres. D’un côté, le Métropol World Atlas (voir p. 173) considère l’agglomération parisienne comme une métropole (9 645 000 habitants et 5 100 000 emplois sur 2 721 km2) en la comparant avec 120 autres villes dont New York (8 100 000 habitants sur 780 km2 répartis en 5 boroughs), Londres (8 200 000 habitants répartis en 2 cities et 31 boroughs et rassemblés dans une entité politique unique, la Greater London Authority) et Shanghai. D’un autre côté, cette métropole tend encore à s’ignorer comme telle et noue des liens avec les autres métropoles (régionales et non pas mondiales) de l’Hexagone. Alors que des communautés urbaines comme Nantes, Rennes, Lyon, Bordeaux, Lille… s’interrogent depuis des années sur leur devenir métropolitain, Paris se perçoit trop souvent à travers son patrimoine napoléonien et muséifié. Et pourtant, entourée de métropoles mondiales, européennes ou régionales, le Paris historique est le Manhattan du Grand Paris métropolitain. On comprend qu’une approche métropolitaine est aussi l’occasion pour le Paris muséifié de changer de perspective et de renverser cette image prestigieuse mais peu dynamisante.
Une polycentralité hiérarchisée
Échelles et limites : les scénarios divers
Si l’ouvrage est porté par ces présupposés (prise de distance vis-à-vis du couple centre/périphérie qui a marqué l’urbanisme parisien18, prise en compte politique de la densité et de la mobilité, inscription de la métropole dans un contexte global), il prend le risque de mettre en scène des réponses possibles. Autant de scénarios devant permettre d’innerver le débat public si celui-ci voit le jour. Ainsi Philippe Panerai prend en considération huit échelles et propose quatre scénarios possibles, quatre Grands Paris, qui n’opposent pas une zone dense compacte et une zone diffuse extensible. S’appuyant sur divers critères (superficie, nombre d’habitants), ces huit échelles ne correspondent pas nécessairement à des limites visibles dans chacun des cas dans la mesure où elles ne font pas coupure.
Les limites du Grand Paris doivent jouer un triple rôle : elles intègrent autant qu’elles enclosent, elles associent des échelles emboîtées, elles sont définies par adhésion au lieu d’être imposées.
Quelles sont donc ces huit échelles rendant possibles les quatre scénarios (le Grand Paris du Vélib’, celui du département, celui de la ville métropole et celui de l’agglomération) ? La première est celle de Paris centre (les 11 arrondissements centraux de Paris, 950 000 habitants, 27 km2, 350 habitants/ha) dont la limite est l’enceinte des Fermiers généraux dont les lignes 2 et 6 du métro suivent le tracé ; la deuxième celle du Paris intra-muros (les 20 arrondissements, 2 000 000 habitants, 248 habitants/ha, 87 km2 sans les bois et 107 avec), dont la limite est marquée par le double anneau du boulevard des Maréchaux et du périphérique ; la troisième celle de Paris et de la première couronne (20 arrondissements + 29 communes limitrophes, 180 km2 de rayon, 3 500 000 habitants), dont la limite faiblement visible sur le terrain est rythmée par la ligne des forts19 ; la quatrième celle de Paris et de la zone dense (20 arrondissements + 79 communes, 450 km2 pour un rayon de 12 km), dont la limite floue hésite entre l’A 86 et l’ancien département de la Seine ; la cinquième celle de la métropole parisienne au sens strict (20 arrondissements + 200 communes, 1 400 km2 pour un rayon de 20 km), dont la limite hésitante correspond en gros à la francilienne ; la sixième celle de l’aire métropolitaine (20 arrondissements + 396 communes, 2 700 km2 pour un rayon de 30 km2), dont la limite floue correspond au territoire du plan d’Henri Prost de 1934 ; la septième celle de la région Île-de-France (1 300 communes, 12 000 km2, 11 000 000 habitants, 8, 8 habitants/ha, à comparer avec les 248 habitants/ha de Paris intra-muros) ; la huitième celle du Bassin parisien qui correspond à la région Île-de-France, aux quatre régions limitrophes et à des parties de quatre autres régions dans un rayon de 200 à 300 km qui englobe une première couronne de villes importantes (Reims, Orléans, Amiens, Saint-Quentin). C’est en fonction de ces huit échelles correspondant à des limites plus ou moins visibles et aux statuts distincts (institutions comme la région ou le département, paysages comme les forts ou les territoires agricoles, modes de transport comme les axes autoroutiers, les lignes de métro ou de Rer) que l’ouvrage propose les quatre scénarios décrits avec précision dans le texte qui suit (voir infra, p. 122).
Mais au-delà des échelles, des limites et des scénarios, Philippe Panerai évoque parallèlement les scénarios liés aux formes de gouvernance possibles. Ce qui le conduit à préciser trois « contours » afin d’éclairer les débats sur la gouvernance qui opposent les acteurs concernés.
Trois contours structurent déjà ce Grand Paris. L’ancienne enceinte de Thiers qui associe aujourd’hui le boulevard des Maréchaux et le boulevard périphérique distingue le Paris intra-muros de la banlieue. Certes l’adoucissement de la rupture, la couverture partielle du périphérique, le tramway commencent à transformer cette coupure en suture. L’ensemble RN 186-A 86, futur support du métrophérique, est le deuxième contour important. Il peut marquer la distinction entre la métropole centrale et la première couronne, un peu comme inner/outer London. Au-delà, l’attractivité et le rayonnement de l’agglomération capitale ont depuis longtemps dépassé les limites de l’Île-de-France pour constituer une vaste aire urbaine, aire économique et bassin d’emploi, mais aussi aire historique et culturelle.
Cette notion de contour (un contour est flou, indéterminé) n’a pas été introduite par hasard puisqu’elle permet de cadrer le débat « flou et complexe » sur la gouvernance. Ces trois contours vont en effet de pair avec trois échelles (et non plus huit) : la première, constituée par la zone dense qui varie selon les définitions entre 550 et 775 km2 et rassemblant entre 80 à 120 communes, est
indispensable pour mener à bien deux actions : amplifier l’espace de la capitale qui étouffe à l’intérieur des limites de Thiers, développer équitablement les territoires de la première couronne trop longtemps asservis.
La deuxième, qui s’identifie à l’agglomération consolidée, déjà définie par le schéma directeur de 1965, couvre 1 450 à 1 650 km2 (8 à 8, 5 millions d’habitants), est
l’échelle d’une métropole où se rassemblent plusieurs centres historiques et les grands équipements métropolitains, même si c’est Paris-central qui domine. Sa gouvernance permet la mise en valeur des sites naturels ou forestiers inclus dans l’agglomération indispensables à sa survie ainsi que la constitution des réserves foncières qui permettront son développement.
La troisième échelle, celle de la région urbaine au sens anglo-saxon, dépasse la région Île-de-France (plus de 30 000 km2, 100 km de rayon, et 14 à 15 millions d’habitants, soit 25 % de la population de la France métropolitaine). Ce qui soutient la comparaison avec Londres (Greater South-East, d’Oxford à Douvres et de Cambridge à Brighton, 22 000 km2, 19 millions d’habitants). Bref, c’est en fonction de telles configurations que les scénarios institutionnels relatifs à la gouvernance20 devraient s’opposer. Mais, à ce stade, il est significatif que beaucoup de chercheurs et d’experts, si l’on excepte les propositions de Marc Wiel par exemple21, font passer aujourd’hui le projet avant la gouvernance, arguant que seules des concertations préalables sur des projets convaincants permettront la décision politique. Au risque d’oublier un peu vite tous les problèmes que posent les trois types d’intercommunalités et de reléguer la question des liens entre démocratie et territoire dans le contexte politique français.
Pôles et centralités
Dans le territoire du Grand Paris où s’emboîtent huit échelles, la métropole est parallèlement définie comme « constellation de centralités » qui permettent à la fois de rendre possible un territoire viable sur le plan de la densité (logements), de la mobilité (transports) et des services (eau, égout, propreté, espaces verts…) dans l’esprit de l’urbanisme lié à la société industrielle (Cerda, Haussmann). Mais dans « le nouveau monde industriel » qui est le nôtre, la métropole est polycentrique et ce polycentrisme est lui-même hiérarchisé. En valorisant la polycentralité, Philippe Panerai s’inscrit dans le sillage du schéma directeur de 1965 et se démarque de l’exigence multipolaire qui sous-tend le schéma régional de 1994. Les mots ont ici tout leur sens : si le pôle sépare (telle est la tendance du pôle d’excellence – campus retranché ou petite « ville globale » avant la lettre – d’être séparateur car spécialisé), le centre est une force d’attraction. Mais les centres sont hiérarchisés, ce qui n’est pas un hasard sur le plan de la conception urbaine : c’est parce qu’il y a des liens et des variations entre les centres que le paysage et les espaces non construits peuvent trouver leur place dans l’ensemble.
La polycentralité peut revendiquer l’héritage de Paul Delouvrier et du schéma directeur de 1965. Mais tous les centres ne sont pas équivalents. Économiquement, politiquement ou culturellement certains dominent et organisent de fait le territoire et la vie quotidienne des communes voisines. D’où le concept de polycentralité hiérarchisée : polycentralité car il semble impensable de rassembler 8, 5 millions d’habitants sous une autorité unique au mépris des organisations existantes. Hiérarchisée, car dans un tel rassemblement toutes les communes n’ont pas le même poids et que l’organisation de l’agglomération par constellations – certaines intercommunalités en sont déjà une illustration – suggère de respecter les hiérarchies existantes.
Ce qui signifie, contrairement aux scénarios qui voient dans la métropole une simple polycentralité effaçant tout centre (symbolique, historique), que le centre historique demeure le centre-ville mais qu’il fait écho à des pans entiers de la mémoire présents au-delà de son propre territoire. Tout comme Manhattan symbolise New York pour le reste du monde tout en étant l’un des cinq quartiers de New York. La hiérarchisation est ici une invitation à prendre en compte la pluralité des centres, des pôles et des sites possibles, mais l’ouvrage de Philippe Panerai n’a pas pour objectif de décrire (ce qui est apparemment la priorité de la mission de Christian Blanc) les sites moteurs tant sur le plan économique que du savoir appelés pôles d’excellence. Mais faut-il en rester à une approche économiste de cette polycentralité hiérarchisée ?
Les tissus et le Grand paysage
À ce stade, l’originalité de l’ouvrage réside dans la prise en compte de la nature paysagère du site du Grand Paris indissociable de l’Île-de-France et de ses confins. Se décaler, c’est prendre du recul, s’orienter autrement qu’à partir du centre en partant du grand territoire qu’on appelle soit la région urbaine soit le Grand paysage. La thématique du paysage rappelle que dans le plus petit paysage la nature est présente et que le Grand paysage est l’occasion de raccorder l’urbain à la Nature et à ses équilibres. Prendre en compte le paysage, ce n’est pas choisir entre la ville ou la campagne mais valoriser l’intrication de l’urbain et des rythmes naturels qui devraient affecter aussi bien l’habitat que les espaces verts et publics. Dans cette optique, Philippe Panerai élabore un chapitre où le subtil connaisseur des formes urbaines qu’il est22 prend un plaisir évident à décrire ce qu’il appelle les tissus qui sont des « formes en mouvement ». Dans une approche qui ne surprendra pas ceux pour qui l’eau est un élément essentiel dans la nouvelle société industrielle, il dessine le grand paysage métropolitain en suivant les courbes et les mouvements de la Seine, et en rappelant l’importance des rivières (la Bièvre…) et des canaux d’irrigation (l’Ourcq…), mais aussi des pièces d’eau, des lacs et des bassins. Suivre le fleuve fournit l’occasion de rappeler que Paris n’est pas une cuvette ou un espace fermé sur l’un de ses côtés par un front collinaire (comme c’est le cas des monts du Lyonnais qui invitent Lyon à regarder vers l’est et les Alpes) mais qu’il est composé de petites collines et nombreux « hauts lieux » d’où il est possible de prendre de la hauteur23. Mais comme les tissus du paysage renvoient aussi au construit, Philippe Panerai imagine une rénovation urbaine qui ne raye pas de la carte la maison pavillonnaire et les grands ensembles.
Très inventive et éclairante, sa lecture morphologique revient à valoriser des paysages (qui sont également des centralités), à redonner leur place aux parcs, bois, grands espaces verts (à la différence de Londres, les grands espaces verts parisiens sont hors du Paris intra-muros), à rappeler que le paysage parisien est un horizon qui renvoie à l’infini :
L’horizon, écrit Michel Corajoud, c’est le tremblement de la limite, la ligne poreuse. L’un des premiers réflexes à avoir est d’outrepasser la limite, puisque les espaces transgressent les bornes et les propriétés, puisent leurs qualités au-delà de leurs propres frontières24.
Définir strictement le territoire métropolitain n’a donc guère de sens si les limites du paysage sont floues, et encore moins si l’on est convaincu que le monde urbain doit composer avec les valeurs d’une nature qui demeurent visibles dans ce qu’il reste des terres agricoles… quand elles ne sont pas soumises à l’agressivité de la culture intensive. S’il ne s’agit pas de croire que l’on va retrouver une campagne pure en dehors de l’espace urbain, le territoire métropolitain a pour tâche de refaire de la campagne dans le territoire urbain, de « mettre de la campagne dans la ville », de passer « une alliance entre le paysage et la ville » (M. Corajoud) sans pour autant se contenter de murs végétaux, d’arbres symboliques, d’espaces verts étiques. Le débat sur la métropole va donc de pair avec l’émergence d’un espace urbain susceptible de retrouver le sens du patrimoine. Si tout monument historique n’est pas nécessairement à révérer comme un objet patrimonial pour la République25, le monument à respecter est peut-être déjà là puisqu’il renvoie à la terre des ancêtres (le cimetière) mais aussi à la nature entendue comme un territoire qui respecte les grands équilibres et fait mémoire. Tel est le sens du « suburbanisme » cher à Sébastien Marot :
Celui-ci fait signe vers le substrat de nos pratiques d’aménagement, et montre ainsi le site, l’assiette ou le paysage comme une grande infrastructure dont le sens est engagé par tout projet. Quatre réflexes caractérisent cette démarche : la mémoire ou anamnèse des qualités du site, la vision du site et du projet comme processus, la lecture en épaisseur et non seulement en plan, et enfin la pensée relative (la mise en relation plutôt que les arrangements d’objets). Bref le siècle n’est pas à l’extension des villes mais à l’approfondissement des territoires26.
Nous vivons dans un monde de flux et au rythme de « l’urbain généralisé ». Si on ne va pas réinventer de la campagne au-delà de l’urbain, l’interrogation sur la métropole est une occasion de reprendre à nouveaux frais la question des liens susceptibles de se nouer entre les espaces urbains, la campagne et la nature. Alors que l’opposition entre la terre vierge et la ville artificielle n’a plus de sens, une dynamique métropolitaine doit prendre en compte les mobilités et les flux qu’elle a pour tâche de pacifier, de calmer. Bref, il faut respecter l’inscription corporelle et l’art d’habiter, ces invariants anthropologiques, car naturels, dont l’urbain participe inéluctablement.
Françoise Choay aime rappeler que nous sommes dans un monde de flux où l’espace décisif est celui de la connexion (le hub, le pôle d’excellence, le non-lieu par excellence selon Marc Augé) au risque de voir disparaître toutes les médiations spatiales indispensables entre l’inscription spatiale du corps individuel et les flux qui valorisent en priorité les espaces de connexion. La réflexion originale sur la dynamique métropolitaine initiée par Philippe Panerai permet d’envisager des synergies entre des centres qui risquent de se morceler et menacent de se séparer, mais aussi de décrire des formes urbaines ayant une signification pour des corps humains dont la mobilité ne se résume pas à une déterritorialisation permanente. En cela, ce livre exemplaire sur le Grand Paris et le devenir métropolitain est une belle occasion de s’interroger sur les conditions d’un vivre ensemble nécessairement spatialisé.
- 1.
Philippe Panerai, Paris Métropole. Formes et échelles du Grand-Paris, Paris, Éditions de La Villette, 2008.. Nous remercions l’éditeur du livre, Marc Bédarida, pour son aide amicale et efficace.
- 2.
Paul Virilio, « Tout Paris », Les Temps modernes (Paris s’éveille), décembre 2001-janvier-février 2002.
- 3.
Pour rappel : les flux périphérie/périphérie sont de l’ordre de 70 % en Île-de-France, les flux centre/périphérie de l’ordre de 15 %, et les flux intra-muros de l’ordre de 15 %.
- 4.
Paul Claudel, Connaisssance de l’Est, Paris, Gallimard, coll. « Poésie », p. 47-48.
- 5.
Gustavo Giovannoni, l’Urbanisme face aux villes anciennes, Paris, Le Seuil, 1998, préface de Françoise Choay.
- 6.
Dans ce contexte, le projet ambitieux des « terrasses » qui descendent de l’Arche de La Défense à Nanterre retient l’attention.
- 7.
Éric Lapierre (sous la dir. de), Aménager Paris, Paris, Éd. du pavillon de l’Arsenal, 2005.
- 8.
Dans son Identité de la France (Paris, Flammarion, 2000), Fernand Braudel souligne que le développement historique par les centres (Bourgogne, Île-de-France) a eu pour conséquence une double incapacité : une réticence à valoriser le littoral atlantique et à devenir une force maritime, une difficulté à s’ouvrir à l’Europe centrale (ce qui n’est pas sans lien avec le caractère sauvage du Rhône qui ne sera « civilisé » qu’avec les barrages de l’après-guerre).
- 9.
Voir Philippe Estèbe, « Quel avenir pour les périphéries urbaines ? », dans Esprit (La ville à trois vitesses), mars-avril 2004 et id., Gouverner la ville mobile. Intercommunalité et démocratie locale, Paris, Puf, 2008.
- 10.
Pour une critique de la langue de bois, voir J.-M. Roux, « Éloge de la densité : leçon de morale ou projet urbain ? », Urbanisme, n° 361, juillet-août 2006.
- 11.
Voir les pages consacrées aux tours (p. 98-100) auxquelles P. Panerai ne manifeste pas une opposition de principe, bien au contraire. Sur les tours, voir le livre à paraître de Thierry Paquot, la Folie des hauteurs, Paris, François Bourrin, 2008.
- 12.
Voir la comparaison portant sur les densités variables entre le quartier intra-muros de Popincourt, le 14e arrondissement, la ville nouvelle de Marne-la-Vallée et Romainville.
- 13.
P. Panerai, qui a travaillé sur le site de Seine-Amont (à la confluence de la Seine et de la Marne), connaît bien le dossier des fiches ferroviaires et portuaires. C’est l’occasion de rappeler que l’État et les entités autonomes que sont la Sncf, Rff (Réseau ferré de France), et le port autonome de Paris possèdent un parc immobilier impressionnant dont il faut tenir compte avant de construire à l’emporte-pièce. Comme le disait Vincent Renard, économiste et spécialiste du foncier, dans Esprit (« L’ urbanisme et le foncier », février 2008), il y a une survalorisation du foncier alors que le terrain ne manque pas ! Qu’en est-il de la petite ceinture ? Qu’en est-il aussi de ces immenses friches ferroviaires dont on oublie qu’elles ont été achetées par le citoyen au xixe siècle en plein essor de la société industrielle et qu’elles vont être vendues au prix du marché à des promoteurs qui les revendront sous forme de logements à des citoyens-contribuables qui auront donc payé deux fois (l’achat des voies ferrées hier, l’achat des mêmes voies transformées en logements aujourd’hui) ! La république urbaine et d’intérêt général se portent bien !
- 14.
On pourrait également prendre le critère des ponts sur la Seine. Dans Paris intra-muros il y a en moyenne un pont tous les 400 mètres. Dès que l’on franchit les limites du petit Paris, la moyenne passe à 4 kilomètres. Construire des ponts est l’une des urgences de la banlieue du côté de Seine-Amont par exemple.
- 15.
Voir l’entretien avec Saskia Sassen dans Urbanisme, repris dans Thierry Paquot (sous la dir. de), Conversations sur la ville et l’urbain, Gollion (CH), Infolio Éditions, 2008, p. 814-825. La littérature sur les comparaisons internationales ne fournit guère de modèle idéal à l’échelle européenne et mondiale, voir Bernard Jouve et Christian Lefèvre, Métropoles ingouvernables, les villes européennes entre globalisation et décentralisation, Paris, Elsevier, 2002, et l’entretien avec Christian Lefèvre dans Urbanisme (Gouverner), n° 360, mai-juin 2008.
- 16.
La question de la limite est très éclairante pour comprendre ce qui est en jeu dans la dynamique métropolitaine. Face à un urbain sans limites (l’expansion chaotique de la « ville générique » sans discontinuités chère à Koolhaas) et à un urbain dont la limite est séparatrice (voir le poids des « environnements sécurisés » – ce qui dépasse l’idée répandue de la gated community généralisée – bien analysés par David Mangin, la Ville franchisée. Formes et structures de la ville contemporaine, Paris, Éd. de la Villette, 2004 ; voir aussi son entretien dans Esprit, « Les flux, l’architecture et la ville », février 2008), il faut retrouver le sens de limites intégratrices. Si la culture urbaine est décisive tout au long de l’histoire européenne, Braudel et Le Goff n’ont cessé de le rappeler, ce n’est pas parce que la ville oppose un centre à son dehors mais parce qu’elle crée des limites susceptibles d’accueillir ceux qui viennent du dehors. On parle aujourd’hui de la nécessité de retrouver le sens des limites à tout propos (morale, finance…) parce que le monde « globalisé » se croit sans limites car fasciné par le virtuel. Sur la limite dans le domaine urbain, voir Pierre Veltz, « La ville planétaire, horizon de la mondialisation », dans Collectif, De la limite, Marseille, Parenthèses, 2006.
- 17.
Philippe Estèbe parle à juste titre de « ville mobile », voir son pertinent Gouverner la ville mobile, op. cit.
- 18.
En cela l’urbanisme industriel haussmannien se distingue de celui de Cerda, l’auteur de la Théorie générale de l’urbanisation (1867) qui a théorisé dans le cas de Barcelone la ville linéaire, la Ciudad Lineal. Sur tous ces points, voir les travaux historiques de Françoise Choay.
- 19.
Alors qu’on célèbre l’année Vauban (dont l’œuvre a été retenue cette année au patrimoine mondial de l’Unesco plutôt que celle de Le Corbusier !), la prise en compte des forts (à Lille par exemple) prend de l’importance dans la mesure où ils permettent, depuis leur promontoire et leurs contrescarpes, une « mise en spectacle » grâce à des perspectives originales comme celles que les meurtrières rendent possibles. Roland Castro, tout comme Philippe Panerai, accorde un rôle particulier à la limite dessinée par la ligne discontinue des fortifications à la périphérie.
- 20.
Parmi d’autres : la proposition du sénateur Dailler de revenir à l’ancien département de la Seine, le rapport Planchou pour la région, la conférence métropolitaine dynamisée par Pierre Mansat, l’identification par J.-P. Huchon de la métropole et la région, l’implication de l’État à travers le secrétariat d’État confié à Christian Blanc, ancien Pdg d’Air France, qui a déjà annoncé qu’il rejetterait le dernier schéma directeur régional (Sdrif).
- 21.
Voir par exemple les propositions de Marc Wiel qui suggère une structuration en districts autour de la municipalité parisienne, dans Urbanisme (Gouverner), n° 360, mai-juin 2008.
- 22.
Voir ses deux ouvrages : Philippe Panerai, Jean Castex et Jean-Charles Depaule, Formes urbaines. De l’îlot à la barre, Marseille, Parenthèses, 1997 ; David Mangin et Philippe Panerai, Projet urbain, Marseille, Parenthèses, 2005. L’ouvrage sur le Grand Paris reprend d’ailleurs les séquences de l’ouvrage sur les formes urbaines (op. cit.) : l’échelle parcellaire (découpages, densités, typologies), les espaces publics, la production du tissu urbain, la construction avec le temps. Où l’on voit que la thématique du durable n’est nouvelle que pour l’État et ses grands corps.
- 23.
Dans un bel article sur l’axe historique (Louvre/Tuileries/Champs Élysées…) et l’Arche de La Défense (inaugurée en 1989), Paul Thibaud décrit quatre « hauts lieux parisiens » qui se répondent : la montagne Sainte-Geneviève (notre acropole), l’Étoile (le pouvoir napoléonien), Montmartre (l’Église et la religion) et l’Arche de La Défense (un carré vide qui renvoie à l’individu « protestant » des droits de l’homme), « Cité pleine de rêve. Paris et l’Arche de La Défense », dans Esprit, juillet-août 1989.
- 24.
Michel Corajoud, dans Ariella Masboungi (sous la dir. de), Penser la ville par le paysage, Paris, Éd. de la Villette, coll. « Le projet urbain », 2002, p. 21.
- 25.
Voir Françoise Choay, l’Allégorie du patrimoine, Paris, Le Seuil, 1992.
- 26.
Sébastien Marot, « Suburbanisme et art de la mémoire », dans A. Masboungi (sous la dir. de), Penser la ville par le paysage, op. cit., p. 16.