
Ils font vivre le journalisme en Russie ! Portraits de journalistes indépendants Sous la dir. de Johann Bihr
Préface de Marie Mendras
Selon le dernier classement de Reporters sans frontières (RSF), la Russie occupe aujourd’hui la 150e place sur 180 dans le classement mondial de la liberté de la presse. Cet indice semble résumer la situation des journalistes dans le plus vaste pays du monde, marqué par une histoire tragique et où bien des conflits gelés ou non entachent la liberté d’expression et de jugement. Comme l’indique Jeanne Cavelier, ancienne correspondante à Moscou et responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF, trente-sept journalistes ont été tués dans le pays à cause de leur travail depuis que Poutine a été élu président en 2000. Pourtant, en tant que membre du Conseil de l’Europe, la Fédération de Russie s’est engagée à respecter certaines normes. On se plongera avec intérêt et attention dans ce portrait de quinze personnalités qui font vivre le journalisme en Russie. Ils ne travaillent pas seulement dans les médias les plus connus à l’extérieur comme Lenta.ru, la Novoïa Gazeta (le journal d’Anna Politevskaïa, assassinée le 7 octobre 2006, et dont le directeur vient de recevoir le prix Nobel de la paix), ou la radio Écho de Moscou et la chaîne de télévision indépendante Dojd (qui vient d’être placée par la justice russe sur la liste des « agents de l’étranger »). La grande valeur de cet ouvrage, écrit Marie Mendras dans sa préface, tient à la diversité des villes et des régions où travaillent ces journalistes. Il s’agit surtout de préoccupations locales, visant à dénoncer les potentats locaux, les détournements de fonds et la corruption. Ce sont des thèmes comme l’écologie, la paix, la lutte contre les feux de forêts et le ramassage des ordures. Les villes de Sibérie, où le patriotisme local a été toujours vif, ont été historiquement particulièrement engagées et innovantes. Bien des problèmes brûlants, comme la mémoire des guerres en Afghanistan et en Tchétchénie, ou encore l’Ukraine et les interventions en Syrie et en Libye, font l’objet d’un regard neuf. Les portraits de ces quinze journalistes, dont sept femmes, provenant d’horizons très divers, offrent un échantillon de la vivacité de la société civile russe, qui vient de si loin.