
Face aux migrants : le silence et le regard. Pour une Europe de la compassion de Vincenzo Sorrentino
Vincenzo Sorrentino décrit la crise des migrants comme une tragédie humaine, et propose, pour y remédier, « une Europe de la compassion ». Face aux regards détournés, à la « mondialisation de l’indifférence », l’auteur interpelle son lecteur et le force à prendre conscience de l’horreur de la réalité à l’aide nombreux témoignages (trafic d’organes et d’humains, noyades de masse, décès d’enfants, tortures, viols…). S’insurgeant contre la « politique des murs », il incite à mesurer la précarité de notre propre condition, ainsi que l’illégitimité partielle de tout ce que nous possédons. L’auteur n’hésite pas à comparer les horreurs de la crise des migrants à celles des camps de concentration et appelle au réveil des esprits. Il théorise, en s’appuyant sur les Évangiles, la philosophie de Levinas et celle d’Arendt, une « éthique de la proximité » qui, plus qu’une éthique du care, est une éthique du cœur : exhortant à une compassion qui mènerait à l’agir, Sorrentino vilipende l’« anesthésie moderne » et le « non-penser ». On peut regretter l’excessive culpabilisation à l’œuvre et l’usage abusif de l’injonction moralisatrice au lecteur, qui va jusqu’à l’obliger à imaginer son jour et son jugement derniers pour l’amener à porter secours à son prochain.