
Le populisme de gauche. Sociologie de la France insoumise de Manuel Cervera-Marzal
Cet ouvrage richement documenté et fouillé a une double ambition : d’une part, présenter les lignes de force sociopolitiques du « parti-mouvement » que constitue La France insoumise (LFI), d’autre part, intégrer cette analyse à une théorisation plus large du populisme.
Le premier intérêt de l’ouvrage est de présenter la genèse, pas toujours connue, de LFI ; de la façon dont les lenteurs du Front de gauche (coalition de partis ancrés à gauche qui s’est présentée aux élections de 2012) ont incité Jean-Luc Mélenchon à en partir et à développer, à partir du Parti de gauche (parti qu’il a fondé après son départ du Parti socialiste), un nouvel objet politique plus souple et davantage adapté, selon lui, à la conjoncture. Cet objet, ce sera La France insoumise, organisation créée spécifiquement pour les élections de 2017, qui s’axe sur l’opposition à une certaine élite désignée comme « caste » financière globalisée, et qui met en sourdine la référence à la gauche au profit du peuple. On retrouve ici la stratégie populiste.
Mais ce n’est pas une simple reprise de la philosophie du populisme de Chantal Mouffe et d’Ernesto Laclau, ni une copie de ce qu’a pu faire Podemos en Espagne. Il s’agit plus précisément de prendre acte de la fragmentation de la classe ouvrière qui faisait le lit électoral du Parti communiste, sans pour autant renoncer à politiser la classe ouvrière au profit seulement des classes moyennes supérieures urbaines, comme le fera le Parti socialiste. On