
L’intervention russe en Syrie
Mise en scène d’une revanche sur l’histoire
L’intervention russe en Syrie fait partie de la stratégie d’influence de Moscou, qui se met en scène comme garant de l’ordre international, mythifie la grandeur historique russe et promeut une union eurasiatique. Mais les rebelles syriens, la communauté internationale et même certains membres de la société russe dénoncent une stratégie d’anéantissement, montrant que l’opposition se joue aussi sur le plan des symboles.
Si les dix ans du soulèvement syrien semblent sonner l’heure d’un état des lieux, la Russie, allié incontournable du régime, n’a pas attendu 2021 pour tirer son propre bilan. En 2017 déjà, l’état-major russe annonçait la « libération totale » du pays à l’occasion d’une visite de Vladimir Poutine sur place, tandis que Bachar al-Assad déclarait : « Ce qu’ont fait les militaires russes, les Syriens ne l’oublieront jamais. Leur sang s’est mêlé au sang des martyrs de l’armée syrienne. » L’année suivante, célébrant l’anniversaire des trois ans de son intervention militaire en Syrie, le ministère de la Défense russe vantait « l’expérience de combat » acquise sur le terrain et les mérites de l’industrie de l’armement à grands coups de statistiques. Dès le début du conflit, le Kremlin a déployé toutes ses armes dans une bataille qui est aussi celle d’un storytelling engageant un ensemble de signes historiques, idéologiques, religieux, voire mythologiques, et mettant en récit une véritable revanche sur l’histoire.
Une recomposition de la stratégie d’influence russe
L’intervention militaire engagée à partir du 30 septembre 2015, qui visait officiellement à bombarder les positions de Daech à la demande de la Syrie, représente une étape décisive du retour de la Russie dans la région, et plus largement sur la scène internationale. Dès 2011, afin de justifier la répression, le président syrien associe toute contestation à une « cons